Journal des débats de la Commission des relations avec les citoyens
Version préliminaire
42e législature, 1re session
(début : 27 novembre 2018)
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Le
mardi 13 août 2019
-
Vol. 45 N° 31
Consultation générale et auditions publiques sur le cahier de consultation intitulé « La planification de l'immigration au Québec pour la période 2020-2022 »
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10 h (version non révisée)
(Dix heures dix-sept minutes)
La Présidente (Mme Chassé) :
À l'ordre, s'il vous plaît! Bonjour, tout le monde. J'espère que vous vous êtes
bien remis de notre première journée, hier, de retour de nos activités en
comté. Je trouve qu'on a eu un bon départ hier. Je constate le quorum et je
déclare la séance de la Commission des relations avec les citoyens ouverte. Je
vous souhaite la bienvenue et je demande à toutes les personnes dans la salle
de bien vouloir éteindre la sonnerie de tous leurs appareils électroniques
ainsi que le mode de vibration.
La commission est réunie aujourd'hui afin
de poursuivre la consultation générale et les auditions publiques sur le cahier
de consultation intitulé La planification de l'immigration
au Québec pour la période 2020‑2022. M. le
secrétaire, y a-t-il des remplacements?
Le Secrétaire
: Oui, Mme
la Présidente. M. Skeete (Sainte-Rose) est remplacé par M. Allaire
(Maskinongé).
La Présidente (Mme Chassé) :
Oui?
Le Secrétaire
: C'est
bien le cas.
La Présidente (Mme Chassé) :
M. Skeete n'est pas remplacé, il est là.
Le Secrétaire
: Oh!
Excusez-moi.
Des voix
: ...
Le Secrétaire
: Non, il
n'est pas là.
Des voix
: ...
Le Secrétaire
: Je vais
poursuivre. M. Birnbaum (D'Arcy-McGee) est remplacé par M. Derraji
(Nelligan); Mme Dorion (Taschereau) est remplacée par M. Fontecilla
(Laurier-Dorion); et M. LeBel (Rimouski) est remplacé par Mme Perry
Mélançon (Gaspé).
La Présidente (Mme Chassé) :
Alors, ça, c'est l'effet des vacances qui se poursuit. Seigneur! Merci, M. le
secrétaire. Alors, ce matin, nous entendrons les organismes suivants : l'Association
du Barreau canadien; l'Association Restauration Québec; et, en audition
conjointe, les représentants de la Financière Banque Nationale, Auray Capital,
Capital Sherbrooke Street, Industriel Alliance Valeurs mobilières et
Renaissance Capital.
Je souhaite donc la bienvenue aux représentants
de l'Association du Barreau canadien, division du Québec. Et je vous rappelle
que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, après quoi nous
procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. À une
minute de la fin, je vais vous faire un signe. Comme ça, ça va vous donner une
indication qu'on arrive à la fin de l'exposé. Je vous invite tout d'abord à
vous présenter. Allez-y. Merci.
Mme Middlemiss (Lisa) : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. L'Association du Barreau canadien est un organisme
qui regroupe environ un peu plus que 36 000 juristes à travers le
Canada. Je suis Lisa Middlemiss. Je suis présidente de la section immigration
et citoyenneté de l'Association du Barreau canadien, division du Québec.
Aujourd'hui, je suis accompagnée par Nadine Landry, à ma gauche, qui est la
présidente sortante de notre section.
• (10 h 20) •
La première orientation est très
importante pour l'ABC Québec. Concernant les seuils d'immigration 2020‑2022,
nous comprenons que le ministre et le gouvernement veulent augmenter
progressivement le nombre d'immigrants...
Mme Middlemiss (Lisa) : ... La
première orientation est très importante pour l'ABC-Québec concernant les
seuils d'immigration 2020 à 2022. Nous comprenons que le ministre et le
gouvernement veulent augmenter progressivement le nombre d'immigrants admis à atteindre
49 500 à 52 000 personnes en 2022. Pourtant, nous sommes préoccupés
que ces cibles sont nettement inférieures aux seuils que nous avons observés
auparavant et qu'avec ces cibles, le Québec sera loin de respecter notre
engagement en vertu de l'Accord Canada-Québec relatif à l'immigration et à
l'admission temporaire des aubains, qui date de 1991. Cet accord prévoit à
l'article 7 que le Québec s'engage à poursuivre une politique d'immigration
dont l'objectif est de lui permettre de recevoir un pourcentage du total des
immigrants reçus au Canada égal au pourcentage de sa population par rapport à
la population totale du Canada. En fait, avec la diminution dans l'ensemble des
personnes immigrantes admises à 40 000 personnes en 2019, les seuils qu'on
voit en 2022, sans parler de 2020 et 2021, nous ramèneraient vers les niveaux
d'immigration qu'on a vus en 2017 et 2018. Si nous faisons référence à la table
en annexe de notre mémoire, la compilation des données publiques du MIDI et de
Statistique Canada, nous observons que la part du Québec du nombre total des
immigrants admis diminuera significativement en 2019. On parle d'une part du
Québec d'environ 12 %, alors que le Québec représente environ 23 % de
la population du Canada. Et, malgré le fait qu'on voit dans nos tables que le
Québec n'a pas atteint le taux anticipé de personnes immigrantes à travers les
années, nous étions vraiment plus proches que nous trouvons à l'heure actuelle.
«So», nous rappelons le ministère de l'importance de cet accord dans le niveau
et aussi dans la répartition des compétences. Nous rappelons que le Québec a la
compétence exclusive, bien sûr, sur la sélection des immigrants économiques, et
au même temps le Canada a la compétence... la responsabilité pour les
immigrants dans la classe familiale et que le Canada détermine les conditions
d'admission pour la classe de motifs humanitaires, l'application de la
Convention des Nations unies relative au statut des réfugiés.
Dans le deuxième objectif... deuxième orientation
du gouvernement est d'atteindre en fin de période une proportion des personnes
admises dans la catégorie de l'immigration économique de 65 %. Pourtant,
afin d'atteindre ce seuil, considérant que le Québec n'a pas la compétence sur
l'ensemble des immigrants admis au Québec, et on ne peut pas contrôler les
chiffres vraiment pour la mission familiale ni pour le traitement des demandes
d'asile au Canada, il serait nécessaire d'augmenter le nombre de personnes
immigrantes accueillies, en termes de chiffres, en ce qui concerne la classe
économique.
Mme Landry (Nadine) : Merci,
Lisa. Je vais continuer sur l'aspect de l'immigration économique, puisque c'est
effectivement la seule compétence du Québec et là vraiment où on a un pouvoir
de faire des changements.
Alors, il n'y a pas si longtemps, le
Québec représentait 25 % de la population canadienne. On faisait l'envie
de tous avec nos programmes, on était la seule province qui pouvait
sélectionner ses immigrants économiques. Ce n'est plus le cas. Toutes les
provinces ont un programme de nominations provinciales, et le programme est
plus agile, il est plus rapide, et nous sommes envieux des autres provinces. Je
vais vous donner un exemple concret. En Colombie-Britannique, pour avoir une
invitation, ça prend une semaine si on est un... on fait partie de 28
professions identifiées. Suite au dépôt de notre demande qu'on a faite dans les
30 jours, on peut avoir notre nomination provinciale en deux jours ouvrables.
Avec cette nomination provinciale là, on peut se présenter au point d'entrée et
obtenir un permis de travail. Ça, c'est ce qu'on appelle répondre à court terme
aux besoins des employeurs; ça, c'est être agile.
Le programme qu'on nous propose ici n'est
pas agile. Avec les seuils proposés et les sélections qui ont déjà été faites — donc,
il y a déjà plusieurs dizaines de milliers de personnes qui ont été
sélectionnées — les seuils proposés ne permettront pas de faire
entrer des gens invités sous Arrima avant 2022, donc à la fin du plan qui est
proposé. Donc, les orientations sont un peu contradictoires. Quand on dit qu'on
veut arrimer...
Mme Landry (Nadine) :
...de milliers de personnes qui ont été sélectionnées. Les seuils proposés ne
permettront pas de faire entrer des gens invités sous Arrima avant 2022, donc,
à la fin du plan qui est proposé. Donc, les orientations sont un peu
contradictoires. Quand on dit qu'on veut... Arrima va être le Tinder de l'immigration
pour faire un match entre les employeurs et les candidats. Un match, quand je
fais une offre d'emploi aujourd'hui, qui demande trois mois à être traitée, que
mon candidat a une invitation sous Arrima qui est traitée, son CSQ, dans six
mois et que le fédéral prend deux ans pour traiter la demande de résidence
permanente, ce n'est pas du court terme, ça ne répond pas aux besoins des
employeurs. Donc, c'est pour ça qu'on pense qu'une augmentation significative
des seuils, conformément à l'Accord Canada-Québec sur l'immigration est le seul
moyen d'atteindre les objectifs et de pouvoir se servir de cette plateforme qui
est Arrima.
Au niveau de faciliter la rétention du
temporaire vers le permanent, on dénonce le manque de critères transparents et
prévisibles. Donc, quand on conseille nos clients qui veulent embaucher des
gens à l'étranger, la personne, avant de déménager avec sa famille, avant
d'inscrire les enfants à l'école en français, parce que, sous permis de travail
temporaire, ils peuvent aller à l'école en anglais, quand ils ont leur CSQ, ils
doivent aller en français. Quand le plan est à long terme de s'établir ici pour
la résidence permanente, ils vont tout de suite mettre les enfants à l'école en
français. Quand on ne sait pas si on va pouvoir rester et quand on ne peut même
pas leur dire de façon prévisible s'ils vont avoir une chance de rester, bien,
les décisions sont autres. Donc, quand on essaie de former notre équipe, on ne
se donne pas les moyens d'aller chercher les meilleurs choix.
Mme Middlemiss (Lisa) :
En fait, nous considérons que le Québec est à risque de perdre le talent à
cause de ce manque de critères clairs et définis pour encadrer la transition
vers la résidence permanente, tant pour les candidats à l'immigration que pour
les employeurs au Québec qui veulent non seulement attirer le talent, mais le
retenir au Québec. Et, franchement, les membres de notre section en immigration
et citoyenneté de l'Association du Barreau du Québec trouvent qu'il est de plus
en plus difficile de fournir un conseil juridique à nos clients à cause d'un
manque de transparence et imprévisibilité dans nos programmes d'immigration au
Québec. Par exemple, nous pouvons conseiller nos clients ailleurs au Canada de
leurs chances de recevoir une invitation du ministère fédéral à faire leur
demande de résidence permanente. On peut calculer le pointage à l'entrée
expresse, on sait à peu près c'est quel pointage les tirages se passent. Alors,
c'est vraiment plus facile de fournir un conseil juridique. Alors, qu'au Québec
il est impossible en ce moment de savoir quels sont les critères d'invitation
en Arrima, quelles sont les fréquences. Je pense parfois nos clients ont
l'impression qu'ils sont avec un «blind date» d'Arrima ou le match parfait
entre leurs compétences qu'ils puissent offrir et le marché du travail de la
société québécoise.
Et, pour vraiment faire un meilleur
arrimage aussi entre les besoins du Québec et les talents qu'on a accueillis,
le MIDI doit travailler étroitement avec nos partenaires... les partenaires
fédéraux à Immigration Canada pour s'assurer aussi un traitement plus rapide
une fois que les personnes sélectionnées du Québec puisqu'on voit un délai
d'environ 22 mois en ce moment pour les demandes de résidence permanente
d'être traitées par Immigration Canada, une fois qu'ils sont déjà sélectionnés.
La Présidente (Mme Chassé) :
...une quinzaine de secondes.
Mme Landry (Nadine) :
Merci.
La Présidente (Mme Chassé) :
Ça va? Ça conclut votre exposé. Merci beaucoup. Nous allons maintenant débuter
la période d'échange. M. le ministre, la parole est à vous pour un bloc
d'échange de 16 min 30 s.
M. Jolin-Barrette :
Merci, Mme la Présidente. Bonjour, Me Middlemiss. Me Landry, merci pour votre
présence, ici, en commission parlementaire. J'aimerais que vous me rappeliez
comment ça fonctionne, l'Association du Barreau canadien. Au niveau de l'association,
bon, c'est des avocats, c'est des juristes, c'est des étudiants en droit qui
sont membres. Les étudiants en droit sont membres d'office de l'Association du
Barreau canadien. Le membership est gratuit. Mais comment ça fonctionne, les
prises de position de l'Association du Barreau canadien, section Québec? C'est
quoi, le processus décisionnel pour amener un mémoire à l'Assemblée nationale?
• (10 h 30) •
Mme Middlemiss (Lisa) :
Si je peux me permettre, merci, on a un conseil d'administration qui approuve
nos démarches. Alors, notre section, notre exécutif en immigration et
citoyenneté, on a rédigé un mémoire. Ça a été partagé avec notre conseil...
10 h 30 (version non révisée)
M. Jolin-Barrette :
...décisionnel pour amener un mémoire à l'Assemblée nationale.
Mme Middlemiss (Lisa) : Si je
peux me permettre, merci. On a un conseil d'administration qui approuve nos
démarches. Alors, on a... notre section, notre exécutif en immigration et citoyenneté,
on a rédigé un mémoire. Ça a été partagé avec notre conseil d'administration,
qui est également des juristes, afin d'assurer que toute la position est conforme
à la position de l'ABC au Québec et à... et ça comprend... La plupart de nos
membres sont des avocats, mais il y a aussi des notaires, des professeurs en
droit, également des étudiants en droit.
M. Jolin-Barrette : C'est ça.
Donc, c'est des juristes. Et, sur le comité immigration de l'Association du
Barreau canadien, section Québec, il y a combien d'avocats qui font du droit de
l'immigration, qui ont des intérêts avec des clients qu'ils représentent?
Mme Middlemiss (Lisa) : Je
n'ai pas les chiffres en face de moi. Je sais...
Mme Landry (Nadine) : Il y a
10 membres de l'exécutif, qui représentent toutes les sections, c'est-à-dire
que... c'est ça, selon les spécificités. Donc, on a des gens qui représentent
le milieu scolaire, des gens qui représentent l'immigration économique, des
gens qui représentent les individus, des gens qui représentent les demandeurs
d'asile et les réfugiés, donc, et tout ça est soumis à l'ABC-Québec générale où
là on a des juristes plus larges aux niveaux constitutionnel, administratif,
qui vont réviser les positions.
M. Jolin-Barrette : Mais, ce
que je veux dire sur le conseil... bien, en fait, sur le comité, ce sont des
juristes qui ont une pratique généralement en droit de l'immigration avec
différents volets.
Mme Landry (Nadine) : ...conseil
d'administration qui approuve les positions...
M. Jolin-Barrette : Non, non,
sur le comité de l'immigration. Par la suite, vous êtes... votre conseil
d'administration. Vous dites... Bon, au niveau des seuils, vous dites : Écoutez,
dans l'accord Canada-Québec, il y a certains seuils. Ce que dit l'accord Canada-Québec,
c'est qu'on peut aller jusqu'à un pourcentage de notre population plus
5 %. On n'est pas lié à cette obligation-là dans le cadre de l'accord Canada-Québec.
Êtes-vous d'accord avec moi?
Mme Middlemiss (Lisa) : Non.
Je suis d'accord qu'on n'est pas lié, mais c'est selon l'esprit de l'accord. Je
pense que le Québec va accueillir un pourcentage du nombre de personnes admises
égal à notre population. Quand l'accord a été conclu en 1991, je pense que
c'était l'esprit que les deux parties ont eu et je pense que cet esprit
continue jusqu'à aujourd'hui.
Mme Landry (Nadine) : Au-delà
de ça, si je me peux me permettre d'ajouter, l'esprit de l'accord, à notre
avis, c'est que le Québec garde sa place à l'intérieur du Canada en
sélectionnant ses immigrants, privilégiant l'immigration francophone.
Ce qui arrive présentement, c'est que
c'est plus facile pour l'immigration francophone de s'installer hors Québec.
C'est plus facile d'avoir un permis de travail. Quelqu'un qui parle français
peut... avec une offre d'emploi, peut se présenter à la frontière, s'il n'a pas
besoin de visa, et obtenir un permis de travail. Ce n'est pas le cas au Québec.
Il y a des programmes spécifiques. On donne des points additionnels hors Québec
pour les gens qui parlent le français. Donc, on veut les attirer et on le fait
plus rapidement.
Donc, quand nous, on ferme les portes, on
diminue les seuils, et en plus c'est plus facile pour les francophones de
s'installer hors Québec, bien, on perd notre place. Je veux dire, l'effet ne
peut pas être autre que le Québec va perdre sa place, là.
M. Jolin-Barrette : Est-ce
que vous pensez que le rôle du gouvernement du Québec, c'est de mieux intégrer
les personnes immigrantes? Parmi vos clients, là, quand vous regardez ça, là,
quand les taux de chômage des personnes immigrantes depuis moins de cinq ans
sont plus du double, quand les taux de surqualification sont de 59 % pour
les immigrants de moins de cinq ans, est-ce que vous considérez que le
gouvernement du Québec a fait son travail au niveau de l'intégration?
Parce que vous dites : C'est plus
facile pour des francophones aller dans d'autres provinces canadiennes, alors
qu'avec les seuils qu'on avait auparavant avec le Parti libéral on sera dans
une situation où les gens n'étaient pas accompagnés. Est-ce que vous pensez que
c'est mieux de hausser les seuils puis de ne pas avoir d'accompagnement, comme
c'était le cas sous les libéraux, ou c'est préférable d'avoir un parcours
d'accompagnement personnalisé?
Mme Landry (Nadine) : Non. On
est d'accord avec le... une certaine forme d'accompagnement. Ceci dit, les
statistiques que vous citez sur l'immigration dans les cinq dernières années,
il y a eu énormément de changements, dans les programmes, qui ont été faits, et
ces personnes-là n'ont pas encore été admises, donc ne font pas partie des statistiques.
Donc, on est confiants que le PEQ, par
exemple, qui a pu... permis de sélectionner plus de 10 000 personnes dans
les dernières années, qui ne sont pas admises au Québec encore, qui ne font pas
partie de ces statistiques-là, vont améliorer les données définitivement.
M. Jolin-Barrette : Les gens
qui sont sur le PEQ sont sélectionnés. Vous, vous faites référence aux gens qui
sont dans l'inventaire fédéral.
Mme Landry (Nadine) : Oui.
Ils ne font pas partie des statistiques de sans-emploi.
M. Jolin-Barrette : Mais ça,
c'est une autre réalité. Au niveau de l'inventaire fédéral, il y a eu une
accumulation de dossiers au cours des années. Les cibles... On a sélectionné
plus de personnes que la capacité d'accueil du Québec au niveau des cibles
d'admission annuellement. Ça, vous êtes d'accord avec ça.
Mme Middlemiss (Lisa) : Oui.
Et avec les cibles d'admission diminuées on peut juste anticiper que les délais
pour nos clients de devenir résidents...
M. Jolin-Barrette : ...les cibles,
on a sélectionné plus de personnes que la capacité d'accueil du Québec au
niveau des cibles d'admission annuellement. Ça, vous êtes d'accord avec ça?
Mme Middlemiss (Lisa) : Oui,
et avec les cibles d'admission diminuées, on peut juste anticiper que les
délais pour nos clients de devenir résidents permanents au Québec vont
continuer à augmenter. Alors, à l'ABC-Québec, on trouve, il y a une inéquité
dans nos provinces quand on compare avec les clients dans d'autres provinces.
Alors, nous aimerions qu'on peut accélérer le traitement des demandes de CSQ, bien
sûr, et également le traitement conjointement avec les partenaires au fédéral.
M. Jolin-Barrette : Mais
quand vous présentez votre mémoire, vous dites «nos clients», «la perception,
c'est par rapport à nos clients», mais, nous, on prend ça de l'autre côté, on
prend ça que l'immigration, c'est important pour l'ensemble de la société québécoise.
Puis, comme société, on a le devoir de bien accueillir, de bien intégrer les
personnes immigrantes. Je comprends que vous me parlez des délais de vos
clients, mais lorsqu'on choisit les cibles en matière d'immigration pour une société,
surtout la société québécoise, qui est une société distincte en Amérique du
Nord, qui a une responsabilité pour le gouvernement du Québec de s'assurer que
les personnes apprennent le français, qu'ils puissent l'exercer, qu'ils
puissent travailler avec la langue d'usage au Québec, soit le français, bien,
ce n'est pas uniquement basé sur l'intérêt de vos clients. Il faut faire en
sorte de développer au Québec un système d'immigration, mais surtout
d'intégration qui donne les ressources aux personnes immigrantes pour faire en
sorte qu'elles puissent bien intégrer le marché du travail, qu'elles puissent
apprendre le français aussi.
Alors, je comprends ce que vous me dites
sur le fait que vous souhaiteriez en fonction des intérêts de vos clients dans
un certain sens, mais le gouvernement du Québec doit prendre en considération l'ensemble
des, je vous dirais, des variables associées à l'immigration.
Mme Landry (Nadine) : Je
pense que c'est dans l'intérêt de personne de retarder la résidence permanente
des gens qui sont déjà ici et déjà intégrés, déjà sélectionnés. Le portrait a
changé dans les dernières années, le pourcentage de gens qui sont déjà ici
intégrés en emploi est différent qu'il ne l'était il y a quelques années, alors
qu'on faisait surtout entrer des gens directement de l'extérieur.
M. Jolin-Barrette : Je vous
remercie pour votre présentation. Je sais que j'ai des collègues qui veulent
poser des questions.
La Présidente (Mme Chassé) :
Alors, M. le député de Beauce-Sud désire prendre la parole?
M. Poulin : Merci beaucoup,
Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Chassé) :
La parole est à vous.
M. Poulin : ...très content de
vous retrouver, content de retrouver mes collègues également du gouvernement. M.
le ministre, c'est un plaisir, vous paraissez en grande forme. Alors, très
content de vous retrouver, également, les collègues de l'opposition. Bien évidemment,
content de tous et toutes vous voir.
Différents éléments qui me viennent à
l'idée en entendant votre présentation, j'aimerais qu'on parle un peu plus du
domaine qui est le droit en immigration que vous représentez aujourd'hui.
Est-ce qu'il y a eu une augmentation, au cours des dernières années, d'avocats
se spécialisant en droit de l'immigration?
Mme Middlemiss (Lisa) : Je
n'ai pas étudié les chiffres en termes de nombre d'avocats, mais c'est sûr que
les procédures sont complexes. Il y a une certaine complexité qui est difficile
pour des personnes immigrantes parfois de naviguer. Alors, parfois, ils ont
besoin d'un conseiller juridique.
M. Poulin : Vous représentez,
bon, 37 000 juristes, vous n'avez pas la portion qui se spécialise
particulièrement en droit d'immigration sur les 37 000 juristes.
Mme Landry (Nadine) : Non, ce
qu'on peut affirmer, c'est que l'immigration est un domaine en développement,
alors que le domaine juridique en général est un marché assez stable. Il y a de
plus en plus de demandes à cause de la pénurie de main-d'oeuvre, à cause qu'on
se tourne comme société au Canada en général, parce que le 36 000, c'est
au Canada partout, puis on se tourne de plus en plus vers l'immigration, donc
ça crée un besoin.
M. Poulin : Bien,
effectivement, et c'est là que je voulais vous amener que, s'il y a une
éventuelle augmentation d'avocats qui pratiquent davantage dans le domaine de
l'immigration, c'est certainement parce qu'il y a des défis assez importants
que vous nous avez exposés, que vous venez d'élaborer et qu'il y a des défis
qui ne datent pas d'hier non plus depuis les 15 dernières années, bien
évidemment. Et justement quels sont, très concrètement, des
dossiers — vous m'avez parlé de complexité, là — qui sont
le plus récurrent auprès des avocats en droit de l'immigration, même au niveau
fédéral, je suis intéressé à vous entendre à ce niveau-là, et qui durent depuis
fort longtemps, là?
• (10 h 40) •
Mme Middlemiss (Lisa) : Mais
je pense qu'on peut dire qu'en termes d'immigration économique, la plupart des
clients de nos membres sont déjà ici, au Québec, ils sont déjà intégrés. Ils
sont ici sur un permis de travail, ils se sont intégrés à combler les besoins
de main-d'oeuvre ou parfois des étudiants internationaux qui étaient attirés,
côtoyés même par le Québec à venir ici. Alors, c'est sûr que beaucoup de monde
est déjà très... le niveau de langue en français est très bien. Il peut faire
une demande sous le programme...
Mme Middlemiss (Lisa) :
...et attirer... côtoyer, même, par le Québec, à venir ici. Alors, c'est sûr
que beaucoup de monde est déjà très... le niveau de langue en français est très
bien. Il peut faire une demande sur le programme PEQ, qui, en général, est un
très bon programme. Mais, même parfois avec le PEQ, il y a certains enjeux
difficiles. Par exemple, pour un employé qui détient un pourcentage d'actions
dans la compagnie, la société qui l'emploie au Québec, il est exclu de faire
une demande du PEQ. «So», il y a certaines choses qui fonctionnent bien et
d'autres qui sont quand même complexes à l'intérieur du système de base en immigration.
Au Québec, il y a le PEQ. Parce qu'en termes de chiffres, si on regarde le plan
de sélection en 2019, on voit que la plupart... avec les chiffres qu'on a... et
la popularité du programme PEQ. La plupart des personnes qui seraient
sélectionnées au Québec seraient sélectionnées par voie du PEQ, et non pas le
nouveau système d'Arrima.
Mme Landry (Nadine) : Je
pense aussi qu'il faut parler de la complexité au niveau des employeurs. Il y a
eu tout un régime mis en place sur la conformité des employeurs qui faisaient
des offres d'emploi pour faire l'émission des permis de travail, donc, c'est
ça, donc, on a maintenant, là, des pénalités importantes. Puis là-dessus on
peut peut-être souligner le fait qu'au Québec la validation d'offre d'emploi
permanente, là, le délai entre cette validation-là puis que la personne
devienne résident permanent, c'est totalement irréaliste. Ça nous met dans une
position très difficile pour conseiller nos clients, parce qu'ils nous
demandent : À quoi je m'engage? Bien, dans les faits, tu t'engages
aujourd'hui, en août 2019, à offrir un emploi à quelqu'un dans tel titre, dans
telle position, à tel salaire, en 2022, quand il deviendra résident permanent.
Alors que ce n'est pas ça, la réalité, si la personne est déjà ici. Donc,
comment on conseille nos clients là-dedans? C'est de plus en plus complexe.
C'est une réalité à laquelle ils n'avaient pas à faire face auparavant.
M. Poulin : Bien
évidemment, là, vous me parlez des entreprises que vous conseillez. Ça vous
amène à être en lien, justement, avec les gens qui souhaitent, donc, avoir leur
certificat de sélection et immigrer au Québec.
Qu'en est-il, tout de même, de ces
délais-là? Est-ce que vous, vous pensez que le fait que, justement, on a
accueilli un nombre d'immigrants au Québec, qui a apporté des délais assez
importants compte tenu du fait qu'on n'avait pas le Arrima, qu'on n'était pas
capables de lier le marché du travail avec les besoins en immigration... Est-ce
que vous ressentez, peut-être, auprès de vos clients, un certain découragement,
dans les dernières années, à se tourner vers l'immigration et qu'Arrima et
l'adoption de la loi que nous venons de faire n'amènent pas un certain espoir
auprès des employeurs, et même des immigrants? Moi, depuis que j'ai voté pour
cette loi-là avec les membres de mon gouvernement, les gens dans mon comté sont
très contents et voient qu'on s'en va dans la très bonne direction.
Alors, vous ne le ressentez pas, vous,
chez vos clients, chez vos entreprises, chez vos gens que vous représentez,
cette nouvelle façon de faire, comme étant extrêmement positive?
Mme Middlemiss (Lisa) :
Bien, je pense que l'Arrima a causé beaucoup de confusion auprès des individus
et les employeurs au Québec parce que ça ajoute un autre niveau. Maintenant, il
faut être invité du ministre. Encore là, on ne sait pas si, mettons, une offre
d'emploi validée va donner naissance nécessairement à une invitation à faire la
demande de CSQ. Il y a beaucoup d'incertitude.
Alors, quand le MIDI aimerait traiter une
demande de CSQ à l'intérieur d'une période de six mois... ce serait bien, mais
est-ce que ça compte le processus de trois mois afin d'obtenir une offre
d'emploi validée? Quelques mois afin de recevoir une invitation? Là, le dépôt
en ligne de la demande de CSQ, ensuite l'attente de la liste personnalisée, des
documents à l'appui à soumettre et, finalement, une fois que les documents
seront soumis, le dossier débute l'exercice, «like», la... je vais dire,
l'analyse débute. Alors, est-ce que six mois va vraiment commencer... À quel
moment est-ce que le six mois de traitement de CSQ va commencer? Nous avons
l'impression qu'Arrima va juste prolonger, retarder le processus. Et,
malheureusement, c'est les préoccupations qui étaient apportées par nos
membres.
M. Poulin : Je peux vous
rassurer très rapidement, je pense qu'au contraire, si on réussissait à bien
allier les besoins du marché du travail avec les souhaits des personnes issues
de l'immigration — il faut en parler aussi, hein, les souhaits des
gens qui souhaitent venir vivre au Québec et qui souhaitent avoir des emplois
ici — avec les besoins en termes de marché du travail, avec le fait
que, justement, et c'est ce que nous discutons au cours de la semaine... d'un
seuil d'immigration qui va nous permettre que chaque immigrant puisse atteindre
son rêve et qu'il puisse atteindre son plein potentiel au Québec, avec une
plateforme qui pourra les lier plus rapidement à l'emploi qui est disponible,
donc, quand on le lie à un emploi, c'est qu'on le lie à un employeur, alors vos
clients à vous, qu'ils pourront plus rapidement avoir des réponses sur qui
vient, parce ce que ce qu'ils souhaitent, nos entrepreneurs, c'est d'avoir des
noms, c'est de préparer ces gens-là à leur venue au Québec. Alors, ce...
M. Poulin : ...Québec,
avec une plateforme qui pourra les lier plus rapidement à l'emploi qui est
disponible. Donc, quand on le lie à un emploi, c'est qu'on le lie à un
employeur. Alors, vos clients à vous, qui pourront plus rapidement avoir des
réponses sur qui vient, parce que ce qu'ils souhaitent, nos entrepreneurs,
c'est d'avoir des noms, c'est de préparer ces gens-là à leur venue au Québec.
Alors, ce lien-là, il est très bien accueilli auprès des entreprises au Québec.
Alors, je suis un... Je suis un...
Mme Landry (Nadine) : Le
principe est très bien accueilli. C'est dans l'application que les problèmes se
trouvent. Donc, si le ministère fait ses devoirs et applique ça à son plein
potentiel, ça va être génial. Ce qu'on dénonce, c'est que, présentement, nous,
ce n'est pas ce qu'on voit dans les programmes, dans la législation, dans ce
qui est mis en place.
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci. Ça conclut le bloc. Nous sommes rendus au bloc d'échange avec le parti
formant l'opposition officielle. M. le député de Nelligan, la parole est à
vous.
M. Derraji : Merci, Mme
la Présidente. Premièrement, je vous remercie pour votre présence et d'avoir
pris le temps de venir nous éclairer. Vous avez soulevé pas mal de points, mais
aussi d'incohérences dans la nouvelle planification. J'aimerais bien vous
entendre sur une question qui m'est venue lors de votre échange avec M. le
ministre. Et ma question est la suivante. Est-ce que vous avez... Est-ce que
vous pensez que la réalité vécue par vos clients est différente de l'expérience
vécue par les autres immigrants? Parce que ce que je sais... C'est comme j'ai
eu l'impression qu'il y a deux catégories. Il y a vos clients et il y a les
autres immigrants qui appliquent. Mais, selon votre expérience, est-ce qu'il y
a une énorme différence entre vos clients et les autres immigrants, ou bien il
y a des points de ressemblance? Pouvez-vous nous éclairer?
Mme Middlemiss (Lisa) :
Mais, à titre d'avocats en immigration, nous représentons les clients, les
individus, des entreprises à travers le Canada, y compris au Québec. Alors, si
on compare, mettons, l'expérience du parcours de l'immigration, le parcours
envers la résidence permanente, des clients de nos membres au Québec, comparés
avec d'autres provinces, souvent l'expérience est très différente. Les clients,
les personnes et leurs employeurs au Québec deviennent parfois découragés par
les longs délais et, encore là, l'incertitude dans nos programmes.
M. Derraji : O.K. Donc,
si je résume, pour vous, la planification du gouvernement avec sa politique
d'immigration lance un message d'incertitude et que ce n'est pas incohérent.
Est-ce que c'est ça que vous voulez nous dire aujourd'hui par rapport à votre
message?
Mme Middlemiss (Lisa) :
Dans l'application des programmes, il y a un certain manque de critères
certains et définis pour les acteurs dans... au terrain, oui.
M. Derraji : Parlons
d'incohérence, parce que c'est le mot qui revient dans pas mal d'autres
interventions. J'aimerais vous entendre sur la décision du gouvernement, en
plein mois d'été, de mettre un moratoire sur le PEQ. Pour vous, en quoi c'est
dangereux? En quoi c'est une décision... une mauvaise décision?
Mme Middlemiss (Lisa) :
Bien, c'est sûr que le PEQ est très connu, très connu comme programme au
Québec. Ça amène une certaine incertitude de suspendre temporairement, mais on
se pose des questions à quel moment... Est-ce que ça va être temporaire? Est-ce
que ça va être enlevé, cette suspension? Les gens ont des difficultés à
planifier leur vie. En venant au Québec à faire leurs études, leur parcours
scolaire au Québec, ils ont amené leurs talents, ils ont amené leur vouloir de
s'intégrer au Québec. Ils sont déjà... Ils font déjà partie de la société ici.
Alors, ce suspens temporaire est préoccupant et, encore là, ça amène un autre
niveau d'incertitude.
M. Derraji : Merci. Ma
dernière question, après, c'est ma collègue qui va vous poser d'autres
questions, c'est concernant Arrima. J'ai lu et j'ai relu plusieurs fois le
paragraphe où vous parlez d'Arrima. Vous, vous pensez quoi maintenant? Parce
que vous avez dit quelque part qu'il n'y a aucune invitation qui a été encore
envoyée depuis l'inauguration d'Arrima.
Mme Landry (Nadine) :
Notre mémoire n'est pas à jour. Donc, il y a eu des invitations depuis,
effectivement. De ce qu'on a vu, il y a eu des invitations de personnes avec
des offres d'emplois validées qui étaient déjà dans le système. Donc... Mais il
n'y a aucune transparence, c'est-à-dire qu'il n'y a pas... On n'a pas de
chiffres, on ne sait pas comment les gens ont été priorisés, qui, pourquoi untel
en a une et l'autre n'en a pas. Donc, on est incapable de conseiller nos
clients et de leur donner une perspective, de dire : Bien, d'ici un an, on
devrait avoir un CSQ. Comment on va renouveler ce permis de travail là? On ne
sait pas.
M. Derraji : Et donc,
vous avez soulevé l'incohérence, vous avez soulevé le manque de transparence.
Comment vous pensez que le gouvernement doit être beaucoup plus transparent par
rapport à l'utilisation de la plateforme Arrima? C'est quoi, votre proposition
pour qu'on augmente cette transparence?
• (10 h 50) •
Mme Middlemiss (Lisa) :
Bien, premièrement, je pense que ce serait intéressant de...
Mme Landry (Nadine) : ... On
ne sait pas.
M. Derraji : Et donc vous avez
soulevé l'incohérence, vous avez soulevé le manque de transparence. Comment
vous pensez que le gouvernement doit être beaucoup plus transparent par rapport
à l'utilisation de la plateforme Arrima? C'est quoi, votre proposition pour
qu'on augmente cette transparence?
Mme Middlemiss (Lisa) : Bien, premièrement,
je pense que ce serait intéressant de savoir combien de personnes le gouvernement
aimerait sélectionner par voie d'Arrima pour les... «you know», chaque année et
combien de personnes... travailleurs qualifiés ça va sélectionner du programme
de base du PEQ, parce que je pense qu'en ce moment Arrima reste un programme
marginal. En termes de diminution dans le chiffre, le nombre de personnes
sélectionnées au Québec en 2019, on parle d'un système, je pense, marginal.
«So», ça, c'est une chose.
Et une autre chose, ce serait... on
aimerait savoir les critères qui... importants dans le processus d'invitation
en Arrima. C'est très obscur en ce moment. Au fédéral, il y a un système de
pointage. En Colombie-Britannique également, il y a un système de pointage, ou
un peu comme donner une idée à quelqu'un s'il serait éligible ou non à faire
une demande de résidence permanente. Alors, ce serait vraiment utile d'avoir
quelque chose d'un peu plus concret au niveau du processus d'invitation.
Qu'est-ce que ça prend?
M. Derraji : Je vais laisser
la parole à ma collègue.
Mme Robitaille : Merci.
La Présidente (Mme Chassé) :
Oui. Mme la députée de Bourassa-Sauvé, la parole est à vous.
Mme Robitaille : Bonjour,
mesdames. Eh bien, je vous écoute et puis je... bien, je trouve ça inquiétant.
En fait, vous dites que 12 %, ça fait en sorte que le Québec est en train
de perdre sa place au sein du Canada, et, si on continue comme ça, bien,
évidemment, ce n'est pas à notre avantage. Vous dites aussi qu'Arrima, tel
qu'amené par le présent gouvernement, fait en sorte que ça ne sera pas
nécessairement plus efficace. Vous dites : «Le Québec est à risque de
perdre des talents.» Pourriez-vous élaborer là-dessus?
Mme Landry (Nadine) : Je vais
parler de la rétention. Donc, pour pouvoir garder les talents... Je vais donner
un exemple concret, là. À Montréal, on mise beaucoup sur l'intelligence
artificielle. Pour faire venir ces gens-là, il faut être capable de leur donner
une planification à long terme, ce qu'on n'est pas capable de faire
présentement. Parce qu'on revient à l'obscurité des critères d'invitation sous
Arrima, on ne peut pas prévoir combien de temps ça va prendre à quelqu'un pour
qu'il atteigne le niveau de français. Donc, même si les gens s'y mettent, il y
en a qui y arrivent en un an puis il y en a qui n'y arrivent pas après quatre
ans. Ce n'est pas par manque d'efforts, certains ont plus de talent. Donc,
quand on parle rétention de talents, ces gens-là peuvent devenir résidents
permanents au Canada en moins de six mois. Donc, s'ils se font offrir quelque
chose à Vancouver, s'ils se font offrir quelque chose à Toronto avec une
stabilité, avec une certitude, on les perd. C'est ça, la réalité.
Mme Robitaille : Donc, c'est
ça. Donc, on perd notre...
Mme Landry (Nadine) : On perd
notre place, on perd les meilleurs joueurs, on perd...
Mme Robitaille : Dites-moi,
alors... Puis on dit... Vous disiez aussi — c'est intéressant :
En abaissant les seuils, finalement, les arriérés qu'on a... Il y a des
attentes avant d'avoir une résidence permanente, on le sait, on en a parlé.
Mais là, si on baisse les seuils à 40 000, ça devient pire que jamais.
C'est bien ça? Pouvez-vous encore une fois élaborer là-dessus?
Mme Middlemiss (Lisa) :
L'inventaire en ce moment est considérable, c'est sûr, au niveau fédéral à
Immigration Canada et en termes de nombre de personnes sélectionnées par le
Québec qui est en traitement au fédéral. Maintenant, avec des niveaux moins
élevés de 40 000 personnes admises en 2019, on risque de voir ces dossiers
même plus retardés. Et un délai de 22 mois en ce moment n'est pas très
équitable par rapport à d'autres personnes qui sont destinées à d'autres
provinces. On veut rester concurrent dans... «you know», comparé à d'autres
provinces.
Mme Robitaille : Oui, parce
que là, en ce moment, c'est deux ans, mais ça pourrait être encore plus. Vu que
c'est 40 000, vous prévoyez peut-être même...
Mme Landry (Nadine) :
Exactement. Donc, avant tout ça, là, en février de cette année, les délais de
traitement étaient de 18 mois; on est au mois d'août, on est six mois plus
tard, ils sont à 22 mois. Donc... Et là, on...
Mme Robitaille : O.K. Et donc
ça ne va pas s'améliorer, c'est ce que vous dites.
Mme Landry (Nadine) : Ça ne
va pas s'améliorer, à moins qu'il y ait un changement en quelque part.
Mme Robitaille : O.K. Bon.
Relativement à l'immigration humanitaire, tout ce qui est engagement
humanitaire du Québec, là aussi, il semble qu'on change un peu... qu'on
réoriente le tir. Mais est-ce que c'est réaliste? Par exemple, les demandeurs
d'asile, on ne peut pas... Comme vous le disiez tout à l'heure, il n'y a pas de
contrôle que le Québec peut avoir là-dessus. Est-ce que je me trompe?
Mme Middlemiss (Lisa) : C'est
ça. C'est une responsabilité fédérale, en ce qui concerne le traitement des
demandes d'asile faites au Canada.
Mme Landry (Nadine) : Donc,
il y a eu énormément de demandeurs, là, on se rappelle, à l'été 2017 qui sont
arrivés au sud du...
Mme Robitaille : ...pas. Comme
vous le disiez tout à l'heure, il n'y a pas de contrôle que le Québec peut
avoir là-dessus. Est-ce que je me trompe?
Mme Middlemiss (Lisa) : C'est
ça. C'est une responsabilité fédérale en ce qui concerne le traitement des
demandes d'asile faites au Canada.
Mme Landry (Nadine) : Donc, il
y a eu énormément de demandeurs, là, on se rappelle, à l'été 2017, qui sont
arrivés au sud du Québec en provenance des États-Unis, donc 2017‑2018. Le
fédéral vient de fermer la porte. Donc, tous ces gens-là vont... leur demande
d'asile va être traitée. Après ça, ils vont faire leur demande de résidence
permanente. On comprend mal comment on peut prévoir que les chiffres vont
baisser.
Mme Robitaille : Oui. Donc,
parce qu'il y a... parce qu'il y a ces gens-là qui demandent l'asile, puis
ensuite les dossiers sont traités par la Commission de l'immigration, puis eux
décident, puis le Québec n'a aucune prise là-dessus.
Mme Landry (Nadine) :
...compétence fédérale.
Mme Robitaille : Et en...
La Présidente (Mme Chassé) :
...
Mme Robitaille : Pardon?
La Présidente (Mme Chassé) :
Il reste une minute au bloc.
Mme Robitaille : Une minute.
Et en contrepartie il y a aussi... il y a tous ces réfugiés-là qu'on choisit et
qu'on amène chez nous. Donc, c'est... Est-ce que je me trompe, mais c'est finalement...
si on décide de geler les seuils des gens, des réfugiés qu'on veut faire venir
chez nous, c'est ces gens-là qui vont être pénalisés. On va avoir moins de ces
gens-là. On... Notre engagement humanitaire va être moindre.
Mme Middlemiss (Lisa) : Oui. I mean... On le voit dans le plan pour les trois prochaines
années. Malgré l'orientation que... You know,
l'engagement humanitaire du Québec est important. Si on regarde les admissions
projetées 2020 à 2022, on voit une diminution prévue non seulement pour les
réfugiés sélectionnés à l'étranger, qui est la compétence du Québec, mais les
réfugiés reconnus sur place au Canada. C'est très difficile à prévoir parce
qu'on ne sait pas combien de monde va faire une demande d'asile au Canada et...
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci. Je suis désolée. Ça termine le bloc d'échange avec le parti formant
l'opposition officielle. Nous sommes rendus maintenant à la deuxième
opposition. M. le député de Laurier-Dorion, vous avez un bloc de
2 min 45 s. La parole est à vous.
M. Fontecilla : Merci.
Bonjour, mesdames. Très simplement, est-ce que vous pensez que le seuil proposé
en ce moment respecte l'accord Canada-Québec?
Mme Middlemiss (Lisa) : Je ne
pense pas que les seuils en ce moment respectent l'esprit de l'accord. Et
l'accord... Ma compréhension de l'accord, c'est s'il y a... un instrument quasi
constitutionnel.
M. Fontecilla : ...pourrait
amener différentes parties, soit le gouvernement fédéral ou le gouvernement du
Québec, à reconsidérer cet accord-là?
Mme Middlemiss (Lisa) : Est-ce
que vous pouvez répéter votre question? Je...
M. Fontecilla : Est-ce que
cette situation pourrait amener à... une des parties à vouloir reconsidérer
l'accord Canada-Québec?
Mme Landry (Nadine) : Bien,
disons...
M. Fontecilla : Est-ce que ça
donne une raison pour...
Mme Landry (Nadine) :
Certaines orientations du gouvernement nécessitent une négociation avec le
fédéral. Disons que ça... à notre avis, ça ne nous place pas dans une super
position pour négocier.
Mme Middlemiss (Lisa) : Et vu
la place importante dans le plan juridique constitutionnel, je pense, ce
serait... d'ouvrir l'accord, ce serait vraiment une affaire significative pour
les deux parties.
M. Fontecilla : Dites-moi,
vous avez mentionné quelques éléments qui rendent plus difficile l'immigration
au Québec par rapport à d'autres provinces. Concernant la réunification
familiale, il y a une baisse de cible qui est prévue. Est-ce que cela peut
aussi diminuer l'attrait du Québec, là, par rapport à un certain type d'immigration
qui voudrait amener des parents, etc.?
Mme Middlemiss (Lisa) : Bien,
c'est sûr que la réunification familiale est importante pour les gens qui
souhaitent voir leur famille accueillie bras ouverts dans n'importe quelle
province, et, you know, je pense que certains clients posent des questions. Si
les seuils sont prévus d'être moins bas... moins élevés, est-ce que leur
demande d'engagement vers... sur la classe familiale au Québec va être traitée
plus longtemps, un peu plus longue? Est-ce que le traitement va être plus long
au fédéral aussi vu ces cibles d'admission moins élevées?
C'est préoccupant, mais, en même temps,
l'accord prévoit que le Québec n'a pas la compétence sur réunification
familiale. Alors, c'est un enjeu particulier.
La Présidente (Mme Chassé) :
Ceci met fin au deuxième... au bloc avec la deuxième opposition. Maintenant, on
est rendus à la troisième opposition. Mme la députée de Gaspé, la parole est à
vous.
Mme Perry Mélançon : Merci.
Bonjour, mesdames. Vous disiez, je crois que c'est dans la recommandation... le
point sept, que vous êtes en opposition contre toute condition, y compris
favoriser l'intégration linguistique, quand il s'agit de la résidence
permanente. Donc, je voulais savoir simplement, pour vous, parce que vous
parliez qu'on a des gens compétents qu'après quatre, six ans, parce qu'ils
n'ont pas cette compétence-là linguistique on les perd, bien, c'est quoi,
votre... ce serait quoi la solution pour améliorer la francisation et tout? Et
pourquoi vous êtes en désaccord à ce qu'il y ait des conditions d'imposées?
• (11 heures) •
Mme Landry (Nadine) : Parce
que...
11 h (version non révisée)
Mme Perry Mélançon : ...parce
que vous parlez qu'on a des gens compétents qu'après quatre, six ans, parce
qu'ils n'ont pas cette compétence-là linguistique, on les perd, mais c'est quoi
votre... ce serait quoi la solution pour améliorer la francisation, et tout? Et
pourquoi vous êtes en désaccord à ce qu'il y ait des conditions d'imposées?
Mme Landry (Nadine) : Parce
qu'on est des juristes, donc on est pour la charte qui prévoit la mobilité à
travers le Canada. Puis, quand vous dites qu'un candidat n'apprend pas dans les
quatre à six ans, il est souvent intégré en emploi...
Mme Perry Mélançon : ...
Mme Landry (Nadine) : ...oui,
c'était votre propos. Les enfants sont francisés. Les enfants, avec la loi 101,
vont à l'école en français. Donc, à long terme, ce sera une famille intégrée.
On salue par contre l'initiative du gouvernement d'ouvrir les cours de français
aux résidents temporaires, ce qui n'était pas le cas avant. Donc, ça, on pense
que ça va effectivement grandement aider.
Mme Perry Mélançon : Puis, pour
maximiser, par exemple, la régionalisation, vous en avez parlé un peu pour
qu'on puisse avoir les immigrants partout au Québec, selon vous, de quelle
manière est-ce qu'on pourrait améliorer la grille de sélection? Vous êtes en
faveur d'avoir plus de jeunes, sans qu'il y ait un impact pour les résidents
les plus âgés avec des compétences, et tout, donc qu'est-ce qui serait à
améliorer dans la grille de sélection, selon vous?
Mme Landry (Nadine) : On peut
se positionner là-dessus, on n'a pas discuté de ça avec nos membres.
Mme Perry Mélançon : Merci.
La Présidente (Mme Chassé) :
Alors, ceci met fin à votre exposé, au bloc d'échange. Merci beaucoup pour
votre contribution. Je suspends temporairement la commission pour permettre au
prochain groupe de prendre place.
(Suspension de la séance à 11 h 2)
(Reprise à 11 h 3)
La Présidente (Mme Chassé) :
Oui, je vous invite à prendre place. Et je souhaite maintenant la bienvenue aux
représentants de l'Association Restauration Québec, et je vous rappelle que
vous disposez de 10 minutes pour votre exposé. À une minute de la fin, je vais
vous faire un signe, comme ça, ça vous donnera l'allée pour pouvoir bien
conclure et ensuite nous aurons une période d'échange. Je vous invite, tout d'abord,
à vous présenter puis à débuter votre exposé. Allez-y.
M. Arsenault (Vincent) :
Merci. Mme la présidente de la commission, M. le ministre de l'Immigration, de
la Diversité et de l'Inclusion, Mmes, MM. les députés, bonjour. Je me présente,
je suis Vincent Arsenault. Je suis propriétaire du restaurant Tomate Basilic,
situé dans la circonscription de Pointe-aux-Trembles dans l'est de Montréal.
J'emploie présentement 50 employés, dont 30 sont à temps plein. Je suis
également le président du conseil d'administration de l'Association des
restaurateurs du Québec, qui était auparavant appelé Association des
restaurateurs du Québec — vous voyez, je l'ai dit deux
fois — mais qui a conservé l'acronyme ARQ.
Je suis accompagné, à ma gauche, de M.
Hugues Philippin, propriétaire du restaurant Chic Alors, situé dans la
circonscription de Louis-Hébert à Québec, et
administrateur au conseil d'administration de l'ARQ. M. Philippin emploie 45
employés, dont 14 à temps plein. Aussi, à ma droite, le vice-président aux affaires
publiques et gouvernementales de l'ARQ, M. François Meunier. Font aussi partie
de notre délégation, à titre de participants silencieux, derrière nous, le
président-directeur général de notre association, M. Alain Mailhot et
l'analyste-recherchiste, Mme Julie Couture.
Évidemment, nous voulons commencer notre
intervention en remerciant la Commission des relations avec les citoyens de
nous recevoir aujourd'hui...
M. Arsenault (Vincent) :
...font aussi partie de notre délégation à titre de participants silencieux
derrière nous le président-directeur général de notre association,
M. Alain Mailhot, et l'analyste recherchiste, Mme Julie Couture.
Évidemment, nous voulons commencer notre
intervention en remerciant la Commission des relations avec les citoyens de
nous recevoir aujourd'hui pour discuter d'un dossier devenu crucial pour notre
industrie, soit l'immigration. L'Association Restauration Québec, avec ses
5 600 membres, est la plus importante association de gestionnaires de
restaurants au Québec et elle est aussi la plus ancienne au Canada. L'industrie
de la restauration au Québec est composée d'environ
20 000 entreprises, essentiellement des petites et des moyennes,
employant globalement près de 220 000 personnes dans toutes les
régions du Québec. D'ailleurs l'ARQ se plaît à dire que, dans chaque ville et
village au Québec, il y a une église, une caisse populaire et un restaurant,
même si, depuis quelque temps, il ne reste plus, bien souvent, que le
restaurant capable d'accueillir la clientèle locale, mais pour combien de
temps?
En effet, une ombre importante plane sur
l'industrie. La pénurie actuelle de travailleurs, qui sévit depuis quelques
années déjà, risque de limiter grandement la croissance, voire mettre en danger
le maintien de nos activités. Il n'est pas rare de voir plusieurs de mes
collègues limiter leurs journées ou heures d'ouverture et réduire leur capacité
d'accueil ou plus tristement fermer leurs portes pour ces raisons. Selon une
estimation de Raymond Chabot Grant Thornton, environ 5 500 postes
d'aide de cuisine, de plongeur, de préposé au comptoir, 2 700 postes
de cuisinier et 1 800 postes de serveur seront à pourvoir dans la
restauration au Québec en 2025. Dans les faits, ça ne sera probablement plus
cela puisque déjà, au plus fort de la saison touristique 2018, près de
14 000 postes étaient à pourvoir au total dans la restauration au
Québec.
Ce manque de travailleur en restauration
n'est pas quelque chose de conjoncturel, mais bien un problème démographique.
Depuis longtemps, l'industrie recrute principalement sa main-d'oeuvre dans le
bassin des jeunes travailleurs âgés entre 14 et 24 ans. Ces travailleurs
occupent près de la moitié des emplois en restauration. Or, ce groupe d'âge a
connu une décroissance de 8 % depuis 2012. Il faudra au moins 10 ans
avant de revenir au même niveau que 2012, soit pour retrouver sur le marché du
travail un peu plus de 1 million de jeunes âgés entre 18 et 24 ans.
Pour compenser cet effet, même si ce n'est pas l'unique solution, l'immigration
est un outil indéniable pouvant atténuer la pénurie actuelle de main-d'oeuvre.
Recourir aux travailleurs étrangers, autant temporaires que permanents, est
essentiel pour maintenir nos activités, notamment dans les régions. C'est pourquoi
l'ARQ lance aujourd'hui un véritable cri d'alarme afin que des mesures
concrètes soient mises en place pour alléger notre fardeau et celui de milliers
de PMA... PME du Québec, excusez-moi. Je laisse mon collègue Hugues Philippin
vous en identifier quelques-unes.
M. Philippin (Hugues) : Merci,
Vincent. En lisant le document de consultation, notamment à la lumière de
l'orientation III, on note que le gouvernement souhaite privilégier la
transition de personnes ayant un statut temporaire vers un statut d'immigrant
permanent. L'ARQ n'est pas contre une telle direction, mais bien au contraire.
Mais, pour que ça fonctionne, de nombreuses choses devront être corrigées. La
première, les procédures pour faire venir des travailleurs dans le cadre du
programme de travailleurs étrangers temporaires sont trop lourdes et coûteuses
pour les gestionnaires de PME, entre autres. Nous devons afficher le poste
pendant au moins quatre semaines, l'affichage doit être faite dans au moins
trois publications ou sites différents, dont un doit être le guichet emploi
d'Emploi et Développement social Canada. On doit aussi fournir un plan de
transition afin de réduire la dépendance de l'entreprise à l'embauche de
travailleurs étrangers temporaires, remplir deux formulaires, dont un de
18 pages, débourser 1 392 $ par travailleur en frais de
traitement non remboursables en cas de refus, et pour des postes à bas salaire,
l'employeur doit prendre en charge le transport aérien aller-retour,
l'assurance maladie et un service d'assistance pour le logement.
Alors, malgré ces nombreuses exigences,
sachez qu'il faudra attendre environ six mois avant l'arrivée du travailleur.
Et c'est sans compter le fait que les postes comme plongeur ou aide de cuisine
sont refusés d'office dans certaines régions. Pourtant, ce sont des métiers
dont les besoins sont les plus criants. Et, évidemment, un programme
gouvernemental exclut certaines fonctions de travail et, par conséquent, force
des exploitants qui manquent de ressources à réduire considérablement les
journées, ou les heures d'exploitation, ou pire encore, à fermer leur
entreprise carrément. Je tiens à rappeler qu'avec les coûts associés à la venue
de travailleurs étrangers et les efforts devant être consentis pour ce faire,
les employeurs de la restauration ne se tournent vers le recrutement
international qu'en dernier recours, et c'est parce qu'on n'a pas d'autre
choix.
• (11 h 10) •
Comme l'industrie de la restauration,
comme celle du tourisme est ancrée dans toutes les régions du Québec, à
l'instar de l'agriculture, pourquoi ne pas s'inspirer justement des programmes
de travailleurs agricoles qui sont nettement plus flexibles? On ne demande
aucun frais, aucune obligation de concevoir un plan de transition, et
l'affichage du poste n'est de seulement de 14 jours. Il est aussi possible
de partager le même travailleur entre plusieurs employeurs, une option qui
serait intéressante pour les entreprises saisonnières de notre secteur. Il est
vrai que tous ces éléments relèvent du gouvernement fédéral...
M. Philippin (Hugues) : ...qui
sont nettement plus flexibles. On ne demande aucuns frais, aucune obligation de
concevoir un plan de transition et l'affichage du poste n'est de seulement
14 jours. Il est aussi possible de partager le même travailleur entre plusieurs
employeurs, une option qui serait intéressante pour les entreprises
saisonnières de notre secteur. Il est vrai que tous ces éléments relèvent du gouvernement
fédéral.
L'ARQ croit donc que le gouvernement du Québec
a peut-être la solution à sa portée en négociant une nouvelle entente
permettant, à tout le moins pour le Québec, d'autoriser les employeurs voulant
embaucher les travailleurs peu qualifiés à pouvoir le faire, et d'assouplir les
modalités du programme en calquant celles-ci sur celles des volets agricoles.
Un rapatriement complet de la gestion du programme de travailleurs étrangers
temporaires par le gouvernement du Québec pourrait être aussi à considérer.
L'immigration permanente et l'accompagnement des entreprises sont aussi deux
enjeux cruciaux, dont nous entretiendra mon collègue François Meunier.
M. Meunier (François) : Alors,
merci beaucoup, Hughes, et merci de votre accueil, MM., Mmes les députés. L'objectif
de favoriser un meilleur arrimage entre les besoins du marché du travail et la
sélection des candidats à l'immigration en est un que nous appuyons fortement.
Reste maintenant à définir ce que l'on entend notamment à l'orientation 4
par travailleur qualifié. Rappelons que notre industrie, et dans bien d'autres
secteurs d'ailleurs, que ce sont surtout les postes non qualifiés que l'on
retrouve et que l'on retrouvera en situation de pénurie le plus fortement dans
les prochaines années. Il est donc essentiel que l'immigration économique
permanente soit ouverte aussi aux travailleurs peu qualifiés, qu'il soit
possible pour ces personnes, dont le profil répond aux besoins des entreprises
du Québec, de créer un compte dans la plateforme Arrima et de déposer une
déclaration en intérêt. Aussi, nous avons noté avec un grand enthousiaste
l'orientation du gouvernement d'appuyer les entreprises dans leurs démarches de
recrutement à l'international, outre les irritants dont vous a fait part
Hughes, et touchant principalement le gouvernement fédéral. Nous espérons que
les actions prises dans cette orientation vont permettre une amélioration et un
assouplissement du traitement. Et dans la gestion des dossiers d'immigration,
nos membres nous ont partagés certaines de leurs préoccupations, notamment que
le traitement des demandes pour plusieurs postes par le même employeur soit
fait par un seul conseiller unique du MIDI plutôt que par autant de conseillers
différents, qu'il y ait autant de dossiers à traiter, qu'on prenne davantage en
compte l'expérience du travailleur candidat... du candidat à l'immigration
plutôt qu'uniquement la formation.
Évidemment, il y a un autre facteur qui
doit être aussi considéré par le gouvernement, c'est de faciliter... outre
faciliter les démarches de recrutement, ce sont les coûts importants qu'elle
occasionne... que le recrutement étranger occasionne. Rares sont en effet les
entreprises de restauration qui peuvent profiter d'une personne attitrée à la
fonction ressources humaines, c'est bien souvent le propriétaire qui s'en
occupe.
Devant un processus complexe où personne
ne veut faire d'erreurs qui risquent de retarder l'étude du dossier, les
gestionnaires n'ont habituellement pas le choix d'aller vers des consultants
externes qui facturent en moyenne, outre les frais exigés par le gouvernement,
des coûts au-delà... qui peuvent... qui dépassent souvent, là, 4 000 $
par travailleur recruté, et disons-le. Alors, il s'agit d'un coût important qui
est un frein pour plusieurs pour aller recruter à l'international.
La solution est simple. Selon nous, il
faut que l'accompagnement proposé par le ministère...
La Présidente (Mme Chassé) :
Il vous reste moins d'une minute.
M. Meunier (François) :
...c'est bien noté, se traduise par un soutien personnalisé. Je vais laisser
notre président conclure.
M. Arsenault (Vincent) : Donc,
la restauration est l'une des industries qui a pu compter le plus et qui compte
encore beaucoup sur l'immigration pour assurer son développement. Aux
restaurants de cuisine canadienne proposés aux plus âgés d'entre nous, se sont
ajoutés, au fil des décennies, les mets chinois, vietnamiens, français, grecs
et j'en passe, c'est ce qui donne aujourd'hui à la restauration du Québec un
goût si international. Nous espérons que nos propos permettront aux membres de
la commission de mieux comprendre les besoins des employeurs de la restauration
par rapport au sujet crucial qu'est l'immigration.
La Présidente (Mme Chassé) :
En terminant.
M. Arsenault (Vincent) : Je
souhaite à nouveau remercier le ministre et les parlementaires de nous avoir
reçus aujourd'hui. Merci.
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci pour votre exposé. Nous allons maintenant débuter la période d'échange. M.
le ministre, la parole est à vous pour un bloc d'échange de
15 min 45 s.
M. Jolin-Barrette : Merci, Mme
la Présidente. M. Arsenault, M.Philippin, M. Meunier, bonjour. Merci
d'être à l'Assemblée et d'avoir présenté votre mémoire.
Écoutez, d'entrée de jeu je veux vous dire
que je suis très sensible à ce que vous exposez relativement aux difficultés de
votre industrie à recruter des travailleurs. Et vous le dites bien, dans
chacune des régions, dans chaque village au Québec, il y a souvent un
restaurant où... ça assure la vitalité aussi de nos régions et il faut
s'assurer que, supposons, quand on a une communauté, bien, les gens puissent se
restaurer, alors je suis très sensible à cette réalité-là surtout aux retombées
économiques que ça amène aussi dans les différentes collectivités.
Sur la question du Programme des
travailleurs étrangers temporaires, le gouvernement du Québec est en discussion
avec le gouvernement fédéral depuis plusieurs mois, et vous l'avez bien dit, ça
prend un assouplissement de la part du gouvernement fédéral. Et c'est les
demandes que je porte au nom du gouvernement du Québec depuis plusieurs mois
déjà, et c'est important que le gouvernement fédéral comprenne l'importance du
marché du travail québécois, notamment au niveau des assouplissements qui
doivent être apportés au Programme des travailleurs étrangers temporaires en ce
qui concerne justement l'affichage...
M. Jolin-Barrette : ...et
c'est les demandes que je porte au nom du gouvernement du Québec depuis plusieurs
mois déjà, et c'est important que le gouvernement fédéral comprenne l'importance
du marché du travail québécois, notamment au niveau des assouplissements qui
doivent être apportés au Programme des travailleurs étrangers temporaires en ce
qui concerne justement l'affichage. Ce que nous proposons au gouvernement
fédéral, c'est que le Québec ait la seule juridiction au niveau de l'étude
d'impact du marché du travail, notamment pour réduire les délais associés à ça
au niveau de la période de l'affichage, pour faire en sorte aussi que le
plafond de 10 % ne soit plus présent et pour faire en sorte aussi qu'on
puisse étendre la durée du permis de travail. Je pense que ça pourrait donner
un bon coup de main aux différentes entreprises comme la vôtre pour répondre à
ces besoins-là.
Ce que je voulais vous demander, c'est...
Au niveau du pourcentage de travailleurs temporaires versus au niveau des
immigrants permanents, quand vous dites : On veut aller de l'avant avec
l'immigration notamment parce qu'on a des emplois à combler en matière de
restauration, vous dites : Ça peut être une avenue, le recours aux
travailleurs temporaires. Dans quelle proportion?
M. Meunier (François) :
Écoutez, c'est extrêmement difficile de répondre à cette question-là. Je pense
qu'au niveau des programmes de travailleurs étrangers temporaires,
actuellement, dans le volet vente et services, où notre industrie se retrouve,
je pense que c'est à peine 500 travailleurs par année présentement. Or, une des
raisons principales, c'est parce que c'est bien trop compliqué. Sachez que, par
contre, que notre association a conclu une entente avec une firme de consultants
externes dans les derniers mois et que, déjà depuis le mois d'avril, on a une
forme d'accompagnement via une entreprise privée pour permettre aux entreprises
de recruter. D'ailleurs, M. Philippin, si vous le souhaitez, pourra vous faire
état, il y a déjà deux travailleurs qui sont arrivés, il y en a un autre qui
s'en vient à l'automne.
Donc, ce n'est
pas que l'immigration est impossible, c'est que... sachez que c'est extrêmement
lourd à supporter pour des petites entreprises non seulement en termes de
coûts, mais également en termes de bureaucratie, et le gouvernement peut faire
beaucoup en allant dans ce sens-là. Et, pour nous, que ce soit le fédéral ou le
provincial, ce n'est pas ça qui nous importe, c'est que finalement... c'est que
ça soit plus simple et qu'on puisse... venir les travailleurs dont on a besoin,
ce qui est évidemment... demeure quand même un enjeu de taille, parce que
présentement nous n'avons que deux fonctions, chef et cuisinier diplômé, qui
bénéficient du programme simplifié, hein, au niveau du Programme des
travailleurs étrangers temporaires. Et qui dit traitement simplifié, là, je
veux tous vous le dire, ce n'est pas parce que c'est plus simple, c'est juste
parce que c'est moins compliqué puis que ça peut aller un petit peu plus vite
que les autres, mais ça demeure quand même quelque chose qui est trop lourd.
Alors, on sent
très bien la volonté du gouvernement actuellement d'accompagner puis de
supporter les entreprises. Mais, à la fin, si on ne fait venir que des
ingénieurs puis des informaticiens, quand 50 % des besoins de
main-d'oeuvre des entreprises du Québec, c'est travailleurs peu ou non
qualifiés, on ne réglera pas notre problème.
M.
Jolin-Barrette : Et, ultimement, lorsque vous dites : Écoutez, on
pourrait aller vers les travailleurs temporaires, votre objectif pour les
entreprises, c'est de s'assurer qu'ils puissent demeurer en poste et immigrer
de façon permanente?
M. Meunier
(François) : Je pense qu'Hugues peut peut-être témoigner de ça, il
travaille déjà à s'assurer que ses travailleurs vont rester après le deux ans
de contrat, là.
M. Philippin
(Hugues) : C'est sûr que, si on fait le processus d'embauche, surtout
pour une petite entreprise comme la mienne, on espère les garder. Alors, on va
tout faire ce qui est possible pour intégrer ces employés-là à la société, pour
les franciser si c'est... s'ils ont besoin d'être francisés. Alors, en effet,
là, ce serait au moins d'avoir un baume, un peu, sur le problème, c'est d'avoir
un employé pour remplir le poste, puis après ça on peut s'activer à l'intégrer
le plus possible puis l'inciter à s'établir au Québec.
M.
Jolin-Barrette : O.K. Puis, lorsque vous dites : Bien, on veut
participer à l'intégration, à la francisation, c'est quoi, les mesures que,
supposons, dans votre secteur, les employeurs peuvent mettre de l'avant ou
qu'ils souhaitent mettre de l'avant justement pour participer à cet effort-là?
Parce que l'immigration, ce n'est pas juste unidirectionnel, là, c'est la
société d'accueil aussi. Alors, comment les employeurs peuvent participer à la
francisation et à l'intégration?
M. Philippin
(Hugues) : En fait, quand tu travailles dans une entreprise comme un
restaurant, c'est un... Il y a beaucoup d'employés dans les restaurants. C'est
une entreprise qui embauche beaucoup de gens au pied carré par rapport à
peut-être d'autres industries. Alors, tout de suite en partant, ils sont
immergés dans un bassin de gens locaux. C'est des gens aussi qui proviennent de
tous les milieux, parce que l'industrie de la restauration, je ne pense pas
qu'il y a une industrie plus inclusive que la nôtre. Alors, ils sont plongés
dans un bassin, ils sont... ils communiquent sans cesse avec d'autres
travailleurs et puis ils sont... ils font partie d'un milieu local aussi. Donc,
nous, pour les deux... en tout cas, les deux qui sont déjà en poste et les
prochains qui viennent, on fait tout dans notre possible pour leur montrer elle
est où, l'épicerie, la caisse populaire, on leur fait goûter de la poutine.
Alors donc, ils sont vraiment intégrés dans l'équipe, puis on demande aussi aux
autres équipiers, même si c'est naturel, de les inclure dans leurs sorties,
dans leurs activités. Alors, ces gens-là s'intègrent très rapidement puis ils
sont enchantés de l'accueil que le Québec a fait envers eux autres.
• (11 h 20) •
M. Arsenault
(Vincent) : Bien, peut-être rajouter, par rapport à ça : on est
quand même un milieu qui est très...
M. Philippin (Hugues) :
...intégrés dans l'équipe, puis on demande aussi aux autres équipiers, même si
c'est naturel, de les inclure dans leurs sorties, dans leurs activités. Alors,
ces gens-là s'intègrent très rapidement puis ils sont enchantés de l'accueil
qu'on... que le Québec a fait envers eux autres puis...
M. Arsenault (Vincent) : Peut-être
rajouter, par rapport à ça, on est quand même un milieu qui est très
intégrateur. Donc, notre industrie, sur une prestation, il n'y a pas beaucoup
de travail individuel à l'intérieur de ça, donc ça facilite aussi
l'intégration. On n'a pas le choix de faire en sorte que les gens vont pouvoir
contribuer assez rapidement. Donc, il y a un français qui va venir opérationnel
assez rapidement puis qui pourra être par la suite perfectionné, là, bien
entendu.
M. Jolin-Barrette : Puis, au
niveau du salaire moyen dans l'industrie, ça se chiffre à combien environ pour
les employés?
Une voix
: Bien,
dépendamment des postes, là...
M. Meunier (François) : Bien,
en fait, c'est surtout dépendant des postes de travail. C'est certain qu'au
niveau de la cuisine, là, qui est l'essentiel du besoin, on parle de peut-être
de 15 $ à 20 $ de l'heure pour la cuisine, mais sachez qu'il y a une
pression à la hausse sur les salaires depuis déjà un certain temps. J'ai... On
a des témoignages de gens qui vont chercher des gens en offrant un salaire qui
peut être de 25 $ de l'heure, et ils n'en trouvent pas. Alors, il y a... il
est clair que c'est un... ce n'est plus nécessairement là l'enjeu, c'est...
Pour les régions, notamment, c'est la
saisonnalité qui est le problème. C'est que... Comment on peut attirer un
travailleur pour seulement lui offrir un emploi pendant trois mois? Ça risque
d'être beaucoup plus... un défi important, d'où l'utilisation aussi du
Programme des travailleurs étrangers temporaires, qui pourrait nous permettre
pendant... avoir vraiment des travailleurs temporaires qui répondent à un
besoin temporaire et un besoin de courte durée, comme à l'image de ce qu'on
retrouve dans l'agriculture. Je pense que tout le monde convient aujourd'hui
que, si on n'avait pas les travailleurs étrangers temporaires dans la
production maraîchère, notamment, bien, finalement, on ne mangerait que des
fraises venant de Californie. C'est certain.
Alors, on ne peut pas nier qu'on a des
besoins pour répondre à des besoins qui sont ponctuels. Et, oui, on souhaite
tous garder les futurs travailleurs temporaires de manière permanente, mais, dans
certains cas, il va peut-être falloir avoir recours au programme pour répondre
à des besoins d'entreprise. Je pense, entre autres, aux entreprises du secteur
touristique, qui sont encore en haute saison au moment où on se parle, qui vont
l'être probablement jusqu'au mois d'octobre, mais je pense que vous êtes tous à
même de constater, allez sur la Côte-Nord, là, après la fête du Travail, tout
est fermé parce qu'il n'y a plus de travailleurs.
M. Jolin-Barrette : Puis vous
diriez, là, face à ce manque de travailleurs là, combien de vos entreprises, de
vos membres sont à risque au niveau de la pérennité des entreprises, tu sais,
les défis auxquels vous faites face, là, pour assurer, là, la pérennité des
entreprises? Il y en a combien qui sont en difficulté?
M. Meunier (François) : Je
pense qu'on se ferait accuser de sensationnalisme si on disait que tous les
restaurants vont fermer demain matin, mais il est clair que, si on n'a pas la
part de l'immigration, soit permanente soit temporaire, on met à risque...
c'est vrai qu'on met à risque des emplois de Québécois parce que dans...
Moi, j'ai... je me suis promené un peu
partout au Québec cet été. J'ai vu des restaurants fermés lundi, mardi,
mercredi, donc c'est trois jours de revenus auxquels on renonce. Bien, la
rentabilité en est affectée à long terme, et le petit village va très
certainement, finalement, en pâtir parce que l'offre non seulement offerte à la
population locale, mais également aux touristes, soit étrangers ou même d'ici,
va en pâtir. Ça, c'est certain.
On n'est pas là pour vous dire qu'on va
tous fermer demain matin, mais c'est certain que les gens aujourd'hui doivent
réduire d'une manière importante leur potentiel de développement. Vous savez,
on est en pleine croissance, là. L'industrie a connu... et même en 2019 je
pense qu'on va connaître une excellente année. On a des années records. On a
dépassé 13,5 milliards de ventes dans la restauration au Québec l'an
dernier. On n'a jamais atteint des niveaux comme ceux-là. On dépasse l'Ontario.
On n'a jamais été à ce niveau-là, et ce
qui est sur toutes les lèvres, c'est : J'ai les clients, mais je ne suis
pas capable de servir tout le monde. Et on risque à la fin de... très
certainement de voir des... une offre de restauration qui va être de bien moins
bonne qualité, et où on retrouve essentiellement une cuisine qui va être
industrialisée, standardisée, et on va certainement y perdre sur le plan de la
gastronomie et de la qualité du service.
M. Jolin-Barrette : Je vous
remercie. Je sais que j'ai des collègues qui veulent poser des questions, mais
je retiens de notre échange que vous souhaitez une amélioration au niveau du
Programme des travailleurs étrangers temporaires, et, sur ce, il faut que le
gouvernement fédéral entende votre message, notamment, pour faire en sorte de
comprendre la réalité des employeurs. Alors, je vous remercie pour votre...
La Présidente (Mme Chassé) :
Je crois que c'est la députée de Les Plaines qui prend la parole. Allez-y.
Mme Lecours (Les Plaines) :
Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci, M. le ministre. Merci, messieurs, de
ce mémoire qui est fort intéressant. Plusieurs...
Une voix
: ...il faut
que le gouvernement fédéral entende votre message, notamment, pour faire en
sorte de comprendre la réalité des employeurs. Alors, je vous remercie pour
votre...
La Présidente (Mme Chassé) :
Je crois que c'est la députée de Les Plaines qui prend la parole? Allez-y.
Mme Lecours (Les Plaines) :
Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci, M. le ministre. Merci, messieurs, de
ce mémoire, qui est fort intéressant, plusieurs recommandations.
M. Arsenault, Tomate Basilic, j'en témoigne, est une très belle table dans
l'est de Montréal. Écoutez, vous avez... dans votre mémoire — je vais
aller un petit peu plus pointu — vous parlez d'un contenu didactique
qui a été développé par l'ITHQ. La francisation est la clé du succès aussi de
l'intégration des nouveaux arrivants. J'aimerais que vous nous parliez un petit
peu du contenu exactement, de quelle façon il serait applicable. Et vous dites
qu'il faudrait que ce soit développé dans une prestation informelle. Vous
entendez quoi par une prestation informelle?
M. Meunier (François) : En
fait, ce qu'on veut vous dire, c'est qu'un restaurant, ça ne deviendra pas un
lieu d'enseignement officiel, on n'aura pas de salle de classe. Par contre, un
restaurant, comme n'importe quelle entreprise, peut devenir un lieu
d'apprentissage et un lieu d'intégration. L'outil dont on vous parle à l'ITHQ,
c'est... on possède tous la... non seulement l'infrastructure, mais également
tout un vocabulaire pour assurer, finalement, une utilisation de termes
français dans l'exploitation de nos établissements.
On a ce qu'il faut pour que les gens utilisent les
termes qui sont français, et le fait de côtoyer les autres collègues va avoir
évidemment un effet extrêmement positif sur l'apprentissage du français des
futurs immigrants, qui en ont besoin, parce que, sachez-le, ce n'est pas
nécessairement vrai que ces gens-là vont devoir apprendre la langue.
Il y a beaucoup de nos travailleurs qui
proviennent déjà de l'Europe francophone ou même de d'autres pays de la
Francophonie, qui ne demanderaient que de pouvoir profiter de notre société
pour élever leurs enfants, de système d'éducation. Et notre industrie a
toujours été traditionnellement... vous savez, il y a un paquet de nouveaux
arrivants, qui sont arrivés dans les années 60, les années 50, qui
ont finalement commencé à gagner leur vie en ayant un restaurant pour, par la
suite, évidemment, retourner à l'école, s'assurer d'avoir la réciprocité de
leur diplôme, puis s'ils étaient ingénieurs, bien, ils ont pu exercer leur
métier d'ingénieur. Mais pour gagner leur vie en commençant ici, bien, tout ce
qui leur restait, c'était de pouvoir accueillir des gens pour faire découvrir
leur cuisine. Alors, on s'aperçoit que, finalement, il y a un succès naturel
qui se fait.
Mais oui, c'est vrai que l'industrie est
en mesure... pourrait, par exemple, participer à des programmes de
francisation, d'une certaine manière, pour s'assurer que ces travailleurs
apprennent la langue. Mais je veux juste vous préciser qu'on ne parle jamais de
20 travailleurs d'un coup, là, on n'est pas Olymel qui peut faire venir
200 travailleurs, qu'on est capable d'asseoir dans une même salle pour
leur faire apprendre le français. Non, c'est un, ou deux, ou peut-être trois.
Donc, à ce moment-là, d'avoir un professeur de français, en entreprise, qui...
ça demeure quelque chose qui est un petit peu irréaliste et peu pertinent.
La Présidente (Mme Chassé) :
Il reste une minute au bloc d'échange.
Mme Lecours (Les Plaines) :
...parce que vous parlez aussi du milieu agricole, qui partage les ressources,
et vous parlez du partage des ressources. Est-ce que c'est réalisable et
pensable que dire, dans votre milieu, ça pourrait être fait, ça?
M. Meunier (François) : Regardez,
présentement, on ne peut pas le faire, mais je pense à des entreprises en
région, en Gaspésie ou ailleurs, un travailleur... par exemple, dans le milieu
de l'hôtellerie, les préposés à l'entretien ménager ne sont pas admissibles à
aucun programme de travailleurs étrangers. Or, très certainement que des
préposés à l'entretien ménager pourraient être partagés entre plusieurs
établissements hôteliers pour finalement s'assurer que les chambres soient
propres et accueillir adéquatement la clientèle.
Vous savez, on est extrêmement créatifs et
imaginatifs pour être capables d'aménager les horaires, puis on pourrait le
faire très certainement pour s'assurer que finalement, si on n'a pas accès à
une main-d'oeuvre permanente, minimum 30 heures-semaine...
La Présidente (Mme Chassé) :
En terminant.
M. Meunier (François) :
...bien, qu'on puisse avoir accès à 20 heures-semaines, mais le même
employé dans deux entreprises.
La Présidente (Mme Chassé) :
Je vous remercie. Ça termine le bloc d'échange avec la partie formant le
gouvernement. Nous sommes maintenant rendus à l'opposition officielle. M. le
député de Nelligan, prenez la parole.
M. Derraji : Merci, Mme la
Présidente. Messieurs, merci. Bienvenue à la commission. Écoutez, ma première
question... La situation ne date pas d'aujourd'hui et je partage avec vous
votre cri d'alarme, un cri d'alarme qui est partagé par plusieurs autres
partenaires, notamment le Conseil du patronat, et je cite
monsieur... le P.D.G. du Conseil du patronat,
M. Yves-Thomas Dorval : «Je pense que la situation est alarmante un
peu partout au Québec.» Et c'est là ma première question : Avez-vous déjà
eu une invitation de la part du ministère de l'Emploi pour parler de votre
situation, ou le MIDI?
• (11 h 30) •
M. Meunier (François) : Oui,
et plusieurs fois. Vous savez, moi, j'ai participé, je pense, au moins à une
dizaine de...
11 h 30 (version non révisée)
M. Derraji : ...je pense que la
situation est alarmante un peu partout au Québec. Et c'est là ma première question :
Avez-vous déjà eu une invitation de la part du ministère de l'Emploi pour
parler de votre situation ou le MIDI?
M. Meunier (François) : Oui et
plusieurs fois. Vous savez, moi, j'ai participé, je pense, au moins à une
dizaine de forums, de colloques...
M. Derraji : Je ne parle pas
de forums. La situation est alarmante, on parle de restaurants qui ferment,
vous avez énuméré toute une liste. Moi, devant une situation pareille, ce n'est
pas les forums avec qui... où on va traiter, on va trouver les solutions, vraiment
une rencontre avec le ministre responsable pour trouver des solutions concrètes
rapidement.
M. Meunier (François) : Pas
avec le gouvernement actuel, mais oui, avec les gouvernements précédents, on a
eu des... on a quand même eu des rencontres pas plus tard qu'au printemps avec
toute une série de sous-ministres au gouvernement où on a pu échanger de ces
problématiques-là.
M. Derraji : Merci. Merci. Au
fait, ce que vous avez soulevé, je ne pense pas... et corrigez-moi si je me
trompe, je ne veux pas qu'on part d'ici et on comprend que la seule solution
que vous avez sur la table, c'est le Programme des travailleurs étrangers.
Est-ce que vous pouvez juste clarifier? Parce que j'ai l'impression qu'on a
compris qu'on veut parler avec le fédéral pour travailler encore une fois le
Programme travailleurs étrangers. Et la seule solution que vous avez sur la
table maintenant, c'est ce programme, oui ou non?
M. Meunier (François) : Non,
non, parce que l'immigration permanente aussi, pour nous, est importante, et il
y a un besoin, et on se retrouve avec les mêmes problématiques. Pour nous,
bien, c'est... regardez, il est clair que, par exemple, prenons les seuils
d'immigration. On est membres du Conseil du patronat, M.
le député, alors c'est certain qu'on appuie la position d'augmenter les seuils,
mais pour nous ce n'est pas tant le seuil qui est important, c'est le profil
des travailleurs. C'est que demain matin, là, si on fait venir 60 000
diplômés avec des maîtrises universitaires, là, qui ne pourront pas travailler
dans les restaurants, je n'aurai rien gagné, l'industrie n'aura rien gagné.
M. Derraji : Justement.
Justement, c'est dans ce sens...
M. Meunier (François) : Alors,
c'est là qu'il faut...
M. Derraji : Justement, dans
ce sens, j'aimerais bien vous entendre par rapport à la grille de sélection,
parce que là vous touchez le coeur même du problème. Vous avez dit les
travailleurs non qualifiés, vous avez mentionné le Programme des travailleurs
temporaires étrangers, mais là, je suis là pour vous aider, vous accompagner à
trouver des solutions. C'est ça, mon but, aujourd'hui, et j'aimerais bien que
l'équipe du gouvernement et le ministre vous écoutent aussi. Je ne veux pas
qu'on part d'ici et on pitche le problème au fédéral et que le seul problème...
la seule solution, c'est le Programme des travailleurs étrangers. Là, vous
rajoutez une autre solution, c'est l'immigration permanente, vous ajoutez que
vous n'êtes pas d'accord avec les seuils et, un peu plus loin, revoir la grille
de sélection. Est-ce que c'est ça?
M. Meunier (François) :
Regardez, on n'est pas des spécialistes, hein, de l'immigration puis des
politiques d'immigration. Tout ce qu'on est venus vous témoigner aujourd'hui,
c'est que présentement le modèle ne fait pas le travail, il ne fait pas le
travail pour des entreprises qui ont des besoins importants en termes de
main-d'oeuvre, mais même dans certains cas des travailleurs qu'on dit
qualifiés, c'est extrêmement complexe. On fait une analyse, par exemple, de la
formation académique, on regarde le cursus, on regarde non seulement le cursus
du cours, mais on regarde même le contenu de chacun des cours et on va arriver
à la fin, dire : Ah! ce travailleur-là, il lui manque 50 heures. Vous
savez, la situation actuelle est tellement quand même sensible que ça mérite peut-être
des solutions puis une adaptation à des politiques qui sont quand même...
doivent être agressives. Parce que je comprends que par le passé, que ce soit
avec le Programme des travailleurs étrangers temporaires, tout ça était mis en
place pour régler des problèmes ponctuels, des problèmes qui étaient
temporaires dans le temps. Or, le temporaire, là, la pénurie de main-d'oeuvre,
là, c'est pour la prochaine décennie. Alors, à problème sur 10 ans, on doit
peut-être apporter des correctifs. Et vous savez qu'au fédéral, puis le
provincial pourrait le faire, mais on a toutes sortes de projets pilotes. Dans
les Maritimes, on accorde des contrats de travail à des gens qui... uniquement
basé sur leur expérience de travail soit ici soit ailleurs. Alors, il va falloir
à un moment donné qu'on soit beaucoup plus souples par rapport à ce qu'on est
aujourd'hui pour permettre aux... Mais on comprend qu'il faut encadrer tout ça,
on ne peut pas faire n'importe quoi non plus, mais c'est vrai que présentement
c'est extrêmement compliqué. Et parlez-en au maire Labeaume, qui a promis à une
boulangère un emploi au Québec lors d'une visite à Bordeaux il y a quelques
années, puis ça lui a pris 10 ans... deux ans avant d'être capable de la faire
venir. Donc, c'est ça, notre réalité.
M. Derraji : Très d'accord
avec vous, M. Meunier. Et, je l'ai dit d'entrée de jeu, mon but, aujourd'hui,
c'est faire comprendre votre situation. Vous êtes à la bonne place pour faire
avancer vos idées, et nous sommes là pour trouver des solutions. Le ministère
avec cette démarche entend déposer au mois de novembre sa stratégie pour les
deux prochaines années. C'est très important, ce que vous êtes en train de
dire. Donc, moi, d'ici novembre, si je n'ai pas sur la table une solution qui
va répondre à l'ensemble de vos besoins, parce que ça part de nos régions, de
la vitalité de nos régions et une industrie très importante, je vais être très
déçu. Donc, aujourd'hui, je vous...
M. Derraji : ...au mois de
novembre sa stratégie pour les deux prochaines années. C'est très important ce
que vous êtes en train de dire. Donc, moi, d'ici novembre, si je n'ai pas sur
la table une solution qui va répondre à l'ensemble de vos besoins parce que ça
part de nos régions, de la vitalité de nos régions et une industrie très
importante, je vais être très déçu. Donc, aujourd'hui, je vous lance... je vous
relance une deuxième fois. Oubliez les anciens forums. Aujourd'hui, vous êtes
sur une table avec M. le ministre. Vous avez trois ou quatre propositions pour
répondre maintenant à cette situation, pour répondre maintenant à ce cri
d'alarme que vous êtes venus nous lancer aujourd'hui. C'est un cri d'alarme. On
doit vous écouter, messieurs. Ça serait quoi, vos trois propositions, ou
quatre, ou cinq? Qu'est-ce qu'on doit faire aujourd'hui pour bouger?
M. Meunier (François) : Bien,
c'est clair qu'il faut être en mesure d'aller... de pouvoir recruter les travailleurs
peu ou moins qualifiés, c'est certain, puis qu'on aide les entreprises. On peut
aider les entreprises de deux manières, et ça peut se faire de manière
parallèle en ayant un agent, un conseiller du MIDI ou d'un autre organisme, qui
puisse accompagner les entreprises dans leurs démarches d'immigration à
l'étranger. Et considérant les coûts et la nécessité de faire appel à des
firmes extérieures pour atténuer les importants coûts... M. Philippin a fait
venir un travailleur à bas salaire, là. C'est 8 000 $, sa facture.
Alors, on souhaite qu'il soit là à vie, hein? Parce que la rentabilisation de
tout ça ne sera pas facile. Bien, il est clair que, pour nous, on recommande au
gouvernement d'accorder aux entreprises qui doivent obligatoirement utiliser
des consultants externes pour recruter à l'étranger, de profiter d'un crédit
d'impôt remboursable afin d'atténuer les impacts financiers sur l'entreprise.
M. Derraji :
...proposition, revoir la grille de sélection parce que, comme vous le savez,
il y avait le projet de loi n° 9, que vous avez sûrement suivi, qui... Le
ministre et le ministère pensent révolutionner le système de l'immigration.
Donc, nous sommes toujours en train de suivre comment ce système va vous aider.
Donc, on parle de la grille de sélection, premier point. Deuxième point, vous
demandez de l'accompagnement. Troisième point, les coûts de recrutement. Donc,
si j'ai bien compris, une sorte de reçu ou un truc fiscal par rapport à ces
coûts pour vous supporter et de l'aide par rapport à des firmes spécialisées en
recrutement. Est-ce que j'ai bien résumé un peu...
M. Meunier (François) :
Peut-être, si on doit faire appel à une firme, de pouvoir profiter d'une
réduction fiscale provenant du gouvernement, bien sûr.
M. Derraji : Un avantage
fiscal par rapport aux frais?
M. Meunier (François) :
Aux coûts...
M. Derraji : Aux coûts
que vous payez pour aller chercher de la main-d'oeuvre extérieure.
M. Meunier (François) :
Tout à fait.
M. Derraji : Une toute
dernière question. Je ne veux pas dramatiser, hein? Parce qu'on le voit dans
le... Le rapport, il est très clair. Donc, si on a très bien lu le rapport,
aujourd'hui, on doit tous essayer d'être en mode collaboration avec vous.
Est-ce que vous pensez, parce que, là, on le voit dans plusieurs régions,
est-ce que vous pensez que l'avenir de la restauration au Québec est très
menacé?
M. Philippin (Hugues) : Vas-y.
M. Meunier (François) :
Notre industrie est fragilisée par la pénurie de main-d'oeuvre. C'est un des
enjeux principaux. Quand on parle avec d'autres restaurateurs, ce n'est jamais
un problème de clientèle, c'est toujours un problème de main-d'oeuvre. Ils sont
toujours dans l'incertitude. Est-ce qu'il y aura des travailleurs demain pour
le groupe que j'ai accepté de recevoir? Est-ce que je vais avoir un cuisinier
lundi? Est-ce que... Alors, on ne sait jamais. Alors, c'est ça, le gros,
gros... le gros stress actuellement qui guette les propriétaires, les
restaurateurs. Et d'ailleurs les autres équipes. Parce que les autres... Quand
il manque un travailleur dans l'équipe, toute l'équipe est fragilisée, toute
l'équipe est démotivée. Ça se répercute partout. Donc, c'est majeur.
La Présidente (Mme Chassé) :
il reste une minute au bloc.
M. Arsenault (Vincent) :
Peut-être pour rajouter, présentement, on le sait, on a de la difficulté à
recruter même chez nous, là. Donc, ce n'est pas un... Présentement, la
restauration, ce n'est pas quelque chose qui est très, très en demande. Donc,
il faut travailler fort déjà pour aller chercher des gens. Si on les met dans
un contexte de restauration où ils travaillent beaucoup plus qu'ils en avaient
l'impression de toute façon parce qu'il manque du personnel, etc., bien, on se
crée des problèmes. Puis un élément qui est important, c'est que l'immigration
aussi vient en quelque sorte protéger des emplois de gens d'ici aussi, là.
Donc, ce n'est pas juste une question de deux ou trois postes, là.
La Présidente (Mme Chassé) :
En conclusion. Très bien. 15 secondes.
M. Derraji : Bien, merci.
Merci. Écoutez, nous sommes là, pour vous accompagner, parce que ça touche
vraiment notre avenir économique et l'avenir de nos régions. Merci d'être venu.
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci. Maintenant, je cède la parole au député de Laurier-Dorion, le
représentant de la deuxième opposition. Allez-y.
• (11 h 40) •
M. Fontecilla : Merci.
Bonjour, messieurs. Je lis dans votre mémoire la question d'une instruction
ministérielle, que je lis, et je vous cite : «...refuse systématiquement
toute demande d'entreprises provenant de régions ayant un taux de chômage
au-dessus de la moyenne nationale et qui désirent embaucher des postes peu
qualifiés». Et j'aimerais vous entendre...
M. Fontecilla : ...je lis dans
votre mémoire la question d'une instruction ministérielle qui, je lis... je
vous cite, «refuse systématiquement toute demande d'entreprises provenant de
régions ayant un taux de chômage au-dessus de la moyenne nationale et qui
désirent embaucher des postes peu qualifiés», et j'aimerais vous entendre...
Évidemment, vous avez un problème de
pénurie de main-d'oeuvre. On sait également que les salaires dans la
restauration, ce n'est pas parmi les salaires les plus élevés au Québec, là.
Comment ça joue, là, la question salariale dans... en termes d'attrait de la
main-d'oeuvre et l'utilisation de main-d'oeuvre étrangère, là?
M. Arsenault (Vincent) : Bien,
en fait, si je comprends bien, vous voulez savoir un peu comment se comporte le
salaire présentement dans l'industrie de la restauration, puis est-ce que ça
peut être assez attrayant pour pouvoir permettre à quelqu'un d'immigrer et de
venir travailler pour nous?
M. Fontecilla : Oui.
M. Arsenault (Vincent) : Bien,
je vous dirais que peut-être que la pénurie de main-d'oeuvre a fait son oeuvre
un peu, là. On le voit qu'il y a des... Présentement, les salaires sont en
croissance de façon quand même assez importante. Moi, comme restaurateur, je le
vois, là. On n'a pas le choix de s'ajuster si on veut avoir des gens.
Pour vous donner un exemple, on a des gens
qui font de la vaisselle, qui vont gagner 16 $, 17 $ de l'heure, là.
Donc, on n'était pas là il y a trois ou quatre ans. Donc, je comprends qu'on
n'est pas dans un contexte de salaire... des meilleurs salaires dans
l'industrie de... au Québec, mais on commence à être loin de ce que l'on peut
s'imaginer aussi. Donc, il y a moyen d'intégrer... de s'intégrer quand même
avec ces salaires-là, là.
Puis ce qu'il faut savoir, c'est que,
présentement, ce que l'on a de besoin, c'est des gens pour venir remplir des
postes qui sont souvent un peu boudés présentement, là. Donc, c'est ça.
M. Fontecilla : Vous
mentionnez également qu'un bassin traditionnel de recrutement, c'est les
jeunes. Moi-même, ma première job, ça a été plongeur, effectivement, dans ma
vie, là. Mais est-ce que, malgré cette augmentation salariale pour les postes
comme plongeurs, là, vous avez de la difficulté à attirer de la main-d'oeuvre,
des jeunes, par exemple?
M. Arsenault (Vincent) : Oui,
définitivement, parce que démographiquement, de toute façon, on se bat... notre
industrie se bat avec toutes les autres industries également, là. Donc, on a de
la difficulté à recruter, c'est clair, là.
M. Meunier (François) : Je
peux me permettre d'ajouter peut-être...
La Présidente (Mme Chassé) :
En conclusion.
M. Meunier (François) :
...sachez que la situation présentement, elle n'est pas propre à la
restauration, là. On cherche des pilotes d'avion, on cherche des chauffeurs
d'autobus à la STM, payés 50 000 $, 60 000 $ par année, on
cherche des enseignants, on cherche des préposés aux bénéficiaires...
La Présidente (Mme Chassé) :
Ça conclut.
M. Meunier (François) :
...l'enjeu de pénurie, là, c'est un enjeu d'accessibilité...
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci.
M. Meunier (François) : ...de
personnes, et c'est ce qui manque au Québec présentement.
La Présidente (Mme Chassé) :
Je cède maintenant la parole à la députée de Gaspé.
Mme Perry Mélançon : Merci.
Merci, Mme la Présidente. Donc, c'est très clair, hein, comme exposé. On
s'était déjà d'ailleurs parlé de cette réalité-là dans le domaine de la
restauration, et, comme vous le dites, ça touche d'autres secteurs d'activité
également.
Juste chez nous, à titre d'exemple, bon,
l'industrie touristique est très présente, mais il y a aussi le domaine éolien,
qui cherche beaucoup de main-d'oeuvre, il y a la pêche, et puis la pêche, bien,
ça tombe un peu en début... en fin de saison du printemps et en début d'été,
donc c'est de la main-d'oeuvre qui pourrait être ensuite réembauchée dans votre
industrie, et puis qu'on ait plus de semaines de travail à leur offrir, dans le
fond. Donc, c'est ce qu'ils souhaitent et c'est ce que nous souhaitons aussi.
Donc, je comprends que d'assouplir les
conditions, bien, ça passe par ça. Alors, je vois que vous êtes en faveur de
rapatrier tous les pouvoirs, le plus de pouvoirs en termes d'immigration. Donc,
qu'on aille le chercher du fédéral, ce que mon collègue de Nelligan n'a pas
l'air de croire, parce qu'il nous parlait que c'était de compétence fédérale,
mais je pense qu'il faut vraiment en avoir le maximum.
Donc, ce n'est pas... c'est des
commentaires, comme vous voyez, là. Je connais vraiment votre réalité et puis
je me demandais simplement : Le domaine agricole, est-ce que vous savez de
quelle manière ils ont été chercher ce droit-là? Est-ce que vous avez déjà été
en contact avec eux pour comprendre un peu mieux la réalité?
M. Meunier (François) :
...sans nécessairement connaître parfaitement tous les enjeux de l'agriculture,
mais sachez que les programmes de travailleurs étrangers temporaires ont été
mis sur pied essentiellement pour répondre aux besoins du milieu agricole,
au... du milieu maraîcher, et les services offerts aux gens de l'agriculture,
là, existent depuis au-delà de 30 ans, et ont extrêmement structuré...
Et ce qu'on n'est pas... On n'est pas
venus ici vous dire que ces gens-là n'avaient pas de contrainte ou ne devaient
pas répondre à certaines exigences, mais on accorde des assouplissements au
milieu agricole, qui aujourd'hui sont très certainement... sont légitimement...
pourraient être légitimement accordés à d'autres entreprises, notamment les
entreprises du secteur touristique, dont la restauration.
La Présidente (Mme Chassé) :
...
Mme Perry Mélançon : ...et je
conclurais en disant que, oui, ça passe par l'immigration pour résoudre les
problèmes de main-d'oeuvre, mais il y a aussi des mesures qu'on attendait,
parce que vous dites : 14 000 postes à pourvoir en pleine saison
touristique. Donc, il y a aussi d'autres ministères qui auraient peut-être dû
mettre un peu plus d'efforts avant ce début de saison là. Donc, le travail
continue à ce niveau-là. Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci. Ça termine l'exposé. Merci pour votre contribution à la commission. Je
suspends temporairement la commission pour permettre au prochain groupe de
prendre place.
(Suspension de la séance à 11 h 45)
La Présidente (Mme Chassé) :
...la commission. Je suspends temporairement la commission pour permettre au
prochain groupe de prendre place.
(Suspension de la séance à 11 h 45)
(Reprise à 11 h 47)
La Présidente (Mme Chassé) :
Alors, nous sommes de retour. Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants
de la Financière Banque Nationale, Auray Capital, Capital Sherbrooke Street,
Industrielle Alliance Valeurs mobilières et Rennaissance Capital. Je vous
rappelle que vous disposez de 10 minutes pour l'exposé et que nous procéderons
ensuite à une période d'échange. Et je comprends que nous avons aussi une
présentation qui va accompagner votre exposé. Je vous invite à tout d'abord
vous présenter.
M. Leblanc (Louis) : Bonjour.
Bonjour, Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Chassé) :
Bonjour.
M. Leblanc (Louis) : ...M. le
ministre, membres de la commission. C'est un réel plaisir pour nous d'être ici aujourd'hui
et j'aimerais me permettre de présenter mes collègues à la table. À mon extrême
droite est Marc Audet qui est président et chef de la direction d'Auray
Capital, membre du groupe Raymond Chabot Grant Thornton et j'ai Jean-Pierre
Lessard qui est associé fondateur d'Aviseo Conseil et ainsi que moi-même, Louis
Leblanc, premier vice-président à la Financière Banque Nationale.
Ce qu'on aimerait faire, en considération
du temps qui nous est imparti, c'est inviter tout de suite Jean-Pierre à faire
une présentation sur les impacts financiers du programme investisseurs
immigrants qui a été, je le rappelle, financé par cinq institutions financières
qui représentent approximativement un petit peu plus de 50 % de toute
activité dans le dossier investisseurs immigrants. Donc, il y a Auray Capital,
il y a Industrielle Alliance Valeurs mobilières, il y a Rennaissance Capital,
il y a Sherbrooke Street Capital ainsi que nous, la Financière Banque
Nationale. Alors, à la suite de la présentation de Jean-Pierre, naturellement
ce sera un grand plaisir de répondre à vos questions. Jean-Pierre.
M. Lessard (Jean-Pierre) : À
mon tour de vous saluer, Mme la Présidente, M. le ministre, Mmes, MM. les
députés. Donc, l'objectif de la présentation, c'est vraiment de faire une base
de faits sur la contribution économique du Programme des immigrants
investisseurs. Vous allez m'accuser d'être un mauvais scénariste, mais je
commence avec la conclusion. Donc, nos travaux vont montrer que le
programme représente un support manifeste pour les PME en région et à
dominantes manufacturières. On parle de retombées économiques de
1,5 milliard de dollars, et on souligne également que ça représente des
revenus significatifs pour le gouvernement. Donc, on a fait, entre mai... entre
février et mai dernier, une étude exhaustive et indépendante des impacts
économiques du programme. Alors, on s'est intéressé aux 10 dernières
années, donc de 2009 à 2018. Bien sûr, on s'est concentré sur les retombées
économiques, les revenus des gouvernements et les effets structurants. Ce n'est
pas une analyse bénéfice-coût, ce n'est pas une analyse de programme, on ne
regarde pas l'efficacité d'efficience, mais c'est certainement un élément
important d'une analyse bénéfice-coût, donc on ne pourrait pas lui reprocher, à
cette étude-là, ce qu'elle prétend ne pas être.
• (11 h 50) •
Si je prends un 30 secondes, même
pas, là, parce qu'il n'y a pas beaucoup de temps, dans le fond, le Programme
des immigrants investisseurs prévoit que l'immigrant va prêter 1,2 million
de dollars sans intérêts pendant cinq ans à Investissement Québec et
Investissement Québec va faire fructifier cet argent-là. Alors,
essentiellement, si on a 1,2 million de dollars, on va parler de
165 000 $ en intérêts qui s'en va comme argent neuf...
M. Lessard (Jean-Pierre) :
...Programme des immigrants investisseurs prévoit que l'immigrant va prêter 1,2 million
de dollars sans intérêts, pendant cinq ans, à Investissement Québec et
Investissement Québec va faire fructifier cet argent-là. Alors,
essentiellement, si on a 1,2 million de dollars, on va parler de
165 000 $ en intérêts, qui s'en va comme argent neuf au gouvernement.
Donc, c'est cet impact-là, que nous, qui nous intéresse. Ensuite, il y a une
redistribution entre différents acteurs du programme, comme vous voyez là, mais
la part du lion, ça va dans les entreprises, et c'est vraiment ces aspects-là
qui vont nous intéresser pour l'impact économique.
Donc, on parle de 17 000 prêts
qui ont été faits à Investissement Québec dans les 10 dernières années.
Ces prêts-là, qu'est-ce qu'ils ont permis d'avoir en rendements? On parle de
1 milliard de dollars sur 10 ans. Donc, c'est de l'argent neuf. Il
n'y a pas d'autres façons de le présenter, c'est 100 millions par année
d'argent à la disposition, dans le fond, du Québec. De cet argent-là, on parle
de 477 millions qui sont allés aux entreprises directement. Je sais que ça
intéresse plusieurs, parmi vous, on va parler de 85 % des montants qui
sont allés en région, donc hors Montréal, et 80 % dans le secteur
manufacturier. Ici, on va convenir que c'est un billet de sélection, parce que
c'est une des dispositions du programme, donc il répond aux cibles qu'il avait,
et c'est vraiment les entreprises manufacturières en majorité.
Quand on parle de PME, bien, vous voyez
qu'on a 70 % des entreprises qui ont moins de 10 millions de chiffre
d'affaires. Alors, on ne parle pas de multinationales à coups de milliards de
dollars, ce sont vraiment de petites entreprises. Vous voyez la répartition
ici, on a même le quart des entreprises qui ont moins de 5 millions de
chiffre d'affaires, donc ce sont vraiment des PME.
Qu'est-ce que ça a donné comme support aux
entreprises? On parle de 3 750 projets d'investissement sur
10 ans, donc presque 400 par année, ce qui est fort intéressant. Les
effets des investissements au total sur 10 ans : 8 milliards de
dollars, donc ce n'est pas à négliger. Il y a une sagesse aussi, dans ces
contributions-là : en moyenne, on parle d'un peu moins de 6 %. Donc,
la subvention qui est accordée dans l'ensemble du projet, c'est 6 %. En
termes absolus, en termes monétaires, c'est 130 000 $. Alors, on voit
encore, ce n'est pas des milliards qu'on prête, là, ou qu'on va donner en
subvention, c'est 130 000 $ sur des projets moyens de
2,1 millions de dollars en termes d'investissement.
Donc, on comprend que ça peut être
important d'avoir cette subvention-là de 130 000. Si on est une entreprise
qui a 8 millions, 10 millions de chiffre d'affaires. Mais quand on a
un projet d'investissement de 2 millions, donc ça peut être un déclencheur
important pour passer en action sur le projet d'investissement.
Pour calculer les retombées économiques,
on avait trois grandes composantes. Les contributions aux entreprises, là,
essentiellement, notre 477 millions de dollars, sans le programme, bien,
on n'aurait pas cette injection d'argent là, je vais y revenir tantôt. On parle
des activités de fonctionnement supplémentaires et aussi des dépenses des
intermédiaires financiers qui, dans l'ensemble des contributions, des dépenses
qu'on a calculées, représentent 18 %.
Je passe rapidement, mais c'est un élément
important de l'étude, on a fait une enquête auprès de 200 entreprises qui ont
bénéficié du programme, O.K.? On en était vraiment contents, alors on les a
questionnés, à savoir, bien : Ça va durer combien de temps, votre
remboursement? Puis qu'est-ce que ça a permis comme activités supplémentaires?
Donc, on sait... on a attribué au programme cette composante-là d'activités
supplémentaires, mais on l'a plafonnée dans la durée, durée de remboursement du
projet.
Également, bien, on n'était pas... on
appelle ça, dans les études d'impact économique, de centrer les dépenses. Bien,
on a demandé : Est-ce que vous auriez fait le projet s'il n'y avait pas eu
de programme? Bien humblement, bien, les entreprises ont dit : À
60 %, on l'aurait fait quand même. Mais il reste que 40 % que, eux,
ils ne l'auraient pas fait. Donc, on a gardé ce 40 % là des dépenses
supplémentaires, on l'a attribué aux retombées économiques.
Qu'est-ce que ça donne? Donc,
1,5 milliard de retombées économiques. Vous voyez, presque un peu moins du
deux tiers en direct, donc c'est dans les PME, et les autres, c'est
l'écosystème de fournisseurs qui aussi en bénéficie. On parle que 88 % des
effets directs sont en région, 17 000 emplois sur 10 ans de
programme qui sont supportés par le programme, et des salaires moyens de
50 000 $. Je vous rappelle, ce sont des PME, principalement dans le
secteur privé, donc des salaires à 30 $ de l'heure, ce n'est pas rien.
Les revenus des gouvernements maintenant.
On a calculé que, sur la période de 10 ans, on parle de 300 millions
de dollars, donc un peu moins de 31 millions de dollars. Vous voyez, une
portion qui vient de l'impôt sur le revenu des travailleurs dont on a parlé
tout à l'heure, une autre portion de 34 millions et 47 millions qui
vont respectivement au ministère de l'Immigration et d'Emploi-Québec, issues de
la redistribution prévue au programme.
Je vais revenir sur l'excédent ici, qu'on
voit, le 112 millions pour le ministère de l'Immigration et
240 millions, qu'on a mis à part, d'Investissement Québec, parce qu'on ne
pense pas que c'est quelque chose qui va être récurrent nécessairement, mais
comment il s'explique? C'est que quand une subvention est autorisée, bien, ça
prend quatre ans avant qu'elle soit déboursée et, sur cette période de temps
là, Investissement Québec va faire aussi fructifier l'argent. Donc, elle a eu
une bonne performance, dans les 10 dernières années, là, de la période de
notre analyse et, bon, ça a monté à 276 millions donc, sur notre période,
240 millions au total, ce qui est...
M. Lessard (Jean-Pierre) :
...ça prend quatre ans avant qu'elle soit déboursée, et, sur cette période de
temps là, Investissement Québec va faire aussi fructifier l'argent. Donc, elle
a eu une bonne performance dans les 10 dernières années, là, d'après notre
analyse, et, bon, ça a monté à 276 millions, donc, sur notre période, 240 millions
au total. Ce qu'il est intéressant de savoir aussi, c'est qu'en 2018 Investissement
Québec s'est versé le 200 millions en dividendes sur des revenus nets
dégagés, là, d'à peu près 265 millions.
La mécanique des excédents du ministère
est intéressante, c'est que, quand un immigrant investisseur soumet sa
candidature, ils doivent défrayer 15 000 $. Les coûts à peu près
moyens calculés de traitement pour le ministère, c'est 4 000 $. Donc,
pour chaque traitement, il y a 11 000 $ en excédent qui s'en va au
ministère. Or, ce ne sont pas toutes les candidatures qui sont acceptées, on a
un taux d'acceptation de 60 %. Et, sur l'ensemble de la période, on a
calculé 112 millions d'excédent. Mais avant de faire une moyenne annuelle,
on voit que dans les dernières années on est plus entre 15 et 20 millions
de dollars qui s'en vont comme revenu au ministère.
Alors, en conclusion, Mme la Présidente,
on a souligné dans notre rapport quatre grandes catégories d'effets qu'on dit
un peu plus structurants, quand on parle d'effet de levier, bien, ça augmente
la probabilité de réalisation des projets d'investissement, ça réduit les
contraintes d'accès au crédit de PME, c'est une réalité. Il y a plusieurs études
qui ont documenté cet aspect-là. En région, il y a vraiment une cohérence avec
les stratégies de développement régional du gouvernement, notamment avec la
démarche ACCORD. Ça contribue à une base manufacturière, là, puis il y a
plusieurs effets bénéfiques qui suivent ça, notamment en recherche et
développement, en innovation et même en stabilité économique pour ces
régions-là.
Et on voudrait en conclusion, là,
souligner le caractère redistributif du programme dans le sens qu'on demande à
des immigrants mieux nantis qui indirectement vont financer des programmes pour
des immigrants qui le sont moins. Merci de votre attention.
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci à vous. Ça conclut votre exposé, et on débute la période d'échange. M. le
ministre, la parole est à vous pour un bloc d'échange pour le parti formant le
gouvernement de 15 min 45 s.
M. Jolin-Barrette : Merci,
Mme la Présidente. M. Leblanc, M. Audet, M. Lessard, bonjour. Merci d'être à
l'Assemblée nationale pour la présentation de votre mémoire.
Je pense que vous avez assisté hier aux
présentations d'autres groupes qui sont des intermédiaires financiers. Je vous
savoir, là, dès le départ, comment ça se déroule, le recrutement des candidats
comme immigrants investisseurs à l'étranger, là, pour les cinq firmes que vous
représentez qui font des dossiers d'immigrants investisseurs? Comment est-ce
qu'on les recrute de l'étranger?
M. Audet (Marc) : Il faut
comprendre qu'on est, en premier, dans une compétition internationale, O.K.,
donc on n'est pas la seule juridiction à offrir ce programme-là, il y en a une
quarantaine à travers le monde. Donc, il faut se démarquer. Donc, en premier,
on est des ambassadeurs du Canada, après ça on est des ambassadeurs du Québec,
c'est qu'est-ce qu'on fait comme travail. Donc, notre rôle, c'est d'aller
convaincre les gens que la meilleure place à s'établir éventuellement, c'est le
Canada et le Québec. Donc, ceci étant dit, après ça, c'est tous les attributs
qui vont avec le programme par lui-même, donc l'effet qu'on peut... au niveau
de l'option de financement, les délais en tant que tels. Donc, le démarchage se
fait par... on a développé au cours des 30 dernières années un réseau à travers
le monde, chez nous, dans plus de 100 pays en tant que tels, des gens qui nous
aident, parce qu'on ne peut pas être partout en même temps, même si nous, on
fait partie d'un groupe international qui est Grant Thornton, on a un réseau
dans 135 pays, donc on utilise ce réseau-là notamment pour aller chercher la
clientèle. Donc, chacun des recruteurs, des intermédiaires financiers ont
développé un réseau comme ça qui font du démarchage avec nous et qui nous
aident à nous approvisionner en dossiers, et nous, on fait tout le filtrage par
la suite des dossiers qui sont demandés selon les règles du MIDI.
M. Jolin-Barrette : Et donc,
à l'étranger, est-ce qu'on vous faites de l'achat de dossiers? Dans le fond,
là, comment ça fonctionne, vous faites affaire avec des consultants là-bas qui
eux ciblent déjà des gens qui pourraient vouloir investir dans... qui
voudraient être sélectionnés dans le cadre d'immigrants investisseurs, puis là
il y a de l'achat de dossiers là-bas?
M. Leblanc (Louis) : Ce n'est
pas vraiment de l'achat de dossier, on a, à la Banque Nationale, on a des
mandataires avec lesquels on travaille qui sont soit des consultants en
immigration à l'étranger, des avocats qui, quand on donne des mandats, qui sont
partenaires d'affaires pour nous au niveau local, puis on va nécessairement,
sur le revenu qu'on génère, on va leur verser une partie de notre revenu en
termes de démarchage qu'ils vont faire pour nous à l'étranger. Alors, Marc et
moi, et tout le monde, on voyage sur une base régulière, près de cinq mois par
année, mais c'est ce réseau de démarcheurs avec lesquels on travaille qui vont
identifier les clients comme tels et qui vont nous référer pour le ...
investisseurs immigrants.
M. Jolin-Barrette : O.K.
Revenons aux revenus. Dans vos pratiques, là, avec vos contingents que vous
avez, là, il y en a combien en pourcentage à peu près qui investissent véritablement
le 1,2 million, là, que l'immigrant investisseur décaisse vers
Investissement le 1,2million? Est-ce qu'ils vont davantage vers les facilités
bancaires ou ils investissent le 1,2 million?
• (12 heures) •
M. Leblanc (Louis) : Je vous
dirais que la grande majorité des clients vont aller vers le financement qu'on
offre à...
12 h (version non révisée)
M. Jolin-Barrette : ...combien
en pourcentage à peu près qui investissent véritablement le 1,2 million,
là, que l'immigrant investisseur décaisse vers Investissement le 1,2million?
Est-ce qu'ils vont davantage vers les facilités bancaires ou ils investissent
le 1,2 million?
M. Leblanc (Louis) : Je vous
dirais que la grande majorité des clients vont aller vers le financement qu'on
offre à l'investisseur comme tel sauf... naturellement, l'option initiale,
c'est 1,2 million l'investissement. Il y a peut-être, je dirais, à peine 5 %
des clients qui vont aller sur l'option de 1,2 million, l'autre, ils vont
choisir l'option de financement. Ce qu'on doit comprendre, par exemple, parce
que je sais que la question est venue hier, le commentaire que j'aime tout le
temps faire, c'est un petit peu comme le domaine immobilier, ce n'est pas parce
que les gens doivent acheter une maison au comptant que ça a une valeur
économique comme telle au niveau... comme s'ils prennent une hypothèque. Alors,
dans le dossier investisseurs, c'est vrai que la grande majorité des gens
d'affaires, c'est des gens qui sont très riches en termes d'actifs, mais
souvent que l'actif est immobilisé auprès des différentes entreprises qu'ils
ont. Alors, ils vont vouloir choisir l'option de financement que les
institutions financières vont offrir. Et le confort qu'on a, nous, les
institutions financières d'offrir des financements, c'est à cause de la qualité
de la dette qu'on souscrit. Si on a un billet d'Investissement Québec qui est
souscrit de par la qualité de la dette, on s'arroge de la dette de
l'investisseur et on fait un prêt à l'immigrant à raison de son placement.
M. Jolin-Barrette : Et hier,
on nous a dit que le coût associé à ça était d'environ... entre
300 000 $, 350 000 $ pour l'immigrant investisseur, est-ce
que c'est exact?
M. Leblanc (Louis) : Oui, pour
le nouveau programme, on parle de 1,2 million.
M. Jolin-Barrette : À
1,2 million.
M. Leblanc (Louis) : C'est ça,
1,2 million. Comme on a mentionné hier, à 800 000 $, c'est
environ 200 000 $ de coûts... l'option de financement qu'on offre à
l'investisseur.
M. Jolin-Barrette : O.K.
Donc, l'immigrant investisseur, lui, toute sa démarche lui coûte environ
350 000 $, et puis l'intermédiaire financier, par le biais d'un
prêteur, va faire le placement de 1,2 million à Investissement Québec.
M. Leblanc (Louis) : C'est ça.
En fait, le client, ce qu'on dit toujours, il a deux choix. Le client peut dire
si... il pourrait dire : Moi, je mets 1,2 million, je n'ai aucun
rendement d'intérêts pendant cinq ans, donc tu vas avoir un coût de capital sur
cinq ans, dépose 1,2, récupère 1,2 au bout de cinq ans, ou choisit l'option de financement
immédiat. Et la grande majorité... on l'offre aux investisseurs, tous les
clients. Et pourquoi ils choisissent? C'est parce que les gens préfèrent savoir
quel est leur coût immédiat et de ne pas immobiliser le capital. Parce que la
règle d'or à l'international, c'est le capital de l'investisseur. Le gars va
dire : Écoute, mettre 1,2 million sans rendement pendant cinq ans
pour récupérer mon 1,2, je préfère mettre 350 000 $, que la banque me
finance le reste, et donc la contribution financière qui se fait chez
Investissement Québec est de 1,2 million.
M. Jolin-Barrette : O.K. Dans
la présentation tout à l'heure de M. Lessard, vous disiez : C'est de
l'argent neuf. C'est un flux monétaire qui est généré, mais 95 % des gens
vont prendre l'option de se financer avec des institutions financières. Quand
vous dites : C'est de l'argent neuf, dans le fond, ça crée une
disponibilité d'argent, il y a des banques qui achètent... bien, en fait, qui
fournissent à Investissement Québec 1,2 million qui, par la suite,
achètent des obligations. Alors, est-ce que vous êtes d'accord avec moi que
c'est plus un flux monétaire que de l'argent neuf qui provient de l'étranger?
M. Lessard (Jean-Pierre) : En
fait, c'est l'effet de richesse. S'ils n'avaient pas cet argent-là, le capital,
bien, on n'aurait pas la possibilité de faire les rendements dessus. Alors,
c'est dans ce sens-là que c'est vraiment de l'argent qui est nouveau dans
l'économie. Il n'y a pas d'autre façon vraiment de le présenter. S'ils
n'étaient pas là, s'il n'y avait pas ce capital-là, peu importe de la façon
qu'ils vont articuler le financement, là, bien, on n'aurait pas la capacité
d'avoir ces nouveaux rendements-là.
M. Jolin-Barrette : O.K.,
mais ce que je veux dire, là, l'argent, elle ne provient pas de l'étranger,
c'est de l'argent qui est au Québec qui est placé chez Investissement Québec.
M. Lessard (Jean-Pierre) :
Exact. Mais si c'était... c'était quand même une garantie qui vient de
l'étranger, donc il y a une source qui vient vraiment de l'extérieur. Si ce
n'était pas là, on n'aurait pas 100 millions de rendement pour les
10 dernières années du programme.
M. Jolin-Barrette : O.K.
M. Audet (Marc) : Si vous
permettez, j'aimerais peut-être renchérir là-dessus. Le 350 000 $,
plus ou moins, qu'on parle aujourd'hui, oui, il vient de l'étranger en tant que
tel, l'autre portion est financée techniquement par les institutions du Québec.
Comme Louis mentionnait, on transfère le 1,2 million, mais, de l'autre
côté, ces gens-là pourraient financer de l'étranger. Donc, les gens qui ont une
propriété qui valent 3 millions, ils pourraient aller à la Bank of China
et prendre un prêt de 1,2 million et nous envoyer le 1,2. Nous, on a
développé, comme industrie, cette facilité-là, compte tenu des billets, la
garantie qu'on avait à donner. Donc, techniquement, ces gens ont la flexibilité
quand même d'emprunter dans leur pays, sur leurs propres actifs.
M. Leblanc (Louis) : Si je
peux permettre, juste en complément aussi, par exemple, la Banque Nationale,
pour prendre pour argument, bien ce n'est pas de l'argent neuf comme tel, on
prête au niveau de Montréal. Si jamais on disait : Bien, écoute, il n'y a
plus de prêts qui se font comme tel, on doit aller «full cash», de par, encore
une fois, la qualité de la dette, bien je ferai moi-même mon bureau de Londres
ou le bureau de Hong Kong faire un prêt à l'investisseur, parce qu'encore une
fois, on souscrit en rapport à la qualité de la dette. La qualité de la dette
québécoise est telle que toute institution financière, HSBC, Standard, Charter,
Barclays seraient prêts à faire des prêts et là, et là, ce qu'on verrait... on
ferait si on verrait l'écosystème de financement à l'international, plutôt que
de faire bénéficier les firmes montréalaises de ce financement-là.
M. Jolin-Barrette : Au niveau
des subventions, dans le fond... Là, l'argent est placé, il y a des revenus
d'intérêts annuellement et ces intérêts-là sont donnés sous formes de
subventions non-remboursables aux différentes entreprises. Les...
M. Leblanc (Louis) :
...les firmes montréalaises de ce financement-là.
M. Jolin-Barrette : Au
niveau des subventions, dans le fond, là, l'argent est placé, il y a des
revenus d'intérêts annuellement, et ces intérêts-là sont donnés sous forme de
subventions non remboursables aux différentes entreprises. Les intermédiaires
financiers sur les revenus, depuis la dernière entente, ont... tirent 22 %
des revenus d'intérêts sur ces placements-là. Donc, dans la séquence, là,
l'intermédiaire financier fait un revenu sur le 350 000 $, paie les
courtiers à l'international ou les consultants, les avocats avec qui il a fait
affaire et également se retrouve avec une cote sur le 1,2 million, en termes
de revenus, au niveau du 22 %. Et hier les gens nous disaient
également : Bien, nous, on a un levier pour décider quelles entreprises
bénéficieront de la subvention. Donc, les intermédiaires financiers décident
quels dossiers vont bénéficier de la subvention.
Je voudrais juste avoir votre vision par
rapport à ça. En quoi les intermédiaires financiers doivent décider quels
dossiers doivent être priorisés pour obtenir une subvention d'un programme de
subventions d'Investissement Québec?
M. Leblanc (Louis) :
...qu'en fait l'intérêt principal de la banque de participer au dossier
investisseurs immigrants, c'est justement d'avoir accès à la subvention. Si on
nous disait, nous : Vous ne faites plus les subventions comme telles, vous
participez seulement à la portion de financement, on s'interrogerait sur la
pertinence de notre participation dans le dossier investisseurs immigrants. Si
je remonte... j'ai commencé, moi, à faire la création du programme en 1986. Le
rôle de... On est des banquiers, le rôle important pour nous, c'est au niveau
de l'investissement.
Alors, ce qu'on veut faire, le plus
important, c'est de pouvoir servir nos clients corporatifs en termes de
subventions. Et la façon dont on travaille à la banque, c'est via le service
aux entreprises. Moi, j'ai ma ligne d'affaires, qui est monde international. Ce
n'est pas moi qui décide des subventions comme telles. Nous, on verse l'argent
au service aux entreprises, et c'est le service aux entreprises qui va donner
les subventions dans les différentes régions du Québec, dépendant des relations
qu'ils ont avec les clients corporatifs puis des différentes approches qui sont
faites par les clients comme tels.
M. Jolin-Barrette :
Donc, ça signifie que, pour les intermédiaires financiers, là, qui sont des
institutions financières, ça donne un avantage comparatif sur la concurrence,
sur une autre banque qui ne participe pas. Parce que, exemple, à la Nationale,
bien, puisque vous participez au programme, vous avez accès à ce
financement-là. Donc, quand vient le temps... que quelqu'un veut emprunter chez
vous, il arrive avec son dossier d'affaires, il va voir la Nationale, il va
voir, supposons, la Banque Simon Jolin-Barrette, puis, moi, je ne suis pas un
intermédiaire financier, je n'ai pas accès à ce financement-là. C'est attrayant
pour le client qui va faire affaire chez vous parce qu'il va avoir une partie
de subvention qui va être non remboursable.
M. Leblanc (Louis) : Absolument,
et je trouve tout à fait normal que la Banque Nationale, qui est la plus
importante banque canadienne, siège social effectif à Montréal... qu'elle ait
un avantage comparatif, effectivement, dans un programme québécois. Je trouve
ça tout à fait en symbiose. Alors, qu'on compétitionne la Banque Royale ou la
Banque de Montréal, qui n'ont pas le réseau que nous avons au Québec, c'est
d'encourager une institution québécoise, et, pour moi, je suis tout à fait en
accord avec ça.
M. Audet (Marc) : Si vous
me permettez également, si demain matin, je ne sais pas, Investissement Québec
prenait ce rôle-là directement, on reviendrait peut-être à la même case de
départ parce que, comme Louis vient de mentionner, le portefeuille commercial
de prêts au Québec, Nationale a sa portion, Desjardins a sa portion, et tout
ça. Donc, les projets qu'ils vont soumettre, les banquiers, ça va être
Nationale, ça va être Desjardins, BMO en tant que tels, et la distribution va
se refaire en tant que telle, qui serait peut-être même plus avantageux pour
certaines institutions que d'autres. Donc, il faut garder ça en considération
aussi.
M. Jolin-Barrette : Mais
ce que vous nous dites, vous dites : Bien, écoutez, pour nous, parce qu'on
a notre siège effectif à Montréal, c'est avantageux parce que ça amène des
retombées pour une banque qui a son siège à Montréal. Mais, dans le Programme
des immigrants investisseurs, il y a des institutions financières qui ne sont
pas basées avec leur siège social à Montréal où, comment je pourrais dire, que
les décisions sont principalement prises à partir du siège dans une autre
province canadienne et qui font partie du Programme des immigrants
investisseurs.
M. Audet (Marc) : L'an
dernier, le MIDI a mis un nouveau d'avoir de siège au Québec, qu'on salue.
Donc, je pense que c'est une première démarche dans le bon sens en tant que
tel. C'est un programme québécois, et je pense que vous voulez avoir les
acteurs québécois autour de la table. Donc, je pense...
M. Jolin-Barrette : Mais
ce que je veux dire, au niveau du financement, le financement peut être fait
par une institution financière qui a sa principale place d'affaires dans le
reste du Canada.
M. Audet (Marc) : Oui,
pourrait, oui.
M. Jolin-Barrette : O.K.
Au niveau des revenus d'intérêts de 22 %, expliquez-moi pourquoi les
intermédiaires financiers doivent avoir accès à des revenus aussi importants
sur les 1,2 million qui sont placés.
• (12 h 10) •
M. Audet (Marc) : ...
Chez nous, notre équipe, chez Auray Capital, on est 25 personnes. On a une
équipe avec... gens de 12 nationalités en tant que telles. On a des
bureaux partout, on a... on travaille avec... on a développé un réseau
d'agents. Il faut les... comme Louis mentionnait, il faut... ces agents-là, il
faut...
M. Audet (Marc) : ...chez
nous, notre équipe, chez Auray Capital, on est 25 personnes. On a une
équipe avec origine de 12 nationalités en tant que telles. On a des
bureaux partout. On travaille avec... On a développé un réseau d'agents. Il
faut les... comme Louis mentionnait, il faut... ces agents-là, il faut les
chouchouter parce qu'ils sont sollicités par d'autres programmes, que ce soit
le Portugal, que ce soit les États-Unis, que ce soit Malte et Antigua, «name
it», il y en a 40. Et donc, il faut s'assurer de préserver la relation.
Donc, il y a des coûts de développement
d'affaires avec ces gens-là. Par la suite, toute l'infrastructure de l'équipe
comme on a chez nous en tant que tel, ce n'est pas nécessairement des salaires
à 20 000 $ par année. On a des juriscomptables, on a des chefs de
conformité, on a un chef de finance. Il ne faut pas oublier qu'on est
réglementé par l'OCRCVM qui est le plus gros «regulator» au Canada. On est
150 firmes au Canada qui sont réglementées. On doit soumettre nos états
financiers à chaque mois en tant que tel. Donc, on des coûts élevés. On est...
Sans compter que tous les coups d'épée dans l'eau qu'on donne, parce que les
dossiers qu'on va chercher à l'étranger, on ne les prend pas tous. Je vous
donne un exemple. Actuellement, dans le... On est en train de déposer des
dossiers. On regarde au moins trois dossiers avant d'en prendre un. Donc, il
faut faire le travail. Puis celui qu'on prend, comme Jean-Pierre a mentionné,
il y a six ou sept chances sur 10 d'être accepté. Puis je ne suis pas payé
quand ce n'est pas accepté. Donc, notre coût est élevé en tant que tel par
dossier accepté.
M. Jolin-Barrette :
Donc, ce que je comprends de votre structure financière, c'est que pour... À
l'entrée, là, dans votre relation avec l'immigrant investisseur, c'est que le
300 000 $, 350 000 $, il est peut-être plus bas, mais vous
vous reprenez sur les revenus d'intérêt rattachés au placement, parce que vous
savez que, s'il est accepté, vous allez avoir des revenus de placement de
l'ordre de 22 %.
M. Leblanc (Louis) :
Effectivement, je pense que tous les revenus sont importants pour nous. Comme
mentionné, on compétitionne vraiment à l'échelle internationale. On est
compétitif. Ici, je vous dis, moi, depuis 33 ans, dans le business, ce qui
a vraiment changé, ce qui s'est amplifié, c'est la compétition internationale.
En 1986, la seule compétition qui existait à peu près, c'était l'Australie et
la Nouvelle-Zélande. Aujourd'hui, tu as environ 35 pays que ce soit en
Europe, que ça soit au niveau des Caraïbes, qui offrent des produits
d'immigration. Et, de là, j'argumenterais la valeur encore plus importante des
partenaires financiers d'expérience dans la quête de bons clients.
La Présidente (Mme Chassé) :
Il reste une vingtaine de secondes, M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Oui.
Bien, je vous remercie pour votre présentation.
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci. Ça termine le bloc d'échange avec le parti formant le gouvernement.
Maintenant, on passe à l'opposition officielle. M. le député de Nelligan, la
parole est à vous.
M. Derraji : Merci, Mme
la Présidente. Merci, monsieur, pour votre présence et la qualité de la
présentation. Ma première question, parce qu'on l'a eue hier aussi, j'aimerais
bien comprendre l'impact réel du Programme immigrants investisseurs sur les
PME. Hier, lors d'un échange, on voulait savoir concrètement c'est quoi
l'impact sur l'économie régionale, PME, manufacturier dans une région X au
Québec. Si vous avez un cas, mais concret, mais non nominatif. Vraiment, là, on
parle dans le fictif, un programme, mais avez-vous un exemple?
M. Lessard (Jean-Pierre) :
Bon, on a souligné tantôt qu'il y a l'aspect des subventions qui vont à
85 % dans les régions hors Montréal. On a 88 % des effets directs qui
sont aussi dans les régions hors Montréal. Donc, la structure du programme
ferait en sorte... C'est tous les secteurs qui sont visés, notamment le secteur
manufacturier, mais les activités sont souvent en région. Il y a... Par
exemple, si on prenait la Montérégie, bien, cette région-là va avoir
essentiellement sa part économique en termes de contribution. Si on en prenait
une autre comme la Gaspésie, bien elle va avoir deux fois son poids économique
en termes de contribution économique. Alors, ça illustre vraiment la puissance,
si on veut, des effets dans les régions. Dans notre rapport, on fait état de
deux projets, là. Il y a vraiment des entrepreneurs qui ont décidé à visière
levée d'exposer leur projet. On en avait un dans la région de
Saguenay—Lac-Saint-Jean et on en avait un autre qui était plus dans le secteur
manufacturier. Et les impacts sont très importants parce qu'ils disent :
Bien, probablement que mon projet d'investissement aurait été retardé si je
n'avais pas eu les sommes d'argent.
M. Derraji : Si je peux
résumer, l'impact, il est réel sur plusieurs régions, surtout le manufacturier.
M. Audet (Marc) : Tout à
fait. Tout à fait.
M. Derraji : Excellent.
Une deuxième question, c'est par rapport à l'inventaire. On sait que la
catégorie immigrant investisseur, on parle de plus ou moins 18 000 en
attente de la résidence permanente et des objectifs proposés par le
gouvernement à l'effet d'accueillir annuellement entre... de 3 300 à
4 300 personnes. Si on vous pose la question, vous proposez quoi pour
tempérer la situation? Ça serait quoi, votre solution ou votre proposition?
M. Audet (Marc) : Effectivement,
je dirais : C'est une décision quand même un peu difficile au niveau
global parce qu'il y a trois éléments à regarder au niveau du ministère. Tu as
le volet recrutement, tu as le volet sélection puis tu as le volet admission.
Donc, c'est un peu avec la géométrie que le ministère...
M. Derraji : ...ou votre
proposition?
M. Audet (Marc) :
Effectivement, je dirais : C'est une décision quand même un peu difficile au
niveau global parce qu'il y a trois éléments à regarder au niveau du ministère.
Tu as le volet recrutement, tu as le volet sélection puis tu as le volet
admission. Donc, c'est un peu avec la géométrie que le ministère doit jauger.
Actuellement, comme vous dites, il y a
5 000 dossiers en attente en admission, il y a plus ou moins 2 500
dossiers en attente de sélection, et là on va avoir une décision, parce que là
il va y avoir un moratoire sur le programme à la fin du mois, et donc le
gouvernement va avoir une décision à prendre : Est-ce qu'on recrute de
nouveau de nouveaux immigrants investisseurs pour en remettre sur l'inventaire
pour le bénéfice de nos entreprises?
C'est sûr que, comme Louis a mentionné
aussi plus tôt, si on décide de mettre un moratoire plus long, ça peut avoir
des impacts par la suite pour essayer de revendre le programme en tant que tel,
parce que les gens vont nous avoir oubliés en tant que tels. On est compétition
contre d'autres pays. Donc, il faut s'assurer d'avoir un recrutement sur une
base continue.
Mais, pour essayer d'accélérer, c'est sûr
qu'actuellement, je pense, la question à très haut niveau, là, à 3 000
pieds d'altitude, le problème, c'est justement le total d'admissions que le
gouvernement actuel regarde. Le problème part de là en tant que tel, parce que
tout découle par la suite dans les sous-catégories en tant que telles. Le
niveau est trop bas pour les admissions soulignées, pour les impacts
économiques en tant que tels.
M. Derraji : Vous avez soulevé
un point important, parce qu'on l'a vu pendant l'été, le ministère a mis un
moratoire par rapport au PEQ. Là, la situation que nous avons devant nous,
l'inventaire au Québec de 2 500, au fédéral, à peu près 5 000, si je
vous dis aujourd'hui : Le ministère et le ministre vont faire un
moratoire, ça serait quoi, les impacts? On s'en va dans le mur?
M. Audet (Marc) : ...on donne
juste les impacts. Actuellement, là, juste la décision de cette année de moins
traiter de dossiers versus l'impact économique... L'an dernier, Investissement
Québec a accordé 94 millions de dollars aux PME du Québec en 2018. Cette
année, on s'enligne pour moins de 50 millions, compte tenu qu'on a décidé
de faire de... moins de sélection.
Donc, ce 40 millions d'écart là,
c'est moins d'argent, peu importe si c'est le programme actuellement d'aide aux
entreprises, de support à PRIIME ou d'aider tout autre programme. Parce qu'on
peut moderniser le programme aussi, actuellement, le programme de subvention,
comment il est fait. On a vu les présentateurs avant, au niveau de la
restauration, qui cherchaient des crédits d'impôt ou autres, peut-être avec nos
immigrants investisseurs aussi, on pourrait peut-être profiter de leur argent
pour aider au recrutement international ou autre. Il faut être imaginatif, on a
une chance d'aller chercher, comme Jean-Pierre mentionnait, 100 millions
récurrents par année.
Donc, je pense qu'il faut... il va falloir
livrer le service, parce que ces gens qui sont en attente d'admission ont déjà
payé leurs frais, ont déjà contribué à l'économie du Québec, on ne peut pas les
faire attendre aussi longtemps que ça.
M. Derraji : Même question que
j'ai posée aux restaurateurs où vous faites référence, est-ce que, déjà, vous
avez eu des discussions avec le MIDI par rapport à ce ralentissement et
l'impact que ça cause sur l'économie québécoise? Est-ce qu'on vous a déjà
invité ou consulter du moment que vous êtes parmi les firmes les plus
importantes au Québec?
M. Audet (Marc) : Je vous
dirais, le ministère a mis en place un comité-conseil, au niveau de la
catégorie des gens d'affaires, en place. C'est sûr qu'on a eu un changement de
gouvernement, là, à l'automne, donc on a eu un premier comité sous le nouveau
gouvernement, il y a plus ou moins deux mois, le but étant justement
d'améliorer... notamment le premier comité était sur les francophones, comment
attirer davantage de francophones en tant que tels au niveau de la clientèle
gens d'affaires. C'est sûr qu'à notre niveau on n'est pas impliqués au niveau
de la main-d'oeuvre en tant que telle, temporaire, parce que, nous, on est au
niveau de la résidence permanente, mais c'est sûr qu'entre nous on a des idées
pour améliorer le programme.
M. Derraji : Ma question,
c'est que, si vous avez des idées sur la table, moi, aujourd'hui, notre rôle,
c'est comment on peut bénéficier de ce que vous avez, votre expertise. Hier, un
des intervenants a dit que, même les États-Unis veulent copier le modèle
québécois. Moi, j'irais, à la place du ministère, j'irais lancer un comité,
profiter de votre expertise du moment qu'il y ait des besoins, en créant
notamment, on l'a entendu tout à l'heure au niveau des restaurateurs. Et à
votre place, je lance l'invitation au ministère et à M. le ministre de
probablement évaluer la possibilité de vous écouter au-delà de la commission
parce que vous pouvez amener des solutions à notre économie québécoise.
Je sais que ma collègue a d'autres
questions, je vais, si ça ne vous dérange pas, M. le Président, lui céder la
parole.
Le Président (M. Lévesque,
Chauveau) : Merci beaucoup, M. le député de Nelligan. Mme la députée
de Bourassa-Sauvé, la parole est à vous.
Mme Robitaille : Dites-moi, M.
le Président, combien de minutes?
Le Président (M. Lévesque,
Chauveau) : Il vous reste 3 min 34 s.
Mme Robitaille : Merci.
Écoutez, je voudrais simplement que vous nous expliquiez... j'aimerais
comprendre, messieurs, la différence entre la sélection et l'admission de ces
investisseurs étrangers.
• (12 h 20) •
M. Leblanc (Louis) : La
différence, elle est vraiment importante, c'est à l'entrée versus la sortie,
c'est-à-dire qu'aux deux niveaux, c'est le vin du Québec qui intime sur la
sélection, la sélection, c'est combien d'individus nous devons sélectionner en
début de piste comme tel, et ensuite l'admission, c'est Québec qui intime le
fédéral en disant quels sont les degrés d'admission qu'elle amènerait avoir en
termes d'émission de visas canadiens. Alors, c'est vraiment l'entrée et la sortie.
Et, si on regarde, au fil des dernières années, il y a eu une dichotomie
entre le nombre de candidats sélectionnés et le nombre de candidats admis, qui
fait en sorte qu'il y a des délais qui sont dans... Pour rejoindre ce que Marc
disait tantôt, je pense que...
M. Leblanc (Louis) : ...c'est Québec
qui intime le fédéral, en disant : Quels sont les degrés d'admission qu'on
aimerait avoir en termes d'émission de visas canadiens. Alors, c'est vraiment
l'entrée et la sortie. Et si on regarde, au fil des dernières années, il y a eu
une dichotomie entre le nombre de candidats sélectionnés et le nombre de
candidats admis, qui fait en sorte qu'il y a des délais qui sont rendus... Pour
rejoindre ce que Marc disait tantôt, je pense que le but de notre présence
ici... On est des gens qui avons énormément d'expérience... Évidemment,
c'était, premièrement, d'asseoir... parce qu'il y a beaucoup de «qu'en
dira-t-on», beaucoup de rumeurs quant au dossier investisseurs immigrants.
C'est important, pour nous, comme institution, d'asseoir, je pense, le mérite
du dossier investisseurs immigrants. Une fois qu'on convient du mérite du
programme comme tel, ensuite regardons les problèmes que nous avons, nous, en
termes de démarchage. Et le problème numéro 1... Je dis tout le temps qu'en immigration,
il y a trois grands problèmes de base : les délais, premièrement, deuxièmement,
les délais, et troisièmement les délais. C'est essentiel. Et là on est dans un
univers compétitif à l'échelle internationale et on se retrouve dans des situations
où des gens ont fait des placements, mais ils attendent trois, quatre, cinq ans
pour pouvoir avoir le visa fédéral pour rentrer au Canada, et ça devient très,
très difficile au niveau compétitif sur la scène internationale.
Mme Robitaille : Et pendant ce
temps-là, bon, il faut comprendre qu'en attente comme ça ils ont déjà payé
leurs frais, donc le Québec en profite malgré tout, malgré l'attente de ces
gens-là, il y a quand même les retombées économiques.
M. Leblanc (Louis) : Non seulement
les frais, mais les retombées économiques, c'est-à-dire quand les clients sont
acceptés, lors de l'émission du CSQ, c'est à ce moment-là qu'on demande de
faire le placement comme tel, donc c'est là que tout... nous profitons, la société
québécoise, le gouvernement, les institutions financières, mais le plus important,
les PME québécoises, les placements se font à ce moment-là, et le client est en
attente. Et vous avez compris hier un petit peu la situation qui devient très
difficile, c'est qu'il y a des situations pendant lesquelles les clients vont
jusqu'au terme de leurs placements de cinq ans et, au terme du cinq ans, ils
n'ont pas encore reçu de visa d'entrée au Canada. Donc, les gens ont fait une
contribution complète à ce qu'on avait demandé sans avoir le résultat, qui est
le visa canadien.
Mme Robitaille : Encore là,
c'est une erreur, parce que souvent on pense : Ah oui, mais ces immigrants
investisseurs là, ils ont un «fast-track». Mais en fait ils n'ont pas de «fast
track» du tout, là, ils attendent.
M. Leblanc (Louis) :
Absolument. Au contraire, je vous dirais qu'à l'heure actuelle, en fait, sur
l'échelle internationale, c'est sans doute les dossiers québécois dans un
contexte d'immigration économique de gens fortunés où les délais sont les plus
longs à l'heure actuelle.
La Présidente (Mme Chassé) :
Il reste moins d'une minute.
Mme Robitaille : Je ne suis
pas une experte là-dedans, du tout, du tout, mais je vous écoute puis j'ai
écouté les groupes hier. Si je comprends bien, là, s'il y avait un moratoire
là-dessus, il y aurait... Ce serait une grave erreur de mettre un moratoire
là-dessus, il y a trop de retombées pour le Québec.
M. Leblanc (Louis) : Le marché
a horreur du vide. Alors, ce qui se produit, il y a vraiment une compétition, actuellement,
sur la scène internationale, si le Québec se retirait, ne serait-ce que pour quelques
mois, ça aurait un impact en termes de régénérer de l'intérêt en termes... Ce
qu'on recommande toujours, c'est une stabilité en termes de pouvoir vendre le
produit sur la scène internationale.
Mme Robitaille : Et vous
êtes... C'est la crédibilité, la cote du Québec, j'imagine, qui est remise en
cause, là. Si on suspend tout ça, c'est tout à recommencer après.
M. Leblanc (Louis) : Je pense
que collectivement on doit vraiment réfléchir. On a un problème de base qui est
celui des délais, à l'heure actuelle, l'absence d'arrimage entre la sélection
et l'admission. Il faut vraiment qu'on adresse cette situation-là. Mais aussi,
ce qu'on demande, c'est d'être très prudent de faire un arrêt substantiel du
dossier investisseurs immigrants sur la scène internationale.
Mme Robitaille : Sans faire de
moratoire.
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci, ça termine le bloc d'échange. Maintenant, je cède la parole au député de
Laurier-Dorion pour son bloc d'échange d'une durée de
2 min 30 s.
M. Fontecilla : Bonjour,
monsieur. Très rapidement, question de compréhension, est-ce que les volumes
d'admission sont corrélés avec les volumes... les seuils d'immigration du Québec?
M. Audet (Marc) : Si on
regarde le Québec, actuellement, si on regarde les cibles proposées pour 2020‑2022,
on parle de plus ou moins... je pense, de 13 % du poids au niveau des gens
d'affaires sur la totalité au niveau des admissions. On parle d'une quarantaine
de mille, versus 300 à 400. Il faut donc... Dans les gens d'affaires, on a les
immigrants entrepreneurs, les immigrants investisseurs. Donc, si on regarde
aussi la progression, au lieu d'augmenter, elle descend, donc si on regarde
l'estimé de 2020‑2022, on tombe sous la barre des 13 % en tant que tel,
sur le poids juste du Québec. Si on va de... Je pense que les gens de l'ABC
l'ont souligné avant, le problème de base, c'est l'ensemble du poids du Québec,
démographique versus l'immigration, qui a un décalage trop important, qui a un
genre de collapse sur tout le reste par la suite.
M. Fontecilla : O.K. Je
reviens avec une question : Puisque le programme est si rentable, si utile
économiquement, il y a une forte compétition internationale, etc., alors
quelles sont les raisons, d'après vous, j'aimerais vous entendre, là, les
raisons qui ont poussé le gouvernement fédéral à abandonner ce programme-là?
M. Leblanc (Louis) : Je pense
que c'est l'exemple classique d'une gestion de secteur privé versus une section
de secteur public. Au fédéral, les institutions financières n'avaient aucun
rôle quant au placement des fonds. Et ce qui s'est produit malheureusement au
niveau fédéral, c'est qu'il y a des sommes importantes qui ont été ramassées
par les institutions financières, déposées au fédéral. Mais ces fonds-là n'ont
jamais été placés auprès de PME. Le gouvernement, passez-moi l'expression,
s'assoyait sur l'argent. L'Ontario particulièrement a reçu plus de
1 milliard de dollars puisqu'il y avait une garantie obligatoire,
l'échéance de cinq ans, les fonds étaient versés au fonds consolidé de la
province et n'a jamais été donné en subventions ou à différentes PME en
Ontario...
M. Leblanc (Louis) :
...financières déposées au fédéral. Mais ces fonds-là n'ont jamais été placés
auprès de PME. Le gouvernement, passez-moi l'expression, s'assoyait sur
l'argent. L'Ontario particulièrement a reçu plus de 1 milliard de dollars
puisqu'il y avait une garantie obligatoire, l'échéance de cinq ans, les fonds
étaient versés au fonds consolidé de la province et n'a jamais été donné en
subventions ou à différentes PME en Ontario.
Donc, Jason Kenney à cet égard-là,
passez-moi... avait une question qui disait : «Where is the beef?» Mais
quel est l'avantage du dossier fédéral? Je vous dis qu'à cet égard-là, il avait
raison parce que c'était très difficile de démontrer la pertinence économique
en termes de retombées de placement pour les PME parce qu'il n'y en avait pas.
Alors qu'au Québec, c'est l'inverse. 100 sous dans les dollars octroyés
sont donnés aux PME.
La Présidente (Mme Chassé) :
Très bien. Il reste 15 secondes. Merci. Prochain bloc d'échange avec la députée
de Gaspé pour 2 min 30 s.
Mme Perry Mélançon : Merci.
Bonjour à tous. On sait que la réforme de l'immigration du gouvernement actuel,
c'est vraiment dans le but de mieux arrimer les besoins... bien, les nouveaux
arrivants avec les besoins de main-d'oeuvre et surtout de régler la question
d'intégration et de rétention qui est problématique en ce moment au Québec.
Donc, vous dites d'ailleurs dans votre
document qu'à l'orientation 2, l'objectif de 65 % de personnes
admises dans la catégorie de l'immigration économique, vous en faites partie.
Les immigrants investisseurs en font partie de cette catégorie-là.
Alors, je voulais vous entendre. Vous
dites, vous êtes prêt à ce qu'on priorise en fonction de différents facteurs,
par exemple, les compétences linguistiques, la connaissance du français. Pour
vous, qu'est-ce qui est fait présentement pour attirer ces gens-là qui ont déjà
une connaissance en français et qu'est-ce qu'on pourrait faire pour mieux les
sélectionner?
M. Audet (Marc) : Je dirais
d'un premier point, je prendrais des slogans de la CAQ : C'est d'en
prendre moins mais d'en prendre soin. Les immigrants investisseurs, on n'a pas
besoin d'en prendre nécessairement soin versus face à l'intégration en tant que
telle. C'est du monde d'une qualité internationale qui voyage. M. le ministre
mentionnait hier : Oui, que les gens sont principalement dans la région de
Montréal comme la majorité des immigrants quand ils arrivent au Québec.
70 %, je pense, de l'immigration passe par Montréal. Ces gens-là veulent
être prêts.
Il faut, dans ces gens-là, les immigrants
investisseurs, je pense, il faut ouvrir un peu nos œillères, de les regarder
d'une autre façon. Il faut regarder la deuxième génération. C'est là qu'il faut
travailler. Ces gens-là, c'est les enfants qui vont rapatrier le tout. Vous
allez dans le quartier chinois à Montréal. Vous mangez, vous pensez puis vous
regardez, c'est un Chinois qui parle à la québécoise. C'est la réalité. Vous
allez dans nos écoles maintenant. Avant, on voyait une ethnie dans le gymnase.
Là, il y en a cinq par classe. Donc, c'est la réalité. Ils sont là, ces
gens-là.
Mais je pense que c'est pour ça qu'on
pense qu'on privilégie d'accélérer le traitement au niveau des investisseurs
parce qu'ils sont capables de faire leur propre intégration en bonne partie.
Mme Perry Mélançon : Donc,
est-ce qu'on augmenterait les seuils pour cette catégorie-là au détriment
d'autres catégories? Pour vous, c'est...
M. Audet (Marc) : Je ne
voudrais pas dire au détriment. Je voudrais qu'on augmente puis dans
l'ensemble. Donc, le total, quand le gouvernement regardera, je pense qu'il
faut considérer que cette catégorie-là en tant que telle est dans un monde
particulier en tant que tel et considérer les impacts économiques qu'ils
peuvent faire sur toutes les autres catégories par la suite pour nos...
Mme Perry Mélançon : Et vous
dites en conclusion...
La Présidente (Mme Chassé) :
En conclusion.
Mme Perry Mélançon : Oui. Vous
dites que... Je vais essayer de faire ça vite. Combien de temps?
La Présidente (Mme Chassé) :
Zéro.
Mme Perry Mélançon : Bon,
d'accord. Merci. Merci à vous.
La Présidente (Mme Chassé) :
M. Audet, M. Lessard, M. Leblanc, merci pour votre contribution aux travaux de
la commission. J'ajourne les travaux jusqu'à 14 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 28)
14 h (version non révisée)
(Reprise à 14 h 7)
La Présidente (Mme Chassé) :
Alors, nous sommes de retour. Nous reprenons nos travaux. Je demande à toutes
les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie et la
vibration de leurs appareils électroniques.
Nous sommes réunis en commission pour
poursuivre la consultation générale et les auditions publiques sur le cahier de
consultation intitulé La planification de l'immigration au Québec pour la
période 2020-2022.
Je vais juste vérifier... Bon, c'est bon.
Cet après-midi, nous entendrons les organismes suivants : le Service
d'aide aux néo-Canadiens, l'Association canadienne des conseillers
professionnels en immigration, la Ligue nationale... non, la Ligue d'action
nationale, le Conseil du patronat du Québec et le Mouvement
Québec indépendant.
Comme la séance a débuté à
14 h 07, est-ce qu'il y a consentement pour poursuivre nos travaux
au-delà de l'heure prévue, soit à 17 h 52?
Des voix
:
Consentement.
La Présidente (Mme
Chassé) : Consentement. Je souhaite donc la bienvenue aux
représentants du Service d'aide aux néo-Canadiens et je vous rappelle que vous
disposez de 10 minutes pour votre exposé. À une minute de la fin, je vais vous
faire un signe qui va vous permettre de pouvoir conclure en douceur. Et
ensuite, nous procéderons à une période d'échange avec les différents membres
de la commission. Je vous invite tout d'abord à vous présenter puis à débuter
votre exposé. Allez-y.
Mme Letendre
(Lucie) : Alors, bonjour. Bonjour, Mme la Présidente, M. le ministre
et distingués invités. Je tiens à remercier la commission de nous accorder ces
quelques minutes afin de vous faire part du point de vue du Service d'aide aux
néo-Canadiens quant aux orientations du MIDI.
Tout d'abord, je me
présente. Mon nom est Lucie Letendre, et je suis présidente du conseil
d'administration du SANC depuis 2017 et sur le conseil depuis 2014. J'ai avec
moi Mme Mercedes Orellana, qui oeuvre au SANC depuis plus de 26 ans. Elle en
est la directrice générale et elle a elle-même bénéficié des services de
l'organisation lorsqu'elle est arrivée comme immigrante au Québec. Et Mme
Claire Denis, administratrice et également sociologue de formation, professeure
retraitée du cégep de Sherbrooke et qui a formé plusieurs cohortes d'étudiants
en matière de communication interculturelle et d'enjeux liés à l'immigration.
Quant à lui, le SANC — c'est
l'acronyme que je vais utiliser pour le reste de la présentation — est un
OBNL qui a été fondé en 1954. On a plus de 65 ans d'existence dans le domaine
de l'intégration des immigrants au Québec. Nous sommes une organisation
apolitique et areligieuse, dont la mission est de servir d'organisme de
référence en Estrie pour l'accueil des personnes immigrantes et faciliter leur
intégration à la vie de notre région, et non seulement au plan économique, mais
aux plans social et culturel également. Le SANC est composé de 32 employés,
plus de 150 bénévoles et a notamment le soutien du MIDI et de Services Québec.
• (14 h 10) •
M. le ministre, nous sommes généralement
en accord avec les orientations proposées par le MIDI. Rassurez-vous, on ne
viendra pas trop vous parler de pénurie de main-d'oeuvre aujourd'hui, parce que
beaucoup d'autres l'ont fait avant nous. Mais on vient vous dire que le Québec
a la capacité d'accueillir et d'intégrer plus de personnes immigrantes...
Mme Letendre (Lucie) : ...M.
le ministre, nous sommes généralement en accord avec les orientations proposées
par le MIDI. Rassurez-vous, on ne viendra pas trop vous parler de pénurie de
main-d'oeuvre aujourd'hui parce que beaucoup d'autres l'ont fait avant nous.
Mais on vient vous dire que le Québec a la capacité d'accueillir et d'intégrer
plus de personnes immigrantes. Nous venons vous dire que nos ressources, au
centre, dans les dernières années, ont été même un peu sous-utilisées et les
ressources de la région également.
Vous venez d'ouvrir la porte, et c'est
merveilleux, aux travailleurs temporaires et aux étudiants étrangers, et s'il y
a une ville au Québec qui peut se réjouir d'avoir une belle réputation en tant
que ville étudiante, c'est bien Sherbrooke, et on espère être un peu plus
occupés. De manière plus précise, et dans un souci de collaboration et de
coopération, on vient renforcir les orientations nos1 à 6 et 8 à 10 avec quelques suggestions et commentaires.
Par ailleurs, nous sommes en complet désaccord avec l'orientation n° 7 et nous y reviendrons dans quelques instants.
Quant à l'orientation n° 1
qui est le nombre de personnes immigrantes, nous sommes d'avis que le
Québec a la capacité et les moyens d'accueillir 52 500 personnes, tel
que vous le suggérez, mais dès le début de la période de référence et non pas
d'attendre en 2022 pour ce faire. Le nombre est important, non seulement pour
répondre aux besoins actuels de main-d'oeuvre, mais aussi pour contrer le vieillissement
de la population, conserver le poids démographique du Québec dans le Canada et
garder le fait français bien vivant en Amérique du Nord. Ceci dit, il ne faut
pas non plus que ce chiffre se fasse au détriment des personnes réfugiées. On
vit sur la planète Terre, il y a des bouleversements importants. Les réfugiés,
il faut arrêter de penser qu'ils sont un fardeau pour l'État. Certains ont déjà
une formation. Ce sont des gens... des immigrants dits économiques, et, les
autres, on peut les former, on peut les former à nos besoins et avec nos
formations à nous.
Sur ce, je vais passer la parole à Mme Orellana
qui va vous entretenir sur les autres orientations, et je reviendrai sur
l'orientation n° 7.
Mme Orellana (Mercedes) :
Parfait. On va enchaîner avec les orientations n° 2,
3, 4, 5 et 6, celles qui touchent à l'immigration économique, aux travailleurs
étrangers au Québec, aux étudiants diplômés aussi, et à l'arrimage avec le
marché du travail. En fait, nous sommes d'accord avec une immigration
majoritairement économique, mais il faut porter une attention particulière à
notre capacité à les retenir au Québec. Dans le document qui a été soumis à la
consultation, on est capables de voir effectivement que la partie de
l'immigration économique, c'est celle qui a le pourcentage le moins élevé par
rapport à la rétention.
Le contexte actuel, c'est-à-dire où le
travail est disponible, va aider évidemment à la rétention. Mais on ne peut pas
se fier qu'à cela. Il faut aussi penser à l'intégration sociale parce que
l'immigration économique va de pair, et elle est indissociable à l'intégration
et culturelle. Il y a des mécanismes qui existent déjà aussi pour faciliter
cette intégration.
Entre autres, la personne immigrante va
s'enraciner dans son milieu parce qu'il y a aussi des membres de la famille qui
sont ici ou parce qu'il y a un noyau important déjà de la communauté qui est
présent au Québec. Sans vouloir ghettoïser l'immigration, ça aide aussi le fait
d'avoir aussi des membres de la communauté déjà dans une période de transition,
surtout à l'arrivée, aussi afin de faciliter justement ce passage et cette
intégration au début qui est importante. Nous croyons important de pouvoir
suggérer d'inclure une question sur la présence de membres de la famille au
Québec dans la déclaration d'intérêt et d'en tenir compte dans l'évaluation de
la candidature dans la nouvelle plateforme d'Arrima.
Autre mécanisme qui existe déjà aussi, au
Service d'aide aux néo-Canadiens, c'est la formation en entreprise en gestion
de la diversité culturelle et en communication interculturelle ou dans le
profil interculturel aussi des différents pays. Il faut donner les moyens aux
entreprises de bien intégrer ces personnes, puis de pouvoir préparer leur
milieu de travail aussi au côtoiement de travailleurs d'origine immigrante,
puis pouvoir justement permettre que ça se passe bien en emploi.
Nous sommes heureux de constater que le
ministère a déjà annoncé des mesures afin de prendre en charge ces personnes
dès leur arrivée et même avant à leur ajustement des services de francisation
et à donner des moyens pour que ça puisse les attirer en région en parlant des
différentes régions du Québec en dehors de Montréal. Donc, il faut tenir
justement en compte de pouvoir accélérer les efforts pour améliorer la
régionalisation de l'immigration.
Nous encourageons aussi le gouvernement à
continuer à faire des efforts afin de soutenir les immigrants à passer de leur
statut de résident temporaire à résident permanent pour tous les avantages qui
ont déjà été identifiés dans différentes recherches. C'est... ce sont des
catégories de personnes ou de statuts d'immigrants qui représentent une
opportunité privilégiée pour le Québec. Ensuite, évidemment, le Québec compte
un certain nombre de travailleurs temporaires qui veulent s'installer ici. Leur
expérience de travail au Québec peut aider déjà aussi à leur faciliter la vie,
l'expérience de vie chez nous.
En ce qui a trait à l'orientation n° 8 à 10, nous désirons vous féliciter pour l'accès aux
cours de français autant pour les conjoints des travailleurs temporaires et les
étudiants internationaux. Toutefois, on vous demande un petit effort
supplémentaire en ce qui a trait aux demandeurs d'asile. Je sais que c'est une
catégorie bien particulière...
Mme Orellana (Mercedes) :
... en ce qui a trait à l'orientation 8 à 10, nous désirons vous féliciter
pour l'accès au cours de français, autant pour le conjoint des travailleurs
temporaires et les étudiants internationaux.
Toutefois, on vous demande un petit effort
supplémentaire en ce qui a trait aux demandeurs d'asile. Je sais que c'est une
catégorie bien particulière, mais c'est important parce que ce sont des
personnes qui sont déjà sur le territoire en train de régulariser leur
situation. Nous savons aussi que ça ne relève pas de la décision du ministère
de l'Immigration, mais c'est des personnes qui... avec un permis de travail,
c'est une main-d'oeuvre aussi qui est disponible pour les entreprises, et que
ce soit pour une période transitoire de deux, trois, quatre ans, le temps
qu'ils puissent obtenir leur décision de la Commission de l'immigration et du
statut de réfugié, c'est une main-d'oeuvre qui est disponible et ça peut
favoriser autant sur le plan du français, sur le plan démographique, sur le
plan culturel aussi.
La même chose pour les travailleurs de
45 ans et plus. Ce sont des personnes qui ont encore une vie active au
travail, et, si on ne change pas la grille de sélection pour donner des points
supplémentaires des gens qui ont plus de 40 ans au moment de faire la demande
d'immigration, mais on se prive probablement de candidats qui sont encore aussi
capables de donner quelques années de vie économique à la société québécoise.
Je vais encore redonner la parole à Mme Lucie Letendre.
Mme Letendre (Lucie) :
Oui. Pour faire du pouce sur ce que Mercedes venait de dire, c'est aussi des
gens qui, à 45 ans, ont encore de jeunes enfants, alors c'est des futurs
citoyens du Québec, ça, et ils d'intègrent très facilement, on le sait.
Alors, tel qu'annoncé au tout début de
notre exposé, nous sommes en désaccord avec l'orientation n° 7,
M. le ministre, qui est de favoriser la sélection des personnes qui connaissent
les valeurs démocratiques et autres valeurs québécoises. Je le sais, vous allez
me demander : Comment être contre la tarte aux pommes? Bon.
Nous sommes en désaccord avec cette
orientation-là parce que, dans un premier temps, elle est ambigüe, elle est mal
définie. Tu sais, on peut bien parler que la liberté, c'est une valeur
québécoise, mais moi, quand je dis à mon enfant plus jeune de ne pas sortir le
soir, bien... elle est où, la liberté, là? Elle est où, la ligne? Alors, c'est
ambigu. Il manque ici de contexte, si on peut dire. Et c'est très
difficile aussi. Comment on va les évaluer, ces valeurs-là? Puis quand est-ce
qu'on va les évaluer? Puis, tu sais, c'est... Une valeur, c'est quelque chose
qu'on a à l'intérieur de nous. On peut évaluer des comportements, mais évaluer
des valeurs, c'est quand même quelque chose de très difficile. La valeur, c'est
comme la partie submergée de l'iceberg, si on veut. Le comportement, lui, est
la partie qui sort de l'eau. Donc, évaluons des comportements, mais des
valeurs, ça nous semble assez difficile.
Dans un deuxième temps et par-dessus tout,
l'immigration est actuellement un sujet très sensible à l'échelle de la planète
et nous craignons que cette orientation-là perpétue, si on veut...
La Présidente (Mme Chassé) :
Il vous reste moins d'une minute.
Mme Letendre (Lucie) :
... le discours sur... le discours nocif sur l'immigration et les immigrants,
que ça perpétue les amalgames, l'entretien de paradigmes et d'idées préconçues.
M. le ministre, en conclusion, on se
permet de vous sensibiliser au fait qu'il y a une course à l'immigration parmi
plusieurs pays industrialisés actuellement. La Commission européenne parle
d'une pénurie de 19 millions de personnes de 2023 à 2060. C'est demain
matin. Il ne faut pas laisser passer notre chance, ce qui pourrait être le cas
si on met des conditions trop difficiles ou trop ambigües à rencontrer. Et aussi
il ne fait pas se priver des personnes réfugiées qui, comme je le disais, sont
une main-d'oeuvre aussi accessible.
La Présidente (Mme Chassé) :
En conclusion.
Mme Letendre (Lucie) : Je
vous remercie.
La Présidente (Mme Chassé) :
Très bien. Merci à vous. Nous allons débuter la période d'échange. M. le
ministre, la parole est à vous pour un bloc pour le parti formant le
gouvernement de 16 min 30 s.
M. Jolin-Barrette :
Merci, Mme la Présidente. Bonjour, mesdames, Mme Rémi, Mme Orella,
Mme Letendre. Merci pour votre présence à l'Assemblée nationale pour
présenter votre mémoire.
D'entrée de jeu, je vous voudrais savoir,
vous me dites : À Sherbrooke, on a de la disponibilité, on peut en faire
plus. Pouvez-vous détailler là-dessus quand vous dites : On a... on
pourrait accueillir davantage de personnes... Qu'est-ce qui n'est pas maximisé,
là, à Sherbrooke, là?
Mme Orellana (Mercedes) :
Bien, en fait, on voit les statistiques des personnes qu'on a reçues la
dernière année, on a une baisse par rapport à l'année précédente, et donc, si
on en avait déjà reçu beaucoup plus dans les années d'avant puis qu'on est
capables de les aider à trouver un logement, les enfants sont inscrits à
l'école au niveau primaire, secondaire dans des délais raisonnables, la santé
est capable de faire son exercice aussi en ce qui concerne le bilan santé pour
certaines catégories de personnes, donc on a la capacité de pouvoir, comme
milieu, favoriser leur installation. Par la suite aussi, c'est l'intégration
des personnes qui peuvent être déjà en contact avec des réseaux existants.
Donc, c'est simplement de dire qu'on est en mesure de pouvoir en accueillir,
d'autres personnes aussi. On est mode, je dirais, rattrapage par rapport aux
années précédentes.
M. Jolin-Barrette : Là,
lorsque vous dites ça, vous visez toutes les catégories d'immigrants, là, à la
fois économiques, regroupement familial et réfugiés, là.
• (14 h 20) •
Mme Orellana (Mercedes) :
Tout à fait. Nous autres, on reçoit toutes les catégories de personnes
immigrantes. Et, quand Mme Letendre mentionnait le fait qu'on salue
l'ouverture du ministère par rapport à l'accessibilité des services pour les
travailleurs temporaires, on sait que...
M. Jolin-Barrette :
...ça, vous visez toutes les catégories d'immigrants, là, à la fois économique,
regroupement familial, et réfugiés, là.
Mme Orellana (Mercedes) :
Tout à fait. Nous autres, on reçoit toutes les catégories de personnes
immigrantes. Et quand Mme Letendre mentionnait le fait qu'on salue
l'ouverture du ministère par rapport à l'accessibilité des services pour les
travailleurs temporaires, on sait qu'il y a de plus en plus d'entreprises qui
se tournent vers l'embauche de travailleurs de l'étranger. Mais, ces
personnes-là, l'entreprise n'est pas nécessairement toujours prête ou préparée
à assumer l'intégration sociale. L'intégration en emploi, ça va être une chose.
Par la bande, elle va peut-être se faire avec les collègues de travail, mais ça
va prendre plus de temps. Il n'y a pas un rôle de l'entreprise dans
l'intégration sociale nécessairement de ces travailleurs. Mais, en
complémentarité avec les ressources qui existent, nous, justement, nos services
peuvent compléter cette offre de l'entreprise, ou ce rôle, ou cette responsabilité.
Ensuite, du côté des étudiants
internationaux, vous connaissez bien qu'à l'Université de Sherbrooke puis à
Bishop, on reçoit beaucoup d'étudiants étrangers. Et le fait de pouvoir accéder
à certains de vos services, mais ça va nous aider parce qu'on travaille déjà en
collaboration avec ces institutions aussi. Donc, on souhaite puis on espère
qu'ils vont solliciter nos services davantage aussi.
M. Jolin-Barrette :
Bien... allez-y, allez-y.
Mme Letendre (Lucie) :
Excusez-moi. Si je peux juste me permettre d'ajouter, M. le ministre, c'est ça
qu'on veut aussi accentuer, c'est qu'il y a de la place en région. Il y a de la
place en région pour accueillir des immigrants. Puis il y a 14 villes au
Québec qui ont des organisations semblables à la nôtre, alors il faut s'en
servir. Et puis, oui, chez nous, comme Mercedes le disait, il y a du logement,
les écoles ne débordent pas comme à Montréal. Alors, il faut... ayez ça en
tête, s'il vous plaît.
M. Jolin-Barrette :
Bien, je suis très d'accord avec ce que vous dites parce que c'est un des
objectifs aussi du gouvernement du Québec, depuis qu'on a été élus, de mettre
l'accent sur la régionalisation de l'immigration. Et, vous savez, la majorité
de l'immigration se concentre à Montréal, mais il y a des besoins dans toutes
les régions du Québec, notamment pour les entreprises. Et là je ne vise pas
uniquement les travailleurs qualifiés supposons, mais, comme vous le dites
effectivement, les demandeurs d'asile pendant le temps qu'ils sont sur le
territoire québécois peuvent intégrer un emploi, les personnes réfugiées aussi,
et le regroupement familial. Quoique le regroupement familial, ça dépend parce
qu'on vient rejoindre souvent quelqu'un de sa famille. Cela étant dit,
effectivement, pour assurer la vitalité de toutes nos régions, mais il faut
s'assurer d'une régionalisation de l'immigration.
Au niveau des travailleurs qualifiés,
c'est pour ça que j'ai dit qu'on allait donner priorité aux personnes immigrantes
qui avaient une offre d'emploi validée en région. On allait les prioriser. Mais
une chose aussi, il y a des efforts à faire du côté du gouvernement, d'offrir
des services en région. C'est pour ça que, la semaine dernière, quand j'ai
annoncé le parcours d'accompagnement personnalisé, mais les agents d'aide à
l'intégration vont être principalement en région justement pour qu'on puisse
faire le lien avec les organismes comme le vôtre et que le ministère soit là à
toutes les étapes aussi pour assurer une présence terrain aussi. Puis je pense
que c'est un des éléments qui a manqué au ministère de l'Immigration, le fait
d'être... d'avoir tout rapatrié à Montréal et de ne pas avoir été présent sur
le terrain. Parce que l'idée, là, du ministère, ce n'est pas de venir enlever
ce que vous faites de bien sur le terrain avec les personnes immigrantes. Vous
êtes les plus spécialisés. Mais c'est d'être là en support, puis vraiment aussi
d'amener un support pour la personne immigrante, une personne à qui elle peut
se référer au ministère de l'Immigration. Ça fait qu'on veut vraiment
travailler en collaboration avec vous à ce niveau-là, au niveau de la
régionalisation. Puis, je pense, c'est tout le Québec qui va gagner, notamment
aussi en ce qui concerne l'intégration. Puis vous le disiez, les entreprises
aussi, parfois elles ne sont pas outillées, alors c'est toute la collectivité,
là, qui doit être présente pour l'intégration.
Parlons un peu de l'orientation n° 7 sur les valeurs québécoises exprimées par la Charte
des droits et libertés de la personne. Nous, notre objectif, c'est de faire en
sorte que les gens adhèrent à ces valeurs. Et lorsque vous dites : C'est
un peu flou. Bien, on a discuté abondamment, en commission parlementaire, dans
le cadre du projet de loi n° 9 sur ce qui constitue les valeurs québécoises,
et c'est celles qui sont exprimées dans la charte. Je vous donne un
exemple : la non-discrimination fondée sur l'orientation sexuelle,
l'égalité entre les hommes et les femmes, la laïcité. Ça, c'est des concepts
pour la société québécoise qui sont importants. Alors, on est dans cette
logique-là de dire : Bien, écoutez, l'immigration, c'est une
responsabilité partagée, mais nécessairement, lorsqu'on vient dans une société
d'accueil, on doit s'engager à respecter les codes qui régissent la société. C'est
un peu dans ce sens-là qu'on le présente. Je ne sais pas si ça vous éclaire
aussi sur l'orientation du gouvernement à ce niveau-là.
Mme Letendre (Lucie) :
Bien, les orientations dont vous parlez ou les valeurs, ou les normes dont vous
parlez, évidemment on a suivi effectivement la commission aussi sur le projet
de loi dont... auquel vous avez fait référence. Puis, comme je vous dis, on ne
peut pas être contre la tarte aux pommes. Je pense qu'il faut simplement
clarifier le message. Ici, si on parle d'égalité hommes-femmes, bien,
disons-le, qu'on parle d'égalité hommes-femmes. Puis il faut être juste
conscients qu'aussi il ne faut pas penser que les immigrants ne les connaissent
pas nécessairement, ces valeurs-là, puis parfois ces discours-là, ces
discussions-là autour de ces thèmes-là, bien, ça renforce un peu le message que
les immigrants sont très différents des gens...
Mme Letendre (Lucie) : ...ici,
si on parle d'égalité hommes-femmes, bien, disons-le, qu'on parle d'égalité
hommes-femmes. Puis il faut être juste conscient qu'aussi... il ne faut pas
penser que les immigrants ne les connaissent pas nécessairement, ces
valeurs-là, puis parfois ces discours-là, ces discussions-là autour de ces
thèmes-là, bien, ça renforce un peu le message que les immigrants sont très
différents des gens qui habitent le Québec. C'est dans ce sens-là que je veux
vous dire : Faites attention quand on va sur ce terrain-là parce qu'il est
un peu miné. C'est notre point de vue à cet effet-là.
Mais soyons plus clairs sur ce qu'on
s'attend, à ce moment-là, des personnes qui viennent habiter au Québec quant à
leurs valeurs. De la démocratie, on peut bien penser que c'est le droit de
vote, là. Ça, c'est...
M. Jolin-Barrette : Bien, en
fait, ce n'est pas uniquement ça, la démocratie, et...
Mme Letendre (Lucie) : Non...
un exemple que je donnais, M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Non,
mais, ce que je veux dire, je pense qu'au cours des derniers mois je l'ai
répété abondamment sur ce que constituent les valeurs québécoises, et on peut
les appeler comme on le souhaite. Exemple, le Parti libéral les appelle les
valeurs communes, notamment. Il y a certaines valeurs qui font partie de la
société québécoise, qui n'étaient pas nécessairement dans la charte. Je donne
un exemple : la laïcité ne l'était pas. Le Parti libéral était contre le
fait d'inscrire ça dans la charte.
Mais il faut s'assurer que, lorsqu'on
accueille des gens, on a un cadre qui établit quels sont les paramètres de la
société québécoise, puis je pense que ce n'est pas mauvais de dire clairement
ce à quoi la société québécoise, elle tient. Puis ce n'est pas une question
d'opposition, de dire : Les personnes immigrantes ne connaissent pas les
valeurs. Il y a un effort qui doit être fait de la société québécoise pour
diffuser ces valeurs-là, renseigner et dire que... ce sur quoi est bâtie, et ce
sur quoi on veut bâtir la société québécoise un peu. C'est la vision que le
gouvernement a parce que je pense que c'est ça qui cimente notre société, puis
qu'on établit clairement dès le départ ce sur quoi est fondée notre société
puis notre vivre-ensemble collectif à ce niveau-là.
Peut-être, Mme la Présidente, je céderais
la parole à des collègues. Je sais que j'ai des collègues qui veulent poser des
questions.
Mme Orellana (Mercedes) :
...je voudrais juste peut-être, M. le ministre, faire référence à notre
mémoire. Dans le document, à la page 20, concernant cette orientation, on
disait pourquoi... on expliquait un petit peu pourquoi on était en désaccord,
mais c'est parce que le libellé de l'orientation, il dit : «Favoriser la
sélection des personnes immigrantes connaissant les valeurs démocratiques et
les valeurs québécoises exprimées par la Charte des droits et libertés de la
personne du Québec.»
Or, ce qu'on dit, c'est que, de faire le
lien entre la sélection, la grille de sélection versus la connaissance des
valeurs démocratiques, le Québec n'est pas... n'a pas toute la responsabilité
de la sélection quand on parle de certaines catégories de personnes
immigrantes, dont les personnes réfugiées, par exemple, où le gouvernement
fédéral a sa part des choses à faire.
C'était plutôt justement ce lien entre
faire... le lien entre la sélection, choisir les personnes qui connaissent les
valeurs québécoises, qui était un petit peu... pas vague... ou difficile à
dire : Oui, on adhère à cette orientation complètement, parce qu'on sait
pertinemment qu'il y a une partie de la sélection qui faite par le gouvernement
fédéral. Donc, ça impliquerait d'autres démarches. Ça impliquerait de changer
la grille de sélection, ça impliquerait probablement d'autres travaux au niveau
administratif, qui prendront sûrement une période, un délai, et ça prendrait
des discussions aussi avec l'autre palier gouvernemental aussi. C'était plus
tout ça que je voulais ajouter.
Mme Letendre (Lucie) : ...je
crois que justement... C'est vraiment la façon dont l'orientation est libellée,
là. Ce n'est pas d'avoir des discussions sur la tarte aux pommes.
M. Jolin-Barrette : Je
comprends.
Mme Letendre (Lucie) : Merci.
La Présidente (Mme Chassé) :
Je crois que c'est le député de Mégantic qui désire prendre la parole pour
poursuivre les discussions. Il reste six minutes au bloc.
M. Jacques : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour, mesdames. Ça va bien?
Une voix
: Oui, merci.
M. Jacques : Vous avez parlé
que vous aviez des ressources disponibles, là, étant donné qu'il y avait eu une
baisse de recours à vos services. De quelle façon que vous expliquez cette
baisse-là?
• (14 h 30) •
Mme Orellana (Mercedes) : En
fait, si vous permettez, il y a deux groupes de personnes qu'on a reçus en
moins. Un, c'est les travailleurs qualifiés permanents, parce que c'est des
personnes qui choisissent eux-mêmes où ils vont aller s'installer une fois
qu'ils obtiennent les visas à l'étranger. Donc, si je suis à Paris, par
exemple, en France, je peux décider, à ce moment-là, à partir du moment du
visa, que je viens m'installer à Saguenay—Lac-Saint-Jean plutôt... ou en
Outaouais, ou en Estrie.
Et il n'y a pas de... nécessairement... il
n'y en avait pas, je pense qu'il va y avoir des changements bientôt, il n'y en
avait pas nécessairement, des contrôles, pour dire : On prend un premier
contact avec la personne puis on sait où est-ce qu'elle va s'installer, etc.,
puis on va l'orienter aux ressources qui existent. Donc, comme la décision de
s'installer, ça appartient à la personne, on a eu moins, tout simplement, on a
été moins populaire comme région.
L'autre catégorie, c'étaient les réfugiés
pris en charge par l'État, qui, eux, sont dirigés par le gouvernement du
Québec, par le ministère de l'Immigration, Diversité et Inclusion, à la région
où ils vont devoir s'installer. Globalement, dans toutes les régions du Québec
l'année dernière, il y en a eu, une baisse de toutes les personnes réfugiées
prises en charge prises par l'État, et on sait très bien aussi qu'il y a des
questions de contexte aussi avec l'arrivée des demandeurs d'asile au-delà de
24 000 personnes...
14 h 30 (version non révisée)
Mme Orellana (Mercedes) :
... du Québec par le ministère de l'Immigration, de la Diversité et de
l'Inclusion à la région où ils vont devoir s'installer. Globalement, dans
toutes les régions du Québec, l'année dernière, il y en a eu une baisse, de
toutes les personnes réfugiées prises en charge par l'État. Et on sait très
bien aussi qui des questions de contexte aussi avec l'arrivée des demandeurs
d'asile, au-delà de 24 000 personnes qui sont passées par le chemin
Roxham, qui peut expliquer en partie cette situation-là. Je ne sais pas si ça
répond? Globalement, c'est ça, le... Ça peut expliquer parce que cette année,
on est en remontée. Cette année, on a des accueils beaucoup plus près de
qu'est-ce qu'on avait l'habitude d'en accueillir.
M. Jacques : Et c'est dû
à quoi cette année? Les travailleurs étrangers qui viennent dans l'entreprise
qui sont recrutés, ou à l'étranger, ou des...
Mme Orellana (Mercedes) :
Non. Pour ce qui est des travailleurs qualifiés permanents, on est encore en
baisse parce que l'année d'avant on en a eu 100. Cette année, qui s'est finie
le 30 juin 2019, on en a eu 93, donc on a sept familles de mois, tandis que
pour les réfugiés pris en charge par l'État, c'est une décision que le
gouvernement fait, et il a des consultations avec le gouvernement fédéral à
chaque année puis il décide de statuer quel nombre de personnes réfugiées
prises en charge par l'État il serait prêt à accueillir. Il y a eu probablement
une régulation qui s'est faite à ce niveau-là, donc on a reçu plus de
personnes.
M. Jacques :
O.K. Vous couvrez une partie de l'Estrie, là, ce n'est pas juste Sherbrooke,
donc vous... il y a des... à Mégantic, et à Cookshire, et un peu partout. Vous
avez 150 employés, bénévoles en plus.
Mme Letendre
(Lucie) : Non, 32 employés, 150...
M. Jacques :
102?
Mme Letendre
(Lucie) : 32. 150 bénévoles.
M. Jacques :
O.K., 32. J'avais compris 150...
Mme Orellana
(Mercedes) : Bénévoles.
M. Jacques :
Bénévoles, O.K., c'est bon. Et les bénévoles, ils parcourent tout le territoire
puis ils vont voir les gens, là, qu'ils s'occupent depuis plusieurs années,
d'ailleurs, là.
Mme Orellana
(Mercedes) : Non. En fait, comment qu'on est organisés par rapport à
nos services, c'est que nos employés peuvent se déployer sur le territoire si
c'est nécessaire. Nos services sont accessibles soit par téléphone, par Skype,
en personne. Et les bénévoles vont aller, si c'est nécessaire, effectivement...
vont se déplacer avec un employé, mais en général ça se passe majoritairement à
Sherbrooke, je vous dirais.
Avec la MRC du
Granit, on a... Depuis 2015 que la MRC du Granit a fait... a mis sur pied un
projet qui s'appelle Défi Carrière Mégantic, qui est à la deuxième phase, dans
lequel plusieurs municipalités de la région y participent. Jeudi, je vais à
Saint-Sébastien, c'est peut-être une ville que vous connaissez. Et c'est une
région qui s'est mobilisée beaucoup, depuis les trois dernières années, pour
être plus accueillante. Il y a beaucoup de travailleurs aussi qui existent dans
différentes usines. Et, s'il y a des besoins de ces personnes-là qui sont
installées dans le territoire de la MRC du Granit, il y a des liens qu'on fait
déjà avec... par le biais de la Société de développement économique du Granit
et d'autres organismes partenaires, et on a déjà eu à se déplacer dans
certaines occasions aussi, mais il faut juste, comme, faire appel à nous.
M.
Jacques : ...là, qui est la ressource dans la MRC.
Mme
Orellana (Mercedes) : Oui.
M.
Jacques : Vous avez parlé tantôt, là, l'intégration, là, pour les 40
ans et plus, qu'il y avait une perte de points. Comment vous voyez ça? Comment
vous voyez... pour corriger ça, ce tir-là, pour qu'il y ait une... favoriser
ces gens-là de 40 ans et plus, là?
Mme
Orellana (Mercedes) : Bien, c'est... Premièrement, c'est de modifier
la grille de sélection parce que vous savez que, pour venir au Québec, peu
importe la catégorie d'immigration à laquelle on sollicite, il y a des points,
des pointages qui se donnent selon différents critères, l'âge, la scolarité, la
capacité d'intégration, etc.
Mais, par
rapport à l'âge, si vous en avez 43 ans, mettons, 45 ans, vous avez zéro point,
tandis que peut-être qu'à 45 ans, on a encore 20, 25 ans de vie active devant
nous. À ce moment-là, ça serait de dire, bien, on donne un pointage différent
au critère de l'âge pour favoriser l'arrivée des personnes qui sont encore,
mettons, à 45 ans, mais qui peuvent être économiquement actives encore pendant
des années. Et, comme Mme Letendre le disait, en plus, ils ramènent des
enfants, ils ramènent des gens qui vont être aussi beaucoup plus longtemps sur
le marché du travail. C'est vraiment en favorisant... en modifiant la grille de
sélection puis en donnant plus de points sur le critère de l'âge.
M.
Jacques : Parfait.
Mme
Orellana (Mercedes) : Une fois rendus ici, il y a toute la panoplie
des services qui existent aussi pour favoriser l'aide à la recherche d'emploi
des travailleurs expérimentés.
M.
Jacques : Et est-ce que ces gens-là vont être susceptibles à rester
plus au Québec ou...
La
Présidente (Mme Chassé) : ... au bloc.
Mme
Orellana (Mercedes) : Je n'ai pas compris la question.
M.
Jacques : Les gens de 40 ans, de... mettons, 40, 45, vont-ils avoir un
intérêt à rester plus au Québec que ceux de 30 ans, mettons?
Mme
Orellana (Mercedes) : Moi, je pense qu'il y a une question de... Ça,
c'est toujours relatif, c'est... On ne peut pas comme aller mettre juste sur le
critère de l'âge de la personne parce qu'il y a d'autres critères qui peuvent
rentrer en considération aussi, par exemple, la présence de membres de la
famille dans une autre province, ça en fait un facteur d'attraction. Qu'on soit
jeune ou qu'on soit moins jeune, ils vont avoir un facteur d'attraction pour
nous ramener ailleurs. Puis l'inverse est vrai aussi, si on est déjà ici puis qu'il
y a des personnellement qui viennent, plus âgées...
La
Présidente (Mme Chassé) : ... conclusion.
Mme
Orellana (Mercedes) : ...par contre, on peut dire que la personne,
elle va être plus stable puis va vouloir s'enraciner autour à l'endroit où est-ce
qu'elle arrivera.
La
Présidente (Mme Chassé) : Merci. Ça termine le bloc avec le parti
formant le gouvernement. Maintenant, je cède la parole au député de Nelligan,
porte-parole pour l'opposition officielle. 11 minutes.
M.
Derraji : Merci, Mme la Présidente. Mesdames, merci pour votre
présence. Et vous savez quoi? Vous m'avez donné le goût de venir vous visiter.
Je suis...
Mme Orellana (Mercedes) :
...à s'enraciner aussi à l'endroit où est-ce qu'elle arrivera.
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci. Ça termine le bloc avec le parti formant le gouvernement. Maintenant, je
cède la parole au député de Nelligan, porte-parole pour l'opposition
officielle, 11 minutes.
M. Derraji : Merci, Mme
la Présidente. Mesdames, merci pour votre présence. Et vous savez quoi? Vous
m'avez donné le goût de venir vous visiter, et je suis impressionné par la
qualité de ce que vous faites pour toute l'Estrie. 150 bénévoles, j'ai
déjà eu l'occasion de gérer des bénévoles dans la vie, une dizaine, pas une
150, et je vous salue. Bravo! pour tout ce que vous faites. Et ça démontre, ça
démontre que le Québec et ses régions ont la capacité d'accueil, et vous l'avez
démontré.
Ma question est la suivante :
Pensez-vous que le gouvernement fait fausse route avec ces seuils et le slogan En
prendre moins, en prendre soin ne tient plus la route vu qu'on a la
capacité d'accueil en région?
Mme Orellana (Mercedes) :
Moi, j'ai toujours pensé, puis ce n'est pas la première planification triennale
à laquelle on participe, ce n'est pas la première consultation, on a toujours
tenu ce discours qu'on a la capacité d'intégrer puis d'accueillir plus de
personnes immigrantes sans regard au statut d'immigration. Ce qui va être
différent d'un exercice à l'autre, c'est la question de jouer avec les
catégories, les différents statuts, etc. Donc, je pense que c'est important de
garder en tête que, si on veut... pas seulement pour la question du marché du
travail, mais aussi pour contrer l'effet démographique pour la pérennité du
français dans notre province, c'est important de continuer à recevoir des
personnes.
M. Derraji : Vous avez
très bien soulevé les enjeux : la pérennité du français et le fait de
parler le français, le poids démographique du Québec au Canada, c'est aussi
très important, vous l'avez soulevé, et je comprends vraiment vos
préoccupations. Mais, aujourd'hui, vous avez en face de vous un gouvernement
qui, lors de la dernière élection, a décidé de diminuer les seuils à
40 000, et là, maintenant, on va aller progressivement à 52 000. Et,
vous, vous dites le contraire au gouvernement : Ça n'a pas de bon sens, on
a la capacité d'accueil. Comment contrer ce discours que, d'un côté, on dit
qu'on n'a pas la capacité et, de l'autre côté, vous dites... Vous êtes les
acteurs du milieu, normalement le MIDI doit vous écouter parce que vous êtes en
contact et vous êtes sur le terrain. Comment vous leur dites aujourd'hui que
vous avez la capacité d'accueil et ce n'est pas bon de diminuer les seuils, il
faut aller à 52 000 aujourd'hui?
Mme Letendre (Lucie) :
Bien, je crois qu'on a dit ce qu'on avait à dire qu'effectivement on a la
capacité d'accueil. On a dit au ministre aussi qu'on pense qu'on peut
accueillir ces 52 500 personnes dès le début de la période triennale.
Le ministre tient cette consultation pour nous écouter, alors là, voilà.
M. Derraji : Et le
ministre a confirmé qu'il est là en mode écoute, donc j'espère que ce que vous
avez dit par rapport à la capacité d'accueil va sonner dans l'oreille du
ministre et que le Québec est prêt à accueillir plus de ce qu'on accueille
maintenant.
Je vais... je suis curieux à vous entendre
par rapport à l'orientation n° 7. J'ai entendu que
vous êtes contre. J'ai entendu vos explications, les explications et vos
arguments à la question du ministre. Si je vous repose une autre question et je
vous dis : Cette orientation, c'est à réécrire, comment vous allez la
libeller? Si vous avez une façon de voir, de revoir, à la lumière des
explications que vous avez évoquées, comment réécrire cette orientation?
Mme Letendre (Lucie) :
Veux-tu que je réponde?
Mme Orellana (Mercedes) :
Oui. Mais, en fait, je pensais que tu... désolée, on ne s'est pas vues, mais on
peut répondre toutes les deux, si vous voulez. Mais, en fait, je...
Mme Letendre (Lucie) : On
se complémentarise très bien, Mercedes et moi.
Mme Orellana (Mercedes) :
...je vais amorcer la réponse, si vous voulez, puis Mme Letendre pourra
compléter.
Est-ce qu'on a besoin de la réécrire?
Premièrement, je sais que c'est mal élevé de répondre à une question par une
question. Mais, mon premier réflexe, ça serait dire : Est-ce qu'on a
besoin de la réécrire? Parce que dans notre texte de mémoire, on explique très
clairement que, dans notre travail quotidien, on applique les valeurs
démocratiques avec les nouveaux arrivants qu'on accueille dans nos services. On
applique chacun des éléments qui sont importants pour la vie, le bon
vivre-ensemble entre tous les Québécois, et que c'est par les comportements
qu'on a dans la vie de tous les jours, par le côtoiement face à notre voisin, à
notre collègue qu'on est capable de comprendre l'importance de l'égalité, par
exemple, entre les hommes et les femmes, l'égalité entre les personnes,
l'importance du français, etc. Donc, je pense que c'est plutôt de donner
l'opportunité à ce que les personnes arrivent sur le terrain, sur le territoire
et apprivoisent... Vous savez, l'intégration, on dit que, dans la courbe de
l'intégration, quand la personne est à l'étranger du Québec, qu'elle n'a pas
encore mis les pieds, on peut idéaliser, à partir d'une photo, voir la neige
dans un paysage. Mais voir la neige puis la toucher, ce n'est pas pareil. Ce
n'est pas la même sensation. Voir une image d'un vent puis sentir la bourrasque
qui vous rentre le froid dans vos os, ce n'est pas la même chose. Donc, il faut
être en mesure de...
Des voix
: ...
• (14 h 40) •
Mme Orellana (Mercedes) :
...c'est vrai, de se donner l'occasion de vivre ensemble puis de comprendre un
peu nos habitudes, nos traditions, et là on va aimer, on va apprendre les
valeurs, comment elles sont vécues ici, au Québec. Parce que, moi, mes
valeurs... Je ne suis pas originaire du Québec, mais j'avais quand même une
valeur d'égalité...
Mme Orellana (Mercedes) :
...le froid dans vos os, ce n'est pas la même chose. Donc, il faut être en
mesure de...
Des voix
: ...
Mme Orellana (Mercedes) :
C'est vrai... de se donner l'occasion de vivre ensemble puis de comprendre un
peu nos habitudes, nos traditions, et là on va aimer, on va apprendre les
valeurs, comment ils sont vécus ici, au Québec. Parce que, moi, mes valeurs...
Je ne suis pas originaire du Québec, mais j'avais quand même une valeur
d'égalité entre les hommes et les femmes quand j'habitais au Salvador, mon pays
d'origine, et je la chérissais, cette valeur-là, mais j'ai appris aussi à voir
comment elle se vivait ici, au Québec, qui était différente d'El Salvador.
Donc, je pense qu'il faut donner la
chance, à mon avis, plus...
M. Derraji : Je vous remercie
et je... probablement, je suis dans la même situation que vous parce qu'avant
de venir j'ai vécu une tempête de sable mais pas une tempête de neige. C'est
toute une différence.
Je comprends ce que vous venez de dire.
Donc, selon vous, l'orientation 7 ne sert absolument à rien.
Mme Letendre (Lucie) : Bien,
en fait, elle ne sert à rien... Ce qu'on veut dire, c'est que c'est important
de les vivre, ces valeurs-là, ici, mais en tout cas, de la façon dont elle est
libellée, elle n'est pas libellée, selon nous, de façon très adroite. Et, comme
Mercedes le dit, on pense que c'est en vivant ici qu'on va apprendre à vivre
ces valeurs-ci et...
M. Derraji : Oui. Votre
expérience avec les nouveaux arrivants au niveau de la région de l'Estrie
depuis plusieurs années, avez-vous senti une inquiétude par rapport à ces valeurs
démocratiques? Je ne parle pas uniquement de l'égalité hommes-femmes mais
l'ensemble des valeurs québécoises. Est-ce que vous senti une inquiétude que...
Mme Letendre (Lucie) : ...en
général?
M. Derraji : Les gens avec qui
vous travaillez, est-ce que vous avez senti une menace ou une inquiétude par
rapport au respect des valeurs démocratiques depuis le temps que vous
travaillez avec les nouveaux arrivants?
Mme Orellana (Mercedes) :
Moi, j'ai senti plus une inquiétude de la part de certaines collègues qui
portent le voile, par exemple, et qui se sentent regardées de façon différente
depuis un certain temps, qui font face peut-être à des commentaires qui sont
moins respectueux, mais pour le reste des personnes je n'ai pas senti
d'inquiétude. Si on parle de la communauté africaine, latino-américaine,
européenne, non.
M. Derraji : Mais, quand je
parle d'inquiétude, c'est que les gens avec qui vous travaillez ne respectent
pas les valeurs québécoises... Je vais revenir au cas du voile, mais je parle
des gens avec qui vous travaillez, et vous sentez qu'il n'y a pas, genre, par
exemple, le principe de l'égalité hommes-femmes. Est-ce que vous avez senti ça,
un besoin de consolider à ces gens : Écoutez, là, au Québec, là, l'égalité
hommes-femmes, c'est non négociable. Est-ce que vous avez été témoins de ça?
Mme Orellana (Mercedes) :
Oui, on a été témoins dans différentes situations, mais je veux vous
dire : Honnêtement, à chaque fois qu'il y a eu une situation problématique
à ce niveau-là, il y a une intervention très rapide qui s'est faite par les
personnes concernées aussi où, par exemple, disons, dans le milieu travail, on
va sentir un inconfort d'une personne qui...
L'inquiétude est des deux côtés, je vous
dirais, autant une personne qui travaille dans un endroit et qui n'était pas
habituée à recevoir des ordres d'une femme qui est en position d'autorité. La
personne ressentait... Évidemment, il y a un choc, il y a une adaptation qu'il
faut faire, puis c'est ça que j'ai expliqué quand je disais qu'il faut donner
le temps puis l'éducation pour pouvoir expliquer à la personne comment ça se
vit ici.
M. Derraji : C'est là où je
comprends que vous ne pouvez pas mesurer ça par des tests mais plutôt le vivre
sur le terrain.
Mme Orellana (Mercedes) : Et
d'expliquer à la personne pourquoi. Et l'inverse, l'autre côté de l'inquiétude
aussi, ça s'est dit, un directeur, une directrice des ressources humaines, par
exemple, femme, qui est en train d'embaucher quelqu'un mais qui dit : Moi,
j'ai une crainte parce que j'ai peur que cette personne-là, il ne voudra pas
recevoir des ordres de ma part. Mais là il faut expliquer à la personne
justement qu'il y a un exercice à faire des deux côtés pour que la personne
comprenne comment ça se fait ici, au Québec.
M. Derraji : Merci. Je crois
que ma collègue... Oui.
Mme Robitaille : Oui. Il me
reste deux minutes, oui...
La Présidente (Mme Chassé) :
O.K. En deux minutes, Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme Robitaille : O.K. Oui,
brièvement. Vous avez parlé tout à l'heure des réfugiés. Vous avez parlé de
cette perception des réfugiés comme un fardeau et vous dites : Ce n'est
pas ça du tout...
Une voix
: ...
Mme Robitaille : ...et
j'aimerais que vous nous parliez justement de cette capacité d'intégration,
cette capacité de travail des réfugiés, essayer de défaire ce mythe-là que
certains peuvent avoir.
Mme Orellana (Mercedes) :
Moi, je pense... Dans notre mémoire, on donne une proposition à la fin, en
disant au gouvernement : Est-ce que c'est possible de faire une recherche
pour mesurer l'impact, et là on parle de mesures, pour mesurer l'impact de
l'apport de l'immigration humanitaire, les réfugiés, au Québec, à travers différentes
villes au Québec.
Nous, on est dans une région où est-ce
qu'on a deux tiers des personnes réfugiées, si on prend les réfugiés pris en
charge par l'État et les réfugiés parrainés par le privé, et un tiers de
l'immigration économique. Mais je suis convaincue qu'on serait capables de
démontrer que, les réfugiés qu'on reçoit, une fois la période de transition
faite au niveau de l'installation les premières années, la personne, elle
devient économiquement active. Elle va payer des impôts comme tout le monde,
elle va apprendre la langue, elle va s'intégrer, elle va faire des enfants,
elle va grandir sa famille.
Donc, il y a un impact économique quand
même intéressant aussi à regarder, et, même s'il y a un investissement social
au début, à la longue, on est gagnant.
Mme Robitaille : Donc...
Mme Letendre (Lucie) : Mais
moi, juste pour ajouter, j'inviterais...
Mme Orellana (Mercedes) :
...des impôts comme tout le monde, elle va apprendre la langue, elle va
s'intégrer, elle va faire des enfants, elle va agrandir sa famille.
Donc, il y a un impact économique quand
même intéressant aussi à regarder, et, même s'il y a un investissement social
au début, à la longue, on est gagnant.
Mme Robitaille : Donc...
Mme Letendre (Lucie) : Mais
moi, juste pour rajouter, j'inviterais même le gouvernement à faire une
campagne de sensibilisation sur la question des personnes immigrantes au Québec
et des réfugiés tout comme on le fait en matière de sécurité automobile. Il
faut vraiment aller au coeur, au noeud de cette perception que les gens ont que
les personnes réfugiées sont ici puis qu'elles ne sont pas utiles à la société.
Ces personnes-là, ce n'est pas notre expérience, elles sont ici pour
travailler, puis elles veulent participer au succès de la société québécoise
puis elles veulent participer au succès des entreprises d'ici.
La Présidente (Mme Chassé) :
En conclusion.
Mme Letendre (Lucie) : Alors,
il faut vraiment aller au coeur de ce mythe.
Mme Robitaille : Donc, il y a
de la place pour les réfugiés dans la région de Sherbrooke.
Mme Letendre (Lucie) : Oui.
Mme Orellana (Mercedes) : Beaucoup.
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci. J'invite maintenant le député de Laurier-Dorion du deuxième groupe
d'opposition à prendre la parole pour 2 min 45 s.
M. Fontecilla : Merci.
La Présidente (Mme Chassé) :
Allez-y.
M. Fontecilla : Bonjour,
Madame. La TCRI hier nous disait que... nous parlait d'une sorte de
privatisation détournée du système de sélection au Québec, là, parce qu'on
donnait de plus en plus de place aux employeurs dans la sélection des
immigrants et ils craignaient une certaine forme d'homogénéisation parce qu'on
sait qu'il y a des milliers qui rentrent dans la sélection et qui sont souvent
inconscients mais qui rentrent quand même et qui fait en sorte qu'on va choisir
de plus de francophones, de blancs, des Européens. Est-ce que vous partagez cet
avis?
Mme Orellana (Mercedes) :
Oui. Mais en fait, c'est... je n'ai pas eu l'occasion nécessairement d'entendre
la TCRI dans les commentaires, mais je pense que c'est... non, les entreprises,
les témoignages que j'ai du travail qu'on fait avec les entreprises de la
région de l'Estrie, c'est qu'ils vont aller participer à des Journées Québec,
oui, des Journées Québec que le gouvernement fait en France, par exemple, mais
qui donnent accès au bassin d'Afrique du Nord, par exemple, donc dans des pays
comme la Tunisie, le Maroc, etc., l'Algérie. Et il y a aussi d'autres actions
qui se font, les entreprises, dans d'autres pays comme le Mexique, Nicaragua.
Donc, on est dans un autre continent au niveau de l'Amérique latine. Je pense qu'on
est dans une région assez diversifiée en temps d'immigration, on a au-delà de
133 communautés qui sont présentes dans de petits noyaux, mais, quand même,
ensemble, ça fait une belle mosaïque, je vous dirais. Donc, je pense que c'est
important de continuer dans cette diversité aussi pour consolider le noyau déjà
existant.
M. Fontecilla : Et, dites-moi,
la planification prévoit un certain plafond pour les personnes réfugiées et le
programme de réunification familiale qui est de compétence fédérale, mais,
pratico-pratique, ça fait en sorte que, les gens qui veulent regrouper la
famille, ça va prendre plus longtemps, et des réfugiés, il va y en avoir moins,
etc. Ça envoie le message que ce n'est pas des gens très utiles à l'économie du
Québec. Est-ce que vous partagez ce point de vue là?
Mme Orellana (Mercedes) :
Non, puis c'est pour ça qu'on vient de vous dire justement qu'on souhaiterait
qu'on puisse avoir des recherches, des analyses, des sondages qui vont nous
dire exactement : Est-ce que nos perceptions sont vraies ou elles sont
fausses ou sont partiellement vraies. Nous, on n'en partage pas, parce que
notre travail au quotidien avec les personnes réfugiées nous font dire que
c'est des personnes qui participent à la société aussi.
M. Fontecilla : Est-ce que ça
pourrait vouloir dire que le gouvernement fonde ses politiques sur des
perceptions?
Mme Orellana (Mercedes) : Je
ne vais pas sur ce plan-là, mais j'airais plutôt pour vous dire que, ce qu'on
peut constater au niveau des chiffres, c'est que le niveau des personnes
réfugiées prises en charge par l'État que le gouvernement du Québec avait en
2010, environ, qui était autour de 1 900 personnes, on est rendu à
1 200 aujourd'hui...
La Présidente (Mme Chassé) :
...
Mme Orellana (Mercedes) :
...donc, je pense que c'est important de revenir puis de trouver un équilibre
parce que c'est une immigration qui peut apporter quand même beaucoup au Québec
aussi.
M. Fontecilla : Merci.
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci. Je cède maintenant la parole à la députée de Gaspé du troisième groupe
d'opposition, 2 min 45 s.
Mme Perry Mélançon : Merci.
Bonjour, mesdames, merci de votre venue et surtout de tout ce que vous faites
pour contribuer à l'aide... au soutien de nos nouveaux arrivants en région. Je
suis une députée de région également, donc je sais qu'on peut recevoir plus
d'immigrants en région, ça, c'est sûr, vous dites que vos ressources ont même
été sous-utilisées dans les dernières années. Donc, comment voyez-vous
l'annonce des nouveaux agents d'intégration qui vont accompagner les nouveaux
arrivants, là, même au niveau de la sélection et de l'intégration? Est-ce que
vous avez des craintes par rapport à votre place dans tout ce système-là et
services? Ce sera...
• (14 h 50) •
Mme Orellana (Mercedes) :
Oui. Non, on n'a pas de craintes. En fait, j'ai une des ressources qui a
travaillé avec le comité qui a regardé le parcours d'accompagnement dans son
élaboration. Je pense que c'est plutôt le travail de concertations puis de
collaborations très étroites avec le gouvernement qu'il va falloir surveiller
pour que ça ne se traduise pas dans un travail de contrôle ou de supervision
juste pour remplir des petites cases, mais pour s'assurer effectivement qu'on
ait un suivi rigoureux du parcours des personnes. Je pense que le gouvernement
reconnaît l'expertise qu'il y a dans son réseau de partenaires, dont le Service
d'aide aux néo-Canadiens fait partie. Et ce qui est important aussi, c'est
probablement toute la question... Cette mesure...
Mme Orellana (Mercedes) :
...qu'on a un suivi rigoureux du parcours des personnes. Je pense que le gouvernement
reconnaît l'expertise qu'il y a dans son réseau de partenaires, dont les
services de... canadien fait partie. Et ce qui est important aussi, c'est probablement
toute la question... Cette mesure est venue répondre à une lacune qui avait été
identifiée par le Vérificateur général de 2017, donc je pense que justement a
fait... a pris en charge la mesure pour corriger cette situation qui avait été
identifiée.
Mme Perry Mélançon : En
terminant, justement, vous avez parlé aussi de l'accompagnement des employeurs,
parce que c'est aussi une démarche, c'est une charge de travail, une lourdeur,
et puis souvent ils se retournent vers des firmes pour avoir de l'aide, et
tout, ça coûte des sous. Alors, comment est-ce que le gouvernement pourrait
mieux soutenir les employeurs? Quel type d'accompagnement pourrait se faire?
Mme Letendre (Lucie) : Non,
mais on sent qu'on a déjà mis en place des services de formation aux entreprises
pour les aider dans leurs communications interculturelles. Puis là-dessus, il
ne faut pas juste penser qu'il faut aider l'immigrant puis l'employeur, il faut
aider aussi les travailleurs qui sont déjà sur place. Alors, effectivement
qu'un financement accru du gouvernement pour permettre la mise en place de tels
programmes serait également bienvenu. Mercedes, je ne sais pas si tu veux
ajouter.
La Présidente (Mme Chassé) :
En conclusion.
Mme Orellana (Mercedes) :
Bien, en fait, je pourrais juste vous dire qu'à travers le service aux entreprises
de Services Québec, il y a déjà probablement une porte aussi qu'on pourrait
exploiter davantage. Le gouvernement pourrait vérifier l'assouplissement de
certaines mesures ou l'ajout de certaines mesures pour que les entreprises
puissent y avoir accès et faire la promotion surtout des services qui existent déjà
dans des organismes comme le nôtre pour la formation en gestion de la diversité
culturelle.
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci. Ça termine votre exposé et le bloc d'échange. Je suspends momentanément
les travaux pour permettre au prochain groupe de prendre place. Merci encore
pour votre contribution.
(Suspension de la séance à 14 h 52)
(Reprise à 14 h 54)
La Présidente (Mme Chassé) :
Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants de l'Association
canadienne des conseillers professionnels en immigration. Vous avez
10 minutes pour votre exposé. À une minute de la fin, je vous ferai un
signe. Je vous invite tout d'abord à débuter en vous présentant. Bon exposé.
M. Jade (Dory) : Merci. Mme la
Présidente, M. le ministre, Mmes, MM. les députés, bonjour. Mon nom, c'est Dory
Jade, je suis le directeur général de l'Association canadienne des conseillers professionnels
en immigration. Je veux remercier la commission de nous avoir invités à
présenter un mémoire, ainsi que... sur la planification des niveaux d'immigration
2020‑2022. M'accompagnent aujourd'hui Mme Kathy Pellerin...
M. Jade (Dory) : ...en
immigration. Je veux remercier la commission de nous avoir invités à présenter
un mémoire ainsi que sur la planification des niveaux d'immigration 2020‑2022.
M'accompagnent aujourd'hui Mme Kathy Pellerin, qui est membre du conseil
d'administration de l'association, et Mme Sylvie Gonin, qui est à ma droite,
membre du comité de la section Québec. L'ACCPI est l'association
professionnelle pancanadienne des consultants en immigration. Elle les
représente, elle leur fournit des services d'information et de
perfectionnement. Elle agit distinctement, mais en concert avec le CRCIC, qui
est l'ordre professionnel ou l'organisme de réglementation.
Notres section du Québec compte la grande
majorité de consultants inscrits au registre des consultants en immigration du
Québec. Nos points de vue sur les orientations sont les suivants, je vais être
bref et juste prendre quelques-uns des points qui seront les plus importants.
L'orientation 1, les niveaux d'admission... concernant les niveaux d'admission,
sur ce point-là, l'ACCPI est persuadée que l'immigration influence la
croissance démographique, contribue ainsi à la croissance économique et à la
prospérité du Québec. Comme le démontrent les plus récentes perspectives
démographiques de l'ISQ, qui est Institut de la statistique du Québec, pour la
période 2016 à 2066, il faut atteindre annuellement 55 000 immigrants pour
maintenir une croissance raisonnable et ralentir le vieillissement de la
population. De plus, afin d'éviter une chute importante du poids démographique
du Québec et ses répercussions politiques et économiques, il sera nécessaire
d'augmenter le nombre d'immigrants admis chaque année au Québec.
Le Canada veut recevoir, comme vous le
savez, 350 000 immigrants par année en 2021. Si le Québec exerçait son
pouvoir sous l'Accord Canada-Québec, ce nombre aurait atteint 79 000
personnes. Certains affirment que ce nombre dépasse la capacité d'accueil du
Québec, nous pensons qu'à l'intérieur de paramètres raisonnables cette capacité
d'accueil est, avant tout, une question de leadership politique. Et, vu les
récentes mesures annoncées que ce soit au niveau de la francisation ou de
l'intégration, nous croyons que cette capacité d'accueil est grandissante.
Voilà pourquoi l'ACCPI recommande de s'inspirer du scénario de l'ISQ,
d'augmenter jusqu'à 55 000 personnes immigrantes par période qui est un
an.
• (15 heures) •
L'orientation 2, l'apport de l'immigration
économique. Nous sommes d'accord avec cette orientation. Toutefois, le maintien
d'un pourcentage pour les catégories dans le total des admissions ne devrait
pas servir comme motif pour réduire les membres d'admission dans, par exemple,
les membres de la famille ou le parrainage des enfants, de personnes... de
Québécois ou de Québécoises qui sont à l'extérieur du pays. Si plus de
Québécois, par contre... par exemple, désirent parrainer leur conjoint ou leurs
enfants, ce barème ou ce plafond de 65 % ne devrait pas s'appliquer. Il
faudrait aussi augmenter les nombres pour les gens d'affaires pour le déclin
démographique et l'enjeu de la relève entrepreneuriale nous inquiète, un besoin
important et immédiat. Avons-nous suffisamment d'hommes d'affaires au Québec?
Si des gens intéressés à créer des entreprises au Québec répondent aux
exigences, selon quelle logique devons-nous limiter le nombre d'entrepreneurs à
60 et de travailleurs autonomes à 50, tel qu'il était l'année passée? Pour les
investisseurs, nous proposons de, progressivement, hausser les...
15 h (version non révisée)
M. Jade (Dory) : ...selon
quelle logique devons-nous limiter le nombre d'entrepreneurs à 60 et de travailleurs
autonomes à 50, tel qu'il était l'année passée. Pour les investisseurs, nous
proposons de progressivement hausser les quotas et d'améliorer la rétention en
relevant le seuil de passage pour favoriser ceux qui obtiennent... ou ceux qui
obtiennent davantage de points. Nous croyons que l'ACCPI devait être associée à
la mise en place des nouveaux programmes pour les gens d'affaires, vu que la
grande majorité est... selon le ministère, plus que 95 % de ces gens-là
ont recours aux services de consultants en immigration.
Orientation trois : augmenter la part
du PEQ. Nous soutenons cette orientation, nous constatons avec plaisir que plusieurs
des recommandations que nous avons faites en 2018 ont été retenues concernant
le PEQ. Par contre, pour les travailleurs temporaires, nous continuons à
demander de revenir à la définition initiale d'emploi admissible au PEQ, qui
accepterait le travail autonome et celui pour une entreprise qui est au Canada
et dont le propriétaire est en situation temporaire.
En ce qui concerne le volet étudiants
étrangers, nous voudrions voir assouplir les exigences du diplôme admissible.
Par ailleurs, un passage du cahier de consultation nous a laissés perplexes. À
la page 8, on écrit qu'Arrimasera étendu pour les années prochaines aux autres
programmes d'immigration, en commençant par le PEQ. Or, le PEQ ne fonctionne
pas selon une grille de sélection ou des points, alors on aimerait savoir
probablement comment Arrima et le PEQ fonctionneraient ensemble. Par
conséquent, nous n'appuyons pas cette intention.
Finalement, nous ne comprenons pas la
cohérence avec cette orientation et la décision suspendue... de suspendre, le
10 juillet 2019 jusqu'au 1er novembre 2019, la réception des
demandes du volet Diplômés du Québec. La raison invoquée de donner la priorité
à la sélection de personnes qui occupaient un emploi au Québec au cours de
cette période ne nous apparaît pas convaincante.
La Présidente (Mme Chassé) :
...à votre exposé.
M. Jade (Dory) : D'accord. Je
vais donner la parole à ma collègue Sylvie pour la conclusion et le point six.
Mme Gonin (Sylvie) : Oui.
Alors, je vais aller avec l'orientation six : appuyer les employeurs pour
la sélection temporaire. Nous appuyons le MIDI dans sa démarche de mettre en
place une nouvelle offre intégrée de services aux entreprises. Nous
recommandons que le MIDI puisse s'assurer de bien identifier les différents
partenaires publics et intégrer également des entreprises privées dûment
agréées et spécialisées. L'offre de services actuelle n'est pas suffisante et
pas suffisamment adaptée aux besoins des employeurs devant faire face aux défis
du recrutement international, autant dans la phase de sélection selon le bassin
géographique visé qu'au niveau de l'administration...
La Présidente (Mme Chassé) :
Il vous reste 30 secondes.
Mme Gonin (Sylvie) : ... des
procédures d'immigration à court et moyen terme. Donc, nous accueillons par
contre positivement les premiers efforts du MIDI en matière d'accompagnement
des employeurs, on le sent très bien déjà, que les entreprises acceptent ce
nouveau service.
Donc, j'y vais avec la conclusion, en
terminant, que nous vous référons à notre mémoire pour d'autres considérations,
recommandations pour donner suite à notre analyse du cahier de consultation.
Donc, vous retrouverez les autres recommandations dans le mémoire. Merci.
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci à vous. Nous allons débuter la période d'échange. M. le ministre, la
parole est à vous pour un bloc de 16 min 30 s.
M. Jolin-Barrette : Merci,
Mme la Présidente. M. Jade, Mme Pellerin, Mme Gonin, bonjour, merci d'être
présents en commission parlementaire aujourd'hui pour présenter votre mémoire
sur la planification pluriannuelle.
D'entrée de jeu, je veux qu'on aborde la
question d'Arrimaavec l'utilisation du Programme d'expérience québécoise par
Arrima. Lorsqu'on dit qu'on va utiliser Arrima, c'est la plateforme qu'on
utilise, parce que... Je vous donne un exemple, quelqu'un qui... ce qu'on
souhaite faire...
M. Jolin-Barrette : ...votre
mémoire sur la planification pluriannuelle.
D'entrée de jeu, je veux qu'on aborde la
question d'Arrimaavec l'utilisation du Programme d'expérience québécoise par
Arrima. Lorsqu'on dit qu'on va utiliser Arrima, c'est la plateforme qu'on
utilise. Parce que je vous donne un exemple, quelqu'un qui... ce qu'on souhaite
faire, c'est que le Programme d'expérience québécoise passe par la plateforme
informatique Arrima de façon à faire en sorte de s'assurer que la personne,
elle est admissible. Je vous donne un exemple, quelqu'un qui appliquerait dans
le PEQ, dans le Programme d'expérience québécoise, et qu'elle n'est pas
admissible, supposons, elle n'a pas son niveau 7 de français, ou ça ne
fait pas un an qu'elle travaille sur une période de deux ans, mais, déjà, cette
personne-là, si elle répond aux besoins du marché du travail, on ne voudrait
pas qu'elle soit oubliée et qu'elle ne puisse pas faire partie de la banque de
personnes potentiellement immigrantes, donc on pourrait la diriger vers le
Programme régulier des travailleurs qualifiés. C'est dans ce sens-là qu'on veut
utiliser notamment la plateforme Arrima, et il faut comprendre qu'à l'intérieur
de la plateforme Arrima, c'est un véhicule qui peut gérer plusieurs programmes
d'immigration, à la fois, le Programme régulier des travailleurs qualifiés, à
la fois celui du PEQ. Éventuellement, si jamais on avait le rapatriement de la
compétence en matière de regroupement familial aussi, on pourrait l'utiliser.
C'est vraiment l'outil de base que le ministère va se servir. Alors, je
souhaite juste diminuer vos craintes relativement à l'utilisation. Le programme
en soi est distinct de celui du Programme régulier des travailleurs qualifiés,
mais c'est la plateforme qu'on utilise comme véhicule informatique à ce
niveau-là.
Au niveau des travailleurs temporaires,
comment vous percevez ça, le fait que le Québec souhaite aller de l'avant avec davantage
de travailleurs temporaires dans l'objectif de permanentiser ces
travailleurs-là pour répondre à la pénurie de main-d'oeuvre?
Mme Gonin (Sylvie) : Oui,
bien, tout à fait. En fait, on croit que c'est une belle avenue parce que,
comme vous le dites, ils rentrent ici de façon temporaire qui est beaucoup plus
rapide que d'aller vers le grand processus de la résidence permanente pour
ensuite s'adapter ici et pouvoir aller plus loin dans leurs démarches et de
s'intégrer graduellement dans la société québécoise.
M. Jolin-Barrette : O.K. Et
lorsqu'on parle d'intégration, là, de la société québécoise, la semaine
dernière, on a annoncé le parcours d'accompagnement personnalisé, qu'est-ce que
vous pensez du parcours qu'on va déployer, là, est-ce que vous voyez ça d'un
bon oeil pour l'intégration des personnes immigrantes?
Mme Gonin (Sylvie) : Oui.
Bon, disons que ça vient, si je le comprends bien, là, en complément de ce qui
est... les autres services qui sont déjà offerts par les organismes
d'intégration. En fait, ce qu'on soulignait tout à l'heure dans
l'orientation 6 était de pouvoir aller plus loin avec les services,
concrètement, là, d'accompagner les employeurs au niveau des procédures légales
à court terme et à long terme. Donc, qu'est-ce qu'on se rend compte sur le
terrain actuellement, c'est qu'à titre de consultants, on est peut-être moins
sollicité qu'on pourrait l'être et... c'est ça, en fait, la... Je voulais juste
revenir sur le point qu'on a peut-être coupé un peu. C'est ça, en fait... Dory,
tu veux-tu le terminer...
M. Jade (Dory) : O.K., je vais
continuer. C'est que les consultants en immigration font partie déjà du système
qui existe déjà, et il y a des cas qui commencent à arriver. Et, peut-être, M.
le ministre, vous pouvez nous clarifier comment l'accompagnement va
fonctionner, parce qu'on est sous l'impression et sous quelques échos qui
disent que certains de ces centres-là ne reçoivent plus de subventions parce
que le nouveau système rentre en fonction, et ces personnes-làse
convertissent un peu hors du cadre de l'accompagnement à aller plus dans un
cadre légal de la loi. Alors, j'espère que je me trompe et j'espère que ces
échos ne sont pas corrects.
M. Jolin-Barrette : Bien, en
fait, peut-être juste pour me renseigner, je ne suis pas sûr de saisir votre
question quand vous dites qu'ils vont plus être dans le cadre de la loi. À quel
centre vous faites référence?
M. Jade (Dory) : Vu que c'est
ça qu'on a entendu, je n'ai pas de preuves à l'appui malheureusement
présentement, que, vu qu'il n'y a plus de subventions, au lieu d'envoyer des
employés, les employés travaillent en termes d'aider les personnes à remplir
des documents ainsi qu'à être conseillées, comment la loi en immigration
fonctionne au Québec, ce qui est techniquement illégal selon la loi du Québec.
M. Jolin-Barrette : Vous
voulez dire, dans les organismes communautaires?
M. Jade (Dory) : Oui.
• (15 h 10) •
M. Jolin-Barrette : Bien, en
fait, si...
M. Jade (Dory) : ...et à être
conseillé comment la loi en immigration fonctionne au Québec, ce qui est techniquement
illégal selon la loi du Québec.
M. Jolin-Barrette : Vous
voulez dire dans les organismes communautaires.
M. Jade (Dory) : Oui.
M. Jolin-Barrette : Bien, en
fait, si vous faites référence au parcours d'accompagnement personnalisé, l'objectif,
c'est de faire en sorte de déployer un accompagnement pour les personnes
immigrantes de la part du ministère de l'Immigration, des agents d'aide à l'immigration
dès l'étranger, s'ils ont des questions, notamment de favoriser l'apprentissage
du français en ligne dès l'étranger, s'il y a des difficultés avec les ordres
professionnels ou même de faire reconnaître les compétences dès l'étranger...
M. Jade (Dory) : Et ça, c'est
parfait.
M. Jolin-Barrette :
...d'avoir le permis d'exercice aussi, tout ça en amont, avant d'arriver, et
que, lorsque les personnes arrivent à Dorval, à l'aéroport, eh bien, elles
puissent avoir rendez-vous avec un agent d'aide à l'intégration dans les cinq
jours ouvrables. Alors, on va vraiment faire en sorte, là, de déployer les ressources
au sein du ministère de l'Immigration dans les régions pour faire en sorte qu'il
y ait un accompagnement parce qu'il y a des difficultés. On ne vient pas se
substituer au travail que les partenaires du ministère font, que ce soit les organismes
communautaires ou les différents groupes, on est vraiment là en soutien, mais
il faut que le ministère retrouve son rôle qui, on peut dire, au cours des
dernières années, avait été un peu diminué, si je peux dire, parce que la responsabilité
de l'intégration, c'est principalement une responsabilité des communautés, mais
de l'État lui-même. Alors, c'est pour ça qu'on a décidé de déployer le
parcours.
Puis, vraiment aussi, ça faite suite aux
constats de la Vérificatrice générale qui disait : Écoutez, il n'y a pas
de suivi, il n'y a pas d'accompagnement. Vous n'en faites pas suffisamment, et
donc on corrige cette situation-là puis on s'assure vraiment que, dans toutes
les étapes, dans toutes les démarches du processus d'intégration d'une personne
en fonction de sa réalité, en fonction du profil de la personne, parce que ce
n'est pas vrai qu'il n'y a qu'une seule réalité au niveau... En fait, chaque
personne a sa propre réalité lorsqu'on immigre dans le pays, alors ce n'est pas
tout le temps les mêmes besoins. Donc, l'agent d'aide à l'intégration va être
là pour ça. Donc, peut-être que ça vous renseigne un peu sur c'est quoi...
M. Jade (Dory) : Très
apprécié.
M. Jolin-Barrette : ...la
vision du ministère.
Mme Gonin (Sylvie) : Si je
peux poursuivre sur ça, en fait, ce qu'on voulait tout à l'heure, ce que je
voulais apporter, en fait, c'est que, oui, ces agents d'immigration là, c'est
vraiment très bien ce que vous faites, à ce niveau-là, on sent qu'il y a un
besoin. Puis je pense que, justement, les attraper tout de suite à l'aéroport,
qu'ils sentent qu'ils vont avoir un suivi dans les jours suivants, ça va
vraiment sécuriser ces gens-là. Parce que même les travailleurs temporaires qui
arrivent, même si c'est un employeur qui veut bien faire, et tout ça, c'est
quand même une relation d'emploi, employé-employeur, d'avoir quelqu'un, un
spécialiste qui va pouvoir donner les bons conseils et renseignements au niveau
de leur intégration, c'est vraiment une très bonne nouvelle.
Par contre, ce qu'on voit, c'est pour ça
que, tout à l'heure, j'ai ramené un petit peu au niveau des associations, il ne
faudrait pas que ça se répète à ce niveau-là, c'est que les gens sont... vos
personnes qui vont entrer en poste sont en première ligne, ils sont directement
en contact avec le besoin de cette personne-là. Et parfois, bien, c'est le
besoin d'un service qui touche la loi de l'immigration, que ce soit provincial
ou fédéral. Et c'est là qu'on sent que les conseils viennent par habitude ou
c'est ça un peu qu'on voulait apporter, de venir vers nous, qui est déjà
réglementé et que vous nous donnez un droit de pratique ici, au Québec, pour
qu'on puisse venir en appui à ces gens-là.
M. Jolin-Barrette : Je
comprends. Je vous remercie pour la présentation, je sais que j'ai des
collègues qui veulent poser des questions. Alors...
La Présidente (Mme Chassé) :
...prend la parole.
Mme Lachance : Merci, Mme la
Présidente. Mesdames messieurs... monsieur, pardon... merci d'être là. Merci de
participer à cet échange qui est très enrichissant, ma foi!
Je veux revenir, madame, parce que vous
étiez en fin d'exposé, et ça a déboulé très rapidement, concernant
l'orientation 6 justement dont on parlait. Vous avez dit que vous étiez en
faveur de l'accompagnement des employeurs de toutes les régions dans la
démarche de recrutement...
Mme Gonin (Sylvie) : Oui.
Mme Lachance : ...et puis que
vous souhaitiez une collaboration avec les partenaires publics et privés
agréés. De ce fait, on vient de parler, au niveau de la loi, entre autres
choses; j'aimerais ça si on pouvait en discuter pour approfondir. Selon vous,
parce que vous avez mentionné dans votre mémoire que l'offre actuelle n'était
pas suffisante et pas suffisamment adaptée aux besoins des employeurs...
J'aimerais ça vous entendre parler de ce que serait une offre adaptée aux
besoins des employeurs, un peu comment...
Mme Lachance : ...j'aimerais ça
si on pouvait en discuter pour approfondir. Selon vous, parce que vous avez
mentionné dans votre mémoire que l'offre actuelle n'était pas suffisante et pas
suffisamment adaptée aux besoins des employeurs. J'aimerais ça vous entendre
parler de ce que serait une offre adaptée aux besoins des employeurs, un peu
comment elle se déclinerait, quelle procédure, quelles étapes sont importantes.
Mme Gonin (Sylvie) : 7
minutes, là, pour tout ça?
La Présidente (Mme Chassé) :
Vous êtes rendus à 5 min 30 s.
Mme Gonin (Sylvie) : O.K.
Bien, écoutez, moi, je suis une personne de terrain, là, je veux dire, de créer
votre offre en détail serait difficile un petit peu pour moi, là. Par contre,
je me rends compte qu'il y a beaucoup de donneurs de services qui
s'improvisent. C'était un peu notre aspect, là, d'apporter le point ici, là, de
service qui n'est pas suffisant ou suffisamment adapté. On parle, là, de
recruteur international. Je pense que le ministre du Travail et de... de
l'Emploi et du Travail, Solidarité sociale travaille aussi sur un dossier qu'on
a déposé, nos recommandations pour réglementer tout ça un petit peu pour
éviter, là, des situations qu'on se voit reprendre la balle en entreprise pour
des situations dommages, là, de dossiers mal préparés ou laissés tomber. Donc,
il y a quelque chose à faire sur ça, mais de dire, là, que je vous propose
clairement des points à apporter, c'est une situation qu'on voit sur... en
région régulièrement, là.
Mme Lachance : Bien, en fait,
c'est parce que vous avez parlé de manque au niveau de l'adaptation, c'est
peut-être davantage à ce niveau-là pour les employeurs, quelle...
M. Jade (Dory) : Permettez que
je vous réponde? Oui?
Mme Lachance : Merci.
M. Jade (Dory) : O.K. Ce que
nous voulons mentionner, je vais essayer de le vulgariser, comme ça, peut-être
c'est plus simple. Vous avez toutes sortes d'employeurs, vous avez toutes
sortes d'industries, et dans chaque industrie il y a aussi des catégories.
Souvent, on sait ça, et ce n'est pas quelque chose de négatif, mais c'est la
réalité. Le gouvernement souvent, dans tous les services, incluant l'immigration
maintenant, dans tout ce qui est service à la population, c'est souvent un
service... je le nommerai pour des fins de vulgarisation, générique. Donc, il
ne s'adapterait pas aux entreprises qui ont besoin de quelque chose en
particulier. Je vais prendre un seul exemple, sans nommer aucune entreprise,
mais l'industrie de vidéo et de logiciels à Montréal, c'est une industrie qui
est grande, que le gouvernement pourrait par exemple allouer les ressources
nécessaires, l'argent et les personnes qui pourraient aider ces gens-là. Par
contre, une autre petite industrie que peut-être ne vous passerait même pas par
la tête, mais tout ce qui est relié au domaine dentaire, qui est toujours en
pénurie depuis 1980 ou 1990, tout ce qui est relié aux prothèses, tout ça, ça,
c'est tellement minime que je douterais par exemple que le ministère pourrait
donner un service en particulier pour ça. C'est un peu... j'ai essayé de
vulgariser l'idée pour vous... pour mettre en contexte les nuances de plusieurs
industries, plusieurs besoins.
Mme Lachance : Est-ce qu'il me
reste quelques secondes? Deux minutes?
La Présidente (Mme Chassé) :
Oui.
Mme Lachance : Merci. En fait,
ce que je voulais savoir, c'est : En quoi les entreprises agréées étaient
les mieux placées pour établir un processus de recrutement?
Mme Gonin (Sylvie) : Bien, en
fait, si je veux transposer la situation dans une entreprise privée, j'ai
rarement vu un dirigeant d'entreprise dire : Ce matin, je vais faire faire
mes états financiers par le département des ventes. Tu sais, je veux dire,
quand on a besoin de conseils légaux, je veux dire, on va se tourner vers un
avocat. On a besoin de renfort au niveau des démarches légales pour
l'immigration, on va aller vers un consultant en immigration, un avocat, un
notaire, bon, ceux qui sont réglementés pour le faire. Vous n'êtes pas sans
savoir que les lois changent rapidement et qu'on doit s'adapter, on est
constamment en formation pour offrir le meilleur des conseils à nos clients, et
puis c'est ce qu'on voit quand même assez régulièrement, là, que les conseils
viennent d'un peu de toutes sortes de façons et puis que ça peut causer quand
même des situations problèmes en entreprise. Donc, en ayant le support de gens
qui sont agréés et spécialisés dans leur domaine, bien, je pense que ça vient
renforcir, là, vos...
Mme Lachance : Ça, c'est au
niveau du processus d'immigration, mais vous êtes d'accord que, pour le
processus de recrutement, il faut aller en amont avec des spécialistes en
recrutement.
Mme Gonin (Sylvie) :
Exactement, des gens qui vont avoir... c'est ça, la formation et les
connaissances pour le faire.
Mme Lachance : Oui, monsieur?
• (15 h 20) •
M. Jade (Dory) : Je voulais
dire que le recrutement, avant qu'une personne devienne...
Mme Lachance : ... d'accord
que, pour le processus de recrutement, il faut aller en amont avec des
spécialistes en recrutement.
Mme Gonin (Sylvie) : Exactement,
des gens qui vont avoir... bien, c'est ça, la formation et les connaissances
pour le faire.
Mme Lachance : Oui, Monsieur.
M. Jade (Dory) : Non, je
voulais dire que le recrutement, avant qu'une personne devienne résidente
permanente au Québec, exige tous les services d'immigration fédérale et/ou
provinciale, dépendamment de la situation.
Mme Lachance : Merci beaucoup.
M. Jade (Dory) : Merci.
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci. Je cède maintenant la parole au député de Nelligan pour un bloc d'échanges
de 11 minutes.
M. Derraji : Merci, Mme la
Présidente. Mesdames, messieurs, bonjour, bienvenue. Merci pour votre rapport.
J'ai juste une interrogation par rapport
au... Vous avez dit «droit de pratique au Québec». Pouvez-vous juste nous
clarifier l'échange que vous avez eu avec le ministre?
Mme Gonin (Sylvie) : Oui...
M. Derraji : Qu'est-ce que
vous voulez dire par «le droit de pratique»?
Mme Gonin (Sylvie) : En fait,
pour être consultant réglementé en immigration canadienne,pour pouvoir offrir
des services, autant aux entreprises qu'aux gens de l'étranger, on doit être
réglementés par le conseil de réglementation en immigration du Canada. Ensuite,
pour pratiquer ici, au Québec, pouvoir donner des conseils et représenter des
gens au MIDI, on doit faire l'examen et avoir un droit de pratique ici, faire
partie de la liste des consultants...
M. Derraji : Merci. J'ai
compris maintenant ce que vous voulez dire. Est-ce que vous avez une inquiétude
par rapport à ce qui s'en vient au niveau de l'accompagnement, ou le profil
personnalisé, ou bien la stratégie qui a été annoncée par le MIDI, que ça
rentre en conflit avec ce qui existe déjà?
Mme Gonin (Sylvie) : Je vois
quand même ça très positif, ce qu'il nous annonce. Par contre, le vivant... Il
y a quand même des services qui existent déjà. Je ne sais pas comment ça va
s'arrimer à tout ça. Par contre, ce qu'on voit, nous, c'est que les gens en
première ligne, qui font de l'intégration des immigrants ne sont pas sans avoir
ces petites situations-là, légales, à régler avec les travailleurs ou les
employeurs. Et ça cause des réels conflits. Parce que, moi, sur le terrain, je
veux dire, on le voit, que, je veux dire... Vous avez peut-être entendu parler
que les régions ont beaucoup fait de l'immigration vers Montréal, apporter des
autobus en Chaudière-Appalaches, rentrer ces gens-là en entreprise. Donc, oui,
c'était une belle initiative. Les gens viennent, ils travaillent, mais après
deux ans on ne fait pas de suivi avec eux. Ça fait que, moi ça m'arrive de
faire des diagnostics en entreprise et de me rendre compte que, finalement, ces
gens-là n'ont même plus de permis valide. Ça fait que je suis obligée de dire
aux entreprises : Non. Il faut qu'ils cessent de travailler. Et puis, là,
bon... Vous comprenez, ça prend des gens spécialisés, tels que nous sommes, l'association,
ici, pour les supporter, ces employeurs-là. Et les gens qui sont en emploi, ce
n'est pas seulement de les rendre ici en emploi, c'est de les suivre et les
amener légalement vers la résidence permanente ou, du moins, les maintenir sur
des permis de travail temporaire ou autres permis pour ne pas qu'ils perdent
leur statut ici, là.
M. Derraji : Je comprends
l'enjeu. Ma dernière question, parce qu'après ma collègue va poursuivre. À la
lumière de ce que vous venez de dire et à l'explication que vous avez évoquée,
avez-vous une crainte d'une sorte compétition avec le MIDI? Avez-vous des
craintes qu'il va y avoir de plus en plus de décentralisation? Sentez-vous que
votre organisme est partenaire dans la nouvelle démarche du MIDI dans ce qu'il
compte déployer avec le projet de loi n° 9? Est-ce que vous êtes rassurés,
hein, pour être beaucoup plus clair?
Mme Gonin (Sylvie) : On
n'a pas beaucoup d'information non plus encore.
M. Jade (Dory) : C'est un
projet qui n'est pas encore avec tous les détails. Donc, on ne peut pas se
prononcer à ce sujet-là. Il faut que, vraiment, on ait plus de détails pour
pouvoir se prononcer.
M. Derraji : Vu votre
rôle, vu ce que vous jouez sur le terrain, aimeriez-vous que le ministre vous
invite et le ministère vous invite et vous inclue? Vous soulevez des
problématiques. Il me semble que c'est des problématiques... C'est du vécu.
Vous êtes sur le terrain. Vous accompagnez, vous voyez des cas au niveau de certaines
entreprises. Aimeriez-vous que le MIDI vous invite pour être sur la table?
Notre but, que ce soit l'opposition officielle ou le gouvernement, c'est
vraiment accompagner et non pas créer des problèmes. Est-ce que c'est ça que
vous aimeriez?
M. Jade (Dory) :
Absolument.
M. Derraji : O.K. Merci.
La Présidente (Mme Chassé) :
Mme la députée de Bourassa-Sauvé, il reste un peu moins de sept minutes au
bloc.
Mme Robitaille : Je veux
juste bien comprendre. Donc, toute cette question des seuils à 40 000,
selon vous, c'est une bonne ou une mauvaise idée? Baisser les seuils à
40 000, vous pensez que c'est une bonne ou une mauvaise idée dans le
contexte actuel?
M. Jade (Dory) : O.K.
C'est...
Mme Robitaille : Dans le
contexte actuel, parce que je sais que vous parlez de flexibilité.
M. Jade (Dory) : C'est
une décision que le ministère a prise, ou va prendre, ou le Parlement va voter
pour...
Mme Robitaille : ...baisser les
seuils à 40 000, vous pensez que c'est une bonne ou une mauvaise idée dans
le contexte actuel?
M. Jade (Dory) : O.K. C'est...
Mme Robitaille : Dans le
contexte actuel, parce que je sais que vous parlez de flexibilité.
M. Jade (Dory) : C'est le...
C'est une décision que le ministère a prise, ou va prendre, ou le Parlement va
voter pour, peu importe. Mais...
Mme Robitaille : Mais là on
est justement en consultations. Le ministre réfléchit. Alors, qu'est-ce que
vous... De la façon dont voyez ça, est-ce que c'est nécessaire de faire ça ou
si on devrait y aller avec 55 000 par année, comme vous semblez dire dans
votre rapport? J'aimerais vous entendre là-dessus.
M. Jade (Dory) : Nous, nous
préférons les 55 000 par année pour plusieurs raisons qu'on a évoquées,
incluant le poids démographique du Québec au Canada, parce que le Canada
accélère plus vite que nous. Ils ne nous attendront pas.
Par contre, j'aimerais donner une opinion
dans ce cadre. L'immigration temporaire est une immigration illimitée qui ne
rentre pas dans ces seuils-là, pour ceux parmi vous qui peut-être ne sont pas
au courant de ce détail. Le Québec pourrait, s'il choisit, de remplir la
différence du seuil par une immigration temporaire qui pourrait à ce moment-là
s'intégrer au cours des deux prochaines années, le temps que les seuils
montent, et convertir, si le terme est acceptable, ces personnes-là en
personnes permanentes pour combler le retard. C'est la situation et c'est une
proposition ou solution.
Mme Robitaille : Donc,
admettre plus d'immigrants... de travailleurs temporaires pour combler...
M. Jade (Dory) : Parce que ça
va être la situation. Tous les employeurs... et ça, ce n'est pas juste nous qui
le disons, nous ne sommes pas des employeurs, pour être en conflit, mais toutes
les statistiques démontrent que les employeurs sont en pénurie presque dans
toutes les industries, en particulier ceux à l'extérieur de la grande région de
Montréal.
Mme Robitaille : Est-ce
qu'on s'en va vers une situation où ça sera plus facile de passer du temporaire
au permanent ou le contraire, à la lumière de ce que vous voyez?
M. Jade (Dory) : Ça,
c'est le... O.K. Pour l'instant, on ne peut pas se prononcer là-dessus parce
que c'est une, si je peux me permettre de dire, c'est une façon tactique pour
le MIDI d'agir au moment opportun. Ça veut dire, il n'a pas besoin en principe
du gouvernement pour pouvoir décider comme ministère si le ministère voudrait
accélérer le processus ou le régresser en termes de conversions rapides. Par
contre, le Québec restera pour très longtemps et, avec respect, peu importe le gouvernement,
dans une situation précaire, vu que tous les dossiers passent par le gouvernement
fédéral avant d'avoir le visa, d'où les retards qui dépassent pour maintenant
les 24 mois. Donc, même si le Québec accélère son processus de conversion,
que j'ai appelé conversion, disons, d'un mois, il resterait un autre
24 mois d'attente.
Mme Robitaille : ...qu'on
disait ce matin avec d'autres gens qui étaient là en consultation. On disait
que baisser ces seuils en 40 000, en fait, ça étire le délai d'attente
pour les résidences permanentes parce que ça crée un «backlog» encore plus
grand. Donc, ça va un peu à contre-courant de ce qu'on voudrait, si je comprends
bien.
M. Jade (Dory) : Ça,
c'est des ententes internes entre le MIDI et le IRCC qui est le... Immigration,
Réfugiés et Citoyenneté Canada. C'est des ententes qui se font continuellement
pour voir combien de visas ils veulent cette année pour quelle catégorie et de
quel pays.
Mme Robitaille : Mais
s'il s'agit juste de vous, on devrait y aller avec 55 000 par année.
Ça serait la logique dans le contexte actuel.
M. Jade (Dory) : C'est ça
notre opinion.
Mme Robitaille : Hum-hum.
Et ce poids-là du Québec au sein du Canada, qui diminue, ça vous inquiète?
M. Jade (Dory) :
Absolument. Parce que, selon les calculs, ce que nous ne pouvons pas faire,
mais selon les calculs, c'est 79 000, si on veut exercer tout notre
pouvoir en termes de démographie en immigration selon l'accord signé en 1991.
Mme Robitaille : Il y
a...
M. Jade (Dory) : Mais
79 000, ce n'est pas possible.
Mme Robitaille : C'est
beaucoup.
M. Jade (Dory) : Puis ce
n'est pas équitable, puis ça ne fonctionnera pas.
Mme Robitaille : Mais
55 000, ça vous...
M. Jade (Dory) : En
principe, ça devrait.
Mme Robitaille : Oui. La
suspension. Vous parliez tout à l'heure de la suspension du passage à...
M. Jade (Dory) : Ça vient
à travers le PEQ.
Mme Robitaille : Un visa
pour les étudiants diplômés. Ça vous dérange beaucoup, ça? Est-ce que vous
pensez que c'est une erreur sérieuse?
• (15 h 30) •
M. Jade (Dory) : Bien, on
ne trouve pas la raison pour quoi. Parce que ces étudiants-là ont étudié ici.
Ils se sont... Ils ont planifié comme quoi ils ont ce droit de présenter cette
demande, qui ne prend pas que quelques semaines pour être soit approuvée ou
non, pour avoir une décision. Basé sur cette décision, ils vont aller en résidence
permanente qui...
15 h 30 (version non révisée)
M. Jade (Dory) : ...la raison
pourquoi, parce que ces étudiants-là ont étudié ici, ils se sont... ils ont
planifié comme quoi ils ont ce droit de présenter cette demande, qui ne prend
pas que quelques semaines pour être soit approuvée ou non, pour avoir une
décision. Basé sur cette décision, ils vont aller en résidence permanente,
qui... à ce moment-là, on retourne au délai que nous avons mentionné, des mois
et des mois, pour ne pas dire même des années. Donc, ce qui se passe, c'est
qu'arrêter ces personnes-là de prendre une décision dans leur avenir futur...
Et à mon avis, peut-être qu'on pourrait les laisser présenter des demandes, et
même si la demande va prendre un peu plus de temps faute de ressources, ce qui
pourrait arriver, au lieu que dire : Bon, on fait un moratoire...
La Présidente (Mme Chassé) :
Il vous reste moins d'une minute au bloc.
M. Jade (Dory) : ...pour une
certaine période.
Mme Robitaille : Est-ce que
des suspensions comme celle-là, le fait que, dans les
18 000 dossiers, il y avait ces gens-là au Québec dont a mis les
dossiers à la poubelle, est-ce que ça peut... et ces délais-là qui s'étirent,
vu qu'on descend à 40 000, pour ce qui est des résidences permanentes,
est-ce que ça peut jouer sur l'attractivité du Québec, ça?
M. Jade (Dory) : Pouvez-vous
répéter? Je m'excuse.
Mme Robitaille : Est-ce que ça
peut jouer sur l'attractivité du Québec? Parce qu'on voit la suspension de ce programme-là
pour les étudiants diplômés, et tout ça. Est-ce que ça peut avoir des
incidences, vu qu'on est en concurrence?
M. Jade (Dory) : Ma collègue
voudrait répondre à cette question.
La Présidente (Mme Chassé) :
En terminant.
Mme Pellerin (Kathy) : Oui. Dans
le fond, le problème, c'est qu'en disant ça on envoie un message très négatif, étant
donné qu'il y a un plan de vie déjà fait de toute personne qui vient ici, et la
majorité des gens qui viennent ici avec un permis de travail temporaire ont un
permis de... ils désirent rester au Québec, au Canada, et si on dit : On
va suspendre ce type de programme, ça envoie une alarme, et ils deviennent...
La Présidente (Mme Chassé) :
Ça termine...
Mme Pellerin (Kathy) :
...très inquiets avec leur futur, donc ils pourraient partir pour une autre
province.
La Présidente (Mme Chassé) :
C'est terminé. Merci. Je passe maintenant la parole au député de Laurier-Dorion,
2 min 45 s.
M. Fontecilla : Oui, merci,
madame. Monsieur, mesdames. Écoutez, on sait que la question de la volonté de
rendre permanents les travailleurs temporaires est pour l'instant hypothétique,
là, parce que c'est une compétence du gouvernement fédéral et, en ce moment, ce
n'est pas le cas. Mais vous, là, si vous deviez vous prononcer, est-ce que vous
préférez pour le Québec un travailleur permanent ou temporaire?
M. Jade (Dory) : Il faut faire
attention, c'est beaucoup plus complexe peut-être que... c'est beaucoup plus
complexe que ce que vous proposez, parce que, pour devenir un résident
permanent ou travailleur permanent, si on veut les nommer comme ça, ça prend
des mois et des années alors qu'une personne temporaire peut arriver ici, voire
moins que 30 jours, dans certains cas, donc ce n'est vraiment pas la même
comparaison. Par contre, je vous donne un exemple, pour les personnes qui sont
ici et qui ont reçu leur certificat de sélection, il y a déjà une entente avec
le fédéral et ils font ce qu'on appelle un permis... bon, permis de travail qui
permet... jusqu'au moment où vous recevez votre résidence permanente, il y a
une étude. Vu que le Québec vous a sélectionné, vous pouvez continuer à
travailler, donc vous maintenez un statut.
M. Fontecilla : Et, dites-moi,
dans votre mémoire, vous avez mentionné la question de la diversité, comme quoi
ça avait déjà été une orientation et que ça a disparu de la consultation
actuelle comme une orientation du gouvernement. Et qu'est-ce que, pour vous, ça
veut dire, là? C'est que le gouvernement n'est plus intéressé par la question
de la diversité de la provenance des immigrants qui viennent s'établir au Québec?
M. Jade (Dory) : En fait,
j'espère que c'est un point que le gouvernement n'a pas encore vu et, avec les consultations,
le gouvernement va relire la formule. Si la formule est copiée du Canada, le Canada
a un bassin énorme, qui est le monde entier, incluant les pays francophones.
Donc, de ce fait, vous allez avoir, selon le Canada......
les meilleurs, qui ont le meilleurs score en chiffres, vont passer, chaque fois
ils vont prendre 1 500, 2 000, 3 000 dossiers, peu importe.
Le Québec a un bassin restreint, qui est, en grande majorité...
La Présidente (Mme Chassé) :
En conclusion.
M. Jade (Dory) : ...les pays
francophones et de ce fait, si on fait ceci, il y a quelques pays qui vont
dominer.
La Présidente (Mme Chassé) :
C'est terminé. Merci. Je cède maintenant la parole à la députée de Gaspé.
Mme Perry Mélançon : Merci.
Bonjour. Vous évoquez à deux endroits, dans votre document, que certaines
professions ou certaines régions devraient avoir une catégorie de français...
qu'on demande une catégorie de français plus basse. Moi, je trouve que c'est un
sujet qui est assez sensible, même si je comprends que l'intégration
professionnelle se ferait plus facilement. Mais qu'en est-il de l'intégration
sociale? Pourquoi on n'a pas mis...
Mme Perry Mélançon :
...certaines professions ou certaines régions devraient avoir une catégorie de français...
qu'on demande une catégorie de français plus basse. Bien, moi, je trouve que
c'est un sujet qui est assez sensible, même si je comprends que l'intégration
professionnelle se ferait plus facilement. Mais qu'en est-il de l'intégration
sociale? Pourquoi ne pas miser sur d'autres solutions pour attirer plus de gens
en région?
M. Jade (Dory) : Je vais
vous répondre. Ce qui est requis présentement, c'est un B2. Un B2, c'est... En
principe, c'est une personne qui est capable de communiquer très aisément,
écrire et communiquer en français. Par contre, on doit tous savoir qu'une
personne dont le CNP est au C ou D n'est pas nécessairement aussi éduquée dans
son pays d'origine pour pouvoir absorber une langue troisième ou seconde,
dépendamment de si elle a deux langues déjà, additionnelle. Alors que la
capacité d'une personne qui a un poste zéro, A, B, qui sont soit des universitaires
ou des professionnels sont plus capables, dans un court laps de temps, de
maîtriser la langue française.
Mme Perry Mélançon :
Quand je parle de solutions, d'autres solutions, par exemple d'essayer de
favoriser la francisation de l'étranger, ça ne serait pas mieux que de
recommander une baisse du niveau du français?
M. Jade (Dory) : On a
demandé ça parce que c'est un des critères principaux pour pouvoir accéder au programme,
et non que nous n'avons pas d'autres solutions. Mais les autres solutions
peuvent être annexes à celle-là. Si celle-là n'existe pas, elle ne permettra
pas à la personne d'avoir un CSQ ou de déposer une demande au PEQ, par exemple.
Mme Perry Mélançon : O.K.
Merci.
La Présidente (Mme Chassé) :
30 secondes.
Mme Perry Mélançon : En
fait, rapidement, vous avec dit que vous avez aidé à l'évolution des programmes
de travailleurs qualifiés, les listes d'emplois admissibles, par exemple, dans
différents programmes. Est-ce que vous pensez qu'on devrait... À quelle
fréquence vous pensez qu'on devrait faire une mise à jour des besoins du marché
du travail et comment s'y prendre?
M. Jade (Dory) : Ça,
c'est les statistiques qui vont aller au ministère. Et je pense qu'ils les ont
au mois. Mais aux trois mois serait intéressant, parce que je ne penserais pas
qu'au mois serait raisonnable.
La Présidente (Mme Chassé) :
Excellent. Merci. Ça termine le bloc d'échange. Je vous remercie pour votre
contribution aux travaux de la commission. Je suspends momentanément les
travaux, ici, pour permettre au prochain groupe de prendre la place. Merci.
(Suspension de la séance à 15 h 37)
(Reprise à 15 h 39)
La Présidente (Mme Chassé) :
On reprend les travaux. Et je souhaite maintenant la bienvenue...
Des voix
: ...
La Présidente (Mme Chassé) :
Je vous invite à l'ordre, s'il vous plaît. Merci. Je souhaite maintenant la
bienvenue aux représentants de la Ligue d'action nationale. Vous avez
10 minutes pour votre exposé. Par la suite, il y aura une période
d'échange. Vous avez tout d'abord à vous présenter. Allez-y.
M. Laplante (Robert) :
Alors, bonjour, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Chassé) :
Bonjour.
• (15 h 40) •
M. Laplante (Robert) :
Madame et messieurs, Robert Laplante. Je suis le directeur de la revue L'Action
nationale, accompagné d'Anne-Michèle Meggs qui est membre du conseil
d'administration de la Ligue d'action nationale et du comité de rédaction de la
revue que nous dirigeons.
Alors, nous voulons saluer l'initiative du
gouvernement. Un effort, en effet...
M. Laplante (Robert) :
...directeur de la revue L'Action nationale, accompagné
d'Anne-Michèle Meggs qui est membre du conseil d'administration de la
Ligue d'action nationale et du comité de rédaction de la revue que nous
dirigeons.
Alors, nous voulons saluer l'initiative du
gouvernement, un effort en effet s'impose pour traiter avec plus de rigueur les
questions relatives à l'immigration. Il existe, dans le débat public, une
confusion certaine autour de ces questions, sans compter, bien sûr, des
affrontements idéologiques qui ne font pas de quartier. Mais il est très
important pour l'État de conserver les concepts dans leur plus stricte rigueur
et, à cet égard, il est important, et nous trouvons que le document aurait pu
faire davantage à cet égard, de rappeler que la marge de manoeuvre du
gouvernement du Québec est extrêmement mince et qu'elle ne tient, dans les
faits, qu'à des arrangements administratifs. Malgré les ententes signées, c'est
Ottawa qui fixe les paramètres de la politique d'immigration, y compris la
politique d'immigration du Québec. Le Québec peut composer avec certaines de
ces modalités, mais sans plus, et il bouge dans un espace qu'il ne contrôle
pas. Il est condamné à s'ajuster et à courir derrière un chimérique poids
relatif qui, depuis que la Confédération existe, ne cesse de s'éroder.
Il existe également une grande confusion
autour de ce que doit être le rôle de l'immigration dans le développement, non
seulement du marché du travail, mais de la nation. À cet égard, l'action des
lobbies d'affaires est particulièrement efficace. À en croire, l'immigration
serait une véritable panacée au problème de main-d'oeuvre renversant, dans le
discours, ce qui est pourtant l'ordre logique des choses. Les pénuries de
main-d'oeuvre, ça se gère d'abord avec une politique de main-d'oeuvre, et cette
politique de main-d'oeuvre comporte un volet qui est celui du recours au
travailleur immigré.
Alors, déjà, de rétablir les choses et de
mettre les perspectives au bon endroit contribuerait à assainir et à rendre
plus fructueux le débat public.
Le document de consultation propose des
objectifs, et, à cet égard, ils ne sont pas nouveaux, ils sont pertinents,
c'est un fait, mais nous ne les considérons que comme un premier pas. Des
énoncés généraux et des intentions, ça ne suffit pas. Il y a dans le document,
un véritable vice de méthodes, en fait, une lacune, en ce qui concerne les
objectifs qui ne sont malheureusement que très rarement et très peu chiffrés.
On ne comprend pas quels sont les indicateurs sur lesquels ces objectifs
peuvent se vérifier, se déployer, quels sont les indicateurs qui pourraient
donner les guides d'action. Dans quelle mesure est-ce qu'on peut, à ce
moment-là, établir, de façon rigoureuse, des seuils, on est dans l'arbitraire à
peu près le plus complet, 40 000, 50 000, 60 000. Ce qu'on
voudrait comprendre, c'est à quoi mesure-t-on l'efficacité d'un seuil? Est-ce
que nous avons des indicateurs qui nous permettent de comprendre comment on
peut mesurer l'intégration, comment on peut saisir son efficacité dans le
marché du travail, dans le fonctionnement des institutions, ces indicateurs-là
ne sont nulle part présents dans le document et il va falloir les mettre en place
et les mettre en place avec un suivi rigoureux. Et nous pensons que l'Institut
de la statistique du Québec pourrait être l'institution qui pourrait faire ce
suivi et contribuer à développer un modèle rigoureux qui nous permettrait
ensuite de mesurer le résultat de l'action gouvernementale en commission
parlementaire de façon à ce que des données soient partagées par tout le monde
avec une méthodologie explicite et avec, bien entendu, une crédibilité
scientifique sans failles.
Donc, ces lacunes en matière de gestion
sont corrigeables, et nous espérons vivement que le gouvernement va donner à
l'Institut de la statistique les moyens de le faire convenablement. Mais une
politique d'immigration, ce n'est pas autoportant, c'est aussi une pièce dans
un ensemble, et cet ensemble, ce n'est pas le marché du travail, cet ensemble,
c'est l'intérêt national tel qu'il est défini comme essentiel à la vie de la
nation. Et, là-dessus, le document devrait l'établir encore plus clairement que
jamais. Le grand objectif d'une politique d'immigration, c'est de contribuer à
renforcer le caractère français du Québec. C'est un des grands sauts
historiques qu'a réalisé notre peuple avec l'adoption de la loi n° 101...
M. Laplante (Robert) : ...le document
devrait l'établir encore plus clairement que jamais. Le grand objectif d'une politique
d'immigration, c'est de contribuer à renforcer le caractère français du Québec.
C'est un des grands sauts historiques qu'a réalisé notre peuple avec l'adoption
de la loi n° 101 et ça doit être maintenu. Pour que
cet objectif puisse servir, il faut bien comprendre qu'accueillir plus que la
capacité de franciser, c'est éroder le socle de la nation, c'est une vérité
élémentaire de la sociologie. Ça fait plus de 150 ans que les sociologues
ont fait cette démonstration.
Alors, il nous semble primordial que, dans
ce scénario, l'immigration économique, qui est à peu près le seul volet sur
lequel le gouvernement du Québec a une poignée, que cette immigration
économique exige la connaissance du français pour obtenir le statut à la fois
de résident permanent ou de citoyen. Il est essentiel que nous envoyions un
message clair : la société d'accueil pour l'immigrant, c'est le Québec
français. C'est la langue française qui est notre ciment et notre instrument de
délibération publique et, à cet égard, c'est aussi,
comprenons-nous — il faut le comprendre — le gage de succès
pour une intégration réussie, donc pour une réussite du projet migratoire
lui-même. Mettre des gens qu'on invite, dans notre société, au beau milieu d'un
conflit de légitimité entre deux modèles linguistiques, ce n'est pas leur
rendre service, ce n'est pas nous rendre service, c'est pourtant,
malheureusement, encore le cas. On ne parviendra certainement pas à convaincre
le gouvernement fédéral de respecter la loi n° 101, y
compris à l'aéroport.
Alors, dans le même esprit, on pense aussi
qu'il faut envoyer un message de cohérence, donc enlever ce privilège de
séjours temporaires dans les écoles anglaises. On ne peut pas être un peu
enceinte alors on ne peut pas non plus être un peu une société française, on
l'est ou on ne l'est pas. Et il faut clairement établir qu'on immigre dans une
société française, on séjourne dans une société française, et ce sont des
institutions qui sont chargées d'assurer ce consensus social.
Il faut réaliser également que les
objectifs généreux et généraux concernant la régionalisation, qui servent
souvent d'arguments de légitimation, sont des objectifs qui ne soutiennent pas
les connaissances scientifiques. Ce que nous savons de l'immigration, c'est que
partout dans le monde, c'est un phénomène de grande agglomération, c'est un
phénomène métropolitain d'abord. Alors, s'imaginer que hausser les seuils pour
combler les besoins dans les régions, ce n'est rien d'autre qu'un voeu pieux,
qui n'est pas soutenu par les évidences scientifiques, et le sens commun nous
l'établit également : les immigrants n'ont pas plus de raisons et de
motifs d'aller dans les régions que les natifs n'en ont de s'y cramponner.
Les problèmes relatifs à la difficulté de
recruter des travailleurs dans les régions tiennent à une multitude de facteurs
et pas seulement à une difficulté ou à un effort à accroître pour convaincre
les immigrants d'aller dans les régions, c'est la structure du peuplement qui,
à ce moment-là, à restaurer, et ça, c'est une politique de population qui peut
faire ça...
La Présidente (Mme Chassé) :
Il vous reste une minute.
M. Laplante (Robert) : ...ce
n'est pas une politique d'immigration. Voilà, Mme la Présidente, pourquoi on
pense qu'essentiellement il faut mettre de l'ordre dans les concepts et
attribuer à l'immigration les vertus qui sont les siennes, créer des conditions
pour que les progrès et les projets migratoires réussissent, mais en même temps
s'assurer qu'on ne se berce pas d'illusions et que nous allons avoir une
administration publique rigoureuse, qui va placer les concepts aux bons
endroits et qui va permettre une reddition de comptes, qui va donner un débat
public serein et surtout rigoureux. Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci à vous pour votre exposé. Nous allons maintenant débuter la période
d'échange. J'invite le ministre à prendre la parole pour un bloc de
16 minutes.
M. Jolin-Barrette : Merci,
Mme la Présidente. Mme Meggs, M. Laplante, bonjour, merci d'être
présents à l'Assemblée. Écoutez, d'entrée de jeu sur la première orientation,
la recommandation que vous nous formulez, c'est qu'on devrait faire
l'indépendance du Québec : pour assurer le contrôle de l'immigration,
j'imagine?
• (15 h 50) •
M. Laplante (Robert) :
Absolument, c'est la seule manière d'avoir une politique cohérente. La plupart
des intervenants qui vont venir ici vont vous dire que toutes les mesures que
nous pouvons prendre dépendent, en grande partie, soit...
M. Jolin-Barrette : ...pour
assurer le contrôle de l'immigration, j'imagine?
M. Laplante (Robert) :
Absolument, c'est la seule manière d'avoir une politique cohérente. La plupart
des intervenants qui vont venir ici vont vous dire que toutes les mesures que
nous pouvons prendre dépendent, en grande partie, soit que les compétences
fédérales ont priorité, soit que l'administration fédérale les impose, etc.
Alors, dans les circonstances, une politique québécoise d'immigration, sans
l'indépendance, c'est une politique qui cherche à limiter les incohérences que
nous inflige la situation canadienne. Ça ne veut pas dire qu'il ne faut pas
essayer de les limiter, bien entendu, mais il ne faut surtout pas se conter des
histoires, ça va rester incohérent. Que nous fixions le seuil à 40 000, à
60 000, à 100 000, de toute façon, c'est le fédéral qui va avoir le
contrôle sur le processus qui va faire qu'on va mener l'attribution d'un permis
de séjour ou d'un statut de résidence permanente au Québec.
M. Jolin-Barrette : Et
comment vous voyez ça, la volonté du gouvernement du Québec de rapatrier la
sélection du regroupement familial?
Mme Meggs (Anne-Michèle) :
Bien, c'est... Notre recommandation, c'est qu'on entreprend toutes les
démarches possibles pour récupérer tous les pouvoirs possibles. Mais notre
position, c'est que ça va être très difficile, de un, et, de deux, il faut vraiment
aussi, surtout quand on est encore une province, de bien comprendre pourquoi on
le fait. Parce que pour le faire, il faudrait ouvrir l'Accord Canada-Québec, et
cet accord-là, pour le moment, est très avantageux financièrement au gouvernement.
Donc, avant de l'ouvrir, puis peut-être perdre financièrement, il faudrait
savoir pourquoi on l'ouvre et comment on va sortir plus gagnant après l'avoir
ouvert.
M. Jolin-Barrette : Mais, en
fait, là, vous êtes dans les modalités, là, puis je ne partage pas
nécessairement ce que vous dites au point de vue de votre opinion sur l'Accord
Canada-Québec. Cela étant dit, sur le fondement même de dire que le Québec
devrait avoir la compétence en matière de regroupement familial, qu'est-ce que
vous en pensez?
M. Plante (Robert) : Puisque
nous pensons que le Québec doit posséder tous les pouvoirs, chaque fois qu'il
peut en ajouter un, c'est un pas dans la bonne direction. Cependant, quand on
sait comment fonctionne le Canada, on a beaucoup de difficulté à imaginer, à
moins d'être un jovialiste terrible, ce qui est assez fréquent des
fédéralistes, de penser que le Canada va tolérer un régime à deux vitesses, un
programme de réunification familiale pour le Québec et un autre pour le Canada.
Ça, vraiment, l'histoire nous enseigne qu'il faut être singulièrement
optimiste.
M. Jolin-Barrette : Vous avez
dit tout à l'heure : Écoutez, les seuils sont déterminés par le gouvernement
fédéral. Je donne un exemple, cette année, pour l'année 2019, le Québec va
accueillir 40 000 personnes immigrantes. C'est la volonté du gouvernement
du Québec qui a été mise en application en respectant le plan annuel du gouvernement
du Québec, même chose au niveau du plan d'immigration pluriannuel que je vais
déposer avant le 1er novembre suite aux consultations, suite à ce qu'on va
avoir entendu ici. C'est une discussion qu'il y a avec le gouvernement fédéral,
mais la volonté de l'Assemblée nationale, du gouvernement, est respectée par le
fédéral. Et, ça, à l'intérieur de la fédération canadienne, c'est ce que nous
faisons. Nous dialoguons, mais nous assurons aussi que les compétences du Québec
et que les spécificités de la nation québécoise soient respectées par le gouvernement
fédéral. Alors, l'expérience que j'en ai depuis que je suis ministre de
l'Immigration, c'est qu'on a diminué les seuils à 40 000, et c'était la
volonté des... et le résultat de la dernière élection.
M. Plante (Robert) : Ce que
nous aimerions savoir, c'est : Sur quels critères est-ce qu'on pourra
évaluer le succès de ce choix de fixer le seuil à 40 000? Quels sont les
indicateurs qu'on va utiliser? Et comment on va pouvoir, l'an prochain, dans
deux ans, mesurer que l'action du ministère a effectivement porté ses fruits,
et si ce n'est pas le cas, comment on pourra se corriger pour s'améliorer?
L'idée d'expliciter ces indicateurs, de recourir à la plus grande explicitation
possible, des motifs qui étaient une... qui soutiennent, si vous voulez, une
décision, c'est une contribution démocratique essentielle. Et de ce point de
vue là, de partager les orientations, c'est déjà un premier pas et un pas
significatif; le deuxième, c'est de partager maintenant la méthode pour les
atteindre.
M. Jolin-Barrette : Mais moi,
j'en étais davantage sur le mécanisme de : Comment est-ce que, avec le gouvernement
fédéral, il y a une discussion, pour dire, bien : Écoutez, même si on
sélectionne les réfugiés et l'immigration économique, bien, on...
Une voix
: ...pas, et un
pas significatif; le deuxième, c'est de partager maintenant la méthode pour les
atteindre.
M. Jolin-Barrette : Mais moi,
j'en étais davantage sur le mécanisme de comment est-ce que, avec le gouvernement
fédéral, il y a une discussion, pour dire, bien : Écoutez, même si on
sélectionne les réfugiés et l'immigration économique, bien, on réussit à
atteindre nos cibles en fonction du plan annuel d'immigration.
Je voudrais qu'on discute sur la question
du Programme des travailleurs étrangers temporaires. Vous proposez, dans votre
mémoire, qu'on contrôle ce programme-là, j'en suis également. On a demandé au
gouvernement fédéral que l'étude d'impact sur le marché du travail soit
uniquement faite par le gouvernement du Québec, et là-dessus, je suis content
de savoir que vous nous appuyez, à savoir que pour les employeurs du Québec,
c'est important, ce programme-là, et que justement il faut avoir le plus de
pouvoirs possible sur l'immigration temporaire.
Mme Meggs (Anne-Michèle) :
Bien, soyons clairs, là. Comme avec regroupement familial et comme tous les
autres volets d'une politique d'immigration, on croit que ce serait bien que le
Québec le contrôle, ça, c'est clair. Mais... Donc, ça... mais la question de
l'immigration temporaire versus l'immigration permanente, le titre de cette
section, c'est un choix à débattre, parce qu'il y a beaucoup de questions par
rapport à l'utilisation des temporaires, des effets que ça peut avoir,
démographiques ou autres, là. Donc, oui, ce serait bien que le Québec contrôle
ses frontières, que le Québec contrôle ses politiques internationales, que le
Québec contrôle les entrées puis les sorties, puis... et l'immigration
temporaire et permanente, mais c'est... À ce moment-ci, il y a beaucoup
d'éléments de la politique canadienne qui chevauchent et mettent de la pression
politique ou autre sur les décisions et les choix du Québec.
M. Jolin-Barrette : O.K. Sur
la question de la francisation en entreprise, vous dites : Les entreprises
devraient jouer un plus un grand rôle en matière de francisation. C'est quoi,
votre vision?
M. Laplante (Robert) :
Clairement, d'abord, la francisation doit nous permettre de régler les
problèmes que nous avons accumulés dans la mollesse et la négligence
d'appliquer les choix de la loi 101, premièrement. Deuxièmement, il faut
travailler avec l'imposition de la connaissance préalable du français pour
l'immigration économique. On vient, à ce moment-là, de faire une saine décision
de gestion des ressources publiques, autrement, on importe des dépenses, ce qui
est absurde, nous pouvons... et le bassin d'immigrants capables de parler ou
d'apprendre le français est suffisamment grand pour combler tous les besoins.
En entreprise...
M. Jolin-Barrette : Ce que
vous diriez, là, juste au niveau de la sélection, là, vous dites : Bien,
écoutez, on devrait sélectionner uniquement des gens qui ont une connaissance
du français, donc...
M. Laplante (Robert) :
Ceux-là sont fonctionnels tout de suite. Les autres, ceux qui sont déjà là, on
le sait, et particulièrement dans la région de Montréal, le français est en
mauvaise posture dans les milieux du travail, il faut précisément prendre les
ressources que nous consacrions autrement à cette francisation-là de gens qu'on
sélectionne même si on sait qu'ils ne parlent pas français. On pourrait
utiliser ces ressources-là pour mieux encadrer et mieux organiser la
francisation dans les milieux de travail, ce qui supposerait évidemment aussi
une contribution plus grande de la part des employeurs et surtout un engagement
plus senti à l'endroit de cet objectif de société.
M. Jolin-Barrette : Et je
reviens à ma question, pour votre organisation, vous voudriez uniquement que le
Québec sélectionne ces personnes immigrantes dans des bassins francophones.
M. Plante (Robert) : Pas
seulement dans les bassins francophones, pas du tout. Ce que nous disons,
c'est, connaissances préalables du français pour l'immigration économique.
Alors, ça, qu'ils viennent du Pakistan ou de Ouagadougou, ça n'a pas
d'importance.
M. Jolin-Barrette : Avec une
barrière à l'entrée, exemple, une connaissance de niveau 7.
M. Laplante (Robert) : Les
niveaux, ça se discute sur le plan technique, mais l'idée, c'est que, si on
veut que cette immigration économique soit la plus féconde possible, il faut
qu'elle soit immédiatement fonctionnelle et la meilleure manière de le faire,
c'est d'arriver en maîtrisant déjà la langue.
• (16 heures) •
Mme Meggs (Anne-Michèle) :
J'ajouterais juste que surtout quand on parle de régionalisation, c'est
beaucoup plus simple pour quelqu'un qui parle déjà le français de s'intégrer en
région. C'est plus facile de s'arranger dans une autre langue même, des fois,
la langue maternelle, mais en anglais, dans la région métropolitaine. Mais, si
on cherche l'immigration qui va être... et c'est beaucoup plus facile par
rapport aux adultes parce qu'au point de vue des enfants, ils vont aller dans
les écoles françaises, mais la francisation des adultes est plus lourde, plus
difficile, plus longue, et c'est...
16 h (version non révisée)
Mme Meggs (Anne-Michèle) :
...mais en anglais, dans la région métropolitaine. Mais si on cherche l'immigration
qui va... Et c'est beaucoup plus facile par rapport aux adultes, parce qu'au point
de vue des enfants, ils vont aller dans les écoles françaises. Mais la
francisation des adultes est plus lourde, plus difficile, plus longue, et c'est
donc... donc ce serait nettement plus avantageux, là, de prendre les gens qui
le connaissent déjà. On propose niveau intermédiaire, justement pour qu'ils
aient une connaissance et puissent s'intégrer plus facilement.
M. Jolin-Barrette : Je vous
remercie. M. le Président, j'ai des collègues qui souhaitent poser des questions.
Le Président (M. Poulin) :
Merci infiniment, M. le ministre. Je suis prêt à reconnaître, pour un temps de
parole de cinq minutes, M. le député de Chauveau.
M. Lévesque (Chauveau) : Merci
beaucoup, M. le Président. M. Laplante, Mme Lévesque... Je crois que c'est Mme
Lévesque, j'ai bien compris?
Mme Meggs (Anne-Michèle) :
M-e-g-g-s. Meggs.
M. Lévesque (Chauveau) : Merci
beaucoup. Alors, écoutez, c'est un privilège de vous accueillir, puis merci. Je
voudrais poursuivre un peu sur la francisation, parce que, M. Laplante, tout à
l'heure, vous avez parlé de l'intérêt national, et de ne pas accueillir davantage
que notre capacité, justement, à franciser les gens. Moi, je trouve ça intéressant,
puis c'est peut-être le bout où je suis un peu en désaccord avec vous. Bien que
souhaitable, d'accueillir le maximum de personnes parlant déjà français, on ne
se prive pas, selon vous, de talents qui ont le désir... C'est important, je
pense, d'imposer l'apprentissage rapide du français, d'y consacrer les sommes
d'argent nécessaires, et que ce soit fait rapidement, toujours dans un cadre professionnel,
mais, justement, des gens qui peuvent nous venir de d'autres communautés, là,
des gens d'Amérique latine, d'Asie, d'Afrique, et de d'autres langues, mais qui
ont le désir et cette force-là d'apprendre le français au Québec, vous ne
trouvez pas que ce bout-là doit être mis en lumière, qu'on doit pousser vers ça
pour le favoriser, justement? Parce que j'ai l'impression, c'est une
perception, peut-être que je me trompe, et je suis très loin d'être un expert,
mais si on veut pousser sur le français à tout prix avant l'entrée au Québec,
on risque de se priver de personnes extrêmement intéressantes.
M. Laplante (Robert) : Bien, écoutez,
ça, c'est indémontrable. Ce que nous pouvons faire... en envoyant le message
clair que pour immigrer au Québec il faut parler français, nous faisons un
sérieux test de motivation pour les candidats. Et là-dessus, les succès récents
de la déclaration d'intention... il y a déjà 150 000 personnes qui ont
fait une déclaration d'intention, si on leur dit clairement : Profitez
donc des sept, huit, 10, 15 mois que ça va prendre pour apprendre le français, on
n'aura aucun problème.
Mme Meggs (Anne-Michèle) :
J'ajouterais qu'il y aura déjà, dans les catégories humanitaires et familiales,
des gens qui ont besoin d'être francisés, ça fait que... et ils sont très
capables de contribuer à la société québécoise, au contraire, ils ont toutes
les compétences, et la francisation devrait peut-être se concentrer sur les catégories
qui ne sont pas sélectionnées par le français. Mais on ne voudrait pas voir les
conditions actuelles baisser encore plus, on préfèrerait... Et de toutes les statistiques
démontrant les gains par rapport à l'immigration francophone, c'est par la
sélection que ça s'est fait, il ne faut pas compter sur la francisation.
M. Lévesque (Chauveau) : Vous
sembliez — sur un autre sujet — tout à l'heure, un peu
sceptique sur la capacité d'évaluer les fameux seuils et le succès de
l'immigration, les indicateurs. Vous parliez que les indicateurs actuels sont
non vérifiables. Quels seraient, selon vous, des indicateurs qui seraient
davantage vérifiables? Comment vous l'établiriez, M Laplante?
M. Laplante (Robert) : Ah!
écoutez, il y a une série d'instruments qui ont été développés, à la fois par
les départements de sociologie, par les instituts de recherche, par l'OCDE,
même, où on peut déployer une série de... par procédures d'enquête, par suivi
statistique des candidatures. Et là, avec un profil d'accueil et
d'accompagnement, on aurait l'instrument idéal pour justement chercher
l'information utile et pertinente pour ces indicateurs-là, qui nous permettraient
de voir comment l'intégration à la société se déroule, où, est-ce au travail,
est-ce dans la vie communautaire, est-ce dans le système scolaire, où se font
les gains, où sont les efforts à accroître, où sont les effets. C'est ça que
nous pourrions faire. Actuellement, nous ne le faisons pas. Il existe des
commentaires et des anecdotes, mais il n'y a pas de...
La Présidente (Mme Chassé) :
Il reste une minute à l'échange.
M. Laplante (Robert) :
...cueillette systématique d'information sur ce sujet.
M. Lévesque (Chauveau) :
Merci. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Une dernière question. Moi, ça m'a
soulevé quand même... ça m'a surpris quand même, votre commentaire sur la
régionalisation. Vous avez l'impression, vous mettez fortement en doute la
capacité du Québec actuel de régionaliser son immigration, vous dites que c'est
un peu utopique, c'est un phénomène urbain. J'aimerais ça que vous
approfondissiez davantage, s'il vous plaît.
M. Laplante (Robert) :
Essentiellement, ce n'est pas une question de capacité, c'est une des...
M. Lévesque (Chauveau) : ...sur
la régionalisation. Vous avez l'impression... Vous mettez fortement en doute la
capacité du Québec actuel de régionaliser son immigration. Vous dites que c'est
un peu utopique, c'est un phénomène urbain. J'aimerais ça que vous
approfondissiez davantage, s'il vous plaît.
M. Laplante (Robert) :
Essentiellement, ce n'est pas une question de capacité. C'est une des
observations que nous faisons sur les mouvements migratoires. Ce sont des
mouvements qui se déploient dans les grands centres urbains. Ça ne veut pas
dire qu'il n'y en a pas dans les régions. Il y a de l'immigration qui s'intègre
dans la région. Il y a des immigrants qui choisissent de s'établir dans les
régions. Mais le gros des contingents reste dans les grandes agglomérations
urbaines. C'est ce qu'on observe partout, y compris aux États-Unis.
La Présidente (Mme Chassé) :
Ça conclut le bloc d'échange. Je vous remercie. Je passe maintenant la parole
au député de Nelligan, du côté de l'opposition officielle.
M. Derraji : Merci, Mme la
Présidente. Merci pour votre présence et pour votre mémoire. Première question,
ça concerne l'immigration temporaire, parce que je n'ai pas compris la même
chose tout à l'heure, lorsque vous avez répondu au ministre. Et je vais vous
lire votre passage : «Ce virage vers l'immigration temporaire est d'autant
plus surprenant venant d'un gouvernement qui vise la création d'emplois bien
payants. Pourtant, le gouvernement propose un niveau de dépendance à
l'immigration temporaire rarement vu au Québec.» À la lumière de ce paragraphe,
je peux lire que vous êtes opposés au choix de l'immigration temporaire.
M. Laplante (Robert) : Pas
opposés au choix. Nous souhaitons que ce choix-là soit un choix éclairé, et
qu'il ne serve pas de faux-fuyant. Et à cet égard, les déclarations de nombre
d'organisations patronales sont plus qu'inquiétantes. On sait que le recours à
l'immigration temporaire peut être un formidable instrument pour maintenir une
pression à la baisse sur les salaires. Ça, c'est un lieu commun.
Mais il y a un autre vice dans cette
approche qui est encore plus pernicieux, qui est celui de retarder le moment où
les entreprises, au lieu de se lamenter, devraient faire des investissements
dans l'automatisation, dans la numérisation de leurs procédés, plutôt que de
réclamer de la main-d'oeuvre faiblement qualifiée. Nous avons déjà, dans
l'économie du Québec, un problème de retard en ces matières. Et il y aurait
franchement de quoi s'inquiéter à s'imaginer que nous allons faire des gains de
compétitivité en ayant recours à de la main-d'oeuvre faiblement qualifiée,
plutôt qu'à des robots performants opérés par des gens qualifiés.
M. Derraji : J'entends votre
commentaire, mais dans la page 11, vous faites référence... et vous interpellez
même les propos d'une organisation patronale, à savoir, les Manufacturiers et
exportateurs du Québec. Donc, vous citez la P.D.G. de cet organisme, qui
dit : «On n'a pas besoin uniquement d'ingénieurs, mais de commis et de
journaliers.» Ça, c'est une organisation patronale qui a déclaré ça. Donc, dans
le respect que j'ai pour votre organisme... On respecte les organismes qui
travaillent, qui maîtrisent l'enjeu surtout de la main-d'œuvre. Donc, cette
organisation patronale, qu'est-ce qu'elle nous informe, qu'est-ce qu'elle nous
dit? Elle nous dit : Écoutez, mon besoin, ce n'est pas les ingénieurs,
c'est les commis et les journaliers.
Donc là, c'est un autre sujet que
j'aimerais bien aborder avec vous, c'est la grille de sélection. Donc, l'enjeu
de la main-d'œuvre, là, c'est un fait. Et vous êtes un homme de science, un
homme de chiffres, un homme de mesures qualitatives et quantitatives. Vous êtes
même pour la reddition de comptes. Vous répondez quoi à cet entrepreneur qui a
investi dans la machinerie et qui aimerait avoir des commis et des journaliers
pour soutenir sa croissance économique? Si vous étiez à la place du
gouvernement, ce serait quoi, votre solution?
Mme Meggs (Anne-Michèle) :
Bien, je peux...
M. Laplante (Robert) : Vas-y.
Mme Meggs (Anne-Michèle) :
Non, mais je... Ailleurs, à la page 10 de notre... on fait référence à une
étude qui a été même citée dans le document de consultation, mais pas
nécessairement complètement, qui précise que les résidents temporaires détenant
un permis de travail pour les emplois non spécialisés et qui avaient obtenu le
droit d'établissement obtenaient des gains initiaux beaucoup moins élevés et
une croissance plus lente des gains, en comparaison avec les immigrants qui
n'avaient aucune expérience de travail antérieure acquise au Canada. Ça fait
qu'il y a... C'est une enquête citée même par le ministre, hein?
Ça fait que notre objectif, comme j'ai
dit, notre titre, c'est un choix à débattre, et la question qui nous préoccupe,
c'est que cette question n'a pas été encore vraiment débattue au Québec. Est-ce
que c'est là où on veut mettre nos œufs? Si oui, bien là il faut d'abord aller
chercher le pouvoir, parce que ce n'est pas le Québec qui contrôle les
conditions de permis de séjour temporaires.
• (16 h 10) •
M. Derraji : Mais en attendant
le pouvoir, et je comprends que vous êtes pour la souveraineté... Mettons, pour
moi, là, en tant qu'élu, je dois répondre à la pénurie de main-d'œuvre, qui est
réelle, c'est un fait. Donc, ma question, vous avez soulevé l'incohérence de
l'arrêt du Programme de l'expérience québécoise, PEQ, et là j'aimerais bien
vous entendre parce que c'est des gens qui répondent...
M. Derraji : ...en attendant le
pouvoir et, oui, je comprends que vous êtes pour la souveraineté, mettons, pour
moi, là, en tant qu'élu, je dois répondre à la pénurie de main-d'oeuvre qui est
réelle, c'est un fait. Donc, ma question, vous avez soulevé l'incohérence de
l'arrêt du programme de l'expérience québécoise PEQ, et là j'aimerais bien vous
entendre parce que des gens qui répondent à 100 % de vos
préoccupations : jeunes, parlent français, ils paient leurs études, très
bien intégrés, ils ne demandent qu'à rester au Québec. Le gouvernement,
qu'est-ce qu'il fait? Il met un moratoire en plein été, probablement un retour
au mois de novembre. Ça, pour vous, est-ce que c'est une bonne ou une mauvaise
décision?
Mme Meggs (Anne-Michèle) :
C'est une question qu'on se posait aussi parce qu'effectivement, là, il y en a beaucoup
qui se sont posés cette question-là. Les réponses peuvent être multiples, puis
on suggère certaines. Mais il faut se rappeler aussi que le gouvernement non seulement
a baissé les admissions en 2019, ils ont baissé aussi les sélections. Et le
nombre de demandes qui arrivent par le PEQ, depuis les deux dernières années,
ont augmenté beaucoup, peut-être qu'ils sont arrivés un peu... ils ne veulent
pas dépasser les seuils de sélection pour cette année, ça va juste créer plus
d'inventaire à Ottawa, donc... Mais je ne sais pas, les raisons n'ont pas été
élucidées par le gouvernement encore, mais ils peuvent aussi... il y a d'autres
façons, le gouvernement fédéral a une façon de fonctionner par rapport à des
diplômés canadiens. Ils insistent qu'il y ait aussi un an de travail.
Peut-être qu'il y a des idées, là, de
modifier les critères, mais on ne sait pas, on est tout à fait d'accord, comme
bien des gens au Québec, là, que les étudiants, ça enlève un des obstacles
majeurs, dont on parle tout le temps, c'est de la reconnaissance des acquis
s'ils ont le diplôme du Québec.
M. Derraji : Le français
aussi, c'est un élément très important. Ils parlent français, c'est des
étudiants et le fruit de nos universités, à part qu'ils contribuent à la
richesse culturelle, mais aussi ils contribuent par leur financement à l'essor
de nos universités. Au fait, c'est l'élément le plus important et c'est, pour
cela, j'aimerais bien... je voulais vous poser la question parce que ça va dans
le sens même de ce que vous voulez, ce que vous suggérez.
J'ai une toute dernière question avant de
laisser la parole à ma collègue. Vous avez beaucoup parlé de la reddition de
comptes et les mesures qualitatives et quantitatives de l'intégration.
Avez-vous établi des indicateurs de mesure de performance?
M. Laplante (Robert) : Ce
n'était pas l'objet de ce mémoire, mais nous savons qu'il en existe et nous
savons aussi que le gouvernement du Québec pourrait mandater soit l'Institut de
la statistique, soit un groupe spécial ad hoc pour se doter d'un instrument
semblable. Effectivement, c'est, à notre avis, un instrument nécessaire pour
éviter que la confusion intellectuelle guide le débat, comme c'est, hélas,
beaucoup trop le cas actuellement où, finalement, les jugements péremptoires et
les généralisations tiennent lieu de déclarations officielles. Alors...
M. Derraji : Je vous
comprends. Je veux juste vous citer un exemple parce que je dois absolument
laisser la parole à ma collègue. On dit souvent : Les réfugiés ne
s'intègrent pas, par exemple, où il y a un taux de rétention qui n'est pas très
élevé par rapport à une catégorie. Vous, vous voulez que les paramètres du
gouvernement annuels ou pluriannuels, quand il annonce une politique, soient
accompagnés par des mesures qualitatives et quantitatives.
M. Laplante (Robert) : Oui,
je veux savoir si le budget du ministère qui est consacré à tel, tel programme
donne les fruits pour lesquels les deniers publics lui sont affectés. Ça paraît
essentiel.
M. Derraji : Merci.
La Présidente (Mme Chassé) :
Je passe maintenant la parole à la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme Robitaille : Comment de
temps il me reste?
La Présidente (Mme Chassé) :
Deux minutes.
Mme Robitaille : Ah! Écoutez,
oui, vous parliez, et le député de Chauveau vous a amené la question aussi,
de... vous disiez que la migration, c'est un phénomène urbain. Et, quand on
voit la pénurie de main-d'oeuvre en région, c'est inquiétant. Qu'est-ce que
vous feriez justement, comment amener... alors, quelle est votre solution pour
les régions si on est devant la fatalité que ces immigrants-là vont
nécessairement s'établir en ville?
M. Plante (Robert) : Ce n'est
pas une question de fatalité eu égard à la capacité des régions, c'est un
constat sociologique de base. Bon. Alors, ces problèmes de difficultés à
trouver du personnel dans les régions tiennent lieu à l'effritement de la
structure de peuplement. Et ça, ça tient essentiellement à l'incapacité, et ça
a été terrible au cours des 15, 20 dernières années, le gouvernement du Québec
a renoncé à soutenir et à structurer le développement économique des régions,
il a laissé faire le marché, mais le marché vient de répondre. Essentiellement,
ce n'est pas un problème d'immigration, c'est un problème de développement
régional et d'articulation de ce développement...
M. Plante (Robert) :
...15, 20 dernières années, le gouvernement du Québec a renoncé à soutenir
et à structurer le développement économique des régions et a laissé faire le
marché. Bien, le marché vient de répondre. Essentiellement, ce n'est pas un problème
d'immigration, c'est un problème de développement régional et d'articulation de
ce développement régional là avec les leviers que pourraient conférer une politique
de population et une politique d'immigration. Alors, on peut le faire, mais ça
ne se fera pas par l'immigration. Ça va se faire par une politique de
développement régional et par une politique de population rigoureusement
conduite.
Alors, il y a un certain nombre de
problèmes pour lesquels l'immigration est une réponse, mais il y en a d'autres
pour lesquels ce n'est pas une bonne idée, ce n'est pas un bon moyen. Alors,
les pénuries de main-d'oeuvre sont une réalité complexe. La rareté ne s'exprime
pas de la même façon selon les secteurs industriels, selon les régions, selon
les particularités des communautés elles-mêmes. Et ça, il faut reconnaître que
ça ne se traite pas avec un remède universel, avec une réponse simple : On
va en faire rentrer plus. Ça demande justement un monitoring, un suivi très
fin. Mais évidemment n'importe lequel résultat d'analyse et de reddition de
comptes ne remplacera pas la volonté.
La Présidente (Mme Chassé) :
Ça termine le bloc d'échange.
M. Laplante (Robert) :
Alors, ça nous prend les moyens de faire un développement régional solide.
La Présidente (Mme Chassé) :
Je vous remercie. Je cède maintenant la parole au député de Laurier-Dorion, de
la deuxième opposition.
M. Fontecilla : Merci.
Bonjour, messieurs, mesdames. Vous avez été... Vous êtes critiques par rapport
au test des valeurs et... au test des valeurs, et j'aimerais vous entendre.
Quelles sont vos critiques?
M. Laplante (Robert) :
Ah! écoutez, là-dessus, très rapidement, parce que c'est un vaste débat, je
vous dirais que le Québec tourne en rond depuis 1968. O.K.? Parce
qu'essentiellement c'est un débat qui est induit par une fausse problématique
créée essentiellement par la doctrine du multiculturalisme. C'est une doctrine
qui a été adoptée pour nier notre existence nationale et pour la combattre. Et,
dans les mesures de riposte ou de résistance à cette doctrine d'État, il y a eu
toutes sortes d'avatars, y compris l'interculturalisme, etc.
Si nous avions un pays indépendant, une
approche républicaine nous poserait des moyens et des questions qui seraient
autrement plus intéressants. Là, véritablement, on est dans des mesures qui
sont complètement à côté de la plaque. Je crois que toute l'énergie que nous
avons engloutie ces dernières années dans ces débats-là est une énergie
stérile, et ses effets par contre sont délétères parce que ça sape la cohésion
sociale, et ça, évidemment, encore une fois, il faut aller à la source... et ça
sape la cohésion sociale. Pourquoi? Essentiellement, parce que nous vivons dans
un régime qui finance à même nos impôts une lutte acharnée contre l'intégration
républicaine que le Québec doit et cherche à réaliser. Alors, évidemment, ça se
traduit dans tous les aspects de la vie sociale, et les immigrants sont
probablement ceux qui sont le plus immédiatement frappés, pris entre deux
modèles concurrents.
Écoutez, ça fait des décennies qu'on
demande au gouvernement fédéral simplement de respecter la loi 101. Alors,
imaginez quelqu'un qui arrive de l'étranger, qui n'est pas dans l'histoire, qui
ne sait pas d'où tout ça vient et qui se fait dire : Tu vas être dans une
société française bilingue. Bien, on lui donne une cassette d'un film d'Elvis
Gratton, et puis bienvenue au Québec. C'est une concurrence débile.
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci. Je passe maintenant la parole à la députée de Gaspé pour
2 min 30 s.
Mme Perry Mélançon :
Merci. Merci beaucoup de votre présence. On a discuté et débattu sur le projet
de loi de l'immigration, justement, à la fin de la session parlementaire, dont
plusieurs heures sur des conditions qu'on ne connaît pas trop, sur un projet de
loi qui est assez vague parce qu'on nous rappelait toujours qu'on allait aller négocier
des pouvoirs au fédéral. Puis on a vu aussi un gouvernement qui a essuyé
plusieurs échecs avec des négociations avec le fédéral, justement, depuis son
arrivée au pouvoir.
Donc, est-ce que vous y croyez, à ce qu'on
puisse les rapatrier et... Parce que, de ce que je comprends, finalement, la
seule façon d'avoir une immigration réussie au Québec, c'est par l'indépendance
du Québec.
• (16 h 20) •
M. Plante (Robert) : Ça,
il n'y a aucun doute. Cependant, on peut avoir une politique d'immigration plus
ou moins incohérente, qui va nous permettre de gérer, le temps que ça durera,
les inconvénients et les dommages que nous inflige le régime canadien. Alors,
ce n'est pas...
Mme Perry Mélançon : ...du Québec.
M. Laplante (Robert) : Ça, il
n'y a aucun doute. Cependant, on peut avoir une politique d'immigration plus ou
moins incohérente qui va nous permettre de gérer, le temps que ça durera, les
inconvénients et les dommages que nous inflige le régime canadien. Alors, ce
n'est pas inutile de chercher à limiter ces incohérences-là, mais elles vont
demeurer puisque nous ne pouvons contrôler l'essentiel des leviers qui nous
permettraient une réussite complète d'une politique.
Mme Perry Mélançon : Et puis
pour... en attendant d'avoir l'indépendance du Québec, un désir que je partage
avec vous, bien entendu, qu'est-ce qu'on fait, vos recommandations, là, en
priorité, là, pour la table ici, pour qu'on puisse se consacrer?
Mme Meggs (Anne-Michèle) :
Bien, je pense que ce qu'on cherche, là, notamment, et il y a un certain
travail qui peut se faire là-dessus, même s'il y a des pressions par rapport à
notre poids démographique, et tout ça, c'est de faire l'exercice de déterminer
c'est quoi, d'être bien intégré, c'est quoi, une politique d'immigration
réussie. Ça veut dire certains taux d'emploi, ça... ça veut dire ça. L'OCDE, le
Conseil de l'Europe, plusieurs pays et organisations internationales...
La Présidente (Mme Chassé) :
En terminant.
Mme Meggs (Anne-Michèle) :
...ont élaboré les indicateurs de cohésion sociale. On pourrait piger là-dessus.
Mais l'important, c'est de trouver un consensus dans la société pour arrêter de
rendre cette discussion plus partisane et plus un enjeu qui ne devrait pas être
politique de cette nature-là.
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci. Merci pour votre contribution aux travaux de la commission.
Je suspends momentanément pour laisser le
prochain groupe prendre la place.
(Suspension de la séance à 16 h 22)
(Reprise à 16 h 24)
La Présidente (Mme Chassé) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Je vous invite à prendre place.
Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants
du Conseil du patronat du Québec. Vous avez 10 minutes pour votre exposé. Je
pense que vous connaissez la formule et je vous invite à vous présenter au
début de votre exposé. Allez-y.
M. Dorval
(Yves-Thomas) : Bonjour, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Chassé) :
Bonjour, bienvenue.
M. Dorval
(Yves-Thomas) : Merci aux députés de la commission de nous
recevoir aujourd'hui. Mon nom est Yves-Thomas Dorval, je suis président et chef
de la direction du CPQ, le Conseil du patronat du Québec, et j'ai à ma gauche
M. Denis Hamel, qui est notre vice-président, Politiques de développement de main-d'oeuvre.
Et ça me fait grand plaisir d'être avec vous aujourd'hui, en rappelant que le
CPQ est une confédération qui représente des organismes ou des employeurs...
des organismes d'associations d'employeurs ou des employeurs, en fait, on
représente plus de 70 000 employeurs qui ont des activités au Québec.
Alors, on a une courte présentation avec
nous, on va y aller, si vous voulez bien, Mme la Présidente. Essentiellement,
on a voulu, dans notre mémoire, d'abord, faire un petit peu un résumé de la
situation et répondre aux questions de la consultation. Alors, je crois que
c'est important de faire le point sur certains enjeux qu'on connaît au Québec,
notamment la question démographique et, à titre d'exemple, rappeler qu'au cours...
d'ici 2030, donc au cours des 10 prochaines années, hein...
M.
Dorval (Yves-Thomas) : ...aux questions de la consultation.
Alors, je crois que c'est important de faire le point sur certains enjeux qu'on
connaît au Québec, notamment la question démographique. Et à titre d'exemple,
rappeler qu'au cours... d'ici 2030, donc au cours des 10 prochaines années,
hein, la population en âge de travailler,... évidemment, la population en âge
de travailler peut être plus grande que celle-là, mais où on retrouve la
majeure partie des travailleurs, donc, de 23 à 67 ans, va diminuer au cours des
10 prochaines années, de l'ordre de 140 000 personnes. Et ça, conjointement
avec l'élément suivant, c'est-à-dire que ce vieillissement de la population, ce
vieillissement démographique va faire en sorte qu'on va connaître, au Québec,
une population de 68 et plus qui va grimper de 630 000 personnes, alors ça
veut dire essentiellement, tout ça, qu'à la fois on va... On assiste déjà, au Québec,
c'est le cas présentement, depuis quelques années, mais pour les 10 prochaines
années, à des raretés encore plus accentuées et des besoins de main-d'oeuvre extrêmement
importants sur l'ensemble du territoire et dans à peu près tous les domaines.
Mais en même temps, il faut se rendre compte aussi qu'il y a une population qui
va avoir besoin de services, également, donc qui va avoir besoin d'une main-d'oeuvre
pour offrir ces services.
Quand on regarde
les données qui sont émises par le gouvernement du Québec, les dernières
données dataient de... pour une période, 2017‑2026. On peut extrapoler à peu
près les mêmes données pour les 10 prochaines années. Emploi-Québec estimait
qu'on avait 1,4 million de postes à pourvoir au Québec, au net. Au net, ça
veut dire que ça tient compte des gains de productivité traditionnels par
l'automatisation, l'informatisation, etc. Ça tient compte qu'il y a des emplois
qui ferment, il y a des entreprises qui ferment, mais il y a aussi une création
d'emplois, donc on estime que, pour les 10 prochaines années, ou en tout cas,
pour la période qui était là, 2017‑2026, on a 1,4 million de postes à
pourvoir, dont 80 % sont dus à des départs à la retraite et 20 % à de
la création d'emplois.
Ça nous amène à
regarder quelles sont les pistes pour combler ces besoins. L'immigration, ce
n'est pas la solution magique, mais ça fait partie de l'ensemble des pistes de
solution. Premier élément, c'est pour ça qu'on l'a dit, nous, avant la dernière
élection, la priorité nationale doit aller à l'éducation. Pourquoi? Parce que,
pour les 1,4 million de postes à combler pour les 10 prochaines années,
54 % des personnes qui vont combler ces postes-là sont des personnes qui
sont actuellement assises à l'école, dans les commissions scolaires, dans les
cégeps, dans les universités, donc évidemment on parle ici d'environ
777 000 personnes pour combler 1,4 million qui vont arriver du
secteur de l'éducation. On n'a pas le choix, il faut réussir notre éducation,
au Québec, c'est pour ça que c'est une priorité nationale.
On peut
également regarder les personnes en âge de travailler qui ne sont pas avec des
contraintes sévères à l'emploi, pour les personnes en âge de travailler au
Québec qui sont moins représentées sur le marché du travail. Qu'on pense aux
personnes d'expérience, des gens qui sont sur le bord de la retraite ou qui
viennent tout juste de prendre leur retraite, qu'on pense aux personnes en
situation de handicap, qu'on pense aux personnes en réinsertion sociale, qu'on
pense aux personnes autochtones ou à différentes minorités qui n'ont pas
intégré le marché du travail, ça peut représenter, selon les estimations du
gouvernement, environ 23 % pour combler le 1,4 million. Alors, il
nous reste un écart de 22 %. On parle de plus de 300 000 personnes à
trouver qui ne sont pas ici, au Québec, qui ne sont pas actuellement en train
d'étudier ou déjà présentes sur le marché du travail au Québec. Ça nous prend
donc 22 % environ d'immigration.
• (16 h 30) •
Quand on parle
d'immigration, c'est aussi important de bien comprendre la complexité et, je
dirais, la contribution à l'immigration de différents types. Alors, vous en
avez parlé beaucoup, je ne veux pas vous faire, à vous, la démonstration, vous
la connaissez, mais il y a beaucoup de gens qui veulent mieux comprendre. Parce
qu'on parle d'immigration, souvent, on fixe un objectif, 40 000,
50 000, on dit : Ah! Voici 50 000 personnes qui vont arriver
travailler. La réalité est toute autre, il y a évidemment dans cette
composition-là, une composition de réfugiés, de regroupements familiaux. On a
entendu ce matin l'importance aussi d'avoir des gens d'affaires, des immigrants
investisseurs, mais l'immigration économique, ça représente environ 59 %
du total. Puis là on pense que cette immigration-là, économique, ça représente
tout de suite des travailleurs qu'on peut embaucher. Même quand on regarde les
statistiques sur les requérants principaux, les travailleurs qualifiés, on
pense que les travailleurs qualifiés, là, ah! c'est un groupe de personnes qui
arrivent ici pour travailler. Les travailleurs qualifiés, c'est une catégorie
qui comprend aussi les familles, les enfants de ces gens-là. Alors, quand on
décrit tout ça, on constate à la fin que, dans les faits, pour avoir...
16 h 30 (version non révisée)
M. Dorval
(Yves-Thomas) : ...principaux, les travailleurs qualifiés. On
pense que les travailleurs qualifiés, là, 1355 4131 16779 ah! c'est un groupe de personnes qui arrive
ici pour travailler. Les travailleurs qualifiés, c'est une catégorie, qui
comprend aussi les familles, les enfants de ces gens-là. Alors, quand on décrit
tout ça, on constate à la fin que dans les faits, pour avoir l'immigration
souhaitée, ça prend beaucoup plus, en termes d'immigration, si on veut avoir
les travailleurs nécessaires aux besoins du marché du travail.
Donc, on parle, pour une période 2018 à
2026, d'environ 600 000 immigrants qu'on a besoin au Québec pour obtenir
314 000 travailleurs. Ça ne veut pas dire que les autres qui sont là ne
travailleront pas un jour. Mais quand on parle de besoins immédiats, à court
terme, chaque année, hein, on parle d'immigration pour combler ces besoins-là.
Les autres, que ce soient les réfugiés, que ce soient les enfants qui vont
grandir, que ce soient toutes sortes de considérations, ils vont venir combler
un jour ou l'autre, une partie du marché du travail. Mais quand on parle de
situation urgente à court terme, on parle de ça.
Ça veut dire que si on veut avoir
34 000 travailleurs sur neuf ans pour combler les besoins qu'on au Québec,
on a besoin d'une immigration d'autour de 64 000 personnes par an. C'est
pour ça que dans notre mémoire, on dit aux membres de cette commission, au
gouvernement : Ça nous prend un minimum de 60 000 immigrants
réguliers pour obtenir nos objectifs pour combler les besoins. Encore une fois,
à l'intérieur de l'ensemble des autres mesures, éducation, employabilité,
intégration, etc.
C'est important pour les régions aussi.
C'est important pas juste pour les régions urbaines, c'est important pour des
régions. Regardez la situation au niveau démographique dans certaines régions,
c'est une réduction de population. Sur la Côte-Nord, ça commence à être un peu
catastrophique puis quand on regarde les perspectives des derniers chiffres
démographiques, on parle d'un enjeu majeur pour les régions.
C'est vrai pour les régions, c'est aussi
vrai pour les centres urbains. Si on regarde... Si on exclut du portrait, la
population de Montréal réduirait actuellement. En fait, dans les dernières
années, la population a augmenté à peu près de 1 % par année. Quand on
regarde le nombre de nouveaux arrivants sur l'île de Montréal, c'est exactement
le nombre qui correspond à la croissance de la population pour l'île de
Montréal.
Alors, qu'on soit en région, qu'on soit à
Montréal, puis je pense aux gens de Québec, qui sont dans une rareté
catastrophique, en termes de main-d'oeuvre, toutes les régions sont concernées
à différents moyens puis ça va prendre des moyens adaptés à ces besoins-là.
Juste encore en matière démographique,
parce qu'on a toujours tendance à penser que les employeurs s'intéressent juste
à l'emploi, non, il y a des questions. Non il y a des questions de société
aussi là-dedans. Lamoyenne d'âge au Québec, c'est 42 ans; la moyenne d'âge des
immigrants, c'est 29 ans. Si on veut avoir une population, si on veut avoir un
Québec dynamique, prospère, qui veut réussir, on a aussi besoin de
l'immigration, ne serait-ce que pour rajeunir cette population-là, en moyenne.
Bref, il y a quatre conditions pour
répondre aux besoins. On a besoin d'un minimum de 60 000 personnes par
année au cours des neuf prochaines années... 10 prochaines années. On a besoin
de favoriser les solutions adaptées aux besoins des employeurs et des régions.
On a besoin de réduire les délais et les procédures d'immigration puis on a
besoin de continuer les efforts pour favoriser l'intégration des nouveaux
arrivants, qu'on parle de francisation, de parcours personnalisé, d'Arrima et
là-dessus, je dois dire que, tous partis confondus au cours des dernières
années, il y a eu beaucoup d'efforts. Le gouvernement actuel en met beaucoup et
on les appuie dans leurs initiatives, mais le nombre, ça demeure quand même clé
dans tout ça. C'est pour ça qu'on a conclu notre mémoire en disant : On a
besoin d'au minimum de 60 000 immigrants par année. Merci.
La Présidente (Mme Chassé) :
Très bien, merci à vous. On débute maintenant la période d'échanges. M. le
ministre, la parole est à vous pour un bloc de 16 minutes.
M. Jolin-Barrette : Merci,
Mme la Présidente. M, Dorval, M. Hamel, bonjour. Merci d'être présents en
commission parlementaire aujourd'hui.
Bon, sur la question des seuils, le Conseil
du patronat souhaite avoir... voir que les seuils soient haussés à 64 000
personnes immigrantes. Faites une adéquation entre les besoins du marché du
travail, vous dites : Bien, on devrait avoir ce niveau-là, minimalement.
Déjà, le Québec est une société qui accueille, par rapport à sa population, un
des plus grands nombres d'immigrants. Au niveau de l'intégration aussi, il faut
faire les choses de la bonne façon. Alors, il y a l'aspect économique et il y a
l'aspect aussi sociétal. Et là, on est présentement en train de travailler
là-dessus et depuis qu'on est arrivés au pouvoir, on s'est concentré,
justement, pour développer des ressources en matière de francisation, le
parcours personnalisé que j'ai lancé la semaine dernière.
Alors, comment vous intégrez cette
dynamique sociétale là à l'intérieur de l'analyse, au-delà de l'aspect
uniquement économique?
M. Dorval
(Yves-Thomas) : Bien, en fait, la première des choses, c'est
qu'on appuie toutes les initiatives qui ont été faites dans le sens de favoriser
une intégration des personnes immigrantes, d'en favoriser également...
M. Jolin-Barrette : ...comment
vous intégrez cette dynamique sociétale là à l'intérieur de l'analyse, au-delà
de l'aspect uniquement économique?
M. Dorval (Yves-Thomas) :
En fait, la première des choses, c'est qu'on appuie toutes les initiatives qui
ont été faites dans le sens de favoriser une intégration de personnes
immigrantes, de favoriser également la francisation, parcours personnalisé,
tout ça, on l'a dit. Le gouvernement, à travers Services Québec, veut offrir
aussi une panoplie de services, que ce soit via... qui provient du MIDI ou
d'Emploi-Québec ou de d'autres ministères. La question, c'est... à la fin, ce
n'est pas juste une question économique, je pense que la présentation qu'on a
faite a parlé d'une question sociétale, la démographie du Québec, la
démographie des régions, la démographie de la région de Montréal. Le rapport,
on en parle dans notre mémoire également, du poids proportionnel du Québec dans
la fédération canadienne, pas juste des questions économiques dont on a fait
mention. Pour nous, c'est majeur et c'est pour ça qu'on dit qu'il faut
favoriser des solutions adaptées aux besoins, mais il faut continuer des
efforts pour favoriser l'intégration. C'est tout lié ensemble.
Alors, la réponse, Mme la Présidente, à
cette question-là, c'est qu'on voit justement l'ensemble, et c'était ça, le but
de notre mémoire, de mettre le contexte de façon générale. Mais, en même temps,
on représente 70 000 employeurs qui, jour après jour, communiquent avec
nous pour nous dire : On a des problèmes. La semaine dernière, j'étais
dans une entreprise qui est dans la spécialisation de l'entretien industriel,
40 % de leurs employés sont des personnes qui proviennent de l'étranger, pas
parce qu'ils ne veulent pas embaucher des personnes ici, il y a 100 emplois
actuellement disponibles, ils ont quatre personnes à temps plein qui
travaillent sept jours par semaine sur tous les réseaux sociaux pour attirer de
la main-d'oeuvre, ils ont de la misère.
Je parlais avec le président d'une
importante entreprise québécoise ce matin, Exceldor, 2 500 emplois au
Québec. Encore là, presque 50 % d'emplois, c'est des travailleurs
étrangers qui sont soit immigrants ou travailleurs étrangers temporaires. Ils
ont 150 postes affichés actuellement qu'ils ont de la misère à remplir. Ça,
c'est la réalité des employeurs puis ça, c'est les employeurs dans la région de
Québec, etc., puis il y en a d'autres, c'est des emplois spécialisés à
Montréal. Actuellement, pour chaque étudiant qui sort du Québec en
informatique, il y a trois postes disponibles. Donc, on est en rareté de deux
postes sur trois au Québec, on a besoin d'informaticiens. On a besoin de gens
dans le domaine de la santé, on a besoin de manoeuvre. 50 % à 60 % des
postes, actuellement sur les 118 000 postes ouverts, c'est des postes qui
ne demandent pas de qualification ou peu de qualifications. Ça ne veut pas dire
que le travail ne peut pas être spécialisé, mais ça ne nécessite pas
nécessairement une qualification pour le faire.
Alors, les enjeux sont importants dans
toutes les régions. En Gaspésie, c'est important. On a des membres en Gaspésie
qui sont dans la fabrication d'éoliennes, qui ont des enjeux majeurs dans le
domaine du tourisme. On a des gens dans la région de Québec dans tous les
domaines, agriculture, tourisme à valeur ajoutée, scientifique, c'est le cas
partout, c'est vrai à Montréal. Alors, les enjeux... c'est une situation de
crise actuellement pour plusieurs de ces employeurs-là. Un autre employeur me
disait ce matin qu'il laisse 2,5 millions de profit par année parce qu'il
n'est pas capable de rencontrer les besoins, il les a envoyés en Ontario parce
qu'il n'est pas capable de le faire au Québec. Ça, c'est de la croissance
économique ratée pour le Québec. C'est ça, l'enjeu qu'on a. Puis on n'est pas
en train de dire que le gouvernement ne fait pas des efforts. Moi, à chaque
jour, la semaine dernière, on a appuyé encore les efforts que le gouvernement
fait.
Le point n'est pas là, le point, c'est
qu'aujourd'hui on a des emplois à combler dans toutes les régions, dans
plusieurs métiers, dans plusieurs secteurs. Puis ce qu'on ne fait pas
aujourd'hui, soit qu'on le donne aux autres provinces ou à des compétiteurs ou
soit qu'on retarde pour le Québec, puis ça s'accumule. Exemple, l'inventaire
qui s'accumule au Canada actuellement, au niveau fédéral, pour la résidence
permanente, on est rendu à 41 000, on est rendu à 19 semaines... 19 mois
de traitement au fédéral pour des personnes qui ont déjà leur certificat du
Québec. C'est ça qu'on parle, on ne parle pas de philosophie, on ne parle
pas... mais on parle de société, on parle de besoins, on parle de besoins
d'employeur. Puis l'intégration des personnes immigrantes, c'est une
problématique réelle aussi pour des immigrants qui sont ici puis qui ne
travaillent pas. Puis, là-dessus, on veut aider beaucoup là-dessus.
• (16 h 40) •
Mais les employeurs au Québec sont aux
prises avec des enjeux. On parlait d'employabilité, regardons le tissu des
employeurs au Québec. 98 % des employeurs, il y a 250 000 employeurs
au Québec, 98 %, c'est de la petite entreprise en bas de 100 employés. Ces
gens-là n'ont pas des services spécialisés, là, avec des services de ressources
humaines, et tout ça, pour les aider, là, on parle... ça, c'est 230 000
employeurs au Québec, qui ont, peu ou pas, de services spécialisés, ils ont
besoin d'accompagnement. Nous, on est prêts à en offrir, on en fait, on vient
de mettre sur pied au CPQ, cet été, notre service d'aide aux PME pour les
questions de gestion des ressources humaines...
M. Dorval
(Yves-Thomas) : ...pour les aider, là, on parle... Ça, c'est
230 000 employeurs au Québec qui ont peu ou pas de services spécialisés.
Ils ont besoin d'accompagnement. Nous, on est prêts à en offrir, on en fait, on
vient de mettre sur pied, au CPQ, cet été, notre service d'aide aux PME pour
les questions de gestion des ressources humaines. C'est majeur. Il faut le
faire, puis c'est toutes les parties prenantes. Puis quand on fait nos mesures,
bien, on les fait toujours avec des organismes communautaires, avec le milieu
de l'éducation, avec le milieu municipal et ainsi de suite. C'est une grande
corvée à laquelle on est exposés, comme le ministre de l'Emploi le fait,
actuellement, pour son domaine. C'est une grande corvée qu'on doit faire pour
l'immigration aussi.
M.
Jolin-Barrette : Sur la question des 41 000qui sont à Ottawa, il
faut faire un peu d'historique aussi, hein, ça, c'est important, parce qu'au
niveau des seuils d'immigration, bien entendu, il peut y arriver que les délais
s'allongent, mais c'est important aussi de réaliser qu'au cours des années le
gouvernement du Québec émettait des CSQ et pelletait l'inventaire au fédéral.
Et d'ailleurs c'était la même chose dans le cadre du projet de loi n° 9, où on a remboursé les dossiers, pour lequel certaines
formations politiques étaient en désaccord. On se retrouve dans une situation
où il faut vraiment sélectionner les gens basé sur les besoins du marché du
travail, avec la formation adéquate. Et vous parliez du taux de chômage ou même
du taux de surqualification, et ça, c'est important de contrer ça. Mais on vit
aussi avec une situation où, comment je pourrais dire, nous vivons avec un historique
qui est présent. Et effectivement il y a un inventaire au fédéral. Ce qui
m'intéresse, c'est votre opinion sur la régionalisation. Qu'est-ce que les
employeurs ont de besoin en région pour réussir à retenir les personnes
immigrantes ou à les attirer? Comment est-ce que le ministère de l'Immigration
peut être utile aux employeurs en région?
M. Dorval
(Yves-Thomas) : Merci. C'est une très bonne question, Mme la
Présidente. D'abord, ce n'est pas seulement les employeurs. Chez nous, au CPQ,
on a été fondé il y a 50 ans. Hein, sur le modèle et dans notre ADN, c'est
le dialogue social. Donc, il faut travailler avec les acteurs du milieu. Donc,
ce n'est pas quelque chose que les employeurs peuvent faire tout seuls, ce
n'est pas quelque chose que le MIDI peut faire tout seul, ce n'est pas quelque
chose qu'une municipalité peut faire quelque chose. C'est tous ensemble qu'on
peut le faire. Les organismes qui travaillent à aider les immigrants, les
services publics, que ce soit Emploi-Québec, Immigration-Québec, le MIDI, etc.,
que ce soit les employeurs, il faut tous travailler ensemble.
Qu'est-ce qu'on peut faire? Il y a des
présentations puis il y a des projets qu'on a développés pour aider, qu'on a
présentés. Malheureusement, ils n'ont pas été nécessairement reçus avec
beaucoup d'appui, parce qu'aujourd'hui on regarde les choses souvent en
fonction de notre... je dirais, notre point de vue, en isolation les uns des
autres. Il faut travailler ensemble. Les employeurs, ce qu'ils ont besoin...
Moi, je vais vous dire qu'il y a des grands employeurs qui sont prêts à mettre
la main à la pâte, par exemple, en région pour dire : Écoutez, nous
autres, on offre des très bonnes conditions et on n'a pas trop de problèmes.
Par contre, on sait très bien qu'on déshabille le tissu local régional parce
qu'on attire toujours, hein, comme un aspirateur, vers les meilleures
conditions. Puis les autres entreprises dans le milieu ont plus de misère. Ils
sont prêts à aider, à contribuer à ça parce que leur survie aussi en dépend
quelque part. Leurs fournisseurs en dépendent. Les services à leurs employés,
les services de proximité à leurs employés en dépendent.
Ils sont prêts à collaborer, mais il faut
que cet effort-là, ça ne soit pas fait de manière juste en disant : Bon,
on va aider l'employeur, on va... Toute la chaîne est importante. À partir du
moment où on identifie le besoin, ça veut dire qu'on a besoin de l'aide pour
faire venir des gens. Puis ces gens-là, ce n'est pas toujours des gens, comme
j'ai dit tantôt, qui sont spécialisés, ou avec des qualifications universitaires.
Ça peut être ça puis ça peut ne pas l'être aussi, mais il faut les aider à
travailler à choisir, sélectionner et attirer les gens. Il faut que le
processus soit rapide. Si ça me prend deux ans entre le moment où j'ai
sélectionné quelqu'un puis le moment où je vais l'avoir... Pouf! Ou bien la
personne va être partie ailleurs, ou bien moi, mon besoin va avoir changé.
Aujourd'hui, le rythme économique, le rythme des affaires, le rythme de la
production fait en sorte que j'ai besoin rapidement de ressources. Donc, il
faut avoir aidé dans l'exploration, attirer. Il faut favoriser un processus
très rapide. Le MIDI peut travailler à ce niveau-là, puis pas tout seul, avec
le fédéral.
Ensuite de ça, quand ils arrivent, ça
prend un écosystème local pour accueillir ces gens-là, hein? Parce que, moi je
le vois tous les jours, les employeurs disent : Moi, ça me prend un milieu
de vie. Parce que, même si je l'attire chez moi, il ne restera pas chez moi si
le milieu de vie n'est pas intéressant, s'il n'est pas dynamique, s'il n'y a
pas, par exemple, des infrastructures, s'il n'y a pas la possibilité d'avoir
des services de garde, si les enfants ne peuvent pas avoir accès à des services
d'éducation, à des services de santé. Alors, tous ces éléments-là, même la
culture, c'est important. Il faut que les gens, en dehors du travail, puissent
avoir du plaisir à vivre avec soit le milieu naturel ou soit le milieu
artistique, etc.
Qu'est-ce que le MIDI peut faire? Moi, je
vous dirais qu'il y a beaucoup de projets, il y a beaucoup d'organismes comme
les nôtres qui veulent travailler à aider les entreprises, particulièrement les
petites entreprises, parce que les grandes sont prêtes à contribuer de leur
côté...
M. Dorval
(Yves-Thomas) : ...à vivre avec soit le milieu naturel ou soit
le milieu artistique, etc.
Qu'est-ce que le MIDI peut faire? Moi, je
vous dirais qu'il y a beaucoup de projets, il y a beaucoup d'organismes comme
le nôtre qui veulent travailler à aider les entreprises, particulièrement les
petites entreprises, parce que les grandes sont prêtes à contribuer de leur
côté. Comment on peut faire ensemble? Bien, je pense qu'il faut regarder les
projets qu'on fait non pas dans l'esprit où ces projets-là... ou sont proposés
non pas dans l'esprit où les projets viennent en compétition les uns avec les
autres, mais c'est davantage qu'ils viennent en synergie les uns avec les
autres.
M. Jolin-Barrette : Je vous
remercie. Mme la Présidente, je pense que j'ai des collègues qui veulent poser
des questions.
La Présidente (Mme Chassé) :
Je crois que la collègue de Les Plaines, la députée de Les Plaines désire
prendre la parole. Allez-y, il vous reste quatre minutes.
Mme Lecours (Les Plaines) :
Merci, Mme la Présidente. Merci, M. le ministre. Rapidement, parce que vous
l'avez un petit peu évoqué dans votre présentation, mais dans votre mémoire,
vous en parlez aussi, de l'importance du programme d'investisseurs, aussi,
étrangers. Parce que vous dites qu'on éprouve un retard ici au Québec.
Pouvez-vous m'expliquer un petit peu plus profondément, un peu plus de quel
retard vous parlez, et en quoi...
M. Dorval
(Yves-Thomas) : Bien, dans les faits... Veux-tu... Je vais
demander à mon collègue Denis de commenter également. Mais je vous dirais
essentiellement que c'est un programme qui permet de stimuler à la fois la
croissance économique, particulièrement dans le secteur manufacturier,
notamment auprès des petites organisations, puis ça, c'est sur tout le
territoire. Ça procure aussi, le programme investisseurs... donc, si on parle
de programme investisseurs immigrants, ça procure des sommes aussi... Puis les
gens n'en ont peut-être pas parlé ici, mais PRIME, qui est un programme
important pour subventionner les salaires de nouveaux arrivants pour des
entreprises, bien, il est financé à partir du programme immigrants
investisseurs. Alors, c'est un petit exemple, à la fois sur le plan de
l'embauche ou du... de l'embauche d'immigrants, de nouveaux arrivants et à la
fois aussi sur le plan de l'investissement.
Et ce programme-là, il... comme je vous
dis, il nous apparaît comme ayant des effets positifs. Il n'y a pas de
contradiction avec ça. Puis sur le plan mondial, il y a une concurrence, alors
il vaut mieux avoir des éléments pour attirer les gens ici. Puis ça crée des
investissements, ça crée de l'argent neuf. Je sais qu'il y a eu un débat sur
cette question-là. C'est-u de l'argent neuf? Écoutez, de l'argent neuf, dans le
fond, c'est... Cet argent-là ne serait pas investi si on ne l'avait pas. Si le
programme n'existait pas, il ne serait pas investi là. Il serait investi, mais
il serait investi ailleurs, peut-être dans d'autres États ou dans d'autres
domaines. Mais il serait investi, à ce moment-ci, au Québec grâce à ce
programme-là.
M. Hamel pourrait peut-être compléter.
M. Hamel (Denis) :
Oui. Merci, Mme la Présidente. Oui, bien, certainement...
La Présidente (Mme Chassé) :
Il vous reste deux minutes.
M. Hamel (Denis) :
Deux minutes? Très rapidement, bien, effectivement, pour compléter ce que M.
Dorval a dit, c'est effectivement un programme... Bon, on ne peut pas négliger
aucun des apports des différents volets des programmes d'immigration. Donc,
c'est un programme qui est intéressant, qui est attirant. Je pense que la
démonstration a été faite. Est-ce qu'il pourrait être bonifié? Probablement,
probablement, parce qu'il y a justement... Comme c'est de l'argent qui est
placé au Québec et qui sert à...
D'abord, le Programme PRIME est drôlement
important. Lui aussi mériterait d'être bonifié parce que plusieurs employeurs
disent : Bien, le Programme PRIME, des fois, c'est très long avant
d'avoir... Les délais. Est-ce qu'on pourrait faciliter justement toutes les
ressources qui viennent de ce programme d'investisseurs? Mais c'est surtout le
fait qu'il attire chez nous des gens qui contribuent énormément au
développement... ça fait que... au développement économique. Donc, on a souvent
tendance à le négliger, ce programme-là. On a dit qu'on a haussé les seuils
minimaux récemment et puis, justement, pour en faire un programme qui est
beaucoup plus compétent, beaucoup plus malléable.
Alors, c'était simplement pour dire :
On peut faire encore mieux avec un programme, déjà, qui fonctionne très bien.
M. Dorval
(Yves-Thomas) : Il ne faudrait pas le réduire, à tout le moins.
La Présidente (Mme Chassé) :
Pardon?
M. Dorval
(Yves-Thomas) : Il ne faudrait pas le réduire, à tout le moins.
La Présidente (Mme Chassé) :
D'accord, merci. Ça conclut?
Mme Lecours (Les Plaines) :
Oui.
La Présidente (Mme Chassé) :
Très bien. Il restait 40 secondes. Ça va? O.K. Excellent. Je prête maintenant
la parole au député de Nelligan.
M. Derraji : Merci, Mme la
Présidente. M. Dorval, M. Hamel, bienvenue à la commission. Premièrement, je
tiens à vous remercier pour l'excellent rapport. C'est un rapport qu'on doit
relire. Je l'ai lu au moins trois ou quatre fois. C'est une vraie feuille de
route pour la prospérité économique du Québec, et je tiens à vous remercier au
nom de ma formation politique.
Ma première question. Vous êtes des
gestionnaires. Sur la table maintenant, il y a un gap entre votre proposition
et la proposition caquiste de 20 000 immigrants de moins, 20 000, sur
la table... sur l'échiquier de l'économie québécoise. Vous avez parlé d'une
moyenne de combien d'employés par entreprise, PME, combien d'employés?
M. Dorval
(Yves-Thomas) : Je ne suis pas sûr d'avoir compris la question.
M. Derraji : La moyenne du
nombre d'employés par PME au Québec, aux alentours de combien?
M. Dorval
(Yves-Thomas) : C'est autour d'une dizaine.
• (16 h 50) •
M. Derraji : Une dizaine? O.K.
Aujourd'hui, avec le gap, le gouvernement met en péril...
M. Derraji : ...d'une moyenne
de combien d'employés par entreprise, PME, combien d'employés?
M. Dorval
(Yves-Thomas) : Je ne suis pas sûr d'avoir compris la question.
M. Derraji : La moyenne du
nombre d'employés par PME au Québec, aux alentours de combien?
M. Dorval
(Yves-Thomas) : C'est autour d'une dizaine.
M. Derraji : Une dizaine, O.K.
Aujourd'hui, avec le gap, le gouvernement met en péril, je dirais, probablement
2 000 PME. C'est parce que vous avez fait votre étude que ça prend
60 000 pour pouvoir répondre d'une manière adéquate aux besoins de
main-d'oeuvre. Si vous n'avez pas les 20 000 que vous réclamez
aujourd'hui, ça veut dire que, si le gouvernement persiste dans les mêmes
seuils, on a un gap de 20 000. Le gap qu'on a de 20 000 va affecter
d'une manière directe et frontale un minimum de 2 000 entreprises si je
prends la moyenne de cinq employés. Ça serait quoi, votre réponse à vos
membres, si le gouvernement, au mois de novembre, annonce sa stratégie et
maintient les mêmes seuils?
M. Dorval
(Yves-Thomas) : Alors, Mme la Présidente, en fait, moi, j'ai
entendu le ministre qui nous a dit sur la place publique : On est là pour
écouter puis on va prendre en considération ce qui est dit. Alors, c'est pour
ça qu'on vient parler, puis qu'on vient expliquer, puis qu'on donne des faits
derrière ça. On espère que le gouvernement, à travers ça, va arriver aux mêmes
conclusions. Bien sûr, dans la vie, il y a toutes sortes d'opinions, il y a
toutes sortes de points de vue. Il y a un élément qui est important dans tout
ce débat-là, c'est la perspective du passé, c'est qu'on disait dans le
passé : On a eu des problèmes pour intégrer les personnes immigrantes, on
a eu des problèmes. C'est pour ça qu'il y a eu des... Arrima, qui a été initié
par l'ancien gouvernement libéral mais qui a été mis en place par le
gouvernement actuel. C'est pour ça que les autres initiatives, le parcours,
etc., sont importantes. Pourquoi? Parce qu'on a eu des problèmes. Au niveau de
la sélection, il nous reste un problème encore, parce qu'il faut s'assurer que
la sélection soit vraiment en lien avec les besoins du marché du travail.
Cela dit, donc, les outils sont en place.
Aujourd'hui, on est devant la question : Est-ce qu'on laisse aller des
revenus, des profits, des situations où les entreprises ne peuvent pas répondre
à la demande parce qu'ils n'ont pas les employés pour le faire ou est-ce qu'on
essaie de le combler? Nous, ce qu'on dit, c'est : On arrive à la
conclusion qu'en bas de 60 000 personnes on ne peut pas aller chercher le
nombre de travailleurs...
M. Derraji : J'ai compris.
Juste... je vous informe, j'ai juste 11 minutes, je n'ai pas le même temps que
le gouvernement, parce que j'ai d'autres questions. Ma question, elle est très
claire, parce que je sais votre préoccupation.
La Présidente (Mme Chassé) :
On est rendus à sept.
M. Derraji : Oui. Je comprends
votre préoccupation et je suis là vraiment pour démystifier pour l'ensemble des
membres l'ampleur de ce que vous avez déclaré la semaine dernière, je ne sais
pas si on l'a saisi ou pas, là, c'est un cri du coeur. Vous avez dit qu'on frappe
le mur. Pour moi, aujourd'hui, entendre ça, c'est une attaque frontale à
l'économie régionale et à la vitalité des régions. Vous l'avez mentionné dans
votre mémoire.
Ma question, elle est très simple :
Le gouvernement s'apprête à annoncer sa stratégie au mois de novembre, il vient
avec une décision de maintenir les seuils, ça serait quoi, votre réaction? Moi,
je vais être vraiment au mois de novembre aujourd'hui.
M. Dorval
(Yves-Thomas) : C'est sûr que les employeurs vont être
catastrophés, si on ne réussit pas à augmenter le nombre d'immigrants au
Québec, parce que les besoins sont là. Puis ce n'est pas des besoins
artificiels, ce n'est pas des besoins inventés, c'est une réalité. Alors, nous,
on a fait nos devoirs, on a consulté nos membres, on est arrivés avec les
résultats. Les chiffres du gouvernement sur les besoins de main-d'oeuvre sont
là. Alors, je veux dire : Est-ce que les chiffres sont toujours parfaits?
Pas nécessairement. Qui peut prédire si on n'aura pas une récession dans les 10
prochaines années, puis là on va se dire : Ah! tout à coup, on a trop de
main-d'oeuvre? La réalité, là, on regarde le vieillissement démographique, là,
sur 10 ans, là, lui, il est certain, il est certain parce qu'on ne peut pas
voir, là, tout à coup, un boom de natalité qui va venir remplacer la situation,
puis, même si on en avait un, avant que les gens soient sur le marché du
travail, ça va prendre 23 ans. Alors, de toute façon, on est là. Ce qu'on dit
au gouvernement : On n'a pas le choix, le mur est là, c'est 60 000
minimum. Si on choisit moins, bien, c'est sûr que ça va avoir un impact
économique sur plusieurs employeurs.
M. Derraji : Oui. Et vous
l'avez mentionné que, pour les besoins en net, c'est 1 million. Je veux
revenir à un point que vous avez soulevé, juste de me clarifier, parce que j'ai
l'impression, j'ai l'impression, corrigez-moi, probablement je me trompe, une
réponse que vous avez formulée à M. le ministre que vous avez dit qu'il n'y a
pas d'écoute, vous avez développé des projets, mais malheureusement il n'y a
pas d'écoute. Je veux juste que vous clarifiiez l'écoute, l'écoute de la part
du MIDI, l'écoute de la part du ministère, l'écoute de la part de qui. Et, si
vous avez des projets sur la table, ça concerne quoi, ces projets?
Et ma dernière, dans le même bloc :
Est-ce qu'on vous a inclus dans l'équation de la régionalisation?
M. Dorval
(Yves-Thomas) : Alors, il y a eu des consultations à l'occasion
par la sous-ministre, il y a des conversations avec le cabinet, ces choses-là,
sur les enjeux. Il y en a eu aussi concernant l'enjeu avec le fédéral sur
l'immigration temporaire. À partir de ce qu'on nous a indiqué comme intention,
nous, on a développé des projets chez nous, qu'on a présentés au gouvernement.
Quand je dis au gouvernement, c'est d'abord aux fonctionnaires, là, c'est des
programmes normés ou des programmes qui rentrent, là, dans l'analyse, etc.,
donc je ne parle pas au niveau politique, mais, à tout le moins, on a eu un
frein majeur à ces projets-là. Peut-être qu'ils n'étaient pas parfaits...
M. Dorval
(Yves-Thomas) : ...indiqué comme intention, nous, on a
développé des projets chez nous, qu'on a présentés au gouvernement. Quand je
dis : Au gouvernement, c'est d'abord aux fonctionnaires, là. C'est des
programmes normés ou des programmes qui rentrent, là, dans l'analyse, etc.
Donc, je ne parle pas au niveau politique, mais, à tout le moins, on a eu un
frein majeur à ces projets-là. Peut-être qu'ils n'étaient pas parfaits.
Peut-être que... parce que, vous savez, dans la vie, on peut voir différentes
choses.
L'élément certain, c'est au lieu de
travailler à trouver tout de suite des solutions parce qu'on est en situation
en de crise, bien, on prend plusieurs mois à analyser ça puis après plusieurs
mois, bien, on se fait dire : Bien là, ce n'est pas correct, puis là il
faut refaire nos devoirs, puis là ça prend encore un an, deux ans. Je vous
répète : Le problème, c'est qu'il est actuel. Il y a déjà 118 000
postes à combler au Québec. Ce n'est pas dans... Ça, ce n'est pas dans l'année
prochaine, là, c'est cette année. Alors, chaque année, ça s'accumule.
Alors, nous, ce qu'on dit là-dessus, ce
n'est pas qu'on n'a pas une écoute, mais le processus décisionnel, il est long.
M. Derraji : Oui. Bien, je
vous entends, là, M. Dorval, et la commission, elle est là. Du moment que nous
sommes en consultations, le ministre, il est là, et j'en suis sûr et certain
qu'il a pris bonne note de vos projets. Je sais la rigueur du Conseil
du patronat.
Moi, je pense que le
ministère, et le ministre, et son équipe vont prendre note, parce que c'est
alarmant, c'est inquiétant quand même qu'on a des projets pour répondre à la
régionalisation et aux défis de main-d'oeuvre, et que vous sentez qu'il y a des
obstacles.
Ce que j'entends depuis le
début, qu'on veut travailler en mode collaboration, la coordination au niveau
du MIDI, le signal que vous nous envoyez aujourd'hui, que c'est... il y
a du blocage à l'intérieur du MIDI. Je ne parle pas du politique, de la part
des fonctionnaires. Est-ce que c'est ce que vous voulez dire par vos propos?
M. Dorval
(Yves-Thomas) : C'est la lenteur du processus plus que le
reste. C'est tellement long. C'est tellement long, puis, quand on arrive à des
décisions, puis là il faut recommencer nos devoirs, bien, c'est une autre
période qui recommence.
Moi, ce que je dis, c'est : À quelque
part, il y a plein de gens de bonne volonté, de tous les niveaux, puis c'est
vrai aussi au niveau de la fonction publique, au niveau de politique puis au
niveau des organisations comme les nôtres. C'est juste que c'est long. C'est
très long, trop long.
M. Derraji : Dans la page 9 de
votre mémoire, vous parlez d'une manière très, très claire, le poids
démographique du Québec dans l'ensemble canadien. Pour le bénéfice de tout le
monde, en 2017, le ratio Québec-Canada était de 18,3 %. Avec le
gouvernement caquiste, en 2019‑2020, ce poids va baisser de 18 % à
13 %. C'est quoi, le signal que ça envoie, selon vous?
M. Dorval
(Yves-Thomas) : Je pense que comme politicien, comme formation
politique, de part et d'autre, vous avez la même conclusion.
M. Derraji : Vous avez évoqué
dans votre mémoire que le poids démographique du Québec dans l'ensemble...
La Présidente (Mme Chassé) :
Il reste 30 secondes à l'échange. Pardon.
M. Derraji : Combien?
La Présidente (Mme Chassé) :
C'est vous. Non? Il y a eu un petit bogue. Alors, poursuivez.
M. Derraji : O.K. Vous avez
évoqué... Vous allez rajouter le moment d'arrêt, hein? S'il vous plaît.
La Présidente (Mme Chassé) :
...
M. Derraji : O.K. Le poids
démographique. Le poids démographique est un élément important dans votre
analyse. Donc, vous avez évoqué ça comme un fait, comme problématique. Ce qu'on
constate, que de 2017 à 2019, donc 2019, même 2020, le ratio Québec-Canada va
passer de 18,3 % à 13 %, donc une perte de 5 %, et on sait c'est
quoi, la suite, donc c'est la place du Québec par rapport au nombre de sièges à
Ottawa, etc., le pouvoir. En quoi, en tant qu'association patronale, ça vous
préoccupe, la place du Québec dans l'ensemble canadien.
M. Dorval
(Yves-Thomas) : En fait, Mme la Présidente, notre point n'est
pas nécessairement à dire que, nous, ça nous préoccupe comme organisation toute
seule, c'est qu'on a saisi l'opportunité dans notre mémoire pour expliquer que
l'immigration, ça dépasse seulement la question de l'emploi puis des
employeurs, que c'est une problématique sociétale qui touche les régions, qui
touche, je dirais, tous les Québécois, puis que, si on n'a pas les
investissements requis en matière de nombre, bien, il y a des effets là-dessus,
que ce soit pour les régions, que ce soit pour les employeurs, que ce soit même
pour l'État québécois. C'est essentiellement ce qu'on dit parce que les données
le démontrent, je veux dire, les études démographiques. Si on n'a pas la
compensation par l'immigration, bien, on perd notre rapport de force.
M. Derraji : Donc, ce qu'on
peut comprendre, c'est qu'avec la décision du gouvernement caquiste de réduire
le seuil à 40 000 le gouvernement de la CAQ va nous faire perdre du
pouvoir à Ottawa et perdre des sièges à la Chambre des communes. C'est ce que
vous êtes en train de dire avec cet argument.
M. Dorval (Yves-Thomas) :
Nous, ce qu'on dit, c'est : Statistiquement, on a fait les démonstrations
des faits. C'est aux politiciens maintenant à prendre acte de ça puis décider
qu'est-ce qu'ils veulent faire.
M. Derraji : Oui. Vous avez
parlé des projets, tout à l'heure, au niveau de ce que vous avez sur la table,
M. Dorval. Ça consiste en quoi, les projets que vous avez et que vous avez
développés?
• (17 heures) •
M. Dorval
(Yves-Thomas) : Ah! on en a de différentes natures. On en à
Montréal, dans certains secteurs, pour certains métiers qui sont en pénurie,
pour travailler avec des organismes communautaires à la formation de gens qui
sont déjà ici, par exemple des réfugiés, et autres, et pour les aider à
développer de l'expertise pour être employables puis, en même temps, leur faire
une formation en français avec le réseau de l'éducation et des organismes
communautaires, etc. Bon, ça n'a pas été jugé recevable...
17 h (version non révisée)
M. Dorval
(Yves-Thomas) : ...travailler avec des organismes
communautaires à la formation de gens qui sont déjà ici, par exemple, des
réfugiés, et autres, et pour les aider à développer de l'expertise pour être
employables puis, en même temps, leur faire une formation en français avec le
réseau de l'éducation et des organismes communautaires, etc. Bon, ça n'a pas
été jugé recevable au niveau local parce qu'on a dit finalement que ce n'était
pas nécessairement important. Que ce soit au niveau des régions ressources,
vous savez, il est possible d'amener de l'immigration dans les régions, je
dirais, qui entourent la ceinture de la grande région de Montréal. C'est
possible d'amener les gens en Montérégie, à Laval, à Laurentides, c'est
difficile d'amener quelqu'un de Montréal qui est un immigrant à Sept-Îles ou à
Baie-Comeau. Alors, qu'est-ce qu'on peut faire pour ces régions-là qui, en plus
de ça, sont en...
La Présidente (Mme Chassé) :
En conclusion.
M. Dorval
(Yves-Thomas) : ...décroissance démographique? Alors, on
propose des solutions qui ne sont pas parfaites, l'idée ici, c'est de
dire : Bien, voici une piste, comment on peut travailler ensemble puis
trouvons la solution. C'est là-dessus qu'on travaille actuellement...
La Présidente (Mme Chassé) :
Je vous remercie.
M. Dorval
(Yves-Thomas) : ...de trouver des solutions, sauf que ça prend
un an, deux ans.
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci. Merci beaucoup. Je passe maintenant la parole au député de Laurier-Dorion,
allez-y.
M. Fontecilla : Merci. Bonjour,
Monsieur. Écoutez, pour continuer sur la même veine, l'intervenant juste avant
vous, M. Laplante, disait que la régionalisation est une utopie.
Structurellement, ici, comme partout ailleurs, là, les gens s'installent dans
les grands centres, c'est la tendance mondiale, sociologique, etc. Vous avez
commencé et vous l'avez dit vous-même, vous avez dit : Il y a des pistes,
etc. Est-ce que pour vous, c'est une utopie?
M. Dorval
(Yves-Thomas) : Non.
M. Fontecilla : O.K.
J'aimerais vous entendre.
M. Dorval
(Yves-Thomas) : Bien, il y a des régions qui réussissent,
l'Abitibi-Témiscamingue qui a eu quand même une contribution de l'immigration
significative. Je suis d'accord avec les éléments suivants, c'est que ce n'est
pas juste l'immigration, hein, pour développer les régions, c'est un ensemble
de facteurs. Quand on nous pose la question, au CPQ, on parle, par exemple,
d'apporter l'éducation plus près des gens pour ne pas que les jeunes soient
obligés de quitter la région puis ils ne reviennent pas. Comment on peut amener
l'éducation auprès des jeunes, ça, c'est un exemple.
Deuxième des exemples, les
infrastructures. Comment on peut faire en sorte que les gens ne sont pas isolés
en région. Que ce soit les infrastructures physiques comme le transport
ferroviaire et ainsi de suite, Gaspésie, par exemple, que ce soit la question
des infrastructures numériques, parce qu'aujourd'hui, avec l'économie de
services, l'économie du savoir, on peut s'installer à Chapais puis exporter des
biens vidéo à travers le monde.
M. Fontecilla : ...
M. Dorval
(Yves-Thomas) : Pas toujours, mais, oui. Ça veut dire, c'est toujours
ensemble, les intervenants du milieu, etc. J'ai parlé du rôle des grands
employeurs qui veulent contribuer à ça parce qu'ils considèrent que
l'écosystème est important pour leurs fournisseurs ou pour les services à leurs
employés, etc. Donc, non, ce n'est pas une utopie, c'est possible de le faire,
il y a des moyens pour le faire, ça prend, oui, des orientations, puis ce n'est
pas basé seulement sur l'immigration, mais, l'immigration, c'est la seule
solution lorsqu'on n'a pas assez de démographie interne pour combler les
besoins, il faut aller la chercher ailleurs...
La Présidente (Mme Chassé) :
Il vous reste 30 secondes.
M. Dorval
(Yves-Thomas) : ...plus la productivité, bien sûr,
l'intelligence artificielle, etc. Mais, ça, c'est déjà pris en compte, on a
déjà pensé à ça, et ça fait partie des solutions. Mais il y a des entreprises
ultras modernes qui viennent de s'établir, mais elles ont besoin quand même de
manoeuvre dans cette entreprise-là, puis elles n'en ont pas.
M. Fontecilla : Merci.
La Présidente (Mme Chassé) :
Très bien, je vous remercie. Je passe maintenant la parole à la députée de Gaspé.
Mme Perry Mélançon : Merci, Mme
la Présidente. Bonsoir... bonjour. Vous avez effleuré le sujet de la
surqualification qui est un problème dans la grille actuelle, là, la grille de
sélection, et j'aurais aimé vous entendre sur quels seraient les critères qu'on
devrait prioriser pour améliorer toute la réussite, finalement, de
l'immigration au Québec.
M. Dorval
(Yves-Thomas) : Oui. Bien, là, Mme la Présidente, il y a un
enjeu, c'est qu'Arrima va rentrer en service. Là, Arrima n'était pas là, puis
là, il va y avoir un système où les gens ont déclaré leurs intérêts, puis on va
offrir aux gens... en fonction des besoins du marché du travail, puis c'est
dans la politique du gouvernement de s'arrimer, par exemple, aux discussions
qu'il y a à la Commission des partenaires du marché du travail avec Emploi-Québec,
etc., pour trouver comment combler les besoins régionaux, les métiers en
rareté, etc. Donc, il y a déjà un effort qui va être fait de ce côté-là. Je
n'ai pas la réponse exacte pour la grille de sélection, on peut regarder la
grille de sélection, comment elle a été appliquée dans le passé, c'est clair
que ça a créé de la surqualification. Si on surpondère, par exemple, un diplôme
universitaire dans un domaine qui n'est pas nécessairement en demande au
Québec, on ne rencontrera pas nécessairement les autres domaines puis on ne
rencontrera pas les besoins de main-d'oeuvre qui demandent moins de
qualifications. Si, par exemple, on surpondère aussi la question du français,
attention, nous, on croit que le français est important, mais si on surpondère
la connaissance du français par rapport au type de travail que les gens vont
faire, on va avoir de la misère à être compétitifs au plan international pour
amener du monde ici. Ça ne veut pas dire qu'on ne doit pas tenir compte du
français, au contraire, il faut d'ailleurs travailler sur la francisation, ça
fait partie, hein, des propositions qu'on a soumises ici.
Donc, la question de la grille de
sélection, elle a été, je dirais, dans le passé, pas adéquate. Puis dans le
futur, avec le système Arrima, on va voir comment tout ça va pouvoir
fonctionner. Mais le système Arrima va être aussi bon que la...
M. Dorval
(Yves-Thomas) : ...travailler sur la francisation, ça fait
partie, hein, des propositions qu'on a soumises ici.
Donc, la question de la grille de
sélection, elle a été, je dirais, dans le passé, pas adéquate. Puis dans le
futur, avec le système Arrima, on va voir comment tout ça va pouvoir
fonctionner. Mais le système Arrima va être aussi bon que la qualité des gens
qui vont présenter leur candidature sur Arrima. Si 95 % des gens qui
appliquent sur Arrima, ils ont un diplôme universitaire, mon 50 %,
60 % de personnes... d'emplois qui représentent moins de qualifications,
je vais avoir un problème.
Mme Perry Mélançon :
Rapidement, selon vous, est-ce que l'accompagnement des employeurs devrait
passer par des services offerts par le gouvernement ou par des organismes qu'on
a déjà sur le territoire un peu partout au Québec?
La Présidente (Mme Chassé) :
En moins de 30 secondes.
M. Dorval
(Yves-Thomas) : Mme la Présidente, ça, c'est important, et
c'est en partenariat.
La Présidente (Mme Chassé) :
Allez-y.
M. Dorval
(Yves-Thomas) : Je pense que... On le fait actuellement. Nous,
on a développé un service, qu'on offre sur le territoire, d'accompagnement pour
les petites entreprises en matière de gestion des ressources humaines, puis on
le fait avec le gouvernement, on le fait avec des organismes communautaires, on
le fait avec des MRC et des municipalités. Ça ne peut pas se faire sans l'un ou
l'autre. Ça ne peut pas se faire juste par le gouvernement, ça ne peut pas se
faire juste par une organisation. C'est ensemble. Mais, si on ne le fait pas
ensemble...
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci.
M. Dorval
(Yves-Thomas) : ...on ne réunit pas les forces complémentaires
de chacun, puis le gouvernement ne peut rien faire tout seul si les autres
organisations comme la nôtre, elles ne sont pas là.
La Présidente (Mme Chassé) :
M. Dorval, merci. C'est toujours un plaisir, M. Dorval, M. Hamel, de vous
recevoir à notre commission. Ça conclut l'exposé et le débat.
Je suspends temporairement les travaux
pour permettre au prochain et dernier groupe de la journée de prendre place.
Merci.
(Suspension de la séance à 17 h 6)
(Reprise à 17 h 9)
La Présidente (Mme Chassé) :
Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants du Mouvement Québec
indépendant. Vous avez 10 minutes pour votre exposé, et je vous invite tout
d'abord à vous présenter. Allez-y.
Mme Ouellet (Martine) : Merci,
Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Chassé) : Ça
fait plaisir.
Mme Ouellet (Martine) : Donc,
je me présente, Martine Ouellet, ancienne députée de l'Assemblée nationale,
ministre des Ressources naturelles et ancienne cheffe du Bloc québécois. Donc,
ça me fait plaisir, d'ailleurs, de revoir plusieurs anciens collègues ici
aujourd'hui.
M. Monière (Denis) : Bonjour,
Mme la Présidente. Denis Monière, politologue, auteur et membre du Mouvement
Québec indépendant.
Mme Ouellet (Martine) : Et
donc nous sommes ici au nom du Mouvement Québec indépendant. Peut-être,
plusieurs dans la salle ne le connaissaient pas, donc. Et c'est un mouvement
transparlementaire, transpartisan pour la promotion de l'indépendance du Québec
assumée. Nous avons produit un magazine, puis je vous en parle parce que c'est
lié au sujet d'aujourd'hui. Donc, le premier numéro était sur le dossier de
l'immigration, et le deuxième numéro, sur le multiculturalisme. C'est quand
même assez lié à l'immigration. Plusieurs conférences. Et des positionnements
aussi, mais... Ça ne fait même pas encore un an d'existence, et déjà nous avons
pris position contre le projet d'Énergie Est à la commission canadienne
d'évaluation environnementale, malheureusement, canadienne, et ici, aujourd'hui,
sur le dossier de l'immigration.
• (17 h 10) •
Et sur le dossier de l'immigration, bien,
vous avez vu le titre de notre mémoire, Un pays pour une immigration réussie.
Parce que, franchement vous dire, tant et aussi longtemps que les immigrants seront
accueillis par le Canada, tant et aussi longtemps que les immigrants seront
donc accueillis...
Mme Ouellet (Martine) :
...aujourd'hui sur le dossier de l'immigration. Et sur le dossier de l'immigration,
bien, vous avez vu le titre de notre mémoire : Un pays pour une immigration
réussie. Parce que franchement vous dire, tant et aussi longtemps que les immigrants
seront accueillis par le Canada, tant et aussi longtemps que les immigrants
seront donc accueillis en anglais, seront donc accueillis avec la philosophie
du multiculturalisme, qui est une forme insidieuse d'apartheid, et ça, c'est
même dixit Neil Bissoondath, tant et aussi longtemps que les immigrants devront
prêter un serment d'allégeance à la reine Elizabeth II, bien, ce sera très
difficile, voire impossible, d'avoir une immigration qui soit un succès au Québec.
Parce qu'ici, au Québec, ça se passe en français, parce qu'ici on n'en veut
pas, du multiculturalisme. Ici, depuis l'habitation du territoire,
l'intégration se fait par un partage, se fait par un métissage culturel, puis
ici, bien, la monarchie... c'est clair qu'on ne veut rien savoir de la
monarchie. Donc, vous comprenez la difficulté qu'il y a au niveau de l'immigration.
Et là, on va se le dire bien clairement :
Ce n'est pas les immigrants qui sont en cause dans les problèmes d'intégration
qu'on au Québec, c'est le statut de province que nous avons, un statut de
province subordonnée au gouvernement fédéral. Et dans le dossier de l'immigration,
on le voit, là, l'immigrant, il commence ses démarches dans l'ambassade
canadienne, et ensuite tous les délais de personnel, c'est le Canada qui
décide. Le permis de résidence permanente, on a vu tantôt les délais, c'est le Canada
qui décide. La citoyenneté, c'est le Canada qui décide. Il n'y a pas
grand-chose que le Québec décide dans le dossier de l'immigration. Et tant que
le Québec restera une province, il ne pourra pas concurrencer le Canada sur le
terrain de la loyauté. On ne peut pas blâmer ceux qui viennent vivre au Québec
d'avoir tendance à s'identifier au Canada multiculturel et anglophone, puisque
le Canada est leur pays d'accueil tant que le Québec va rester une province et
qu'il déploie des ressources importantes pour construire l'identité canadienne.
Donc, c'est pour ça qu'on dit que, vraiment, ça prend un pays pour avoir une
immigration réussie. On va aller dans le détail, un petit peu plus, du document
de consultation.
M. Monière (Denis) : Donc, en
continuité avec cette introduction, le document de consultation nous invite à
réfléchir aux compétences partagées qu'aurait le Québec en matière
d'immigration. Cela nous semble un euphémisme, puisque, s'il y a partage des
compétences il y a un très fort déséquilibre entre les capacités du Canada et
celles du Québec, comme Mme Ouellet vient de l'illustrer.
Ceci est un peu surréaliste, en réalité,
parce qu'on nous invite à réfléchir sur une politique de planification
pluriannuelle, et dans les capacités du Québec en matière d'immigration, on ne
contrôle qu'un tiers environ des compétences, on a la maîtrise d'environ une
variable sur trois. On contrôle l'immigration économique, et encore, mais on
n'a rien à dire sur la politique des réfugiés, on n'a rien à dire sur la politique
de réunification des familles. Alors, quand on se met à discuter de quotas, de
seuils en vertu de la politique canadienne, on se dit qu'on est un peu dans
l'absurde, parce qu'il suffit que le Canada décide d'augmenter ses seuils de
réfugiés, d'accueil de familles, pour que nous, nos quotas et nos seuils
tombent à l'eau, n'aient plus de sens.
Donc, c'est une situation paradoxale, et
je pense qu'il faut clarifier les contradictions dans lesquelles le gouvernement
du Québec est obligé de travailler. Donc, c'est un peu le but de notre mémoire,
de mettre en évidence toutes ces embûches et ces contraintes qu'impose notre
présence au Canada, pour une politique d'immigration cohérente.
J'ajouterais, là-dessus, qu'une politique
d'immigration, ce n'est qu'un volet d'une politique plus globale. Une politique
d'immigration doit s'inspirer d'une politique de la population. C'est un
ingrédient dans une politique générale de population. Et la question que vous
devrez résoudre, c'est : À qui doit servir l'immigration? Et dans notre
perspective à nous, l'immigration doit servir à construire une communauté de
langue française en Amérique du Nord. Et jusqu'à présent notre expérience
canadienne nous a amenés à considérer que la politique d'immigration du Canada
cherche, elle, plutôt à diminuer l'importance démographique des francophones
dans l'ensemble canadien. Une seule statistique : en 2016, seulement
7 % des 290 000 immigrants accueillis par le Canada déclaraient
parler le français. Pensez-vous que le Canada va devenir un pays plus
francophone avec l'immigration? Poser la question, c'est y répondre.
Mme Ouellet (Martine) : Dans
le document de consultation aussi, il y a un aspect qui est manquant,
extrêmement important, il n'y a aucune donnée sur les...
M. Monière (Denis) :
...accueillis par le Canada déclaraient parler le français. Pensez-vous que le Canada
va devenir un pays plus francophone avec l'immigration? Poser la question,
c'est y répondre.
Mme Ouellet (Martine) :
Dans le document de consultation aussi, il y a un aspect qui est manquant, extrêmement
important, il n'y a aucune donnée sur les investissements. Et là l'immigration,
c'est clairement un dossier transparlementaire, donc il y a des investissements
du gouvernement fédéral, il y a des investissements du gouvernement provincial,
et on n'a aucune information.
Parler de seuil d'immigration, déjà, en
tant que province, comme on est subordonnés au Canada, c'est un peu surréaliste
parce qu'au bout du compte c'est le Canada qui va décider du quota canadien,
duquel découle en grande partie le seuil d'immigration du Québec. Et, lorsque
mon collègue Denis Monière disait qu'on contrôle une des trois variables,
l'immigration économique... Puis encore, dans l'immigration économique, tout ce
qu'on contrôle, c'est les critères de sélection. On ne contrôle aucunement la
citoyenneté, les délais de réponse. Il y a d'ailleurs des gens qui s'en
plaignaient parce que le gouvernement canadien ne met pas les investissements
nécessaires pour avoir le nombre de ressources. Et donc on n'a pas les
investissements.
Et de parler de seuil d'immigration sans
avoir les investissements, c'est extrêmement problématique parce qu'il faut
avoir les moyens de bien accueillir les immigrants. Ce n'est pas le nombre
total qui est important, c'est la capacité de les accueillir. Et clairement,
actuellement, on n'accueille pas correctement les immigrants. La Vérificatrice
générale du Canada... du Québec l'a dit pour 2017 que la francisation, c'était
un échec. Donc, il y a des investissements qui sont clairement manquants.
Et c'est pour ça qu'on qu'on dit : On
devrait réserver les montants pour la francisation pour les catégories de
réfugiés et les catégories de réunification familiale puis de s'assurer que les
immigrants économiques, sur lesquels, en tant que province... quand on sera un
pays, on pourra choisir... mais, en tant que province, on peut avoir un critère
de sélection. Donc, ça, c'est une des recommandations.
Dans la politique de population, on doit
se poser la question : Est-ce qu'on veut.... Quelle population on veut du
Québec dans 10 ans, dans 20 ans, dans 50 ans? Et l'immigration
est un des morceaux. Et, dans cette perspective-là, ce qu'on dit, c'est qu'on
devrait avoir une politique de retour pour les francophones hors Québec, donc
au Canada et aux États-Unis, instaurer un statut d'étudiant immigrant pour
attirer les jeunes cerveaux et aussi un système de reconnaissance des acquis
souple, équitable et simplifié.
Et en terminant, vous savez, le
Canada — et ce n'est pas pour rien qu'il y a une problématique de
l'immigration au Québec — le Canada... le premier père fondateur du
Canada, lord Durham, ne s'en cachait pas : Il recommandait une politique
vigoureuse de peuplement anglais pour mettre, comme il le disait, «la race
française en minorité le plus rapidement possible». Le Canada a souvent utilisé
l'immigration contre la nation québécoise. Et malheureusement, tant qu'on va
rester dans le Canada, on va avoir cette problématique-là.
Et c'est pour ça que le Québec doit
devenir indépendant, pour que l'immigration devienne un facteur positif dans la
construction de la nation québécoise, d'une part, et parce que l'indépendance
permettra de choisir les immigrants en fonction des besoins réels du Québec,
et, d'autres part, parce qu'il ne constituera plus un facteur d'affaiblissement
démographique, comme c'est le cas actuellement au Canada.
La Présidente (Mme Chassé) :
Très bien, merci. Ça conclut donc votre exposé. Et on va débuter la période
d'échange. M. le ministre, la parole est à vous pour un bloc d'échange avec le
gouvernement de 16 minutes.
M. Jolin-Barrette :
Merci, Mme la Présidente. Mme Ouellet, M. Monière, bonjour.
Mme Ouellet, c'est un plaisir de vous
retrouver. On a fait quelques commissions parlementaires ensemble, et c'était
toujours agréable de vous voir travailler en commission parlementaire avec mes
collègues du précédent gouvernement. On a eu beaucoup de plaisir lors de la
41e législature.
Cela était dit, je comprends de votre
mémoire et de votre intervention que c'est sûr que vous prônez la souveraineté
du Québec. Puis votre mémoire est orienté sur cette question-là, mais on ne
réglera pas cette question-là ici cet après-midi, puis...
Une voix
: ...
M. Jolin-Barrette : Ah!
bien, moi, je n'ai pas ce pouvoir-là, ça appartient à la nation québécoise de
faire ses choix.
Cela étant dit, moi, mon objectif, c'est
d'aller vers le rapatriement de la compétence en matière de regroupement
familial. Je pense que, pour la planification de l'immigration mais aussi
l'intégration, c'est important que le Québec ait le maximum de leviers
possibles sur son immigration.
Cela étant dit, je vous écoutais parler,
tantôt, vous disiez : La Vérificatrice générale a dressé des constats,
notamment en matière de francisation en 2017, et il y a des problématiques au
niveau de la francisation. Mais récemment j'ai annoncé la moitié du budget
supplémentaire que j'ai été chercher, 70 millions justement pour ouvrir
les cours de français aux immigrants en situation temporaire, pour donner
davantage d'allocations aussi.
Qu'est-ce que vous pensez de ce qu'on a
annoncé relativement aux mesures en francisation qu'on met en place?
• (17 h 20) •
Mme Ouellet (Martine) :
Malheureusement, avec les informations disponibles, à moins de faire bien, bien
des recherches... Puis le Mouvement Québec indépendant est un organisme à but
non lucratif, ça fait que vous avez une idée des moyens qu'on peut avoir. Il
n'y avait aucune information dans votre document de consultation sur les
montants en francisation, sur des indicateurs de succès. Donc, moi, à ce
stade-ci, je n'ai aucune idée si le 70 millions qui a été annoncé,
premièrement, est suffisant, deuxièmement...
Mme Ouellet (Martine) : ...des
recherches — puis le Mouvement Québec indépendant est un organisme à
but non lucratif, ça fait que vous avez une idée des moyens qu'on peut avoir — il
n'y avait aucune information dans votre document de consultation sur les
montants en francisation, sur des indicateurs de succès. Donc, moi, à ce
stade-ci, je n'ai aucune idée si le 70 millions qui a été annoncé,
premièrement, est suffisant; deuxièmement, s'il est investi dans les bons
secteurs. Je n'ai rien actuellement qui me permet de pouvoir pencher dans cette
direction-là. C'est sûr, c'est mieux, ça, que pas d'investissements, on
s'entend, là. Mais je n'ai pas les informations pour me permettre, étant donné
qu'il n'y a pas d'informations financières dans votre document de consultation,
qui me permettraient de dire que le 70 millions est suffisant. Qu'est-ce
qu'il y avait avant? Qu'est-ce qui est financé par le gouvernement canadien?
Parce qu'il faut avoir un portrait global, là. On ne peut pas juste regarder un
petit morceau, là, il faut avoir le portrait global.
Et c'est tellement un échec important, la
Vérificatrice générale du Québec le disait, pour 2017 : des 40 % qui
ne connaissent... des immigrants ne connaissaient pas le français; de ces
40 %-là, seulement 60 % prenaient des cours de français, et, si ma
mémoire est bonne, 10 % seulement réussissaient leur cours. Je veux dire,
écoutez, là, 10 % de 60 %, là, c'est...
M. Jolin-Barrette :
Simplement pour vous situer, là, dans le fond, on a déposé le cahier de
consultation avant la fin de la session parlementaire, et l'annonce en matière
de francisation est survenue en juillet, je crois. Alors, bien entendu, ce
n'est pas dans le cahier de consultation, mais ça a été dans la sphère publique
cet été, puis on a annoncé les différentes mesures. Il y a une chose qui est
importante aussi, c'est : la semaine dernière, on a lancé le Parcours
d'accompagnement personnalisé justement pour faire en sorte que les personnes,
dès l'étranger, elles puissent avoir des cours de francisation en ligne, mais
surtout que leur intégration débute dès le départ avec un agent d'aide à
l'intégration qui va leur être assigné, puis ça va être une personne-ressource
pour le ministère de l'Immigration. Mais il faut comprendre que l'intégration
des personnes immigrantes passe par la mobilisation de tous les acteurs de la
société québécoise, mais principalement par le ministère de l'Immigration. Et
ça fait en sorte qu'on a ouvert tous les services du ministère de l'Immigration
aux personnes immigrantes, qu'elles soient en statut permanent ou temporaire,
justement pour faire en sorte que tout le monde adhère à la société québécoise,
et se francise, et aussi puisse occuper un emploi.
Cela étant, est-ce qu'au niveau de la
régionalisation vous avez des propositions qui vont nous permettre d'assurer la
régionalisation de l'immigration?
Mme Ouellet (Martine) :
Écoutez, au niveau de la régionalisation de l'immigration, c'est sûr que c'est
ce qui est souhaitable, ce qui est souhaitable pour plusieurs raisons,
souhaitable parce qu'on sait que la francisation est plus facile en région,
mais souhaitable aussi parce qu'il y a une démographie qui est en baisse en
région et qu'il y a des besoins qui sont en région. Mais, comme l'a dit un
groupe précédent, c'est clair qu'au niveau de la régionalisation, ça prend une
politique plus globale de développement régional. Mais oui, nous, on le
propose, qu'il faut de la régionalisation de l'immigration et, au besoin,
donner des incitatifs financiers — on sait que ça fait une différence,
des incitatifs financiers — et des mesures d'accompagnement. Donc,
c'est très clair.
Si je reviens juste à la francisation, un
peu plus tôt, nous, ce qu'on propose, c'est que... On a trois catégories
d'immigrants, là : il y a les immigrants économiques, sur lesquels le
Québec peut choisir les critères de sélection, pas tellement le reste, mais les
critères de sélection; et ensuite la réunification familiale et les réfugiés.
On peut comprendre que, du côté des réfugiés, on ne peut pas rien demander, là,
c'est des gens qui sont complètement en situation de détresse, là, c'est pour
ça qu'ils viennent ici. Réunification familiale, c'est très variable...
M. Jolin-Barrette : ...sur
les réfugiés, c'est le Québec qui les sélectionne. Vous avez deux types de réfugiés,
ceux qui sont parrainés par l'État et ceux qui sont parrainés par des groupes
de deux à cinq personnes ou par des organisations aussi. Donc...
Mme Ouellet (Martine) : Vous
oubliez tous ceux qui se présentent aux frontières.
M. Jolin-Barrette : Ah! Là,
ceux qui se présentent aux frontières, ce ne sont pas des réfugiés, ce sont des
demandeurs d'asile. Donc, les...
Mme Ouellet (Martine) : Des
demandeurs d'asile, mais qui éventuellement... On fait un raccourci, là. Ce
sont des demandeurs d'asile qui éventuellement vont devenir des réfugiés, là,
si le statut de réfugié est autorisé...
M. Jolin-Barrette : Leur est
accordé. Pas nécessairement.
Mme Ouellet (Martine) :
...leur est accordé, et ça, c'est le Canada qui décide. Et vous savez que
l'année passée et l'année précédente, il y en a pas mal qui se sont présentés à
nos frontières, particulièrement sur les frontières américaines. Mais, si je
reviens à...
M. Jolin-Barrette : Non, mais
c'est quand même important, ça, par exemple, parce que, lorsque les gens, là,
arrivent à la frontière, là, la personne, elle est un demandeur d'asile, ce
n'est pas dans la juridiction québécoise. Mais, à partir du moment où le
tribunal fédéral les reconnaît comme réfugiés, là, à ce moment-là, ils
deviennent de juridiction québécoise, si je peux dire.
Mme Ouellet (Martine) : Vous
avez raison. Toutefois, tout ce délai-là, qui est un délai d'ailleurs
complètement indécent pour les personnes demandeuses d'asile, c'est le Canada
qui décide de ce délai-là, mais, pendant tout ce délai-là, c'est le Québec qui
paie, hein?
M. Jolin-Barrette : Ah! Ça,
je suis d'accord avec vous.
Mme Ouellet (Martine) : Donc,
moi, je veux bien, là, mais on a un problème. On a un problème, parce qu'il y a
des gens qui se présentent à nos frontières, on n'a pas le contrôle ni de
l'émission...
Mme Ouellet (Martine) : ...complètement
indécent pour les personnes demandeurs d'asile. C'est le Canada qui décide de
ces délais-là, mais, pendant tous ces délais-là, c'est le Québec qui paie,
hein?
M. Jolin-Barrette : Ah! ça,
je suis d'accord avec vous.
Mme Ouellet (Martine) : Donc,
moi, je veux bien, là, mais on a un problème, on a un problème parce qu'il y a
des gens qui se présentent à nos frontières. On n'a pas le contrôle ni de
l'émission des permis de travail, et là, il y a des délais encore qui se sont
allongés comme ça n'a pas de bon sens, on n'a pas le contrôle pour les
émissions de statut de réfugié, et on paie, parce que ces gens-là, s'ils n'ont
pas de permis de travail, c'est sûr qu'ils ont besoin de moyens pour subvenir,
et c'est le gouvernement canadien qui a ces leviers-là, donc...
Mais tout ça pour arriver à mon idée de la
catégorie de l'immigration économique où on est tout à fait d'accord avec un
groupe précédent qu'on devrait demander que les gens de cette catégorie-là
aient une connaissance du français suffisante pour pouvoir travailler et
fonctionner au Québec. Bien, on trouve que c'est extrêmement important, puis le
français est quand même une langue internationale, il y a quand même plusieurs
pays qui parlent français et plusieurs pays dont le français est la langue
seconde. Donc, il me semble, comme je répète un peu ce que disait Robert
Laplante, mais le bassin est assez grand de personnes pour avoir des gens selon
les besoins qu'on a au niveau du développement économique du Québec, puisque
c'est la catégorie, là, des immigrants économiques.
M. Jolin-Barrette : Vous
diriez que...
Mme Ouellet (Martine) : Sauf
exception, hein, on s'entend, il peut toujours avoir des exceptions, là, sur
des postes particuliers, des choses, là, sauf exception.
M. Jolin-Barrette : Bien,
vous diriez, à l'image de la proposition du Parti québécois, qu'il y a une
barrière à l'entrée, d'avoir, supposons, un niveau 7 de français, de
connaissances du français, afin de pouvoir être sélectionné par le Québec.
Mme Ouellet (Martine) : Moi,
je ne suis pas dans les niveaux, là, c'est vraiment ça, plus technique, là, je
ne sais pas les niveaux, ça équivaut à quoi. Mais, moi, ce que je vous dis, une
connaissance pour être capable de fonctionner et pour la catégorie de
l'immigration économique. Puis pourquoi on ferait ça? Parce que... pour
réserver les investissements qu'on fait en francisation pour s'assurer que les
deux autres catégories, c'est-à-dire réunification familiale et réfugiés,
puissent avoir accès à des cours de francisation parce qu'actuellement ce n'est
clairement pas le cas.
M. Jolin-Barrette : Mais
c'est quand même important, le niveau, parce qu'on se retrouve dans une
situation où le gouvernement, auquel vous avez appartenu, a haussé, à travers
la grille de sélection, l'ancienne grille de sélection de la façon qu'on
sélectionnait avant Arrima, d'un niveau 5 à un niveau 7 pour avoir des points.
Cela nous amène sur le questionnement suivant, il faut répondre aux besoins du
marché du travail, les deux facteurs d'intégration dans une société, les
principaux, c'est le fait d'occuper un emploi puis le fait de pouvoir parler la
langue d'usage, en l'occurrence le français.
Alors, la question qui se pose, c'est de
dire, dans votre perspective : Bien, tous ceux qui n'ont pas un niveau,
supposons, 7 de français, ne pourront pas venir au Québec. Là, on est plutôt
dans une approche de dire : Bien, accompagnons les gens au niveau de la
francisation, déployons toutes les ressources, puis c'est ça qu'on a annoncé
aussi dès l'étranger parce qu'il faut répondre aux besoins du marché du
travail. Donc, peu importe d'où vous venez dans le monde, vous devriez pouvoir
venir au Québec. Vous n'êtes pas d'accord avec ça?
Mme Ouellet (Martine) :
Premièrement, je ne pense pas que l'immigration... puis on ne pense pas que
l'immigration doit être en fonction des besoins du marché du travail.
L'immigration doit être en fonction d'une politique de la population,
premièrement. Les besoins du marché du travail, il y a l'immigration qui peut
répondre, mais il y a aussi d'autres moyens de répondre au marché du travail,
il y a la formation professionnelle, il y a les salaires, hein, parce que c'est
sûr que, si tu augmentes les salaires, tu vas peut-être avoir plus de gens qui
vont appliquer sur un travail. Ça fait que ça, c'est une première chose.
M. Jolin-Barrette : Sauf que,
là-dessus, par contre, vous savez, la façon dont on sélectionnait les personnes
immigrantes, là, avec l'ancien système, c'était basé sur une grille de
sélection où vous aviez des pointages. Exemple, vous aviez un doctorat,
supposons, en droit, vous aviez plus de points. Combien on a besoin de
professeurs de droit dans nos facultés? Présentement, on n'est pas en pénurie.
Donc, je pense que la façon, dont on sélectionne les personnes immigrantes
maintenant, c'est préférable pour faire en sorte que, un, il n'y ait pas un
taux de surqualification puis il n'y ait pas des taux de chômage non plus.
Alors, êtes-vous en désaccord avec ça?
• (17 h 30) •
Mme Ouellet (Martine) : Nous,
ce qu'on dit, c'est qu'au niveau de la sélection des immigrants pour le secteur
économique, on doit y aller en fonction, effectivement, des besoins du marché
pour cette section-là, mais des emplois spécialisés. Donc, ne pas avoir une
grille qui est un peu bête puis juste en fonction des diplômes, il faut y aller
en fonction des besoins où on doit combler des emplois. Donc, ça, c'est une
première chose pour la sélection, mais on dit aussi, et là je vous amène aux
recommandations, là, 6, 7 et 8, mais particulièrement 7 et 8,
donc «d'instaurer un statut d'étudiant immigrant afin d'attirer les jeunes
cerveaux». Les gens, quand ils viennent étudier ici, s'ils veulent rester, on
croit qu'il faut faciliter le fait que les gens puissent rester, parce que,
déjà, d'être venu étudier, il y a déjà une certaine intégration qui s'est
réalisée. Et on a tout à gagner à conserver les talents des gens qui sont
développés ici, et on dit même de profiter... le même tarif que les Québécois
et les Québécoises pour les frais de scolarité en échange...
17 h 30 (version non révisée)
Mme Ouellet (Martine) :
...étudier ici. S'ils veulent rester, on croit qu'il faut faciliter le fait que
les gens puissent rester parce que, déjà, d'être venu étudier, il y a déjà une
certaine intégration qui s'est réalisée. Et on a tout à gagner à conserver les
talents des gens qui sont développés ici, et on dit même de profiter de frais
de... Le même tarif que les Québécois et les Québécoises pour les frais de
scolarité en échange de rester au Québec cinq ans, et la reconnaissance des
diplômes.
Moi, j'ai eu plusieurs discussions comme
députée avec des immigrants de plusieurs pays. Et vous savez, j'ai travaillé le
dossier des taxis. Et le dossier des taxis, on a beaucoup de gens très diplômés
qui avaient des emplois professionnels dans leur pays, mais qu'il n'y a pas de
reconnaissance des diplômes ici. Et ça fait longtemps qu'on parle de
reconnaissance des diplômes, mais ça ne se fait pas. Et moi, je pense qu'il
faut vraiment mettre un mécanisme de reconnaissance des diplômes qui soit plus
souple, et équitable, et simplifié, puis, au besoin, l'imposer aux corporations
professionnelles, parce qu'on sait qu'il y a beaucoup de protectionnisme de la
part de plusieurs corporations professionnelles.
M. Jolin-Barrette : Je
vous remercie. Je sais que j'ai des collègues qui souhaitent vous poser des
questions. Ça fait que je vais leur laisser la parole.
La Présidente (Mme Chassé) :
Je crois que le député de Beauce-Sud désire prendre la parole.
M. Poulin : Excusez-moi.
J'étais prêt, Mme la Présidente. Bonjour, Mme Ouellet.
Une voix
: ...
M. Poulin : C'est ça. Exact.
Content de vous retrouver. Merci. C'est très apprécié de vous retrouver. Je
salue également votre attaché de presse qui a fait un travail fort important,
ici, à l'Assemblée nationale pendant plusieurs années. Et la fidélité des
collaborateurs, c'est très important en politique. Je pense que votre parcours
l'a démontré également. C'est important d'avoir des gens qui sont fidèles à
côté de nous. Alors, je salue cet engagement-là que vous continuez à travers un
autre véhicule qui est fort important. Vous amenez un élément fort important.
On va travailler sur ce qui nous unit cet après-midi. On va travailler... Vous
avez proposé un élément fort important que peu de gens nous ont abordé jusqu'à
présent concernant l'objectif de peuplement désirable. Et ça, c'est assez
intéressant. Vous indiquez qu'il existe des leviers autres que l'immigration à
la disposition du gouvernement pour atteindre ces potentiels objectifs de
peuplement, puis vous nous avez parlé également de ce qu'on souhaite au Québec
dans 15 ans, dans 20 ans, dans 50 ans. Vous avez parlé des
francophones hors Québec. Je crois qu'il y a un juste milieu à y avoir parce
qu'en même temps, lorsqu'on a des communautés francophones hors Québec, c'est
aussi une excellente nouvelle parce qu'on s'assure de parler français en dehors
des frontières du Québec. Alors, ça, c'est un élément. Mais au niveau des politiques
familiales, parce que, oui, on parle beaucoup d'immigration, mais comment vous
voyez justement ce peuplement québécois là?
Mme Ouellet (Martine) :
En fait, ce qu'on dit, c'est que l'immigration doit être un élément d'une
politique de la population. Et on doit se poser la question. On n'arrivera pas
avec des réponses toutes faites aujourd'hui. On doit se poser la
question : Est-ce qu'on veut maintenir la population du Québec à
8 millions, l'augmenter à 9 millions, à 10 millions, à
12 millions? La question se pose. Et, en fonction de notre objectif de
population, bien là, on va regarder c'est quoi nos différents outils. Il y a
une politique familiale. Il y a une époque où la politique familiale était un
peu plus vigoureuse. Et on l'a vu, ça a créé un petit mini baby-boom. Et il y a
une politique d'immigration également. Et là la politique d'immigration devrait
être en lien, justement, avec la politique de population. Et ce n'est pas de
l'immigration pour de l'immigration. C'est ça. Donc... Bien, tu peux ajouter...
M. Monière (Denis) :
Oui. Alors, il y a des études là-dessus, là, qui...
La Présidente (Mme Chassé) :
...minutes à votre bloc d'échange.
M. Monière (Denis) :
...qui ont fait la démonstration qu'avec un seuil de
40 000 immigrants par année, on maintient la population à
8 millions. Si on augmente le seuil à 50 000 immigrants par
année, sur 20 ans, évidemment, là, on augmente... on a une population de
9 millions. Donc, c'est pour ça qu'on parle de seuil désirable. Si on veut
une population de 9 millions, à ce moment-là, il faut aller vers un seuil
de 50 000 par année. Et si on veut maintenir la population actuelle, selon
les capacités financières de l'État, je pense que c'est toujours ça, le nerf de
la guerre, à ce moment-là, on peut réduire les seuils. Mais, en même temps, on
a des effets secondaires, si on peut appeler ça comme ça, puisque, si la
population n'augmente pas, bien, la croissance économique n'augmente pas.
La Présidente (Mme Chassé) :
En conclusion.
Mme Ouellet (Martine) :
Il est clair que, si on augmente le nombre d'immigrants, mais qu'on n'augmente
pas les ressources financières, bien, on va avoir un problème.
La Présidente (Mme Chassé) :
Très bien.
M. Poulin : ...il restait
une minute.
La Présidente (Mme Chassé) :
Non. Tu es rendu à 10 secondes.
M. Poulin : La pérennité
du français également, les immigrants de deuxième génération, très important de
s'y attarder également.
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci. Je comprends que, maintenant, la députée de Bourassa-Sauvé désire
prendre la parole? Allez-y.
Mme Robitaille : Merci.
Oui.
La Présidente (Mme Chassé) :
Un bloc de 10 min 40 s.
Mme Robitaille : Merci.
Bonjour. Bonjour à tous les deux. Il faut absolument mettre tous les efforts
possibles pour franciser, pour la francisation. Alors, moi, j'aimerais avoir
votre avis. J'aimerais savoir comment créer une synergie dans les régions avec
les employeurs pour favoriser la francisation puis surtout être capable de
retenir ces gens-là en région.
Mme Ouellet (Martine) :
Écoutez, les employeurs pourraient probablement vous répondre mieux que nous,
là. Vous aviez le Conseil du patronat qui était là juste avant nous, mais...
Mme Robitaille : Oui.
Mais la place, par exemple, des municipalités dans tout cet exercice-là.
Mme Ouellet (Martine) :
Mais nous, ce qu'on pense, c'est qu'il faut favoriser la régionalisation de
l'immigration. Puis ça va prendre des investissements. Ça va prendre des
investissements en termes de structure, parce que ça va prendre dans les
régions des structures d'accueil, ça va prendre des gens pour...
Mme Ouellet (Martine) :
...juste avant nous, mais...
Mme Robitaille : Oui. Mais la
place, par exemple, des municipalités dans tout cet exercice-là...
Mme Ouellet (Martine) : Mais
nous, ce qu'on pense, c'est qu'il faut favoriser la régionalisation de
l'immigration, puis ça va prendre des investissements. Ça va prendre des investissements
en termes de structures parce que ça va prendre, dans les régions, des
structures d'accueil. Ça va prendre des gens pour accompagner les immigrants,
donc ça prend des ressources humaines. Donc, il faut que le gouvernement mette
des ressources financières disponibles pour engager des ressources humaines,
pour accompagner les immigrants qui vont être en région, et éventuellement des
incitatifs financiers aussi.
Parce que c'est sûr que les gens venant de
l'étranger, c'est plus facile d'arriver dans la grande ville, et on connaît
moins les régions. Donc, quand il y a un incitatif, bien, on vient connaître,
puis moi, je pense que, quand on va dans les régions du Québec puis qu'on y
reste un peu, on y prend goût, et c'est ça, l'idée, c'est de dire : On va
donner le goût aux immigrants d'habiter en région. On a un territoire
exceptionnel au Québec, des régions vraiment à découvrir, puis il faut
s'assurer d'avoir de l'emploi, puis il faut s'assurer d'avoir de la
francisation. Donc, ça prend des cours de francisation aussi en région pour les
immigrants, par exemple, particulièrement le statut de réfugié et la
réunification familiale, en prenant pour acquis que les immigrants économiques
connaissent déjà le français.
Mme Robitaille : Parce que la
demande... la pénurie, en région, vous le savez, c'est alarmant. Il y a des
entreprises qui demandent ces gens-là à venir travailler là-bas. Est-ce que...
Quel est le rôle des municipalités là-dedans? Il faut aider les municipalités.
Il faut leur donner plus d'argent pour qu'ils créent justement une
infrastructure.
Mme Ouellet (Martine) : Bien
là, écoutez, vous allez... le gouvernement aura un choix à faire, là. Est-ce
qu'il délègue cette responsabilité-là aux municipalités avec les budgets
conséquents ou, à travers ses bureaux régionaux, il s'en occupe? Nous, on n'est
pas dans ce détail administratif là. Ça, c'est des choix qui pourraient être
faits. Ça pourrait même être à géométrie variable, en fonction de ce qui est
disponible dans chacune des régions.
On n'en est pas sur le détail, mais c'est
clair que, si le gouvernement du Québec veut favoriser une régionalisation,
bien, il va falloir que les investissements suivent. Les municipalités ont déjà
des budgets serrés. Ils ne pourront pas faire ça à même les budgets actuels,
là. Ça, c'est de rêver en couleurs, là. Vous ne pouvez pas déléguer une
responsabilité sans que le financement suive, là.
Mme Robitaille : ...moi, mon
comté, c'est Bourassa-Sauvé, Montréal-Nord. Il y a trente organismes communautaires
dans Montréal-Nord. C'est très francophone. Comment... Mais... Bon, il y a
beaucoup d'Haïtiens qui arrivent puis qui parlent créole, et il faut quand même
franciser, et il y a des organismes qui le font, mais c'est un peu disparate.
Moi, je me demandais : Comment
encadrer tous ces organismes communautaires là pour aider à la francisation?
Comment vous voyez ça, vous?
Mme Ouellet (Martine) :
Écoutez, je ne connais pas tout le détail de chacun des organismes. Il y a une
formule qui, par le passé, a très bien fonctionné, qui sont les COFI, et moi,
je suis de l'idée de remettre en place les COFI.
La Présidente (Mme Chassé) :
Les COFI sont...
Mme Robitaille : Oui,
expliquez-nous, oui, parce qu'il y a beaucoup de gens ici qui ne savent pas
c'est quoi, les COFI...
Mme Ouellet (Martine) : Je te
laisse-tu...
Mme Robitaille : ...mais je
suis d'accord avec vous, les COFI ont joué un rôle primordial, mais expliquez-nous
un peu c'est quoi puis l'importance de ces COFI là à l'époque.
M. Monière (Denis) : Bien,
c'est d'abord... C'étaient des organismes gouvernementaux, hein, qui faisaient
de l'enseignement du français mais aussi de l'enseignement de la culture
québécoise, et ils ne faisaient pas simplement des cours de langue. Ils
faisaient des cours de culture, de civilisation, de sociologie. C'était pour
intégrer les nouveaux arrivants dans le contexte québécois.
Alors, quand on veut franciser, c'est
bien, mais ça ne suffit pas à l'intégration, la maîtrise d'une langue. La
maîtrise d'une langue peut être essentiellement technique, et on ne s'en sert
jamais dans la vie courante, et d'ailleurs toutes les études statistiques le
démontrent. Chez les francotropes, par exemple, ils n'utilisent pas le français
dans l'espace public. Ils utilisent majoritairement l'anglais.
Sur la question de la pénurie de
main-d'oeuvre, bien, peut-être que moi, je voudrais mettre un bémol là-dessus,
parce que c'est sûr que des organismes comme le Conseil du
patronat vont faire l'appel à crise pour justifier leur position. Et je
me souviens très bien que, dans les années 90, il y avait une crise majeure, il
fallait rajeunir la population, et c'était dramatique parce que le Québec vieillissait,
et il fallait remplacer les baby-boomers sur le marché du travail.
Or, les études ont démontré, je peux vous
citer l'ouvrage en question, qu'après 20 ans ça n'a eu un effet que de 1 %
sur le rajeunissement de la population, et ça n'a pas d'effet durable.
Pourquoi? Parce que les immigrants vieillissent eux aussi, comme l'ensemble de
la population.
Donc, on a fait appel au loup, à ce
moment-là, en nous disant : Hé! c'est très grave pour la société...
Aujourd'hui, on va changer d'argument, c'est la pénurie de main-d'oeuvre. Alors
là, c'est dramatique, il manque de main-d'oeuvre.
La question qu'on doit se poser, surtout
quand on est un gouvernement, c'est qu'il faut de la... gouverner pour prévoir,
prévoir l'avenir. Or, on sait bien qu'en économie il y a des cycles.
Actuellement, c'est vrai qu'on est dans un cycle de plein-emploi, mais il est
évident qu'il y aura un mouvement... on ne le souhaite pas, mais qu'il y aura
un mouvement de régression de l'emploi et d'accroissement du chômage.
• (17 h 40) •
Alors, O.K. C'est bien, pénurie
maintenant, mais, dans trois ans, qui va financer les chômeurs supplémentaires
qu'on aura fait entrer sur le territoire du Québec? Est-ce que le...
M. Monière (Denis) : ...
de plein emploi. Mais il est évident qu'il y aura un mouvement... on ne le
souhaite pas, mais qu'il y aura un mouvement de régression de l'emploi et
d'accroissement du chômage. Alors, O.K., c'est bien, pénurie maintenant. Mais,
dans trois ans, qui va financer les chômeurs supplémentaires qu'on aura fait
entrer sur le territoire du Québec? Est-ce que le Conseil du
patronat est prêt à s'engager à financer pendant cinq ans les nouveaux
chômeurs créés par l'arrivée de nouveaux arrivants?
Donc, la pénurie de main-d'oeuvre, oui, il
faut trouver des solutions, mais ce n'est pas un problème catastrophique comme
on nous le laisse croire parce que vous saurez que, chez les jeunes de 15 à
24 ans qui ne sont pas aux études, 13 % de ces gens-là sont en
chômage, alors les nouveaux arrivants qu'on va faire entrer ici, surtout dans
le domaine non qualifié, vont entrer directement en concurrence avec nos jeunes.
Et ils sont disponibles, nos jeunes.
Mme Robitaille : On a
toutefois des restaurateurs ce matin qui nous ont dit qu'ils avaient besoin de
main-d'oeuvre et qu'ils pouvaient juste aller les chercher, en ce moment... ils
avaient besoin d'immigration pour combler les postes.
Mme Ouellet (Martine) :
Je pense qu'il faut faire attention à ces affirmations-là, elles sont un petit
peu rapides. Et en fait ce qu'ils font, c'est qu'ils disent : On a
absolument besoin d'immigration... parce qu'ils ne veulent pas hausser les
salaires. Donc, il faut faire attention. Il ne faudrait pas que l'immigration
serve d'outil au patronat pour maintenir des salaires bas. Ça, ça n'a pas de
bon sens, là. Ce n'est pas une bonne utilisation de l'immigration.
L'immigration, c'est... ça doit être positif dans une société. Mais utilisée de
cette façon-là, ça ne serait pas positif.
Mme Robitaille : J'ai une
question... Le temps file, je vais changer de sujet. J'aimerais avoir votre
opinion sur l'immigration humanitaire. Historiquement, le Québec a toujours
fait preuve d'humanité. Il y a eu les «boat people» qui sont arrivés chez nous,
les Bosniaques, les Syriens, qui ont toujours été bien accueillis au Québec. On
a eu des intervenants qui sont venus ici qui nous ont dit : Au regard de
cette planification-là, il y aura une baisse des seuils de cette
immigration-là, humanitaire, là. Et l'impression que ça donne, c'est que les
réfugiés sont un fardeau pour la société.
Moi, j'aimerais savoir : Quel rôle
selon vous le Québec devrait jouer... Quel rôle humanitaire le Québec devrait
jouer? Quel genre... Comment un Québec... Oui, quelle place l'humanitaire
devrait jouer pour ce Québec?
Mme Ouellet (Martine) :
...Québec puisse jouer vraiment son rôle au niveau humanitaire, il faudrait qu'il
soit un pays parce que, comme province, ce ne sont pas des leviers que le
Québec contrôle au niveau provincial.
Mme Robitaille : Mais
comment vous le voyez? Comment vous... Est-ce que vous...
Mme Ouellet (Martine) :
Bien, si le Québec était un pays? Bien, si le Québec était un pays, les gens
qui se sont présentés pour demander le statut de réfugié, les demandeurs
d'asile qui se sont présentés, bien, on pourrait s'organiser pour que... lever
premièrement l'entente de tiers pays sûrs, qui fait en sorte qu'ils sont
obligés de passer à côté des douanes, hein, un peu comme... Puis là les gens
disent : C'est illégal. Ce n'est pas illégal parce que ça fait partie des
conventions internationales, qu'on doit accueillir les demandeurs d'asile. Mais
l'entente de tiers pays sûrs avec les États-Unis — en supposant que
les États-Unis est un tiers pays sûr, hein, puis on voit que ça bouge pas mal
avec Donald Trump — on pourrait... Si on était un pays, il y a des
clauses dans cette entente-là qui nous permettraient de suspendre cette
entente-là. Mais Justin Trudeau ne veut pas la suspendre. Mais nous, comme
pays, on pourrait la suspendre.
Après ça, on pourrait s'assurer que dès
leur arrivée, une fois qu'il y a le contrôle de sécurité, qu'ils aient
immédiatement leur permis de travail, qu'ils puissent, à ce moment-là, aller
travailler. Et ça, ça fait une grosse différence. Et on pourrait s'assurer
que tout le délai pour les demandes du statut de réfugié, qui devrait être de
quelques semaines à quelques mois, soit respecté. Actuellement, ça va jusqu'à
des années. Pensez-vous ça raisonnable quand...
La Présidente (Mme Chassé) :
Il vous reste une minute à votre échange.
Mme Ouellet (Martine) :
Pensez-vous que c'est raisonnable quand les gens arrivent ici, font une demande
de statut de réfugié, ça fait trois, quatre, cinq ans, les enfants ont commencé
à aller à l'école pendant un an, ou deux, ou trois, et après ça on leur
dit : Bien non, on s'excuse, vous êtes refusés, retournez chez vous? Ça
n'a pas de bon sens. Ça, ce n'est pas humain, ce n'est pas humanitaire. Et
c'est ça qui arrive parce qu'il y a plusieurs demandes de statut de réfugié qui
sont refusées, je pense que c'est un taux de 50 %, là, de mémoire, là.
Donc, on ne laisserait pas des délais
comme ça aller, on mettre les ressources financières, les ressources humaines
pour que les dossiers soient traités dans un délai raisonnable.
Mme Robitaille : ...une
place... oui.
Mme Ouellet (Martine) :
C'est ça, toute la différence d'être un pays plutôt que d'être une province,
là.
Mme Robitaille : Mais le
Québec peut quand même déjà accueillir, accueillir certains réfugiés.
Mme Ouellet (Martine) :
Bien non, on ne peut pas...
Mme Robitaille : Bien
oui, on peut. Oui... Bien, en tout cas...
Mme Ouellet (Martine) :
Bien, on peut les accueillir, mais on paie pour les dépenses, là, de soins de
santé, on paie une espèce d'assistance sociale en attendant qu'ils puissent
travailler...
Mme Robitaille : ...oui,
mais on...
La Présidente (Mme Chassé) :
En conclusion.
Mme Ouellet (Martine) :
...mais on ne peut pas agir correctement. Puis on ne les accueille pas. Ce
n'est pas le Québec qui accueille les immigrants, c'est le Canada. Donc, comme
province...
La Présidente (Mme Chassé) :
Je vous remercie.
Mme Ouellet (Martine) :
...on est extrêmement limités.
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci. Merci beaucoup. Maintenant, je cède la parole au député de
Laurier-Dorion, 2 min 40 s. Allez-y.
M. Fontecilla : Merci.
Mesdames, messieurs. Écoutez, j'aimerais vous entendre sur l'accent mis dans la
politique...
Mme Ouellet (Martine) : ...
Donc, comme province, on est extrêmement limités.
La Présidente (Mme Chassé) :
Je vous remercie. Merci, merci beaucoup. Maintenant, je cède la parole au
député de Laurier-Dorion, 2 min 40 s. Allez-y.
M. Fontecilla : Merci, madame,
monsieur. Écoutez, j'aimerais vous entendre sur l'accent mis dans la politique d'immigration
au Québec, là, sur l'acceptation ou l'utilisation accrue de travailleurs
temporaires. Est-ce que c'est une... Même dans l'hypothèse d'un Québec
indépendant — on va placer la question dans
l'absolu — est-ce que vous pensez que c'est une avenue à prendre?
Mme Ouellet (Martine) : Écoutez,
il y en a d'autres qui se sont prononcés avant nous. Je ne sais pas si tu as quelque
chose de spécifique à ajouter là-dessus. Mais l'immigration temporaire, ça
dépend pourquoi on l'utilise. Encore là, il ne faudrait pas que ça serve à
faire baisser les salaires.
M. Fontecilla : Très bien.
Très bien.
M. Monière (Denis) :
L'immigration temporaire doit être temporaire et pas se renouveler d'année en
année ou de six mois en six mois. Mais, bon, on n'a aucun contrôle là-dessus,
encore une fois, hein? Vous pouvez gérer ici, à Québec, l'immigration
temporaire?
Mme Ouellet (Martine) : Non.
M. Monière (Denis) : Personne
ne répond? Non, vous n'êtes pas capables. Vous êtes impotents.
M. Fontecilla : Je vais
continuer. Je change de sujet. Et vous proposez, là, à votre recommandation 9,
d'instaurer un serment de loyauté au peuple du Québec et à ses institutions. Ça
sonne un peu... Et j'aimerais vous entendre à savoir s'il y a une différence
sur la question... sur la proposition de test des valeurs. Est-ce que pour vous
c'est la... on est dans les mêmes eaux? J'aimerais vous entendre.
Mme Ouellet (Martine) : Non,
pas du tout. Actuellement...
La Présidente (Mme Chassé) : À
l'intérieur d'une minute.
Mme Ouellet (Martine) :
...l'immigrant qui arrive doit porter serment d'allégeance au Canada et à la
reine d'Angleterre. C'est insensé. Et là, ça fait un problème de double loyauté
pour les immigrants, parce qu'ils arrivent au Canada, mais ils arrivent au
Québec, puis au Québec c'est différent. Donc, on se dit : Pour essayer
d'équilibrer, en attendant d'être un pays, le plus rapidement possible s'il
vous plaît, mais en attendant d'être un pays, on devrait aussi avoir un serment
d'allégeance au peuple québécois. Et donc c'est un serment d'allégeance comme
il y a un serment d'allégeance au Canada, donc un serment d'allégeance, et ça
pourrait être fait — on fait une suggestion, mais, si vous avez des
meilleures idées... — au moment de l'émission de la carte d'assurance
maladie.
M. Fontecilla : Donc, pour
vous, ce n'est pas le test de valeurs tel que proposé?
Mme Ouellet (Martine) : Non.
Bien non! Non, non, ça n'a rien à voir, là.
M. Fontecilla : Êtes-vous
d'accord avec le test des valeurs?
La Présidente (Mme Chassé) :
...secondes.
Mme Ouellet (Martine) : Vous
savez, un test des valeurs... Ça a été dit plus tôt, là. Tout ça, c'est une
aberration liée au multiculturalisme canadien, le multiculturalisme qui a été
inventé par Pierre Elliott Trudeau pour...
La Présidente (Mme Chassé) :
En conclusion.
Mme Ouellet (Martine) :
...noyer la nation québécoise, et le multiculturalisme, qui est pire que ça, ça
crée des ghettos, ça divise et...
La Présidente (Mme Chassé) :
Je vous remercie. .Désolée, je dois interrompre...
Mme Ouellet (Martine) : C'est
tellement un beau sujet!
La Présidente (Mme Chassé) :
...le débat pour permettre à la députée de Gaspé de conclure nos échanges
d'aujourd'hui pour 2 min 40 s. Allez-y.
Mme Perry Mélançon : Merci
beaucoup. Bien, merci d'être présents et de nous exposer qu'encore une fois de
plus on serait beaucoup plus... mieux nantis au Québec si on avait tous nos
leviers économiques et autres. Alors, c'est un plaisir de vous voir.
J'aimerais rentrer peut-être... Bon. Sans
être dans le gros détail, vous avez parlé des reconnaissances des diplômes. On
sait que la discrimination à l'embauche est un facteur de frein, là, pour les
nouveaux arrivants pour se trouver du travail. Qu'est-ce que vous proposez pour
qu'on puisse un peu régler toute cette question-là une bonne fois pour toutes?
Parce que ça fait... c'est un pan très manquant, là, dans le projet de loi et
la planification du gouvernement.
Mme Ouellet (Martine) : Bien,
moi, je pense que plus de francisation, ça va aider, parce que c'est certain
que les gens, s'ils arrivent à l'emploi et qu'ils ont de la misère à
communiquer avec leurs collègues, c'est extrêmement problématique, et la reconnaissance
des diplômes, parce qu'il y en a, des gens, qui ont des très grandes
compétences et qui sont sous-utilisées. Bien, moi, j'en ai rencontré plusieurs
parmi les chauffeurs de taxi qui pourraient apporter beaucoup plus à la société
québécoise que de conduire un taxi, et ils sont bloqués par la reconnaissance
des diplômes. Donc... Et moi, je crois qu'il faudra peut-être aussi... De plus
en plus, on le voit dans les entreprises, où il y a une diversité au niveau du
personnel, et ça, c'est des habitudes à prendre. Et ça, je pense qu'il peut y
avoir de la formation qui soit faite dans les entreprises qui sont moins
habituées, parce que c'est certain que ça fait un fonctionnement... il faut
qu'au niveau du fonctionnement, qu'il y ait un ajustement, mais ça se fait de
plus en plus, puis je dirais que ça se fait de plus en plus naturellement. Plusieurs
entreprises ont un personnel extrêmement diversifié.
Mme Perry Mélançon : Donc,
pour une immigration réussie puis préserver l'identité québécoise, ça passe par
une meilleure francisation et par l'indépendance du Québec. On peut continuer
là-dessus pour clore.
Mme Ouellet (Martine) : C'est
clair.
Mme Perry Mélançon : Donc, il
me reste encore...
La Présidente (Mme Chassé) :
30 secondes.
Mme Perry Mélançon : O.K.
Bien, qui devrait fixer les seuils au Québec, selon vous, si on n'arrive pas à
s'entendre sur qu'est-ce qui devrait être le seuil idéal?
• (17 h 50) •
M. Monière (Denis) : Pourquoi
voulez-vous des seuils, premièrement? Pourquoi voulez-vous des seuils? Si vous
avez des besoins, vous amenez des gens en fonction de vos besoins, vous n'avez
pas besoin de fixer des seuils. Ça, c'est le Canada qui vous impose cette
logique toxique qui fausse le débat...
Mme Perry Mélançon : ...les
seuils au Québec, selon vous, si on n'arrive pas à s'entendre sur qu'est-ce qui
devrait être le seuil idéal?
M. Monière (Denis) : Pourquoi
voulez-vous des seuils, premièrement? Pourquoi voulez-vous des seuils? Si vous
avez des besoins, vous amenez des gens en fonction de vos besoins, vous n'avez
pas besoin de fixer des seuils. Ça, c'est le Canada qui vous impose cette
logique toxique qui fausse le débat complètement. Centrons le débat sur nos besoins
comme nation.
La Présidente (Mme Chassé) :
En conclusion.
Mme Ouellet (Martine) : Bien,
en conclusion, nous, ce qu'on dit, c'est que, tant qu'on sera une province, on
devrait décrocher de la politique des quotas canadiens et on devrait se fixer
nos propres objectifs d'ici à ce qu'on soit indépendants.
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci pour votre contribution aux travaux de la commission.
Nous ajournons les travaux jusqu'à demain,
mercredi, 9 h 30. On se retrouve ici. Bonne soirée, tout le monde.
(Fin de la séance à 17 h 51)