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Version finale

42e législature, 1re session
(27 novembre 2018 au 13 octobre 2021)

Le mercredi 27 février 2019 - Vol. 45 N° 19

Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Affaires courantes

Déclarations de députés

Souligner la visite à l'Assemblée nationale de membres du regroupement Partenaires neuro,
maladies neurologiques évolutives

Mme Danielle McCann

Rendre hommage à Mme Doreen Cons pour ses 35 années d'engagement bénévole

M. David Birnbaum

Rendre hommage à M. Helder Duarte, entraîneur-chef de l'équipe féminine de soccer du
Rouge et Or

M. Sylvain Lévesque

Rendre hommage à M. Auguste Choquette pour son engagement politique

M. Carlos J. Leitão

Souligner le 30e anniversaire du Groupe vocal Turbulence

M. Richard Campeau

Saluer le travail du collectif d'artistes Nos ateliers

Mme Ruba Ghazal

Souligner la tenue de l'assemblée générale annuelle de La Coop fédérée

Mme Marie-Eve Proulx

Rendre hommage à M. Hratch Der Sarkissian, récipiendaire de la Médaille de l'Assemblée
nationale

M. Guy Ouellette

Féliciter le Centre d'initiatives en agriculture de la région de Coaticook pour son dynamisme

Mme Geneviève Hébert

Souligner le départ à la retraite de M. Jean-Marie Villeneuve, photographe

Mme Nathalie Roy

Présence de M. Jean-Martin Aussant, ex-parlementaire de l'Assemblée nationale

Présence de M. Jean Habel, ex-parlementaire de l'Assemblée nationale

Dépôt de documents

Rapport annuel et états financiers de l'Administration régionale Baie-James

Questions et réponses orales

Réforme du système d'immigration

M. Pierre Arcand

M. François Legault

M. Pierre Arcand

M. François Legault

M. Pierre Arcand

M. François Legault

M. Pierre Arcand

M. François Legault

Recours judiciaire concernant le traitement des demandes d'immigration en attente

M. Sébastien Proulx

M. Simon Jolin-Barrette

M. Sébastien Proulx

M. Simon Jolin-Barrette

M. Sébastien Proulx

M. Simon Jolin-Barrette

Délai de traitement des demandes d'immigration

Mme Dominique Anglade

M. Simon Jolin-Barrette

Mme Dominique Anglade

M. Simon Jolin-Barrette

Mme Dominique Anglade

M. Simon Jolin-Barrette

Processus de traitement des demandes d'immigration

Mme Catherine Fournier

M. Simon Jolin-Barrette

Mme Catherine Fournier

M. Simon Jolin-Barrette

Mme Catherine Fournier

M. Simon Jolin-Barrette

Orientations budgétaires en matière d'environnement

Mme Manon Massé

M. François Legault

Mme Manon Massé

M. François Legault

Mme Manon Massé

M. François Legault

Projections de croissance économique

M. Carlos J. Leitão

M. Eric Girard

M. Carlos J. Leitão

M. Eric Girard

M. Carlos J. Leitão

M. Eric Girard

Mesures pour la protection et la promotion du français

M. Joël Arseneau

Mme Nathalie Roy

M. Joël Arseneau

Mme Nathalie Roy

M. Joël Arseneau

Mme Nathalie Roy

Productions québécoises sur Netflix

Mme Catherine Dorion

Mme Nathalie Roy

Mme Catherine Dorion

Mme Nathalie Roy

Mme Catherine Dorion

Mme Nathalie Roy

Projet de loi sur la réforme de l'immigration

M. Sébastien Proulx

M. Simon Jolin-Barrette

M. Sébastien Proulx

M. Simon Jolin-Barrette

M. Sébastien Proulx

M. Simon Jolin-Barrette

Motions sans préavis

Souligner le 120e anniversaire du Jeune Barreau de Montréal

Mise aux voix

Souligner le Mois de l'histoire des Noirs et la Décennie internationale des personnes
d'ascendance africaine

M. Frantz Benjamin

M. Simon Jolin-Barrette

Mme Catherine Fournier

M. Andrés Fontecilla

Mise aux voix

Avis touchant les travaux des commissions

Affaires du jour

Projet de loi n° 8 — Loi modifiant la Loi sur la sécurité civile concernant l'assistance financière

Adoption du principe

Mme Geneviève Guilbault

Mme Marie-Claude Nichols

Mme Lorraine Richard

Mme Catherine Dorion

Mise aux voix

Renvoi à la Commission des institutions

Mise aux voix

Projet de loi n° 1 — Loi modifiant les règles encadrant la nomination et la destitution du
commissaire à la lutte contre la corruption, du directeur général de
la Sûreté du Québec et du directeur des poursuites criminelles
et pénales

Reprise du débat sur l'adoption du principe

M. Gregory Kelley (suite)

Motion de scission

Débat sur la recevabilité

M. Sébastien Proulx

M. Sébastien Schneeberger

Affaires inscrites par les députés de l'opposition

Motion proposant que l'Assemblée demande au gouvernement d'abolir le cours d'éthique
et culture religieuse

M. Pascal Bérubé

M. Jean-François Roberge

Mme Hélène David

Mme Émilise Lessard-Therrien

M. David Birnbaum

M. Luc Provençal

Mme Christine Labrie

Mme Marilyne Picard

M. Ian Lafrenière

M. Pascal Bérubé (réplique)

Vote reporté

Projet de loi n° 1 — Loi modifiant les règles encadrant la nomination et la destitution du
commissaire à la lutte contre la corruption, du directeur général de
la Sûreté du Québec et du directeur des poursuites criminelles
et pénales

Reprise du débat sur l'adoption du principe

Décision de la présidence sur la recevabilité de la motion de scission

Débat sur la motion de scission

Mme Geneviève Guilbault

M. Marc Tanguay

Ajournement

Journal des débats

(Neuf heures quarante minutes)

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Bon mercredi à tous. Vous pouvez vous asseoir.

Affaires courantes

Déclarations de députés

Nous sommes aux affaires courantes, aux déclarations de députés. Alors, le premier intervenant, je cède la parole à Mme la députée de Sanguinet.

Souligner la visite à l'Assemblée nationale de membres du regroupement
Partenaires neuro, maladies neurologiques évolutives

Mme Danielle McCann

Mme McCann : Merci, Mme la Présidente. J'ai le plaisir, ce matin, de prendre la parole afin de souligner la présence des membres de Partenaires neuro, maladies neurologiques évolutives, une initiative de la division du Québec de la Société canadienne de la sclérose en plaques.

Les Partenaires neuro nous tendent la main pour qu'ensemble nous posions des gestes concrets afin d'améliorer la qualité de vie des personnes aux prises avec une maladie neurologique évolutive et de leurs proches aidants. Les personnes atteintes de ces maladies neurologiques évolutives peuvent, bien sûr, compter sur notre réseau de santé et de services sociaux pour leur offrir un ensemble de services spécialisés de réadaptation. Collectivement, nous devons également nous assurer d'offrir à ces personnes des milieux de vie encore mieux adaptés à leurs besoins.

Ils sont à l'Assemblée nationale aujourd'hui, et j'invite mes collègues à les rencontrer et à échanger avec eux afin de mieux comprendre l'effet dévastateur des maladies neurologiques évolutives. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Maintenant, je cède la parole au député de D'Arcy-McGee.

Rendre hommage à Mme Doreen Cons pour
ses 35 années d'engagement bénévole

M. David Birnbaum

M. Birnbaum : Soyez bons dès que possible. C'est toujours possible.

Mme la Présidente, the Dalai Lama offers that very simple but profound advice to all of us. Evidently, Doreen Cons has led her life, her long life, and enriched the lives of so many others by acting each day upon that very good advice.

Doreen is now 86 years old and only recently concluded some 35 years of active volunteer service on behalf of hearing-impaired children and adults.

Back in 1975, she started by giving time to CHIP, Communicaid for Hearing Impaired Persons, at the MAB-Mackay Center in Montreal. She went on to serve for many years as the president of the organization.

She continues to attend the annual general meetings and to sport a smile for everyone she meets. That kind of communication knows no boundaries.

«Gut arbet», Doreen. Travail bien accompli. Félicitations! And continued good health!

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Maintenant, je cède la parole au député de Chauveau.

Rendre hommage à M. Helder Duarte, entraîneur-chef
de l'équipe féminine de soccer du Rouge et Or

M. Sylvain Lévesque

M. Lévesque (Chauveau) : Merci beaucoup, Mme la Présidente. C'est avec consternation que nous avons appris, la semaine dernière, le décès, à l'âge de 56 ans, de l'entraîneur-chef de l'équipe de soccer féminine de l'Université Laval, M. Helder Duarte, résident de Lac-Beauport.

Entraîneur du Rouge et Or depuis sa fondation, en 1995, impliqué dans l'Association régionale de soccer de Québec depuis 1996, M. Duarte a été une figure extrêmement importante dans le développement du soccer de la région. Il a été élu cinq fois entraîneur de soccer de l'année au Québec et à deux reprises au Canada, en plus de cumuler 300 victoires en carrière.

Mais, bien au-delà de ces statistiques et trophées, ce qu'on entend le plus souvent, ce sont les témoignages sur ses grandes qualités humaines. On souligne notamment sa bonté, sa bonne humeur et aussi son grand sens de l'humour.

À sa conjointe France, à ses deux filles, Amélie et Emanuelle, ainsi qu'à toute sa famille, parents et amis, j'offre mes sincères condoléances. Merci, Helder Duarte.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Maintenant, je cède la parole au député de Robert-Baldwin.

Rendre hommage à M. Auguste Choquette pour son engagement politique

M. Carlos J. Leitão

M. Leitão : Très bien. Merci beaucoup, Mme la Présidente.

Alors, qui ne connaît pas ou ne connaissait pas M. Auguste Choquette? Tous, autant sur la colline Parlementaire de Québec qu'à Ottawa ou encore dans un congrès ou conseil général, ont croisé son chemin. D'ailleurs, il ne manquait pas... il ne manquait jamais un tel congrès, tout, d'ailleurs, comme mes budgets, qu'il considérait les meilleurs.

Une vie aussi remplie peut difficilement se résumer en quelques secondes. C'est pourquoi je me limiterai à vous dire merci, M. Choquette. Merci pour tous ces conseils, merci pour vos encouragements, merci pour votre engagement. Merci d'avoir été un député à l'écoute de vos concitoyens. Enfin, merci pour vos sourires, qui nous motivaient tous.

Mes pensées accompagnent maintenant vos frères, vos soeurs, vos nièces et neveux, à qui je transmets mes sincères sympathies. Encore une fois, merci, M. Choquette.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Maintenant, je cède la parole au député de Bourget.

Souligner le 30e anniversaire du Groupe vocal Turbulence

M. Richard Campeau

M. Campeau : Merci, Mme la Présidente. Aujourd'hui, j'aimerais souligner les 30 ans d'existence de la troupe musicale Turbulence.

Essentiellement présente dans la circonscription de Bourget, elle regroupe 75 choristes sous la direction expérimentée de M. Stéphane Dufour. Turbulence intègre dans ses spectacles un répertoire presque exclusivement francophone.

Annuellement, la formation présente devant plus de 5 000 personnes à guichet fermé, en plus d'appuyer les initiatives locales et les levées de fonds. Le groupe intègre des éléments modernes à ses concerts, appuyé notamment par l'école de Métissage ou avec des narrations.

C'est plusieurs vagues de choristes qui se sont succédé depuis que le groupe La Ritournelle est devenu Turbulence. Ils ont aussi pu partager la scène avec plusieurs artistes québécois de renom.

Finalement, je vous invite à assister à leur présentation, qui aura lieu du 24 au 26 mai prochain au centre Leonardo Da Vinci, à Montréal.

Bravo aux membres de Turbulence! Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Maintenant, je cède la parole à Mme la députée de Mercier.

Saluer le travail du collectif d'artistes Nos ateliers

Mme Ruba Ghazal

Mme Ghazal : Merci, Mme la Présidente. Je veux aujourd'hui saluer le travail du collectif d'artistes Nos ateliers, mis sur pied en décembre dernier et qui se mobilise pour pérenniser la présence d'ateliers d'artistes au coeur de l'île de Montréal, notamment dans Mercier.

C'est d'ailleurs dans la circonscription de Mercier que vit la plus grande concentration d'artistes et d'artisans, et qui est 10 fois plus élevée que la moyenne canadienne. Ces peintres, photographes ou vidéastes font rayonner la réputation de Montréal à l'international et bénéficient grandement aux industries d'ici.

Paradoxalement, ces artistes qui rendent attractifs nos milieux en subissent eux-mêmes trop souvent les contrecoups. Pendant que les artistes créent, des requins de l'immobilier, eux, continuent leur oeuvre de spéculation massive.

Au collectif Nos ateliers, je vous dis : Continuez votre combat, vous n'êtes pas seuls. J'invite d'ailleurs tout le monde à signer leur pétition. Et je presse le gouvernement à soutenir financièrement le programme de soutien des ateliers d'artistes à Montréal. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Maintenant, je cède la parole à Mme la députée de Côte-du-Sud. La parole est à vous.

Souligner la tenue de l'assemblée générale annuelle de La Coop fédérée

Mme Marie-Eve Proulx

Mme Proulx (Côte-du-Sud) : Merci, Mme la Présidente. Demain, La Coop fédérée, fondée en 1922, la plus importante entreprise agroalimentaire du Québec, tiendra sa 97e assemblée générale annuelle. La Coop, qui représente plus de 120 000 membres partout au Canada, regroupe près de 60 coopératives réparties dans plusieurs provinces canadiennes, annoncera ses résultats financiers.

Seul groupe coopératif agroalimentaire du genre à exister au Canada, La Coop fédérée contribue de manière considérable à l'économie québécoise et canadienne avec des ventes consolidées de plus de 6,5 milliards de dollars en 2018. Quelque 14 000 personnes travaillent pour l'une des trois divisions, soit Olymel, Sollio Agriculture ou Le Groupe BMR. Toutes les régions du Québec bénéficient de la présence de La Coop fédérée depuis près de 100 ans, et je lui souhaite tout le succès pour autant d'années à venir.

Je tiens à saluer la présence des membres du conseil d'administration, MM. Ghislain Gervais, Paul Noiseux, Mathieu Couture, Richard Ferland ainsi que Nicolas Poirier-Quesnel et Christian Lévesque. Bonne assemblée générale annuelle aux membres de La Coop fédérée!

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Maintenant, je cède la parole à M. le député de Chomedey.

Rendre hommage à M. Hratch Der Sarkissian, récipiendaire
de la Médaille de l'Assemblée nationale

M. Guy Ouellette

M. Ouellette : Merci, Mme la Présidente. L'automne dernier, Laval accueillait les 100es jeux Homenetmen, rassemblant des troupes scoutes et des sportifs de la communauté arménienne de plusieurs villes du monde. Cet événement survenait près de 50 ans après le premier cross-country du Mont-Royal, événement scolaire d'envergure.

Aujourd'hui, je souligne l'implication, le professionnalisme et le dévouement de Hratch Der Sarkissian, président de ces jeux et concepteur de ce cross-country, un homme particulièrement admirable et attachant.

Engagé dans diverses associations et regroupements sport-études, toujours à la recherche de nouveaux défis, tantôt enseignant, conseiller pédagogique, directeur d'école, initiateur et concepteur de multiples événements scolaires, M. Der Sarkissian a toujours transmis, tout au long de sa vie, son amour et sa passion pour l'activité physique. Il a su faire une différence, la différence auprès de nos institutions et de notre jeunesse québécoise.

Décédé le 29 décembre dernier, je tenais à lui rendre cet hommage et cette reconnaissance en remettant, le 22 février, à son épouse Pierrette, son fils Shant, sa fille Karen et ses trois petits-enfants, Alexandre, Anthony et Sareena, la Médaille de l'Assemblée nationale...

• (9 h 50) •

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : En terminant.

M. Ouellette : ...dont la remise restera gravée dans nos mémoires collectives. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Maintenant, je cède la parole à Mme la députée de Saint-François.

Féliciter le Centre d'initiatives en agriculture de la
région de Coaticook pour son dynamisme

Mme Geneviève Hébert

Mme Hébert : Merci, Mme la Présidente. J'ai le bonheur d'avoir dans ma magnifique circonscription de Saint-François des organismes qui se démarquent, qui rayonnent par leur dynamisme et leur forte capacité à innover. C'est le cas du Centre d'initiatives en agriculture de la région de Coaticook, communément appelé le CIARC.

D'abord, je me dois de souligner la beauté du site et le caractère exceptionnel de sa grange, qui fut construite en 1912. Une grange centenaire, un monument historique, un caractère patrimonial à préserver avec soin. Une merveille, rien de moins.

Le CIARC a mis en place des initiatives telles un incubateur d'entreprises maraîchères biologiques et un jardin pédagogique. Il y a aussi une ferme-école, un lieu extraordinaire de formation pour notre relève agricole.

Finalement, le CIARC a un nombre impressionnant de réussites à son actif, et ce, avec très peu d'aide gouvernementale.

Chère équipe du CIARC, à l'aube de votre 30e anniversaire, c'est un plaisir de travailler avec vous, pour vous, afin de développer votre plein potentiel. Je suis déterminée à vous soutenir, à trouver des leviers qui permettront de réaliser vos objectifs et de briller encore davantage. Félicitations à toute votre équipe! Merci.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Maintenant, je cède la parole à Mme la députée de Montarville.

Souligner le départ à la retraite de M. Jean-Marie Villeneuve, photographe

Mme Nathalie Roy

Mme Roy : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Vous savez, le grand photographe américain Ansel Adams disait de son art qu'il ne s'agit pas de transmettre une vision, mais de toucher les gens à travers une image. C'est exactement ce qu'a fait, en près de 50 ans, le photographe de presse M. Jean-Marie Villeneuve. Je souhaite donc aujourd'hui souligner le départ à la retraite de cet amoureux de son art respecté et apprécié de tous.

C'est au ministère des Communications que M. Villeneuve a fait ses débuts. À l'époque, par passion, il travaillait les fins de semaine pour le journal Le Soleil, qui allait rapidement devenir son principal employeur. Politique, faits divers, spectacles. Au cours de sa prolifique carrière, il a constitué un vaste inventaire de photos témoignant des grands événements de l'actualité qui ont marqué notre histoire.

Alors, rendons hommage à M. Jean-Marie Villeneuve. Merci pour ces cinq décennies au service de la photographie et de l'information, merci d'avoir touché tant de Québécois à travers vos images. Nous vous souhaitons une très belle retraite. Merci pour ces images.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Ceci met fin à la rubrique des députés.

Alors, je vais suspendre les travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 9 h 53)

(Reprise à 10 h 2)

Le Président : Mmes et MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.

Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.

Présence de M. Jean-Martin Aussant, ex-parlementaire de l'Assemblée nationale

J'ai le plaisir de souligner la présence, dans les tribunes, de M. Jean-Martin Aussant, ancien député de Nicolet-Yamaska.

Présence de M. Jean Habel, ex-parlementaire de l'Assemblée nationale

Je souligne également la présence de M. Jean Habel, ancien député de Sainte-Rose.

Nous poursuivons les affaires courantes.

Aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles ni de présentation de projets de loi.

Dépôt de documents

À la rubrique Dépôt de documents, Mme la ministre des Affaires municipales et de l'Habitation.

Rapport annuel et états financiers de l'Administration régionale Baie-James

Mme Laforest : Oui, M. le Président. Conformément à l'article 21.14 de la Loi sur le ministère des Affaires municipales, des Régions et de l'Occupation du territoire, je dépose le rapport annuel 2017-2018 ainsi que les états financiers au 31 mars 2018 de l'Administration régionale de la Baie-James. Merci, M. le Président.

Le Président : Ces documents sont déposés.

Il n'y a pas de rapports de commissions ni de dépôt de pétitions.

Donc, je disais, il n'y a pas de réponses orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.

Questions et réponses orales

Nous en sommes maintenant à la période de questions et réponses orales, et je cède la parole au chef de l'opposition officielle.

Réforme du système d'immigration

M. Pierre Arcand

M. Arcand : M. le Président, la confusion du gouvernement en immigration perdure depuis maintenant des mois. Chaque jour, le gouvernement alimente cette confusion. Il faut traiter les 18 000 dossiers et puis il faut les déchiqueter. La poursuite judiciaire, on dit qu'elle est saugrenue, mais ils perdent en cour. Il faut aller vite, mais pas question de mettre des ressources supplémentaires. Une journée, c'est la faute du Parti libéral, l'autre jour, c'est le Parti libéral qui a mis en place le nouveau système qui va régler tous les problèmes. Là-dessus, M. le Président, ils ont raison, nous avons mis en place ce nouveau système. Ça ne veut cependant pas dire qu'il faut abandonner tous les gens qui ont suivi les règles de l'ancien système et qui attendent une réponse du gouvernement. M. le Président, le plus ridicule de la situation, c'est que des hauts fonctionnaires nous ont démontré que les 18 000 dossiers pourraient être traités en six mois, et ce, en parallèle avec le système Arrima.

M. le Président, est-ce que le gouvernement pense que gaspiller 19 millions de dollars et briser des milliers de rêves est un meilleur deal qu'investir 4 millions pour traiter rapidement les dossiers?

Le Président : M. le premier ministre.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît!

M. François Legault

M. Legault : Ils sont tellement prévisibles. M. le Président, durant toute la campagne électorale, et je sais que le chef de l'opposition officielle était là, a bien suivi la campagne électorale, on a été très clairs, on a dit : Actuellement, le système pour choisir les nouveaux arrivants ne fonctionne pas. Il y a beaucoup trop de nouveaux arrivants qui ne trouvent pas d'emploi à la hauteur de leurs qualifications puis il y a beaucoup trop de nouveaux arrivants qui ne parlent pas français, et, à l'avenir, le plus rapidement possible, si on devient le gouvernement, on va changer ce système, puis, à l'avenir, on va s'assurer que les nouveaux arrivants répondent aux besoins du marché du travail et que les nouveaux arrivants parlent français.

Ce n'est pas vrai qu'on va aller prendre, pendant un an... Parce que, là, n'oubliez pas, il y a 40 000 dossiers en attente, à Ottawa, qui ont été accumulés, il y en a un autre 40 000 personnes que les dossiers n'ont pas encore été traités. Puis là l'opposition nous dit : Continuez à traiter premier arrivé, premier servi, ne tenez pas compte des critères qui sont proposés pendant toute la campagne électorale, c'est-à-dire répondre aux besoins du marché du travail puis parler français. Donc, le chef de l'opposition officielle ne devrait pas être surpris qu'on essaie...

Le Président : En terminant.

M. Legault : ...d'ajuster le système pour être capables de mieux intégrer...

Le Président : Première complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Pierre Arcand

M. Arcand : Hier, à 24/60, un ex-fonctionnaire, il a été clair, on peut faire les deux.

La question, elle est très simple, M. le premier ministre : Est-ce que c'est 19 millions qu'on va dépenser pour déchiqueter 18 000 dossiers ou est-ce que c'est 4 millions qu'on va dépenser pour les analyser rapidement? Je pense que, M. le Président, le premier ministre, il a un passé d'homme d'affaires. Qu'est-ce qui est mieux pour l'économie du Québec?

Le Président : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, selon l'ancien système des libéraux, on demandait à quelqu'un qui veut venir au Québec de donner 1 000 $. Il y en avait la moitié qui était refusée, l'autre moitié qui était acceptée, 53 % ne parlaient pas français. Nous, on a de la difficulté avec ça.

Ce qu'on fait, c'est qu'on rembourse ou on veut rembourser, dès que le projet de loi n° 9 sera adopté, le 1 000 $ qui a été déboursé par les personnes. Je ne sais pas ce que... Est-ce que le chef de l'opposition officielle a un problème avec le fait qu'on rembourse 1 000 $...

Le Président : En terminant.

M. Legault : ...à ceux qui ont payé le 1 000 $?

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Pierre Arcand

M. Arcand : Bien, d'abord, déchiqueter des dossiers, dépenser 19 millions de dollars pour déchiqueter des dossiers, alors qu'on pourrait, avec 4 millions, les analyser rapidement... Et, en plus, c'est miner la crédibilité du Québec à l'international.

Je pense que le premier ministre, il est comptable. C'est quoi, le meilleur deal?

Le Président : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, on ne dépense pas 19 millions de dollars pour déchiqueter des dossiers, là. On remet 1 000 $ à ceux qui ont payé le 1 000 $ et, plus que ça, M. le Président, on les invite à appliquer dans le nouveau système Arrima gratuitement.

C'est un système qui a été mis en place par les libéraux. C'est un bon système, celui-là. L'ancien système, ce n'est pas un bon système. Pourquoi le gouvernement libéral a mis en place Arrima, si ce n'est pas pour l'utiliser avant un an ou deux? C'est quoi, le problème?

• (10 h 10) •

Le Président : Troisième complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Pierre Arcand

M. Arcand : M. le Président, tout le monde est d'accord avec nous, les experts sont d'accord avec nous, les fonctionnaires sont d'accord avec nous. Même, je dirais, je suis sûr que, si vous parlez à votre ministre de l'Économie, votre ministre des Finances, le président du Conseil du trésor, qui voient le bon sens, ils disent que c'est une mesure antiéconomique, c'est clair.

Pourquoi vous refusez de prendre la meilleure décision pour l'économie du Québec?

Le Président : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, le chef de l'opposition officielle pourrait dire : Pour des raisons autres qu'économiques, c'est mieux de traiter les dossiers selon l'ancien système, premier arrivé, premier servi. Mais il ne peut pas nous dire : Pour des raisons économiques, c'est mieux, l'ancien système. Le nouveau système met toute la priorité sur répondre aux besoins des vraies entreprises dans toutes les régions du Québec. Ça, c'est économique. Nous, de notre côté, on est un gouvernement économique.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît!

M. Legault : Je comprends que le Parti libéral est rendu très proche de Québec solidaire...

Le Président : En terminant.

M. Legault : ...mais ça, c'est leur choix.

Le Président : Question principale, M. le leader de l'opposition officielle.

Recours judiciaire concernant le traitement
des demandes d'immigration
en attente

M. Sébastien Proulx

M. Proulx : Oui. M. le Président...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît!

M. Proulx : Lundi, le gouvernement a reçu une gifle au visage. C'est ça qui s'est passé. Et hier le premier ministre et le ministre de l'Immigration avaient l'occasion de faire preuve d'humilité et de se repentir, et, sincèrement, nous aurions salué ce geste. Il ne s'est rien passé, M. le Président. On a écouté le premier ministre à plus d'une occasion hier, et, à chaque fois, c'est comme s'il niait que le jugement avait été rendu.

Pourtant, M. le Président, le jugement de la cour, là, ce n'est pas une décision qui est banale, pour reprendre les termes du collègue de Santé et Services sociaux. C'est une décision qui est grave, c'est une décision qui est importante. C'est une décision qui va teinter, M. le Président, l'avenir de ce gouvernement. Bien, ce qu'on comprend, c'est que l'intention, il est assez clair : on va faire le strict minimum pour ne pas se faire condamner une autre fois. C'est comme si on se dit, M. le Président : On a été punis puis on va faire le minimum en réparation.

La question qu'on pourrait poser, c'est : Est-ce que le ministre reconnaît d'abord qu'il a transgressé des lois? Est-ce qu'il va faire ce que la société civile lui demande, ce que les parlementaires lui demandent, c'est de traiter les 18 000 dossiers?

Le Président : M. le ministre de l'Immigration.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : M. le Président, j'ai eu l'occasion de dire publiquement et dès lundi soir que nous respections le jugement de la Cour supérieure en injonction interlocutoire provisoire. Le leader de l'opposition officielle connaît la procédure judiciaire, sait qu'il s'agit d'une première étape dans le déroulement d'un processus judiciaire. La requête qui a été présentée prévoit trois étapes. Cela étant dit, j'ai indiqué que nous allions traiter les dossiers, comme c'était le cas préalablement au dépôt du projet de loi.

Ceci étant dit, la volonté du gouvernement du Québec, elle ne change pas relativement au fait qu'il faut réformer le système d'immigration au Québec, qu'il faut faire en sorte de s'assurer d'arrimer les besoins du marché du travail avec le profil des candidats. Écoutez, le chef de l'opposition officielle nous dit : Il faut répondre à la pénurie de main-d'oeuvre dans les différentes régions du Québec. L'immigration peut être une solution, mais, si on continue avec le système que vous avez mis en place durant des années, avec l'inventaire de dossiers que vous avez fait accumuler à la fois au Québec et à la fois, également, à Ottawa, en traitant tous les dossiers en fonction du premier arrivé, premier dossier traité, on se retrouve dans une situation où ça ne répond pas à la pénurie de main-d'oeuvre, ça ne répond pas aux besoins de toutes les régions du Québec, à Baie-Comeau, en Abitibi, au Saguenay, dans le Bas-du-Fleuve.

Honnêtement, un gouvernement économique va prendre des décisions basées sur la nécessité de l'économie du Québec et de façon à s'assurer aussi qu'on puisse mieux intégrer les immigrants et mieux arrimer avec les besoins du marché du travail.

Le Président : En terminant.

M. Jolin-Barrette : Alors, le projet de loi n° 9, ce qu'il fait aussi, c'est qu'il prend soin des immigrants. On veut s'assurer...

Le Président : Première complémentaire, M. le leader de l'opposition officielle.

M. Sébastien Proulx

M. Proulx : Oui. M. le Président, on va prendre un peu de temps sur la décision de la cour. Pourquoi un recours judiciaire? Bien, parce qu'il y a une décision politique qui a été prise. Pourquoi la justice s'en est mêlée, M. le Président? Bien, parce qu'il y avait de l'arbitraire dans la décision du ministre, parce que des gens étaient placés devant une situation qui n'est pas viable, parce que leurs droits étaient transgressés, M. le Président, et qu'ils ne pouvaient pas se faire entendre autrement. Alors, c'est comme si, M. le Président, on se retrouvait devant la situation où ici ce n'était pas assez.

Pourquoi...

Le Président : M. le ministre de l'Immigration.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : M. le Président, c'est très clair, le système d'immigration que nous avons actuellement ne répond pas à la nécessité des emplois disponibles dans les différentes régions du Québec. Vous le savez, vous avez mis en place Arrima pour répondre à cette question-là. Il faut faire en sorte de s'assurer que, lorsqu'on accueille une personne immigrante, elle puisse travailler dans un emploi qui correspond à la hauteur de ses compétences. Écoutez, les immigrants depuis moins de cinq ans... qui sont au Québec, 59 % de ceux-ci sont dans un emploi pour lequel ils ont une surqualification.

Est-ce que vous trouvez ça normal que le marché de l'emploi soit comme ça? Que les gens qu'on a accueillis ici, au Québec, n'occupent pas un emploi à la hauteur de leurs compétences? Moi, je ne suis pas satisfait de votre bilan.

Le Président : En terminant.

M. Jolin-Barrette : Je vais travailler à réformer ça et j'espère que la main tendue de la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne, c'est une vraie main tendue.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le leader de l'opposition officielle.

M. Sébastien Proulx

M. Proulx : Oui, M. le Président. Force est de constater que ce que répond ici le ministre, en Chambre, est soit démenti ou démonté dans l'espace public dans les 24 heures qui suivent. À chaque fois, on a l'occasion d'entendre des gens pour dire l'inverse de ce qu'il a dit. Est-il dans l'intérêt des Québécois, M. le Président, de poursuivre ce recours judiciaire? Il faut l'accepter, il a été rendu...

Quelles instructions a-t-il données à ses procureurs? Va-t-il continuer ce recours ou y mettre fin et traiter les dossiers?

Le Président : M. le ministre de l'Immigration.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : M. le Président, le député de Jean-Talon est assez expérimenté en cette Chambre pour savoir que l'article 35.3 s'applique ici et que l'affaire est devant la justice. Alors, pour éviter tout préjudice à toutes les parties, vous savez que je ne peux pas commenter là-dessus.

Cela étant dit, la volonté du gouvernement du Québec est la même, s'assurer de réformer le système d'immigration. Et j'espère que vous allez nous accompagner dans cette modification-là du système d'immigration afin de le bonifier. Vous ne pouvez pas nier la réalité que partout au Québec il y a des entreprises qui ont besoin de travailleurs. Les régions du Québec, il faut s'assurer de leur vitalité. Il faut s'assurer que, les gens qu'on accueille, on puisse les envoyer en région et qu'il y ait un établissement durable.

Le Président : En terminant.

M. Jolin-Barrette : Sur le fond du dossier, pouvez-vous affirmer que vous êtes en accord avec la position du gouvernement et que c'est la voie à suivre?

Le Président : Question principale, Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.

Délai de traitement des demandes d'immigration

Mme Dominique Anglade

Mme Anglade : Merci, M. le Président. Alors, depuis des semaines, le premier ministre nous a dit que demander aux gens de refaire une demande dans le nouveau système Arrima était la bonne approche. Encore hier, le premier ministre nous a dit que ce que préfère le PLQ, c'est traiter 18 000 dossiers, ce qui va prendre plus d'un an. Ce n'est pas le choix qu'on a fait, allons dans le nouveau système. Ceci implique donc que le nouveau système sera beaucoup plus rapide.

Lors des audiences devant le tribunal la semaine dernière, nous avons appris quelque chose qui n'a jamais été présenté aux parlementaires. Dans une déclaration sous serment, le sous-ministre adjoint du ministère de l'Immigration, Eric Gervais, déclare que seulement 400 dossiers seront traités dans le nouveau système en 2019. Le ministre était-il trop gêné pour nous le dire en Chambre? C'est devant les tribunaux qu'on l'a appris.

Alors, la question est simple : Est-ce que le ministre peut nous confirmer que l'intention du ministère est de traiter 400 dossiers en 2019 dans le nouveau système?

Le Président : M. le ministre de l'Immigration.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : M. le Président, peut-être que la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne devrait avoir une discussion avec la députée de Notre-Dame-de-Grâce pour savoir comment fonctionnent les inventaires, parce qu'il y a eu une accumulation de dossiers.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît!

M. Jolin-Barrette : Et, vous savez, actuellement au Québec, on se retrouve avec deux façons de procéder. La première façon de procéder, c'est au niveau du Programme de l'expérience québécoise. Les gens qui sont sur le territoire québécois obtiennent leurs CSQ beaucoup plus rapidement. L'autre élément aussi, c'est dans le système Arrima, la gestion de la demande qui a été chaotique sous votre gouvernement, parce que la réalité, là, c'est qu'on se retrouve avec un inventaire de 40 000 personnes au gouvernement fédéral.

Alors, M. le Président, lorsque la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne nous dit : Traitez les dossiers, traitez les dossiers, vous voulez faire gonfler l'inventaire au fédéral pour s'assurer aussi de créer des délais supplémentaires. Moi, ce que je veux faire, c'est réduire les délais en matière d'immigration, s'assurer également qu'on peut faire en sorte que les gens soient accueillis beaucoup plus rapidement au Québec. Ils vont être en emploi dans les différentes régions du Québec. On ne veut pas de la méthode libérale qui a été un chaos au cours des dernières années. Honnêtement, rendez-vous à l'évidence, votre bilan n'est pas très bon.

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.

Mme Dominique Anglade

Mme Anglade : C'est une habitude, M. le Président, le ministre ne répond pas à la question, mais une chance que nous avons une déclaration sous serment du sous-ministre adjoint.

Vous savez, vous avez recommandé à des gens qui font partie des 18 000 dossiers d'aller dans le nouveau système. 18 000 dossiers en 2019, 18 000 dossiers, vous allez en traiter 400. À ce rythme-là, ça va prendre 45 ans pour traiter les 18 000 dossiers.

Est-ce que, oui ou non, le ministre de l'Immigration peut confirmer que c'est 400 dossiers qui vont être traités dans le nouveau système en 2019?

Le Président : M. le ministre de l'Immigration.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : M. le Président, il y a quelque chose que la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne ne comprend pas. À chaque année, à chaque année, le Québec établit ses cibles en matière d'accueil en matière d'immigration. La réalité, M. le Président, c'est que le gouvernement de la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne a laissé s'accumuler 40 000 dossiers, 40 000 personnes au fédéral, en plus d'avoir 45 000 demandeurs également sur le volet québécois.

Nous, ce qu'on veut faire, c'est s'assurer de faire en sorte qu'on puisse accueillir ces 40 000 personnes là et pour démarrer le nouveau système. Mais vous comprendrez qu'on a des cibles en matière d'immigration, et il faut s'assurer de faire en sorte de bien accueillir les gens. Mais, oui, il y a des délais, puis les délais sont causés par qui? Par votre incurie d'avoir traité les dossiers...

Le Président : En terminant.

M. Jolin-Barrette : ...d'avoir fait une mauvaise gestion de la demande. Admettez-le, reconnaissez vos torts.

Des voix : ...

Le Président : Votre attention, s'il vous plaît! Deuxième principale, Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.

Mme Dominique Anglade

Mme Anglade : M. le Président, on parle de pénurie de main-d'oeuvre, et ils veulent traiter 400 dossiers en 2019 dans le nouveau système. Ils n'ont pas eu le courage de nous le dire ici, en Chambre. Ça fait trois semaines qu'on pose des questions, M. le Président, ça fait trois semaines qu'on n'a aucune réponse.

La question est claire : Est-ce que, oui ou non, vous allez traiter 400 dossiers dans le nouveau système Arrima en 2019? Oui ou non? Ça ne prendra pas 45 secondes pour répondre.

Le Président : M. le ministre de l'Immigration.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : M. le Président, la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne devrait arrêter de faire des campagnes de peur et être honnête avec les gens.

Des voix : ...

• (10 h 20) •

Le Président : Votre attention, s'il vous plaît!

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît!

M. Jolin-Barrette : Actuellement, il existe deux systèmes au Québec : le PEQ, pour les gens qui sont sur le territoire québécois, qui répondent aux besoins du marché du travail, qui parlent français; le programme régulier des travailleurs permanents, le PRTQ, le programme régulier des travailleurs qualifiés, qui, lui, a des délais et que vous avez accumulé un inventaire de dossiers à la fois au provincial, à la fois au fédéral. La députée de Notre-Dame-de-Grâce le sait très bien.

Le volume de personnes qu'on va accueillir en fonction d'Arrima va dépendre nécessairement du nombre de personnes qu'on accueille dans le PEQ.

Le Président : En terminant.

M. Jolin-Barrette : Alors, il faut faire en sorte d'inviter les gens à déclarer leur intérêt dans Arrima, de façon à ce qu'on puisse les traiter.

Le Président : Question principale, Mme la députée de Marie-Victorin.

Processus de traitement des demandes d'immigration

Mme Catherine Fournier

Mme Fournier : M. le Président, ça fait trois semaines que le ministre de l'Immigration a déposé le projet de loi n° 9, ça fait trois semaines qu'il est sur la sellette sur la question des 18 000 dossiers annulés et ça fait trois semaines que je lui propose une voie de passage. Puisque je suis une éternelle optimiste et que j'ai bon espoir que le ministre puisse la considérer, je vais la répéter. Son ministère pourrait traiter en priorité les dossiers des gens qui sont déjà au Québec, qui parlent déjà français et qui occupent déjà un emploi, puis transférer les autres dans le programme Arrima, en demandant le consentement des demandeurs pour l'utilisation des données personnelles. C'est la solution logique. On l'a vu hier aux consultations, tant l'association des avocats en droit d'immigration que la Fédération des chambres de commerce et Québec International s'y rallient, pour ne nommer que ceux-là.

Le ministre est-il prêt à se rendre au compromis que je lui propose?

Le Président : M. le ministre de l'Immigration.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : M. le Président, je remercie la députée de Marie-Victorin pour sa question. Dès le départ, j'ai indiqué que nous souhaitions inviter en priorité les gens qui se retrouvaient sur le territoire québécois et qui étaient en emploi. Pour ce faire, on doit cependant adopter le projet de loi n° 9. Alors, je l'invite à collaborer avec nous lors de l'adoption du projet de loi. Présentement, on est en auditions particulières, on entend les différents groupes. Par la suite, il va y avoir le principe, et on se retrouvera en étude détaillée fort probablement au mois de mars, si on a la collaboration de tous.

Cela étant dit, pour les gens qui sont sur le territoire québécois, qui sont en emploi et qui parlent français, il y a une voie rapide, le Programme de l'expérience québécoise. Ça, il faut le dire, ils peuvent appliquer en 20 jours ouvrables, ils ont leurs CSQ. Pour les autres qui ne sont pas... qui ne répondent pas à ces critères-là, je les invite à déclarer leur intérêt, et notre intention, ça a toujours été de les traiter en priorité par le biais du système Arrima.

Alors, j'invite la députée de Marie-Victorin à travailler en collaboration avec nous dans le cadre de l'élaboration du projet de loi et de façon à faire en sorte qu'on puisse s'assurer de réformer le système d'immigration rapidement pour enfin pouvoir avoir un système qui va être performant.

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Catherine Fournier

Mme Fournier : M. le Président, la collaboration, ça va dans les deux sens. Et le premier ministre l'a bien dit : C'est déjà assez difficile de recruter des gens qui parlent français et qui sont en mesure d'occuper un emploi à la hauteur de leurs compétences. Là, on a des gens qui sont déjà ici, qui parlent déjà français et qui occupent déjà un emploi, et on leur demande de recommencer leurs démarches d'immigration à zéro. C'est totalement illogique.

Pourquoi le ministre s'entête-t-il à leur compliquer la vie, alors qu'il pourrait facilement accepter mon compromis?

Le Président : M. le ministre de l'Immigration.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : Alors, M. le Président, je saisis la question de la députée de Marie-Victorin, et, pour faire ça clair, pour les gens dont elle parle, qui parlent français, qui sont en emploi — 12 mois au cours des 24 derniers mois, ce sont les critères du Programme d'expérience québécoise — toutes ces personnes-là, je les invite à déposer leur candidature dans le Programme d'expérience québécoise.

Il est vrai que certaines personnes qui ont appliqué dans le PRTQ, au moment où elles l'ont fait, elles n'étaient pas admissibles au PEQ. Exemple, quelqu'un qui vient avec un permis de vacances, travail, qui était ici, qui a appliqué un mois après son arrivée, bien, désormais, elle parle français, elle est en emploi depuis 12 mois, elle est admissible.

Alors, je l'invite à communiquer le message comme moi...

Le Président : En terminant.

M. Jolin-Barrette : ...pour les inviter à déposer dans le PEQ pour avoir son certificat de sélection à l'intérieur de 20 jours.

Le Président : Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Catherine Fournier

Mme Fournier : M. le Président, je répète qu'on pourrait traiter ces dossiers des gens qui parlent déjà français, qui sont déjà au Québec et qui occupent déjà un emploi avec le système actuel, rapidement. Deuxièmement, on prend les autres dossiers, on les envoie dans la plateforme Arrima, on leur envoie un courriel, aux demandeurs, pour leur demander leur consentement. On n'est pas loin, M. le Président, là, on est à un clic de s'entendre.

Est-ce que le ministre peut admettre qu'on a trouvé la voie d'un compromis?

Le Président : M. le ministre de l'Immigration.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : M. le Président, comme je l'ai toujours dit, dans un premier temps, pour les candidats francophones et pour ceux qui travaillent, il y a le PEQ, c'est la voie rapide, 20 jours ouvrables. Là-dessus, Mme la députée de Marie-Victorin, je crois que nous nous entendons. Pour les autres candidats qui sont des candidats qui ne sont pas admissibles au PEQ, on les invite à déclarer leur intérêt rapidement dans Arrima, et j'ai toujours dit... et c'est mon intention de les inviter en priorité s'ils sont sur le territoire québécois et qu'ils occupent un emploi. Alors, je ne peux pas être plus clair que ça. Et, pour tous les autres candidats qui souhaitent venir au Québec, je les invite à déposer leurs demandes de déclaration d'intérêt dans le système Arrima également. Alors, pour les personnes qui avaient fait leurs demandes...

Le Président : En terminant.

M. Jolin-Barrette : ...au Québec, il faut déposer leurs demandes ou appliquer dans le PEQ.

Le Président : Question principale, Mme la cheffe du troisième groupe d'opposition.

Orientations budgétaires en matière d'environnement

Mme Manon Massé

Mme Massé : Merci, M. le Président. Hier, on a appris la date du budget et on a aussi appris que ça allait être un budget économique. Un budget, on le sait, ce n'est pas seulement des colonnes de chiffres, c'est aussi le moment où un parti ou un gouvernement annonce ses vraies couleurs, où il parle de sa vision de l'avenir du Québec.

Justement, depuis trois semaines, il y a des jeunes qui nous en parlent, eux autres, de leur vision. Ils marchent dans la rue chaque vendredi pour nous appeler... pour nous parler de leurs inquiétudes face à l'avenir. Le premier ministre n'a pas encore commenté ces manifestations, alors, pour l'aider à se faire une tête, je vous présente Nicolas, 16 ans, qui nous dit, et je le cite : «Je suis ici parce qu'on veut que le gouvernement Legault prenne ses responsabilités. C'est le problème le plus pressant de notre génération, on nous a légué une terre malade. Les rapports disent qu'il [nous] reste moins de deux ans avant que les changements deviennent quasiment irréversibles, donc on doit faire des actions concrètes maintenant. [...]La semaine prochaine, on va être 10 écoles, j'espère que ça va faire réaliser à M. Legault que c'est maintenant que ça se passe.»

Est-ce que le premier ministre pense à ces jeunes quand il décide de ses orientations budgétaires? Lui qui a parlé de ses enfants, dans son discours inaugural, pense-t-il à l'avenir de ses petits-enfants dans son budget?

Alors, ma question au premier ministre : Est-ce qu'il donne des orientations claires à son ministre des Finances pour faire le virage nécessaire vers une économie faible en carbone?

Le Président : Je vous rappelle que, même en citant, on doit quand même utiliser le titre et non le nom de la personne citée, s'il vous plaît, par mesure de rappel. M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Oui, M. le Président. Effectivement, il y aura un budget qui va être déposé le 21 mars. Je pense que la cheffe de la troisième opposition sera contente de voir les mesures, entre autres, en matière d'environnement. C'est important de se dire qu'au Québec on s'est donné un mécanisme, avec le Fonds vert, pour être capable d'agir. On a des montants importants. Malheureusement, au cours des dernières années, le Fonds vert est devenu un fonds qui était utilisé par une dizaine de ministères pour finir leurs fins de mois, si je peux dire, sans rapport avec les impacts pour réduire les GES. Le nouveau ministre de l'Environnement est en train de rectifier le tir. Il y aura des mesures d'annoncées dans le budget le 21 mars. Vous allez comprendre que ce n'est pas possible pour moi à ce moment-ci de vous en dire plus long. Je demande à la cheffe de la troisième opposition d'être patiente, mais je pense qu'elle devrait être contente.

Le Président : Première complémentaire, Mme la cheffe du troisième groupe d'opposition.

Mme Manon Massé

Mme Massé : Vous savez, quand on annonce un budget économique, oui, on peut parler du Fonds vert, dont c'est le mandat de financer du soutien pour la transition énergétique. Mais moi, je me rappelle du premier ministre qui critiquait sans arrêt le PQ et le PLQ qui finançaient la cimenterie de Port-Daniel, le projet le plus polluant.

Alors, ma demande au premier ministre, c'est : Est-ce qu'il va répéter les erreurs des anciens partis et financer, par exemple, le projet de gazoduc présentement sur la table?

Le Président : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, le projet de gazoduc GNL est un projet de 14 milliards de dollars, 14 milliards de dollars, qui créerait des emplois très payants au Saguenay—Lac-Saint-Jean. Évidemment, on va s'assurer d'abord qu'il y ait de l'acceptabilité sociale au Saguenay—Lac-Saint-Jean, ce qui semble être le cas. Maintenant, il faut rappeler qu'il s'agit d'un oléoduc de gaz, hein, pas de pétrole, mais bien de gaz. On va s'assurer que toutes les vérifications environnementales soient faites.

Le Président : En terminant.

M. Legault : Mais on a besoin d'investissement comme celui-là au Québec.

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la cheffe du troisième groupe d'opposition.

Mme Manon Massé

Mme Massé : Alors, voyez-vous, c'est exactement ça, le problème. Économie et environnement, on glisse souvent dans ces affaires-là. Alors, il n'a pas vraiment répondu à ma question, parce que le budget doit donner l'orientation claire. Les jeunes nous le demandent. D'ailleurs, je demande au premier ministre de répondre à ces jeunes-là.

Peut-il vraiment s'engager envers eux de présenter un budget de transition énergétique et économique qui effectue un vrai virage vers une économie faible en émissions de GES?

• (10 h 30) •

Le Président : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : M. le Président, d'abord, c'est important de se le dire, au Québec, on est déjà la province, l'État, en Amérique du Nord où on a le moins d'émissions de GES par habitant. Donc, on est déjà les meilleurs, notre objectif, c'est d'être encore plus meilleurs, comme disait l'autre.

Donc, oui, on veut investir, entre autres, dans le transport en commun, mais, vous savez, pour investir des milliards dans le transport en commun, il faut créer de la richesse. Donc, il faut arrêter de mettre en opposition l'économie, la création de richesse puis les investissements en environnement. On va s'occuper d'environnement.

Le Président : En terminant.

M. Legault : On va s'occuper aussi de créer de la richesse pour les Québécois.

Le Président : Question principale, M. le député de Robert-Baldwin.

Projections de croissance économique

M. Carlos J. Leitão

M. Leitão : Merci, M. le Président. Alors, le Québec est en très bonne santé financière. Cette santé financière se manifeste dans des surplus substantiels, et ça, je vous avoue, c'est la faute des libéraux, M. le Président.

Encore la semaine dernière, l'Institut du Québec, après analyse minutieuse, mentionnait qu'un surplus de 3 à 5 milliards de dollars était possible, et cela, après versement au Fonds des générations. Le premier ministre, lui, il parle toujours d'un surplus de 2 milliards de dollars. Le ministre des Finances, lui, il parle d'une accélération de dépenses pendant que le président du Conseil du trésor passe des commandes d'optimisation de ces dépenses-là, bon.

Alors, après toute cette valse des milliards et par souci de transparence, est-ce que M. le ministre des Finances peut nous donner, à trois semaines du budget, l'heure juste sur le surplus? Combien de surplus en 2018‑2019?

Le Président : M. le ministre des Finances.

M. Eric Girard

M. Girard (Groulx) : M. le Président, je peux certainement vous donner l'heure juste, mais pas le chiffre. C'est lors du dépôt du budget que je donnerai le chiffre précis et, comme je l'ai mentionné plusieurs fois... et je veux revenir sur l'institut économique auquel vous faites référence.

Ces gens-là utilisent les données du ministère, et nous avons publié un rapport mensuel le 8 février, bien avant eux, qui faisait état du surplus. Il n'y avait absolument aucune nouvelle information dans ce rapport. Et, oui, les dépenses sont en retard par rapport à ce qui avait été prévu, notamment dans le budget, dans le rapport préélectoral et dans Le point.

Alors, on est en train d'étudier si, d'une part, les dépenses vont s'accélérer et, d'autre part, s'il y a des gestes concrets qu'on peut faire pour améliorer la qualité des services des Québécois et faire une différence.

Le Président : Première complémentaire, M. le député de Robert-Baldwin.

M. Carlos J. Leitão

M. Leitão : Comme, par exemple, un surplus additionnel pour le ministère de l'Immigration pour traiter les cas. Ça serait très utile.

Maintenant, le ministre, hier, a levé le suspense quant à la date du budget. Très bien, bravo! Mais il nous a aussi réservé une belle petite surprise. Il nous a aussi annoncé par communiqué que le rapport mensuel dont il a fait allusion, qui devait être publié le 8 mars, le sera seulement lors du budget.

Alors, M. le ministre, pourquoi un tel manque de transparence? Pourquoi un rapport à date fixe devient un rapport à quand ça me plaît?

Le Président : M. le ministre des Finances.

M. Eric Girard

M. Girard (Groulx) : Merci pour la question. Simplement parce que, dans un souci de transparence, nous nous sommes engagés, à tous les trois mois, à réviser la prévision annuelle du solde budgétaire, qui, je crois, était l'objet de votre première question. Donc, après neuf mois et le dépôt du budget, il nous fera plaisir de réviser le solde budgétaire pour l'année 2018‑2019.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député de Robert-Baldwin.

M. Carlos J. Leitão

M. Leitão : M. le Président, une chose n'empêche pas l'autre. Le rapport mensuel, d'ailleurs, est un outil précieux pour les parlementaires, et donc pour le public, de suivre régulièrement l'évolution des revenus et l'évolution des dépenses. D'ailleurs, le Québec est le seul État... la seule province, pardon, à avoir un tel rapport. Quand nous sommes... en 2014, transformé ce rapport à date fixe, l'actuel président du Conseil du trésor trouvait ça une excellente idée, il nous a chaudement applaudis.

Est-ce que le président du Conseil du trésor trouve ça une bonne idée qu'une date fixe devienne une date à quand ça me plaît?

Le Président : M. le ministre des Finances.

M. Eric Girard

M. Girard (Groulx) : Nous nous sommes engagés à améliorer ce rapport. Ce rapport fait seulement état du fonds général, c'est un des problèmes. Les autres entités, les fonds, ne nous fournissent pas cette information mensuelle. Le rapport est incomplet et le rapport ne fournit pas d'estimation du solde annuel, ce pourquoi nous nous sommes engagés, à tous les trois mois maintenant, à fournir une estimation du solde annuel, ce que nous ferons, lors du dépôt du budget, avec le rapport mensuel et le dépôt du budget.

Le Président : Question principale, M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

Mesures pour la protection et la promotion du français

M. Joël Arseneau

M. Arseneau : Merci, M. le Président. Avant les fêtes, mon collègue de Rimouski a questionné la ministre responsable de la Langue française sur le renforcement de la loi 101. Elle nous a répondu que son gouvernement n'y ferait pas de modification.

Pourtant, en campagne électorale, la CAQ proposait de renforcer l'Office québécois de la langue française afin d'en faire un acteur majeur de la francisation du Québec. Elle promettait même la création d'un poste de commissaire à la langue française. Or, la création d'un poste de commissaire nécessite de rouvrir la loi. Le gouvernement de la CAQ se plaît à dire qu'il sera le gouvernement qui respectera toutes ses promesses. Pour être cohérent avec sa promesse qu'il a faite aux Québécoises et aux Québécois, le gouvernement doit donc modifier et renforcer la loi 101.

Est-ce que la ministre responsable de la Langue française va revenir sur ses propos et accepter de rouvrir la loi?

Le Président : Mme la ministre responsable de la Langue française.

Mme Nathalie Roy

Mme Roy : Oui. Je remercie le collègue pour sa question. Vous savez, en matière de langue française, M. le Président, le gouvernement, et, je pense, tous les parlementaires, et toutes les sociétés d'État ont un devoir d'exemplarité. La langue française, c'est notre langue commune. C'est la langue officielle du Québec.

Je comprends que la question de mon collègue porte, entre autres, sur un rapport que nous avions déposé lors de la dernière législature, fait par une de mes collègues, un excellent rapport, d'ailleurs. Et, vous savez, ce qui est important pour nous, c'est que l'Office de la langue française applique la loi 101 parce que vous comme moi constatons que, depuis des années, voire plus d'une quinzaine d'années, il y a eu un certain laxisme à l'égard de l'application de la loi 101. Et je pense que ce que les Québécois qui nous écoutent veulent, c'est que la loi 101 soit appliquée.

Alors, nous allons commencer par bien l'appliquer. Et, vous allez voir, d'ailleurs, il y a déjà quelques changements qui ont été effectués au sein même de l'Office québécois de la langue française. Nous avons une toute nouvelle présidente-directrice générale. Et je pense que vous allez voir qu'il y a des choses intéressantes qui s'en viennent.

Le Président : En terminant.

Mme Roy : Alors, surtout... Je vous reviens.

Le Président : Première complémentaire, M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Joël Arseneau

M. Arseneau : Merci, M. le Président.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît!

M. Arseneau : On veut bien croire à la préoccupation sincère de la ministre pour l'application de la loi 101, mais on sent également la responsabilité qu'elle veut remettre à l'office plutôt que ce soit le gouvernement qui prenne ses responsabilités et respecte ses promesses. En septembre dernier, le premier ministre lui-même disait que le français devait être une priorité nationale, et la solution que vous proposez, c'est la création d'un poste de commissaire.

Alors, encore une fois, pour créer le poste, il faut rouvrir la loi. Est-ce que vous allez le faire, Mme la ministre?

Le Président : Mme la ministre responsable de la Langue française.

Mme Nathalie Roy

Mme Roy : Oui. Alors, je poursuis et je vous dis que nous avons maintenant une nouvelle présidente-directrice générale à l'Office québécois de la langue française. Nous sommes en train de voir de quelle façon il y a eu du laxisme. Il y a eu des articles de la loi 101 qui n'ont pas été respectés, nécessairement, ou appliqués. Et, vous savez quoi, M. le député, nous allons commencer par l'appliquer, cette Charte de la langue française. Nous allons commencer par l'appliquer et par maximiser l'efficacité des organes qui sont constitués par la loi 101.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Joël Arseneau

M. Arseneau : Merci, M. le Président. On peut décider d'appliquer la loi. On peut aussi décider de respecter ses promesses et modifier la loi, passer à l'action. L'Office québécois de la langue française peut agir. Le gouvernement doit agir. C'est sa responsabilité.

Encore une fois, pourquoi ne pas accepter de reculer sur vos propos, et d'ouvrir la loi, et de mettre en place le poste de commissaire que vous avez promis?

Le Président : Mme la ministre responsable de la Langue française.

Mme Nathalie Roy

Mme Roy : Alors, il n'est pas question de reculer sur quoi que ce soit. Je vous dis depuis le début, depuis ma nomination, que la loi 101, la Charte de la langue française, nous serons là pour l'appliquer. Il y a eu du laxisme au cours des 15 dernières années. Il y a eu, entre autres, de l'affichage, de l'affichage en anglais, en chinois, en n'importe quelle langue, sauf en français. Nous allons y remédier.

Nous avons une nouvelle présidente-directrice générale, et j'ai demandé un beau portrait de ce qui se passe. Nous attendons d'ailleurs ces travaux à cet égard. Nous allons bouger, mais nous allons appliquer la loi 101, contrairement à ce qui n'a pas été fait au cours des dernières années.

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! Question principale, Mme la députée de Taschereau.

Productions québécoises sur Netflix

Mme Catherine Dorion

Mme Dorion : M. le Président, j'aime beaucoup les séries. Moi, ça a commencé dans mon enfance. J'écoutais Passe-Partout, Watatatow. Après ça, ça a été Les filles de Caleb, Chambres en ville, Lance et compte.

Bon, maintenant, je n'ai plus la télé, mais j'ai Netflix, ça fait que j'écoute House of Cards, j'écoute Game of Thrones, The Handmaid's Tale. Puis, comme j'aime les séries, je me suis dit : Tiens, ma question sur Netflix, il y a deux semaines, a eu une pas pire cote d'écoute sur les réseaux sociaux. Je pourrais en faire une série et puis créer des nouveaux épisodes tant qu'il n'y aura pas un dénouement clair qui mette fin à toute l'histoire. Tu sais, que ça finisse mal ou que ça finisse bien, mais qu'il y ait un dénouement clair, la série est finie.

Alors, deuxième épisode aujourd'hui, ma question est pour la ministre de la Culture. Que pense-t-elle de l'idée de s'inspirer de l'Union européenne et d'imposer à Netflix qu'il mette dans son catalogue québécois au moins 30 % de productions québécoises?

• (10 h 40) •

Le Président : Mme la ministre de la Culture.

Mme Nathalie Roy

Mme Roy : Oui. Bien, je suis ravie de pouvoir continuer notre entretien avec la députée de Taschereau, ravie parce que, vous savez, il faut faire un petit peu de pédagogie ici, hein?

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît!

Mme Roy : Eh bien, légalement, je vous dirai qu'actuellement la grande problématique, c'est qu'Internet et le contenu d'Internet sont de compétence fédérale en vertu des articles 91 et 92 de la Loi constitutionnelle de 1867, que vous devez sûrement connaître.

Actuellement à Québec, vous allez me dire : Mais oui, mais pourquoi ne légifère-t-on? Actuellement, le Québec a un pouvoir de taxation, ce qu'il a fait en janvier dernier, mais n'a pas le pouvoir sur le contenu des fournisseurs de services Internet, et ça, c'est triste. C'est triste, mais cependant vous me parlez de séries et vous me parlez de séries, justement les séries de nos créateurs que nous devrions voir davantage.

Ça me déçoit un petit peu de voir que ma collègue semble faire la promotion de Netflix plutôt que la promotion de nos propres plateformes, ici, québécoises. Vous savez, il y a...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît!

Mme Roy : ...Télé-Québec, M. le Président, qui est un grand succès, une magnifique plateforme. Il y a Tou.tv. On y voit là beaucoup...

Le Président : En terminant.

Mme Roy : ...de créations de nos producteurs, de nos réalisateurs. Pourquoi pas Illico tant qu'à y être?

Le Président : Première complémentaire, Mme la députée de Taschereau.

Des voix : ...

Le Président : Votre attention, s'il vous plaît!

Mme Catherine Dorion

Mme Dorion : Le contenu québécois est bon. Les gens en redemandent. Il y a 700 000 personnes qui ont écouté Passe-Partout cette semaine. Sur Tou.tv, c'est la même chose. On les aime, ces plateformes-là, mais ça serait le fun que ça ne soit pas toujours l'État qui paie, que ce ne soit pas toujours nos taxes qui paient.

Quand il y a des compagnies qui viennent faire beaucoup d'argent chez nous, pourquoi est-ce qu'on ne leur demande pas de participer à l'économie québécoise, d'autant plus qu'on a un gouvernement qui se dit nationaliste en face de nous?

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît!

Mme Dorion : Alors, j'aimerais savoir c'est quoi, son plan quand le fédéral va la revirer de bord par rapport à la négociation?

Le Président : Mme la ministre des Communications.

Des voix : ...

Le Président : Restez attentifs pour écouter tant les questions que les réponses. Merci.

Mme Nathalie Roy

Mme Roy : Vous savez, vous parlez de l'expérience européenne ou, du moins, des réflexions qui sont faites en Europe. Je vous disais qu'on a un pouvoir de taxation, mais on n'a pas un pouvoir sur le contenu. Le fameux contenu, on n'a pas de contrôle là-dessus. Cependant, vous savez qu'il y a actuellement une révision qui est en train de se faire à Ottawa, et moi, je mets de la pression sur mon homologue à Ottawa pour justement valoriser notre contenu, faire en sorte qu'il puisse y avoir quelque chose.

Il y a quelque chose d'intéressant que j'ai vu passer en Europe, entre autres en France, plus précisément. On est en train de se poser la question : Pourquoi ne pas taxer le chiffre d'affaires de Netflix?, ce qui est possible. Alors, cette réflexion-là moi, j'en suis, je trouve ça très intéressant, et je mets de la pression actuellement sur mes homologues fédéraux...

Le Président : En terminant.

Mme Roy : ...pour qu'on puisse faire quelque chose pour que nos créateurs y retrouvent justement leur part et se battent à armes égales.

Le Président : Deuxième complémentaire, Mme la députée de Taschereau.

Mme Catherine Dorion

Mme Dorion : Historiquement, la culture ne fait pas partie, dans la Constitution canadienne, des compétences d'un bord ou de l'autre, et, historiquement, le Québec a décidé d'occuper une part vraiment importante dans cette zone grise là. On a toujours été extrêmement combatifs, beaucoup plus combatifs que les autres provinces, pour une raison très claire, on a une culture à protéger. Là, j'ai l'impression qu'il y a un virage qui se prend, que maintenant on abandonne ça. On se soumet un peu au fédéral puis on change, sur cette trame-là, l'histoire.

Donc, j'aimerais savoir, si je reviens dans, peut-être, trois semaines, un mois, avec la même question, de savoir où on est rendu...

Le Président : Mme la ministre des Communications et de la Culture.

Mme Nathalie Roy

Mme Roy : Oui, je vous remercie. Inquiétez-vous pas, je serai toujours là pour me battre. Nous nous battons pour nos créateurs...

Des voix : ...

Le Président : S'il vous plaît!

Mme Roy : ...nous faisons de la pression sur le fédéral parce qu'il y a une réalité, M. le Président, nous vivons dans un État de droit, et tout ce qui est Internet est de compétence fédérale. Je ne l'ai pas inventé, c'était la Loi constitutionnelle de 1867, c'est les Pères de la Confédération qui ont pensé à ça. Cependant, il faut se battre...

Des voix : ...

Le Président : Votre attention, s'il vous plaît! Deux secondes. Ça va très bien. On est attentifs aux questions. Attention! On est attentifs aux réponses. Je vous demande simplement votre collaboration pour poursuivre cette période de questions. Merci. Mme la ministre.

Mme Roy : Vous savez, M. le Président, moi, je travaille pour la mise en valeur des contenus québécois, effectivement. La création, la diffusion, on travaille là-dessus. Et, vous savez, il y a d'autres choses que Netflix dans la vie, Mme la députée. Nous allons travailler pour aider nos producteurs...

Le Président : En terminant.

Mme Roy : ...sur toutes les plateformes. Merci.

Le Président : Question principale, M. le leader de l'opposition officielle.

Projet de loi sur la réforme de l'immigration

M. Sébastien Proulx

M. Proulx : Oui, M. le Président. Il l'a dit tout à l'heure, puis il l'a répété depuis deux semaines, le ministre a dit : On ne va pas traiter tous les dossiers, on va traiter seulement quelques dossiers, d'ailleurs, la volonté également du premier ministre, il l'a répété. Alors, le gouvernement n'en a pas envie, c'est le PM qui l'a dit.

Alors, ça va poser des questions, M. le Président, d'abord, parce qu'ils vont traiter quelques dossiers, mais on ne sait pas lesquels, mais on ne sait surtout pas comment. Alors, comment ça va se faire, M. le Président? Est-ce que c'est une loterie? Est-ce qu'ils vont faire des choix? Est-ce qu'ils vont suivre l'ancien modèle? Je ne le sais pas, M. le Président. Mais les gens qui écoutent, les gens qui attendent, eux non plus ne le savent pas.

M. le Président, jusqu'à maintenant, le ministre a donné beaucoup de leçons. Il a inventé des histoires. Il a mis la faute sur les autres. Il n'a pas pris acte correctement, je pense, du jugement. Une chose est certaine, c'est qu'il est en colère parce qu'en commission parlementaire c'est palpable, M. le Président, et les groupes qui viennent ont à goûter à sa médecine.

Alors, M. le Président, va-t-il prendre acte de ce dossier? Et combien de dossiers va-t-il traiter pendant l'adoption de son projet de loi?

Le Président : M. le ministre de l'Immigration.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : M. le Président, j'ai eu l'occasion d'indiquer que le traitement normal des dossiers allait suivre son cours. Il faut comprendre qu'en matière de traitement des dossiers tout dépend en fonction du nombre de dossiers que nous recevons dans les différents programmes. Alors, tout à l'heure, j'avais l'échange avec la députée de Marie-Victorin et ensuite avec la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne relativement au fait que nous traiterons les dossiers en fonction du Programme de l'expérience québécoise et en vertu du Programme régulier des travailleurs qualifiés, et ce, jusqu'à ce que cette Assemblée se prononce sur le contenu du projet de loi.

Et, d'entrée de jeu, M. le Président, il faut dire que le projet de loi n° 9 ne change absolument rien au statut des gens qui étaient sur le territoire québécois. Ça, c'est important de le dire et de le répéter. Cela étant dit, j'invite les gens à déposer leurs demandes dans le PEQ ou dans le système Arrima.

Une chose qui est sûre, M. le Président, c'est que le système d'immigration au Québec ne fonctionne pas en fonction, notamment, de la pénurie de main-d'oeuvre, de l'adéquation entre les besoins du marché du travail et le profil de compétence des candidats. Ça, le député de Jean-Talon ne peut pas le nier. Il doit l'affirmer. Et ça doit être très clair qu'il doit également cesser de faire une campagne de peur. Il faut bien renseigner les gens. C'est ce qu'on fait du côté du gouvernement. Et j'invite le Parti libéral à collaborer en commission parlementaire...

Le Président : En terminant.

M. Jolin-Barrette : ...et surtout, lorsqu'il questionne les intervenants, à s'assurer de la validité des propos.

Le Président : Première complémentaire, M. leader de l'opposition officielle.

M. Sébastien Proulx

M. Proulx : Oui, M. le Président. Ce manque de flexibilité, cette rigidité de laquelle fait état le ministre et le gouvernement a un prix, M. le Président. Et mon inquiétude, c'est la suivante, c'est que, puisqu'il y a des gens qui vont payer parce que leurs dossiers ne seront pas traités, et on ne sait pas combien, bien, c'est que le gouvernement n'ait pas envie que ça dure longtemps parce qu'il ne voudra pas traiter beaucoup de dossiers.

Alors, la question qui va se poser, c'est : Quelle sera l'attitude du gouvernement dans le cadre du projet de loi? Va-t-il nous bousculer? Aurons-nous le temps nécessaire pour traiter de ce dossier?

Le Président : M. le ministre de l'Immigration.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : M. le Président, l'étude d'un projet de loi en commission parlementaire dépend de la bonne volonté de l'ensemble de la députation, incluant la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne et les députés que vous allez déléguer à cette commission. Moi, j'aborde les travaux de la commission dans un esprit de collaboration, comme je l'ai toujours fait. On peut bonifier le projet de loi.

Cela étant dit, je demande au leader de l'opposition officielle : Est-ce qu'il est prêt à se joindre à nous et à inviter prioritairement les gens qui sont sur le territoire québécois et qui auront déposé leurs demandes dans le système Arrima? Est-ce qu'il veut favoriser le fait que ces gens-là qui sont au Québec, qui sont en emploi, puissent être invités prioritairement dans le système Arrima? Je lui pose la question parce qu'honnêtement c'est la position...

Le Président : En terminant.

M. Jolin-Barrette : ...du gouvernement depuis le début, et j'aimerais bien l'entendre, connaître sa position à lui.

Le Président : Deuxième complémentaire, M. le leader de l'opposition officielle.

M. Sébastien Proulx

M. Proulx : Oui, M. le Président. Je réitère notre inquiétude. La colère du ministre va toucher les gens, elle va toucher les gens qui sont dans cette liste de personnes, qui, malheureusement, ne seront pas traitées ou ça va arrêter avant eux parce que le projet de loi sera adopté, parce qu'ils n'ont pas l'intention de le faire. Mais ça risque aussi de toucher les parlementaires. Moi, mon impression, M. le Président, c'est que le gouvernement veut aller très vite. Bien, je ne l'ai pas inventé, ce sont les mots du premier ministre.

Alors, qu'est-ce que ça veut dire, aller vite? Ça veut dire nous imposer le projet de loi? Ça veut dire couper court aux consultations et au débat...

Le Président : M. le ministre de l'Immigration.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : M. le Président, dans un premier temps, je ne sais pas où le leader de l'opposition voit de la colère. Je suis très zen et, comme leader du gouvernement, je tente de faire fonctionner le Parlement. Alors, lorsque le leader de l'opposition officielle nous dit : Couper court aux consultations, écoutez, sur les 22 groupes qu'on entend en commission parlementaire sur le projet de loi n° 9, 20 ont été sollicités par le Parti libéral du Québec. Je trouve, M. le Président, que c'est une bonne moyenne au bâton pour le Parti libéral. 20 des 22 groupes nous proviennent de vos demandes. Alors, peut-être que j'aurais dû vous en donner 22 sur 22, avoir 100 % des groupes. La prochaine fois, je tenterai de faire un effort supplémentaire pour vous accommoder encore plus. Mais, vous savez, il faut faire avancer le Parlement.

Le Président : En terminant.

M. Jolin-Barrette : La job du Parlement, c'est d'adopter des lois, et c'est ce qu'on va faire.

Le Président : Cela met fin à la période de questions et réponses orales. Merci à tous.

(Applaudissements)

Le Président : Pas d'applaudissements, s'il vous plaît!

• (10 h 50) •

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Alors, je vous demanderais de garder le silence, s'il vous plaît.

Motions sans préavis

Alors, comme il n'y a pas de votes reportés, nous allons passer à la rubrique des motions sans préavis. En fonction de nos règles et de l'ordre de présentation des motions sans préavis, je reconnais maintenant un membre du deuxième groupe d'opposition. Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Fournier : Merci, Mme la Présidente. Je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter, conjointement avec le député de La Pinière, la députée de Mercier, et le député de Chomedey, la motion suivante :

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement de mettre en place, dans les plus brefs délais, [des] réelles mesures de mitigations pour permettre aux 18 000 usagers des lignes de train Deux-Montagnes et Mascouche de se rendre au centre-ville de Montréal en moins d'une heure.»

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?

M. Schneeberger : ...

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Alors, comme il n'y a pas de consentement, nous allons passer à la deuxième motion sans préavis. Alors, je reconnais un membre du troisième groupe d'opposition. La parole est à vous.

Mme Lessard-Therrien : Merci, Mme la Présidente. Je demande le consentement de la Chambre pour débattre de la motion suivante conjointement avec le député de Chomedey :

«Que l'Assemblée nationale reconnaisse le danger sur la santé et l'environnement de l'utilisation systémique des pesticides en agriculture;

«Qu'elle constate que la stratégie phytosanitaire du Québec a échoué à atteindre sa cible de réduction d'utilisation des pesticides;

«Qu'elle demande au gouvernement de mettre en place, dans les meilleurs délais, un plan de transition afin de réduire la dépendance des agriculteurs québécois envers les pesticides;

«Que ce plan soit axé sur un meilleur accompagnement des producteurs agricoles, notamment par l'ajout de services agronomiques publics et indépendants.»

Merci.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Est-ce qu'il y a consentement pour en débattre?

M. Schneeberger : Pas de consentement.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Comme il n'y a pas de consentement, je reconnais maintenant un groupe formant le gouvernement. Mme la ministre de la Justice, la parole est à vous.

Souligner le 120e anniversaire du Jeune Barreau de Montréal

Mme LeBel : Alors, merci, Mme la Présidente. Je vous demande le consentement pour déposer la motion suivante. Cette demande est faite conjointement avec le député de LaFontaine, la députée de Joliette, le député d'Hochelaga-Maisonneuve et le député de Chomedey. Donc :

«Que l'Assemblée nationale souligne le 120e anniversaire du Jeune Barreau de Montréal, qui s'est déroulé le 4 novembre [dernier];

«Qu'elle soit reconnaissante des services bénévoles de consultation et d'information juridique auprès de différents segments de la population;

«Qu'elle remercie les bénévoles, membres de comité, anciens présidents et administrateurs qui ont contribué à son succès;

«Qu'enfin, elle encourage le Jeune Barreau de Montréal à continuer de travailler pour l'amélioration de l'accessibilité à la justice et de contribuer au bien-être collectif.»

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci. Merci, Mme la ministre. Consentement pour en débattre?

M. Schneeberger : Il y a consentement, sans débat.

Mise aux voix

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Alors, cette motion est-elle adoptée?

Des voix : Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Alors, motion adoptée. Maintenant, nous allons passer au membre... Excusez-moi. Cette motion est adoptée. Le membre de l'opposition officielle. Alors, je reconnais... M. le député, la parole est à vous.

Souligner le Mois de l'histoire des Noirs et la Décennie
internationale des personnes d'ascendance africaine

M. Benjamin : Merci, Mme la Présidente. Je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante conjointement avec le ministre de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion, la députée de Marie-Victorin, le député de Laurier-Dorion et le député de Chomedey :

«Que l'Assemblée nationale souligne le Mois de l'histoire des Noirs ainsi que la Décennie internationale des personnes d'ascendance africaine, proclamée par l'Assemblée générale [des Nations unies] en décembre 2014 et qui a pour but de protéger et de promouvoir les droits des peuples descendants d'Afrique et de reconnaître leur participation à l'enrichissement d'autres cultures;

«Qu'elle rappelle l'enracinement des personnes issues des communautés noires, établies au Québec depuis plus de quatre siècles, ainsi que leur engagement à faire du Québec une société prospère, égalitaire et inclusive;

«Qu'elle souligne, notamment, l'élection historique de M. Jean Alfred en 1976, premier député noir à siéger au sein de cette Assemblée;

«Qu'elle prenne acte que selon la Commission canadienne des droits de la personne, les crimes visant les Noirs sont demeurés le type le plus répandu de crimes haineux motivés par la race ou l'origine ethnique;

«Qu'elle rappelle qu'en mars 2018, le Secrétariat à la jeunesse a développé une stratégie pour les jeunes des communautés noires, en partenariat avec les organismes des communautés noires réunis dans le cadre du sommet socioéconomique des jeunes des communautés noires;

«Qu'elle reconnaisse l'importance de travailler pour une société plus égalitaire, notamment par la mise en place des mesures visant la lutte contre toutes les formes de discrimination et d'exclusion dont sont victimes des membres des communautés noires;

«Qu'enfin, l'Assemblée nationale appuie les objectifs de la Décennie internationale des personnes d'ascendance africaine et qu'elle l'invite à travailler avec les acteurs des communautés noires, afin de trouver des solutions durables visant à améliorer la qualité de vie des personnes visées par cette déclaration.»

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député de Viau. Est-ce qu'il y a consentement pour en débattre?

M. Schneeberger : ...Diversité et de l'Inclusion, la députée de Marie-Victorin et le député de Laurier-Dorion.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Comme il y a consentement pour débattre de cette motion d'une durée de deux minutes, alors je vais reconnaître le député de Viau. La parole est à vous.

M. Frantz Benjamin

M. Benjamin : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je suis très heureux et ému en même temps de présenter cette motion ici, au sein de cette Assemblée. Ils sont, selon le dernier recensement de Statistique Canada, quelque 320 000 Québécoises et Québécois membres des communautés noires. Et ils ont toujours été là, ils ont toujours été là depuis les quatre derniers siècles. Rappelons Mathieu da Costa, accompagnateur et interprète de Samuel de Champlain. Ils étaient Marie-Josèphe-Angélique, esclave à Montréal. Elles étaient la Dre Yvette Bonny, médecin québécoise qui a réalisé la première greffe de moelle osseuse en 1980 au Québec. Ils étaient aussi Oscar Peterson, Oliver Jones, Paul Fehmiu-Brown, plus près de nous, Dany Laferrière. La contribution des membres des communautés noires au développement de la société québécoise est connue.

Mais aussi, je dois rappeler que des épisodes, malheureusement, comme celui dont nous avons tous été témoins hier viennent nous rappeler l'importance d'être non seulement vigilants, mais d'être aussi actifs sur le front de la lutte contre le racisme et contre toutes les formes de discrimination. Donc, je fais allusion à cet épisode dont a été victime, donc, Jonathan Diaby. Et aujourd'hui ce sur quoi il faudra que nous travaillions tous et toutes ensemble au sein de cette Assemblée, c'est que non seulement, non seulement dans nos arénas, dans nos cours d'école, dans les milieux de travail, un peu partout, partout dans la société québécoise, l'engagement soit collectif, les efforts soient déterminés afin que la lutte contre le racisme et toutes les formes de discrimination... que nous soyons tous et toutes des champions au sein de la société québécoise.

Je veux, pour terminer, saluer plusieurs organismes. Je pense, entre autres, à la Maison d'Haïti, sommet socioéconomique pour les jeunes des communautés noires. Je pense aussi à Desta, qui est un organisme dans Côte-des-Neiges—Notre-Dame-de-Grâce. Je pense aussi à la Table ronde du Mois de l'histoire des Noirs, qui nous permet de souligner ensemble cet événement combien important pour nous tous. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député de Viau. Maintenant, je reconnais la parole au ministre de l'Immigration. La parole est à vous.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la Présidente. D'entrée de jeu, je souhaite remercier le député de Viau pour sa motion. Je pense que c'est important de souligner le Mois de l'histoire des Noirs. D'ailleurs, au début du mois de février, j'étais dans une cérémonie à la ville de Montréal pour le lancement, et on a honoré 12 femmes de communautés noires impliquées dans leur communauté, et je trouvais ça important de souligner leur apport au rayonnement de la communauté.

Quelques mots également pour souligner que les récents événements qui ont lieu dans un aréna du Québec sont totalement inacceptables dans notre société, inadmissibles. Le gouvernement du Québec dénoncera toujours ce genre de geste, et ce genre de geste là n'a pas sa place au Québec. Le Québec est une société qui est ouverte, qui est respectueuse, et je pense que, tous ensemble, nous dénonçons les événements qui sont arrivés à ladite aréna.

• (11 heures) •

Alors, Mme la Présidente, le Mois de l'histoire des Noirs, en février, nous permet de reconnaître l'importance de la contribution des Québécoises et des Québécois des communautés noires à l'histoire du Québec et à son développement économique, social et culturel, en particulier les femmes noires, qui sont au centre du rayonnement de leur communauté. Le Mois de l'histoire des Noirs s'inscrit dans la Décennie internationale des personnes d'ascendance africaine, proclamée par les Nations unies, de 2015‑2024. C'est l'occasion de s'éduquer collectivement et de se remémorer, en plus d'enseigner à nos jeunes générations l'héritage historique des communautés noires du Québec et de s'engager à poursuivre les idéaux de justice, d'égalité et de dignité. Alors, j'invite les Québécoises et les Québécois de toutes origines à saisir cette occasion pour bâtir des ponts et créer des liens de confiance et de solidarité afin de combattre les préjugés, les manifestations de racisme et de discrimination sous toutes les formes... et afin de favoriser la pleine participation de toutes et de tous à la vie en société. J'aimerais aussi souligner la présence et l'enracinement des personnes des communautés noires établies au Québec depuis plus de 400 ans ainsi que leur implication à faire du Québec une société plus inclusive et plus ouverte.

En terminant, Mme la Présidente, j'aimerais remercier toutes les personnes impliquées dans l'organisation d'activités qui ont lieu dans plusieurs régions du Québec pour souligner le Mois de l'histoire des Noirs. Je félicite les institutions et les organismes qui ont à coeur et travaillent à reconnaître la richesse et l'importance de l'apport des personnes des communautés noires au développement du Québec. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le ministre. Maintenant, je reconnais la parole à la députée de Marie-Victorin.

Mme Catherine Fournier

Mme Fournier : Merci, Mme la Présidente. Que ce soit à travers l'implication communautaire, sociopolitique, artistique, les communautés noires contribuent au rayonnement du Québec, et chaque année nous soulignons l'apport historique et social de cette communauté.

Nous savons cependant que la marche vers l'égalité n'est pas encore terminée. Même si le Québec est une terre de tolérance, les jeunes Noirs ont encore aujourd'hui quatre fois plus de chances de se faire interpeler par la police, moins de chances de se trouver un emploi à talent égal et plus de chances d'être discriminés lorsqu'ils essaient d'avoir accès à un logement, par exemple. On ne peut pas non plus passer sous silence les événements de la fin de semaine dernière, comme l'a brillamment rappelé le député de Viau. Nous devons donc demeurer vigilants pour assurer une réelle égalité des chances à tous.

Je voudrais également souligner la difficulté d'être une femme noire encore de nos jours au Québec. Peu de place est faite à la contribution de ces femmes dans notre société, et peu de visibilité leur est également donnée. Que ce soit dans les milieux politiques, médiatiques ou artistiques, je veux souligner l'importance d'être conscient de cette double discrimination, de cette double difficulté que vivent encore aujourd'hui les femmes noires. Plusieurs femmes noires ont, malgré tout, réussi à marquer l'histoire du Québec. Pensons, entre autres, à Mme Amina Gerba, arrivée au Québec en 1986. 28 ans après son arrivée en provenance du Cameroun, elle était à la tête de trois entreprises prospères. Elle est aujourd'hui chevalière de l'Ordre national du Québec. Pensons également à Mme Mariam Sy Diawara, originaire de la Côte d'Ivoire. Elle fut la fondatrice de la Maison de l'Afrique et contribua grandement à développer la relation d'amitié entre le Québec et plusieurs pays d'Afrique, relation que nous chérissons tant aujourd'hui et qui ne cesse de se développer.

Un des rôles de l'Assemblée nationale est de perpétuer la mémoire des personnalités importantes du Québec. À ce jour, malgré leur grande contribution à l'histoire de notre pays, il n'y a aucune personnalité noire qui fait partie du décor de notre Parlement. Il faut changer cette réalité. Nous pourrions commencer avec Mathieu Da Costa, un des premiers Noirs à avoir laissé sa marque sur notre pays. Arrivé au Québec au tout début du XVIIe siècle, il oeuvra comme traducteur entre les Français et les Premières Nations. Nous pourrions également penser à Jean Alfred, le tout premier Noir élu à l'Assemblée nationale en 1976 sous la bannière du Parti québécois, qui a d'ailleurs été honoré la semaine dernière alors qu'un pont a été nommé en son nom en Outaouais.

Bref, j'offre ma collaboration au gouvernement, qui, je l'espère, ira de l'avant avec ces propositions. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée de Marie-Victorin. Maintenant, je cède la parole au député de Laurier-Dorion.

M. Andrés Fontecilla

M. Fontecilla : Merci, Mme la Présidente. Je remercie mon collègue le député de Viau d'avoir fait en sorte que la communauté noire soit présente aujourd'hui ici, à l'Assemblée nationale.

Louis-Joseph Papineau, Marguerite Bourgeoys, Jeanne Mance, Samuel de Champlain, Jacques Cartier, Marie-Claire Kirkland, ces noms sont connus de tous et toutes. Ils font partie du panthéon de notre nation. Mais il y a des noms qui sont moins connus et qui mériteraient d'avoir une plus grande reconnaissance. Je pense à Olivier Le Jeune, le premier esclave acheté et résidant en Nouvelle-France. Je pense à Marie-Josèphe-Angélique, cette esclave de Montréal qui a été mise à mort en 1734, car elle avait supposément mis le feu à la maison de sa propriétaire. Sa condamnation rapide ne tenait que par les dires d'une fillette de cinq ans. C'est pour vous dire. Je pense aussi, il a été nommé, à Jean Alfred, le premier député noir à l'Assemblée nationale. Il y en a d'innombrables autres qui pourraient être cités ici.

C'est donc un honneur pour moi de prendre la parole pour souligner le Mois de l'histoire des Noirs. Nous avons tendance à oublier qu'il y a une présence noire au Québec depuis le début de la colonie et nous avons aussi tendance à occulter le fait qu'il y a bel et bien eu des esclaves ici même. Le Québec d'antan n'était pas une société esclavagiste, mais il y avait bel et bien des esclaves. Le grand historien qu'était Marcel Trudel a beaucoup écrit sur le sujet. Pas plus tard que la semaine dernière, les membres de l'aile parlementaire de Québec solidaire avons suivi une formation sur le sujet avec l'historien Webster. C'est une histoire fascinante que nous devons connaître. Dans le contexte, je tiens aussi à souligner l'appui de ma formation politique au jeune joueur de hockey Jonathan-Ismaël Diaby, qui a subi d'horribles commentaires racistes cette semaine. Comme quoi nous avons encore du chemin à faire pour éliminer le racisme au Québec.

Je remercie encore une fois le député de Viau pour sa motion, mais je rappelle que c'est son gouvernement qui a refusé la tenue d'une commission sur le racisme systémique. C'est dommage. Mais nous sommes ici pour célébrer le Mois de l'histoire des Noirs. Donc, en terminant, j'aimerais inviter les membres de cette Chambre à aller visiter l'exposition Fugitifs! au Musée national des beaux-arts du Québec du 10 avril au 10 mai prochains. Cette exposition donne un visage à 10 esclaves décrits dans des annonces publiées dans la Gazette du Québec. Bonne visite à tout le monde! Merci.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député.

Mise aux voix

Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix : Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Motion adoptée.

Avis touchant les travaux des commissions

Maintenant, nous allons passer à la rubrique des avis touchant les travaux des commissions. M. le leader.

M. Schneeberger : Oui. Alors, Mme la Présidente, j'avise cette Assemblée que la Commission des relations avec les citoyens poursuivra les consultations particulières sur le projet de loi n° 9, Loi visant à accroître la prospérité socio-économique du Québec et à répondre adéquatement aux besoins du marché du travail par une intégration réussie des personnes immigrantes, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 h 15 et de 15 heures à 18 heures, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine;

La Commission des finances publiques poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 3, Loi visant l'instauration d'un taux unique de taxation scolaire, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 heures à 18 heures, à la salle des Premiers-Ministres, 1.38, de l'édifice Pamphile-Le May;

La Commission de l'économie et du travail poursuivra les consultations particulières du projet de loi n° 10, Loi modifiant la Loi sur l'équité salariale afin principalement d'améliorer l'évaluation du maintien de l'équité salariale, aujourd'hui, de 15 h 45 à 18 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le leader. Est-ce qu'il y a consentement pour déroger à l'article 143 du règlement concernant l'horaire des travaux des commissions?

Des voix : Consentement.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Consentement. Parfait. Il y a consentement.

Alors, pour ma part, je vous avise que la Commission des institutions se réunira en séance de travail demain, le jeudi 28 février 2019, à 7 h 15, pour une durée de 1 h 15 min, à la salle des Premiers-Ministres, à l'édifice Pamphile-Le May, afin de statuer sur la possibilité que la commission se saisisse d'un mandat d'initiative portant sur la possibilité que des actes illégaux soient commis par des groupes à dérives sectaires et d'un mandat d'initiative portant sur le dossier du congédiement du lanceur d'alerte Louis Robert.

Affaires du jour

La période des affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer aux affaires du jour. M. le leader du gouvernement.

• (11 h 10) •

M. Schneeberger : Mme la Présidente, je vous demande d'appeler l'article n° 6 du feuilleton.

Projet de loi n° 8

Adoption du principe

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Mme la ministre de la Sécurité publique propose l'adoption du principe du projet de loi n° 8, Loi modifiant la Loi sur la sécurité civile concernant l'assistance financière.

Alors, Mme la ministre, la parole est à vous.

Mme Geneviève Guilbault

Mme Guilbault : Merci, Mme la Présidente. Alors, Mme la Présidente, chers collègues, bonjour à nouveau. On faisait le même exercice hier sur un autre projet de loi tout aussi emballant et on le fait aujourd'hui sur le projet de loi n° 8.

C'est donc avec enthousiasme et beaucoup d'optimisme que je me présente devant vous aujourd'hui pour l'adoption du principe du projet de loi n° 8, intitulé projet de loi modifiant la Loi sur la sécurité civile. Ce projet de loi, Mme la Présidente, a fait l'objet d'un mandat prioritaire qui m'a été confié par notre premier ministre lors de mon arrivée en tant que ministre de la Sécurité publique. Il est, à notre avis, une autre pièce maîtresse visant à placer les citoyens du Québec au coeur de nos préoccupations et de nos actions. En effet, son principal objectif est de permettre au gouvernement d'établir un programme général d'indemnisation à l'égard des sinistres réels ou imminents qui simplifierait la gestion de l'assistance financière aux sinistrés. Et je suis d'autant plus enthousiaste de voir ce projet de loi cheminer que la problématique des sinistres au Québec est totalement transpartisane et requiert la collaboration de nos collègues des oppositions pour que les solutions proposées puissent être mises en oeuvre dès ce printemps.

Permettez-moi, Mme la Présidente, de revenir tout d'abord sur le contexte qui a rendu nécessaires des modifications à la Loi sur la sécurité civile. Cette loi, qui a été adoptée en 2001, permet d'établir des programmes généraux d'aide financière qui s'appliquent, par exemple, lors de sinistres réels ou imminents ou lors d'autres événements qui compromettent la sécurité des personnes. Elle fixe les conditions d'admissibilité, les barèmes et les modalités de versement de ces programmes. Comme il est difficile de prévoir tous les cas éventuels, la loi permet également au gouvernement d'établir des programmes d'indemnisation ou d'aide financière ponctuels dits spécifiques. Cependant, actuellement, la loi ne prévoit pas de programme général d'indemnisation qui permettrait de simplifier la gestion de l'assistance financière aux sinistrés pour des événements d'envergure et récurrents comme les inondations.

Depuis l'adoption de la Loi sur la sécurité civile, le Québec a subi plusieurs sinistres qui ont mobilisé de nombreuses ressources. On peut penser aux inondations du printemps 2011 en Montérégie et bien sûr aux inondations historiques du printemps 2017. Ces événements ont entraîné l'établissement de programmes d'aide financière spécifiques afin de répondre aux besoins particuliers de la situation. Toutefois, les délais entre l'occurrence des sinistres causent parfois des difficultés de gestion et de mise en application rapide et efficiente de ces programmes, et, pour le personnel du ministère de la Sécurité publique, des situations de ce genre engendrent une tâche colossale, ne serait-ce que pour le traitement des réclamations d'aide financière, qu'il s'agisse de particuliers, d'entreprises ou de municipalités.

Il importe de mentionner qu'au cours des dernières années les catastrophes naturelles ont engendré un nombre croissant de réclamations et que celles-ci sont devenues de plus en plus complexes. Ainsi, en 2011, près de 4 000 demandes d'aide financière ont été transmises par les sinistrés, ce qui représente des réclamations de 93,4 millions de dollars. Les inondations du printemps 2017, quant à elles, ont généré plus de 6 100 réclamations provenant de 293 municipalités désignées. Pour ce sinistre... pour ces sinistres, plutôt, l'aide versée à ce jour est de 245,7 millions, et le ministère estime que l'aide totale pourrait atteindre 285 millions de dollars. C'est ce dernier événement qui a véritablement mis en lumière la très grande complexité du traitement des réclamations d'aide financière. En effet, le personnel du ministère est tenu d'analyser de nombreuses pièces justificatives avant de pouvoir verser une aide, ce qui représente un long processus.

Bien que certaines procédures administratives aient été modifiées et que du personnel additionnel ait été embauché, les délais de traitement demeurent importants. C'est donc dans ce contexte que nous en sommes venus à la conclusion que la Loi sur la sécurité civile ne correspond plus à la réalité vécue sur le terrain lors de sinistres de grande envergure. Nous souhaitons donc la modifier afin que le gouvernement puisse établir un programme général d'indemnisation pour les inondations, puisque, selon de nombreux experts, ce type de sinistre devrait augmenter en nombre et en intensité, notamment, en raison des changements climatiques.

Concrètement, s'il est adopté, ce projet de loi élargira l'éventail des possibilités pour le gouvernement lors de sinistres réels ou imminents. Premièrement, le gouvernement pourrait verser des indemnités pour les mêmes sinistres et événements que ceux prévus dans la loi actuelle, pour lesquels une aide financière est prévue. Un programme général d'indemnisation permettrait ainsi de compenser la perte d'une partie du patrimoine d'un sinistré par une indemnité. Pour recevoir cette somme, le demandeur n'aurait pas à soumettre les pièces justificatives démontrant, par exemple, la réparation d'un bâtiment essentiel, comme c'est le cas actuellement pour obtenir une aide financière, parce que, dans le cas d'une aide, le ministère a l'obligation de procéder à la vérification de l'utilisation de l'aide versée, conformément à ce que prescrit la loi.

Deuxièmement, le gouvernement bénéficierait d'une plus grande flexibilité lors de l'établissement d'un programme général d'aide financière ou d'indemnisation. Le champ d'action des programmes généraux pourrait ainsi être élargi en fonction des circonstances.

Troisièmement, le projet de loi n° 8 permettrait de mettre en place des programmes spécifiques afin de pouvoir intervenir dans des cas particuliers. Il donnerait, par exemple, la possibilité au gouvernement d'offrir une assistance financière à un sinistré pour un risque, même si son bâtiment essentiel n'a subi aucun dommage et qu'il n'est pas menacé par un danger imminent, car, dans certains cas, même si le bâtiment ne se trouve pas en situation de danger imminent, il est évident qu'il sera affecté dans un avenir rapproché.

Quatrièmement, s'il est adopté, ce projet de loi rendrait possible l'application des critères d'inadmissibilité prévus par la loi actuelle à l'ensemble des programmes. En ce moment, la loi précise les catégories de personnes qui ne sont pas admissibles à un programme pour la réparation de dommages causés aux biens par un sinistre. La modification proposée aurait pour effet d'étendre l'application à tous les types de programme, ce qui inclut ceux qui visent la réparation des dommages causés aux biens par un sinistre. Le but d'un tel ajustement est de responsabiliser les personnes pour une saine gestion des fonds publics. Le gouvernement pourrait aussi prévoir des exceptions, par exemple un programme pour la réalisation de mesures préventives ou de préparation des interventions.

Enfin, le projet de loi n° 8 donnerait au gouvernement plus de latitude pour prévoir, dans les programmes qu'il établit, d'autres cas d'inadmissibilité à une assistance financière que ceux déjà précisés dans la loi actuelle.

La Loi sur la sécurité civile de 2001 était une conséquence directe de la crise du verglas de 1998 et de la Commission scientifique et technique chargée d'analyser les événements relatifs à la tempête de verglas survenue entre le 5 et le 9 janvier 1998, communément appelée commission Nicolet, du nom de son président, l'ingénieur Roger Nicolet. Dans son rapport, la commission soulignait que la protection des personnes et des biens constitue une fonction essentielle de l'État. C'est d'ailleurs probablement la première fonction qu'une société décide d'assumer collectivement.

C'est dans cet esprit, donc dans la reconnaissance de la responsabilité fondamentale de l'État en matière de protection de la population, que nous avons réévalué la question de l'aide apportée aux victimes de sinistre par le gouvernement du Québec. Les sinistrés des inondations du printemps 2017 étaient unanimes sur les principaux obstacles auxquels ils ont fait face lors de leurs demandes d'aide financière. D'une part, ils se sentaient impuissants devant la lourdeur bureaucratique. Déjà fragilisés par les événements, sortis littéralement de leur zone de confort, ils auraient voulu qu'on leur facilite les choses. D'autre part, la longueur des délais pour recevoir de l'assistance financière leur a souvent semblé interminable, alors que leur souhait le plus cher était de retrouver une vie aussi normale que possible. Nous avons écouté ces gens et tiré des leçons des derniers sinistres. Le Québec doit mettre en place des outils adaptés aux nouvelles réalités qu'il doit affronter. En conséquence, il convient d'ajuster la législation en fonction de l'apparition de nouveaux facteurs de risque associés à l'urbanisation, aux développements technologiques et aux effets des changements climatiques. Un programme d'indemnisation découlant de la modification de la loi permettrait aux sinistrés de connaître d'avance les montants auxquels ils ont droit et de recevoir des sommes beaucoup plus rapidement qu'avec un programme d'aide financière.

Le projet de loi n° 8 s'inscrit donc dans une volonté d'élargissement des services offerts en matière de sécurité publique, et notre gouvernement a la ferme conviction que le projet de loi qui est devant vous aujourd'hui répond aux attentes de la population du Québec. Je vous remercie, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la ministre. Maintenant, je cède la parole à la députée de Vaudreuil. La parole est à vous.

Mme Marie-Claude Nichols

Mme Nichols : Merci, Mme la Présidente. Il me fait plaisir de prendre la parole aujourd'hui, au nom de ma formation politique, dans le cadre du débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 8, soit la Loi modifiant la Loi sur la sécurité civile concernant l'assistance financière.

Nous comprenons que ce projet de loi vise à permettre au gouvernement d'établir un programme général d'indemnisation à l'égard, notamment, des sinistrés réels ou imminents ou d'autres événements qui compromettent la sécurité des personnes.

Mme la Présidente, si nous débattons, aujourd'hui, de ce projet de loi, c'est parce qu'il y a eu, dans les dernières années, des sinistres de grande ampleur qui ont démontré les limites pratiques des programmes d'indemnisation actuellement en place. Évidemment, je fais ici référence aux inondations du printemps 2017, qui ont été exceptionnelles du point de vue de leur ampleur, de leur durée et de leur étendue. On se le rappelle, ce sont plus de 4 000 personnes qui ont dû quitter leurs domiciles entre la fin février et le début de juin 2017. Ce sont 291 municipalités, 5 300 résidences et 400 routes réparties dans 15 régions administratives du Québec qui ont été touchées par ces inondations, et ce, sans compter les 180 glissements de terrain.

• (11 h 20) •

Je peux vous dire que, dans ma circonscription, Vaudreuil, nous avons été frappés de plein fouet. Et je sais que plusieurs collègues ici, dans cette Chambre, ont vécu cette situation similaire. J'aurai l'occasion de revenir sur ce sujet plus tard dans mon intervention.

Un autre événement qui motive visiblement le dépôt du projet de loi est le passage des tornades à Gatineau le 21 septembre dernier. En effet, ce sont trois tornades qui ont frappé la région d'Ottawa et de Gatineau avec des vents allant jusqu'à 265 kilomètres-heure qui ont causé des dégâts très importants : on parle ici de 200 immeubles endommagés sérieusement, particulièrement dans le quartier Mont-Bleu de Gatineau. Nous avons tous été choqués, j'en suis sûre, par les images de désolation que l'on a pu voir à la télévision ou sur le terrain, pour les collègues qui y étaient. Les événements de cette ampleur mettent évidemment une pression très grande sur les programmes d'indemnisation découlant de la Loi sur la sécurité civile.

Le projet de loi n° 8 n'est pas une initiative isolée, il semble plutôt être l'aboutissement d'un travail entamé par l'ancien ministre de la Sécurité publique, mon collègue Martin Coiteux, dans la foulée des inondations printanières 2017.

En effet, en décembre 2017, le ministre Coiteux, accompagné de plusieurs députés et ministres, avait tenu une journée d'échange avec les différents acteurs concernés par les inondations printanières. Cette journée, intitulée Inondations du printemps 2017 — Bilan et perspectives, avait pour objectif de dresser le bilan des événements et de porter un regard sur les pistes d'amélioration pour l'avenir. Des travaux ont aussi été menés par notre collègue le député de Vimont, notamment, auprès des partenaires municipaux, des partenaires de sécurité civile et des personnes sinistrées. Dans la foulée de cette journée, des consultations et de ces travaux, le Plan d'action en matière de sécurité civile relatif aux inondations a été dévoilé le 1er mars 2018.

Je suis convaincue que la ministre est très familière avec ce document, mais, pour le bénéfice des citoyens ou ceux qui suivent nos débats, j'aimerais brièvement en expliquer le contenu.

Ce plan d'action comprenait 24 mesures regroupées sous trois thèmes principaux. Le premier thème, qui s'intitulait Pour un niveau accru de la mobilisation : un accroissement de la préparation, de la prévention et de la connaissance, regroupait des mesures telles que l'obligation pour les municipalités d'avoir un plan de sécurité civile, l'offre d'outils et un soutien financiers pour améliorer la préparation municipale aux sinistres, la mise en place d'une veille particulière sur un dégel printanier. Le second thème, Pour un accompagnement personnalisé : une nouvelle gestion du rétablissement, proposait, notamment, la révision du Programme général d'aide financière, la délégation de la gestion de ce programme aux municipalités, la mise en place d'un guichet unique pour les personnes sinistrées. Finalement, le troisième thème, Pour faire face aux défis actuels et futurs : une évolution des pratiques, proposait, entre autres, de documenter les bonnes pratiques municipales en matière de sécurité publique.

Le plan d'action était accompagné d'un investissement de près de 50 millions de dollars répartis ainsi : soit 20 millions pour soutenir financièrement les municipalités dans l'élaboration de leurs plans de sécurité civile; 20,5 millions de dollars pour actualiser la cartographie des zones inondables avec la Communauté métropolitaine de Montréal, la Communauté métropolitaine de Québec, la MRC de Maskinongé, la ville de Gatineau et d'autres municipalités; 6,9 millions de dollars pour des travaux de recherche sur les zones inondables, par exemple, l'organisme Ouranos, qui aura comme mandat de réaliser les études exhaustives des crues historiques ainsi que des simulations, des scénarios et des analyses climatiques permettant de considérer les incidences des changements climatiques.

De plus, le 13 avril 2018, nous avons annoncé une bonification du programme d'aide financière, une simplification des démarches administratives et un investissement additionnel de 40 millions de dollars pour les mesures prévues dans le plan d'action.

À la lumière des actions que je viens d'énumérer, l'on peut constater le sérieux qui a été accordé par le précédent gouvernement aux enjeux reliés aux inondations. D'ailleurs, lors des consultations particulières, la ministre a elle-même témoigné de son appréciation pour le travail réalisé par notre gouvernement et a positionné son projet de loi en continuation avec celui-ci. Je me permets de la citer : «Je pense que le gouvernement précédent puis mon prédécesseur en particulier, M. Coiteux, avaient quand même fait un bon travail pour essayer de faire le maximum possible dans les limites de la Loi sur la sécurité civile dans sa forme actuelle et pour réduire, autant que possible, pour faire des aménagements administratifs autant que possible, pour simplifier la vie des gens autant que possible. Mais, la loi étant ce qu'elle est, on est arrivés, je pense, à la limite de ce qu'on pouvait faire en termes de simplification, d'où le projet de loi d'aujourd'hui, d'ailleurs.»

Le comté de Vaudreuil a été durement touché par les inondations du printemps 2017. Sur les huit villes qui formaient le comté de Vaudreuil, sept ont été touchées par les inondations. 295 dossiers ont été ouverts, dont 25 d'entreprise. J'ai encore des images terribles de ces journées, qui nous paraissaient sans fin. On comparait, entre autres, la petite municipalité de L'Île-Cadieux à une ville sous-marine. On circulait dans les avenues de Terrasse-Vaudreuil en chaloupe. Les gens ne voulaient pas quitter leurs domiciles. C'était tellement triste. Les citoyens se sont mobilisés de façon spectaculaire pour venir en aide à ceux dans le besoin. Nous avons fait des repas, des boîtes à lunch, des poches de sable, érigé des murs. Il n'y a rien qu'on n'a pas fait pour venir en aide à ces citoyens dans le besoin. Et le plus impressionnant, c'est : malgré cette catastrophe, quelle fierté de voir les gens de notre comté se mobiliser! C'était une solidarité incroyable.

Je me permets de rappeler que dame Nature est souvent imprévisible et que des catastrophes météo risquent de se reproduire, et ce, de façon extrême : des pluies torrentielles, des vents extrêmes, des chaleurs insoutenables, et pire encore.

Mme la Présidente, ce que le projet de loi vient faire en son essence, c'est de donner au gouvernement un ancrage législatif un peu plus large pour mettre sur pied un nouveau programme d'indemnisation. Vous comprendrez que les parlementaires se retrouvent aujourd'hui devant un projet de loi qui est bref, quelques articles à peine, mais qui ne peut être réellement jugé qu'à la lumière des détails du programme d'indemnisation qui sera rendu public suite à l'adoption du présent projet de loi. Je réitère que nous sommes très intéressés, de ce côté ici de la Chambre, à entendre la ministre nous expliquer les grandes orientations de son programme à venir. D'ailleurs, lors du point de presse qu'elle a réalisé au dépôt du projet de loi il y a déjà trois semaines, la ministre a confirmé l'avancement de l'élaboration du programme, et je la cite : «Le travail est très, très avancé dans l'élaboration du programme. Il reste de petites choses à attacher, des consultations à faire, mais l'essentiel, l'esprit du programme est déjà vraiment mis en place.» Il va donc sans dire que la ministre saura nous en dire davantage sur les principes et les mécaniques de son programme envisagé afin de nous apporter l'éclairage nécessaire quant aux dispositions législatives qu'il requiert. Cela faciliterait grandement le travail qui nous attend lors de l'étude article par article. Ainsi, j'invite la ministre à prendre cette suggestion en considération.

Nous avons tenu des consultations particulières sur le présent projet de loi le 21 février dernier lors desquelles nous avons pu entendre la fédération des municipalités du Québec, la Croix‑Rouge canadienne, section Québec, la Protectrice du citoyen, l'Union des municipalités du Québec et le Bureau d'assurance du Canada, qui ont aussi fait parvenir à la commission leurs commentaires au sujet du projet de loi. Les groupes ont certainement salué la volonté de poursuivre les efforts d'amélioration des programmes d'indemnisation adoptés lors de la précédente législature sans pouvoir se prononcer sur le contenu de l'éventuel programme, pour le moment, toujours inconnu et non rendu public. Toutefois, un message très clair a été envoyé autant par la FQM que l'UMQ : ils s'attendent à être consultés dans l'élaboration du programme. Ainsi, j'invite la ministre à le faire, puisque les municipalités ont un point de vue unique et une contribution importante à apporter. Après tout, ils ont été, dans les dernières années, si on remonte, entre autres, au printemps 2017, aux premières loges de la gestion de ces programmes et ont été à même d'en observer les lacunes et les limites dans leur application sur le terrain.

Mme la Présidente, nous sommes le 27 février. Le printemps cogne à nos portes dans moins d'un mois... enfin, on espère qu'il cogne à nos portes. Avec les précipitations abondantes que nous avons connues cet hiver, je crois que de nombreux citoyens regardent les cours d'eau à proximité de leurs résidences avec une certaine appréhension et, très franchement, de l'inquiétude. Nous comprenons d'ailleurs tout à fait leurs états d'âme. Je comprends de même que la ministre soit... je recommence, souhaite faire adopter le projet de loi rapidement afin de pouvoir déployer son nouveau programme à temps pour la saison des inondations. C'est un objectif tout à fait légitime, auquel nous souscrivons, et ce, pour le bien-être de tous les citoyens du Québec. C'est pourquoi je fais miens les propos de ma collègue la députée de l'Acadie, qui, lors des consultations, a exprimé la volonté de collaboration de notre formation politique pour l'adoption du projet de loi.

En terminant, je réitère que, pour nous, l'action gouvernementale incarnée par le projet de loi n° 8 se situe dans le continuum des actions et améliorations que nous avons apportées lorsque nous étions au gouvernement. En ce sens, nous allons voter en faveur de l'adoption du principe du projet de loi n° 8. Merci, Mme la Présidente.

• (11 h 30) •

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je vous remercie, Mme la députée de Vaudreuil. Maintenant, je reconnais la parole à Mme la députée de Duplessis.

Mme Lorraine Richard

Mme Richard : Merci, Mme la Présidente. Nous sommes ici aujourd'hui afin d'adopter le principe du projet de loi n° 8, Loi modifiant la Loi sur la sécurité civile concernant l'assistance financière.

Ce projet de loi, Mme la Présidente, il vise à permettre au gouvernement d'établir un programme général d'indemnisation à l'égard notamment des sinistres réels ou imminents ou d'autres événements qui compromettent la sécurité des personnes. Il vise également à permettre au gouvernement d'établir des programmes d'aide financière ou d'indemnisation spécifiques lorsqu'il existe un risque qu'un sinistre ou qu'un autre événement qui comporte la sécurité des personnes survienne. Le projet de loi introduit, en outre, une disposition qui confirme le caractère de dernier recours de l'assistance financière versée en application du programme d'aide financière ou d'indemnisation, qu'il soit général ou spécifique. De plus, le projet de loi habilite le gouvernement à prévoir, dans ses programmes, d'autres cas d'inadmissibilité que ceux prévus par la loi.

En réalité, Mme la Présidente, ce que le projet de loi n° 8 va venir faire... va venir faire une concordance dans différents articles, mais il va venir, en fait, mieux soutenir les victimes qui sont victimes de sinistres par différents moyens, on va le voir, obtenir de l'aide financière plus rapidement, et que les gens connaissent, à l'avance, les montants auxquels ils ont droit. Donc, vous comprenez que personne ne peut être contre ça. Moi, je ne l'ai pas vécu, des sinistres, comme tels, par des inondations, mais, vous savez, des problèmes d'érosion des berges, dans mon coin de pays... Ce n'est jamais facile pour les gens qui ont à vivre des difficultés telles que voir leurs maisons, que ce soit par l'érosion des berges, partir, ou que ce soit à cause de pluies diluviennes. Souvent, bon, déjà, la perte des biens, tout ce que ça occasionne, le stress que ça occasionne pour certaines familles, déménager, résider à l'hôtel, des fois pendant des semaines, des mois, c'est un stress quotidien, il faut réorganiser notre vie. Et qu'on le veuille ou qu'on ne le veuille pas, Mme la Présidente, l'argent, on en a besoin pour vivre au quotidien, et c'est un stress important, quand vous avez des centaines et des centaines de milliers de dollars qui sont partis comme ça, toute votre vie, des fois, est anéantie, parce que vous avez tellement mis d'efforts et d'amour dans votre chez-vous.

Donc, le projet de loi n° 8, en arrangeant des articles de concordance, va permettre, par la suite, à ce que la ministre... Bon, elle nous dit qu'elle a travaillé sur le programme, je n'en doute pas... et qu'on puisse arriver avec un règlement.

Mais, vous savez, Mme la Présidente, fort intéressant... parce que, lors des auditions du projet de loi n° 8, on a écouté, entre autres, la Fédération québécoise des municipalités, le Protecteur du citoyen, la Croix-Rouge canadienne. Puis la plupart des gens, là, ils ont évoqué la même chose, hein, c'est que, quand arrive un sinistre, bien, les médias se déploient sur place, ils trouvent des moyens extraordinaires, mais ils sont là. Mais on a des gens, des bénévoles, on a des gens de la Sécurité publique, différents... que ce soient les pompiers, les ambulanciers, la Croix-Rouge est omniprésente, ils sont sur place, on s'occupe des sinistrés, on fait des gestions de crise, on leur apporte tout le soutien nécessaire.

Mais il y a des personnes pour qui ça ne se règle pas dans l'espace d'une semaine, et ces gens-là, qui sont venus en commission, ils l'ont répété à la ministre. Puis je pense, sincèrement, Mme la Présidente, que la ministre en est consciente que ces gens-là, ils doivent être accompagnés du début à la fin. On ne peut pas juste s'en occuper pendant trois semaines, un mois, puis qu'après on les laisse à eux-mêmes dans l'appareil gouvernemental. Je suis convaincue que tous mes collègues, comme députés depuis... c'est un nouveau gouvernement, mais, même quand on est au gouvernement, on a à appeler un tel ministère, ce n'est pas la bonne personne qui nous répond, faites le un, faites le deux, faites le trois avant de trouver quelqu'un. Ça fait que, imaginez-vous, là, plusieurs mois après qu'un sinistre est arrivé à un endroit, ces gens-là, là, bon, ils appellent le maire, ils appellent leur conseiller municipal, après, ils appellent, s'ils ont des numéros de téléphone, bien, la Sécurité publique. Ils appellent partout pour avoir de l'aide, puis, sûrement, c'est difficile, c'est complexe. Les rôles, des fois, sont plus ou moins définis. La Sécurité publique, des fois, elle veut en faire plus, mais elle aussi, elle a des balises.

Ça fait que je sais que la ministre semblait avoir une très grande sensibilisation face à ces gens, ces sinistrés, elle veut faire les choses autrement. Donc, moi, je ne pense pas, Mme la Présidente, qu'avec le projet de loi n° 8 il va y avoir beaucoup de gens... je pense qu'il n'y en aura pas du tout qui vont être en désaccord.

C'est sûr que, bon, écoutez, comme deuxième opposition, moi, comme porte-parole pour mon parti au niveau de la sécurité publique, on va collaborer. Mais j'ai bien hâte, Mme la Présidente, de voir le règlement, comment tout ça va se concrétiser sur le terrain parce que, comme on le dit souvent, hein, le diable est dans les détails. Et que je vais demeurer vigilante.

Moi, j'ai abordé... c'est sûr, le problème d'érosion des berges ne fait pas partie, là, de ce programme qu'on va viser à établir plus les sinistrés qui vivent des inondations ou une tragédie comme il s'est passé au Lac-Mégantic, hein, on l'a tous en souvenir.

Donc, si, au moins, malgré tout ce que les gens peuvent vivre dans ces moments-là qui sont extrêmement difficiles, on peut leur éviter, tout au moins, les problèmes financiers puis qu'on peut accélérer les choses. Soyez assurée, Mme la Présidente, qu'on va collaborer. Et je souhaite que la réglementation, que le programme fasse en sorte que ces gens-là soient soutenus du début à la fin.

Puis moi, je pense que ça va aller rapidement parce qu'on veut tous... puis on le sait, ma collègue l'a dit avant moi, il a neigé beaucoup cet hiver, on pourrait en jaser longtemps. Donc, je suis sûre que, on ne le souhaite pas, mais ça va être ainsi, hein? On va avoir des endroits où il va y avoir des inondations. Vous vous levez un matin, l'eau est dans le sous-sol, là, hein? Vous appelez votre assurance, puis, après, là, ça déboule, puis vous êtes des mois, là, dans un processus. Donc, soyez sûrs qu'on va agir rapidement, mais on va agir en pensant aux gens qui ont besoin qu'on fasse notre travail pour les sécuriser davantage, puis faire ça vraiment selon les règles de l'art pour leur enlever le plus de soucis possible. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je vous remercie, Mme la députée de Duplessis. Maintenant, je reconnais la parole à Mme la députée de Taschereau.

Mme Catherine Dorion

Mme Dorion : Merci. Ce projet de loi est bienvenu. Il va faciliter la vie des citoyens qui sont victimes de sinistres. Et on a vu, lors des consultations particulières, que le projet de loi était bien reçu, que les oppositions lui étaient favorables. J'aimerais quand même, rapidement, là, discuter de quelques éléments qui me semblent importants.

Chaque fois qu'il est question des inondations ou autres sinistres, ce qui revient souvent, c'est la question des assureurs. Je sais que le projet de loi porte sur la création d'un programme gouvernemental, mais j'aimerais ça juste ne pas passer ce sujet sous silence : on sait que plusieurs personnes ont eu des problèmes avec leurs assureurs après sinistre, et pas seulement lors de sinistre, c'est quelque chose qui n'est pas nouveau, qui est fréquent. On a tous déjà entendu des histoires d'horreur en lien avec des assureurs qui refusent de payer, alors que ça aurait vraiment été attendu qu'ils le fassent. Puis je veux soulever la question parce que, tôt ou tard, il va falloir évaluer la question du resserrement des balises qui entourent les assureurs. J'espère que ça va venir parce qu'un assureur qui décide de revenir sur sa parole, donc sur le contrat signé avec un citoyen, ça brise des vies, ça met du monde en dépression, ça a vraiment des conséquences qui peuvent être très, très lourdes.

En 2017, notre ancien député Amir Khadir avait appelé, à tout le moins, à une assistance juridique ou à une autre forme d'intervention gouvernementale qui pourrait ressembler à ça auprès des compagnies d'assurance pour les forcer à respecter rapidement leurs responsabilités sans plonger les citoyens qui sont déjà dans la misère d'un sinistre, là... à se dépatouiller avec ça. Ces compagnies d'assurance, souvent, essaient de minimiser leurs responsabilités financières, mais il y a aussi, face à ça, une responsabilité gouvernementale. Donc, à titre de députés, je pense que notre gouvernement doit être responsable, dans ce sens-là, doit rappeler aux assureurs privés les engagements pris par contrat. Je propose donc peut-être que ce débat-là se fasse ultérieurement dans un autre cadre. Mais, comme ça touche de très près à ce qu'on regarde là, je pense qu'il faut vraiment amener ça à la conscience des parlementaires.

L'ancien député de Mercier me rappelait par ailleurs que le Canada était le seul pays du G7 à ne pas compter un programme national d'assurance pour les cas d'inondation, autre truc à réfléchir. Et je comprends aussi que le programme gouvernemental d'aide aux sinistrés couvre des éléments que généralement l'assureur privé ne couvre pas, sauf que notre action à titre de législateurs doit et peut en plus aller plus loin dans l'encadrement des assureurs pour le bien-être des citoyens.

• (11 h 40) •

Maintenant, là, je ne suis pas une experte des affaires municipales, mais j'ai aussi remarqué la demande des municipalités d'être incluses le plus souvent possible dans le processus de décision quant au programme et à toutes les modalités. Il y a des réalités différentes dans chaque région, il y a des modalités différentes, même, dans chaque ville, fait que ça serait logique, pour moi, d'acquiescer à ces demandes de concertation avec le milieu municipal. Il faudrait trouver une façon de mettre ça dans le projet de loi. Il en va du principe de subsidiarité, qui est un concept important pour notre gouverne collective.

Et je voudrais finalement finir ça sur le point qui, selon moi, est le plus important, les changements climatiques. Je note que le mémoire de la Fédération québécoise des municipalités commence en nommant cet enjeu. C'est quelque chose qui devient de plus en plus «mainstream», excusez mon québécois. Et ça, c'est vraiment de la clairvoyance, de commencer en nommant cet enjeu-là. C'est même ce que j'appellerais du réalisme, là. C'est là qu'on est rendus. C'est le grand défi de notre génération, la lutte aux changements climatiques. Et on sait tous que, si on ne fait pas, en même temps, des politiques pour s'attaquer aux changements climatiques, on peut avoir autant de programmes qu'on veut, à un moment donné, on ne sera plus capables de payer. On va frapper un mur. Et, quand ça va arriver à tout le monde en même temps, il n'y a personne qui va pouvoir répondre à la demande d'assurance.

Alors, évidemment, je vais avoir quelques propositions d'amendement pour bonifier ce projet de loi. Et j'annonce que les membres de ma formation allons voter en faveur du principe de ce projet de loi là. Merci beaucoup.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je vous remercie, Mme la députée de Taschereau. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants? Il n'y a pas d'autre intervenant.

Mise aux voix

Alors, le principe du projet de loi n° 8, Loi modifiant la Loi sur la sécurité civile concernant l'assistance financière, est-il adopté?

Des voix : Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Alors, c'est adopté. M. le leader du gouvernement.

Renvoi à la Commission des institutions

M. Schneeberger : Oui. Alors, Mme la Présidente, conformément à l'article 243 de notre règlement, je fais motion afin que le projet de loi n° 8, Loi modifiant la Loi sur la sécurité civile concernant l'assistance financière, soit déféré à la Commission des institutions pour son étude détaillée.

Mise aux voix

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix : Adopté.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Adopté. Alors, la motion, adoptée. M. le leader du gouvernement.

M. Schneeberger : Oui. Alors, Mme la Présidente, j'appelle le... En fait, appelez l'article 1 du feuilleton.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je vais suspendre les travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 11 h 42)

(Reprise à 11 h 48)

Projet de loi n° 1

Reprise du débat sur l'adoption du principe

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Alors, l'Assemblée reprend le débat ajourné le mardi 26 février 2019 sur l'adoption du principe du projet de loi n° 1, Loi modifiant les règles encadrant la nomination et la destitution du commissaire à la lutte contre la corruption, du directeur général de la Sûreté du Québec et du directeur des poursuites criminelles et pénales.

Alors, M. le député de Jacques-Cartier n'avait pas terminé son intervention. Alors, je reconnais la parole... M. le député, la parole est à vous.

M. Gregory Kelley (suite)

M. Kelley : Merci, Mme la Présidente. Alors, juste de continuer après une longue pause.

C'est sûr que ce projet de loi touche certaines institutions qui sont très, très importantes. Si on pense juste à la sécurité du Québec, ça sert à environ 1 039 municipalités partout au Québec. C'est environ 7 800 personnes qui travaillent pour la sécurité du Québec. Alors, c'est quand même une institution très grande et très importante au sein du Québec. Quand même, on sait très, très bien que l'Unité permanente de l'anticorruption, c'est une autre institution très, très importante dans notre société qui fait un travail très important. Puis le Directeur des poursuites criminelles et pénales, qui est en place depuis 2007, c'est aussi encore une autre institution qui joue un rôle très important dans notre société. Alors, je veux juste souligner ça, que ce débat parle vraiment et touche des institutions importantes pour notre démocratie.

• (11 h 50) •

I'm delighted that this Government wants to continue to work on being more transparent. As you recall, the previous Government created the Web site transparence.gouv, a place that allows the public to know where ministers have been, who they have been meeting, which is something that had been asked for from civil society for many, many years. So, for sure, that was just one example of advancement in being more transparent.

So coming back to this debate, where we are discussing a check on the executive, an ability to perhaps bring names to the limelight, where they will be discussed in this house before nomination... is in that light, which is why I think my party is extremely keen to continue the discussion going forward in the adoption of this bill. But, at the same time, something that is extremely fundamental to our core beliefs is that the judiciary remains separate from political interference. So that is something that, of course, going forward, we're going to be very upfront and vocal about.

La notion de transparence telle qu'évoquée par le nouveau gouvernement consiste à modifier le mode de nomination de directeur général de sécurité du Québec, du Commissaire à la lutte contre la corruption et du Directeur des poursuites criminelles et pénales afin d'assurer que ces officiers de la justice reçoivent l'appui de deux tiers des membres de l'Assemblée nationale avant d'occuper des fonctions importantes dans notre société.

Mme la Présidente, cette façon de procéder pourrait, à première vue, paraître transparente, mais, quand même, le gouvernement garde toujours beaucoup de pouvoirs discrétionnaires avec leur majoritaire. Puis, juste avec l'ajout... députés, l'autre côté, il y a toujours vraiment le contrôle de la majorité dans ce processus.

Et c'est juste quelque chose encore de continuer notre réflexion. Puis, présentement, la députée de l'Acadie a fait un travail extraordinaire puis aussi la députée d'Anjou a fait un travail extraordinaire en 2014 quand elle a mis en place différents processus de nomination de ces trois postes qu'on discute aujourd'hui.

Alors, juste de rappeler un petit peu, dans le cas du directeur général de la sécurité du Québec, il y a déjà un processus très robuste, avec un comité de sélection composé d'un sous-ministre de la Sécurité du public, l'ancien directeur de police recommandé par l'association des directeurs des policiers du Québec, d'une personne recommandée par des organismes représentant le milieu municipal, des administrateurs d'État désignés par le secrétaire général associé aux emplois supérieurs du Conseil exécutif et, finalement, du directeur général de l'École nationale de police du Québec. Alors, quand même, dans notre processus, il y a un processus en place, et ça implique des personnes qui travaillent pour l'État, qui ont des bonnes intentions.

Alors, le comité évalue des candidats avant de remettre un rapport au ministre de la Sécurité publique, avec les noms des candidats. Des processus de sélection similaires existent présentement pour la fonction de Directeur des poursuites criminelles et pénales ainsi que pour la fonction de commissaire à la lutte à la corruption.

La nouveauté introduite par le projet de loi est la suivante : suite à une recommandation du comité de sélection, le premier ministre met de l'avant une candidature déclarée apte pour la considération de divers partis reconnus à l'Assemblée nationale. Un représentant de chacune des formations politiques peut rencontrer à huis clos le ou la candidat proposé avant de faire connaître son opinion au premier ministre dans un rapport. La nomination doit ensuite recevoir le vote de deux tiers de l'Assemblée nationale.

Alors, Mme la Présidente, lorsque le processus de sélection est terminé et les bonnes personnes sont en place, celles-ci doivent jouer de la confiance absolue de la population. Pour ce faire, elles doivent être en mesure de mener leurs enquêtes sans crainte d'être démises de leurs fonctions. L'ancienne loi prévoit que ces gens ne pouvaient être démis pour cause... qui vient de dire pour cause, Mme la Présidente, le fait d'avoir commis une faute grave dans l'exercice de leurs fonctions. Si l'Assemblée nationale, aux deux tiers des voix, aura le pouvoir d'enlever une charge publique à une personne qui a agi avec loyauté ou dévouement envers nous tous, Mme la Présidente, comment est-ce que son prédécesseur pourra faire son travail? Ont vraiment un DPCP qui prenne des décisions pour des raisons politiques. Comme l'Association des policiers provinciaux a dit en commission parlementaire : «En effet, il est reconnu que l'apparence d'indépendance et d'impartialité est au moins aussi importante qu'une réelle indépendance et impartialité.» L'association souhaite le maintien d'un processus de sélection, d'évaluation qui aurait pour effet de promouvoir une diminution de cynisme ambiant de notre société envers certaines de nos institutions et la classe politique en général.

Again, the SQ is the largest police force in Québec. It is also the only one which has the authority and impact throughout the entire province. The SQ, it is huge, the Director General's work is from one corner of Québec to the other, and 30 local police forces depend on the SQ for police services. Employees with highly technical skills were assigned by Revenu Québec, la Régie du bâtiment and la Commission de la construction to assist UPAC in fulfilling its mandate. Yet, if the Government has their way, they can throw the whole network in a total chaos by adopting a simple two-thirds motion. That is not democracy, Ms. Speaker. Only a few of us in this Assembly have the experience with policing. We would be flying blind if we were to vote on a motion which would essentially censure a high-ranking office for not doing their job, for serving and protecting in the best way they know how, and this is the best way to manage the SQ. Why is it not the same procedure as being recommended for the Montréal police force?

Motion de scission

Alors, c'est sûr que ce projet de loi touchant le domaine des forces policières et touchant le domaine de la judiciaire, alors, c'est pour ces raisons que je souhaite présenter la motion suivante, Mme la Présidente :

«Qu'en vertu de l'article 241 du règlement le projet de loi n° 1, loi modifiant les règles encadrant la nomination et la destitution du commissaire à la lutte contre la corruption, du directeur général de la [sécurité] du Québec et du directeur des poursuites criminelles et pénales, soit scindé en deux projets de loi : un premier intitulé [la] Loi modifiant les règles encadrant la nomination et la destitution du commissaire à la lutte contre la corruption et du directeur général de la [sécurité] du Québec, comprenant les articles 1 à 8, le 2e alinéa de l'article 12, ainsi que les articles 13, 14 et 16; [...]un second intitulé [la] Loi modifiant les règles encadrant la nomination et la destitution du directeur des poursuites criminelles et pénales, comprenant les articles 9 à 11, le 1er alinéa de l'article 12, ainsi que les articles 13, 15 et 16.»

Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Je vais suspendre quelques instants les travaux pour vérifier la recevabilité de la motion de M. le député de Jacques-Cartier.

Alors, je suspends les travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 11 h 58)

(Reprise à 12 h 12)

Débat sur la recevabilité

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je suis maintenant prête à entendre des arguments sur la recevabilité de la motion de scission présentée par M. le député de Jacques-Cartier et je cède la parole à M. le leader de l'opposition officielle.

M. Sébastien Proulx

M. Proulx : Merci, Mme la Présidente. Alors, vous me permettrez de, d'abord, vous saluer et saluer les collègues qui sont présents, vous dire que j'aurai l'occasion, dans les prochaines minutes, de vous faire part de cette motion qui est présentée par notre collègue, motion que je vais lire, Mme la Présidente, d'entrée de jeu pour bien situer les gens, mais, je pense, qui a été partagée avec l'ensemble des gens intéressés ici, dans cette Assemblée. Alors :

«Qu'en vertu de l'article 241 du règlement — qui prévoit, Mme la Présidente, qu'on peut faire ce que nous proposons aujourd'hui — le projet de loi n° 1, Loi modifiant les règles encadrant la nomination et la destitution du commissaire à la lutte contre la corruption, du directeur général de la Sûreté du Québec et du directeur des poursuites criminelles et pénales, soit scindé en deux projets de loi : un premier intitulé Loi modifiant les règles encadrant la nomination et la destitution du commissaire à la lutte contre la corruption et du directeur général de la Sûreté du Québec, comprenant les articles 1 à 8, le 2e alinéa de l'article 12, ainsi que les articles 13, 14 et 16; [...]un second intitulé [la] Loi modifiant les règles encadrant la nomination et la destitution du directeur des poursuites criminelles et pénales, comprenant les articles 9 à 11, le 1er alinéa de l'article 12, ainsi que les articles 13, 15 et 16.»

Alors, Mme la Présidente, je vous rappelle que le projet de loi qui a été présenté par la ministre de la Sécurité publique vise distinctement trois organismes qui sont indépendants, actuellement. Vous les connaissez, il y a le Commissaire à la lutte contre la corruption, le directeur général de la Sûreté du Québec et le Directeur des poursuites criminelles et pénales.

Alors, ce que nous proposons, Mme la Présidente, avec la motion qui a été présentée il y a quelques instants, c'est de scinder ce projet de loi là en deux parties distinctes, soit une première qui touche le système policier et une deuxième partie qui touche le système judiciaire, qui est le DPCP. J'ai déjà lu quels sont les titres proposés de ces projets de loi.

Vous savez, Mme la Présidente, qu'à cette étape-ci on n'a pas à discuter du fond des choses, de la pertinence, voire des amendements à proposer sur chacun des articles qui se trouvent dans le projet de loi ni même de sa finalité, vous avez à vous prononcer sur la recevabilité de cette motion. Et, selon la procédure parlementaire et plusieurs décisions que je vais vous citer, les critères, Mme la Présidente, qui sont essentiels pour que cette motion soit jugée recevable, sont les suivants. D'abord, pour la recevabilité de la motion, un premier critère est que, dans sa forme, la motion doit indiquer de quelle façon la scission s'effectue. Alors, vous le trouvez au texte. Vous constaterez qu'elle respecte ce critère et est conforme à notre règlement.

Un autre critère important qui doit être considéré pour la recevabilité, c'est qu'il doit contenir plus d'un principe. Le projet de loi pour lequel une motion est déposée doit contenir plus d'un principe.

Et là, bien, Mme la Présidente, pour interpréter ce qu'est un principe, bien, je vous amène aux décisions suivantes, une première qui a été rendue par une prédécesseure, Mme Houda-Pepin, en 2011, et je la cite : «Dans la détermination de ce qu'est un principe, la présidence ne doit ni rechercher ni tenir compte de l'intention de l'auteur du projet de loi. L'analyse est basée uniquement sur les dispositions contenues dans le projet de loi.»

Maintenant, pour déterminer si ce projet de loi contient un ou plusieurs principes, il y a d'autres décisions, Mme la Présidente, qui peuvent vous éclairer. Le président M. Brouillet, le 1er juin 1995, je le cite : «Pour déterminer si un projet de loi contient un ou plusieurs principes, il faut se référer au contenu même du texte législatif», donc travailler avec le texte qui est déposé.

Je poursuis également la citation : «...chaque série de mesures forme en soi un tout cohérent qui peuvent exister distinctement. De plus, bien qu'elles n'aient pas de valeur juridique en soi, les notes explicatives sont en l'espèce révélatrices de l'existence des deux principes.»

Or, dans le projet de loi qui est devant nous, les notes explicatives indiquent que le projet de loi apporte des modifications aux modes de nomination et de destitution des trois organismes distincts. Alors, je lis un extrait desdites notes : «Ce projet de loi apporte des modifications aux modes de nomination et de destitution du Commissaire à la lutte contre la corruption, du directeur général de la Sûreté du Québec et du Directeur des poursuites criminelles et pénales.»

Alors, dans une décision rendue par le président M. Pinard le 7 juin 2000, vous me permettrez de la citer également : «Lorsque la présidence a à décider de la recevabilité d'une motion de scission, elle s'en tient au texte du projet de loi. Elle n'a pas à rechercher tous les effets qui pourraient découler en pratique de l'application du projet [...] une fois celui-ci adopté.» Ça fait référence aux remarques que j'avais d'entrée de jeu avec vous

Dans le même ordre d'idées, je me permets de vous référer à une décision également du 11 décembre 2007 : «Il ne faut pas confondre le ou les principes qu'un projet de loi peut contenir avec le domaine sur lequel il porte. En venir à une conception différente de la notion de principe ferait en sorte que la plupart des projets de loi ne pourraient faire l'objet d'une motion de scission, en raison du fait qu'ils portent sur un domaine précis.»

Alors, M. le Président... Mme la Présidente, pardon, je répète, à sa lecture, vous conviendrez que ce projet de loi est rédigé en trois sections distinctes. Si vous le prenez et vous l'analysez, vous le verrez. La première section traite de la Loi concernant la lutte contre la corruption, la deuxième, sur la Loi sur la police et la troisième, pour la Loi sur le Directeur des poursuites criminelles et pénales. Alors, dans le projet de loi n° 1, je constate, Mme la Présidente, qu'il y a trois principes.

Alors, il est établi, à mon avis, qu'il y a plus d'un principe dans ce projet de loi, mais il faut aller au-delà de ça. Pour que vous puissiez reconnaître la recevabilité de cette motion, il faut aller au-delà des nombreux principes et ajouter des conditions. Et là-dessus je vous cite encore le président Pinard, ancien député de Saint-Maurice, qui disait, en décembre 1997 : «...le fait qu'un projet de loi comporte plus d'un principe ne signifie pas qu'il peut être scindé. Les conditions suivantes ont été aussi élaborées par la jurisprudence — et là je vous les donne : chaque partie du projet de loi scindé doit pouvoir être considérée distinctement; chaque partie du projet de loi scindé doit constituer plus qu'une modalité; les projets de loi qui résulteraient de la scission doivent constituer des projets de loi cohérents en eux-mêmes.»

Et je poursuis dans la décision : «Par ailleurs, la présidence n'a pas à porter d'opinion juridique sur le fond du projet de loi.» Ça ne sera pas non plus le cas dans mes remarques. «Elle n'a pas non plus à rechercher l'intention du législateur, mais plutôt se limiter à la lecture du texte sans l'interpréter.»

Une autre décision qui a été rendue par le président Pinard le 3 juin 1998 : «...un principe est un élément essentiel du projet de loi par rapport à une simple modalité qui, elle, est un accessoire à un principe.» Or, est-ce qu'on peut considérer le Commissaire à la lutte contre la corruption, le directeur général de la Sûreté du Québec et le Directeur des poursuites criminelles et pénales comme de simples modalités? Je ne pense pas, Mme la Présidente. C'est une question à laquelle on peut facilement répondre.

Le président Brouillet avait également établi, dans sa décision du 1er juin 1995, que chaque série de mesures doit former un tout cohérent et peut exister distinctement. Alors, les mesures qui sont contenues au projet de loi n° 1, je l'ai dit, Mme la Présidente, c'est trois organismes distincts : deux de notre système policier, un de notre système judiciaire. Et, si vous prenez ces deux projets de loi proposés dans notre motion de scission, bien, vous verrez et vous pourrez constater, comme je l'ai fait, qu'ils peuvent exister distinctement, sont cohérents en eux-mêmes. Ce sont des projets de loi qui sont autonomes et qui pourraient vivre indépendamment l'un de l'autre.

Alors, je pense, Mme la Présidente, avoir fait la démonstration que cette motion est recevable, puisqu'elle remplit les critères de recevabilité de la jurisprudence.

Il y a une autre décision que je voulais vous citer, qui date du 3 décembre 1992, et du président Lefebvre, à l'époque, qui indiquait : «...ce n'est pas parce que les principes propres à chacun des projets de loi qui résulteraient de la scission pourraient être regroupés sous un même thème, [...]qu'on peut les ramener au niveau de simples modalités.»

Je cite cette décision, Mme la Présidente, en prévention d'un argument qui pourrait venir de la part du gouvernement. Il pourrait prétendre que le projet de loi n° 1 ne vise qu'un thème qui est soit le processus de nomination et de destitution. Mais je pense avoir fait la démonstration, Mme la Présidente, que les trois organismes ne constituent pas des simples modalités, comme le demande notre jurisprudence.

• (12 h 20) •

Et le critère qui est le dernier mais qui est très important lorsque vous... et qui devra vous amener, je pense, à prendre une décision comme je le propose, c'est que chaque principe doit pouvoir faire l'objet d'une motion distincte et complète en soi. Il doit y avoir un exercice parlementaire pour chacun de ces projets de loi qui puissent vivre ici, dans cette Assemblée. Et la motion de scission qui est proposée, bien, elle est rédigée de façon à ce que tous les articles du projet de loi initial soient intégralement redistribués dans les projets de loi proposés sans devoir les modifier, donc je pense répondre à ce critère.

Je veux apporter une précision, Mme la Présidente, parce qu'il y a deux articles, les articles 13 et 16, qui se retrouveraient dans les deux projets de loi. Certains pourraient penser qu'en redistribuant les articles et/ou en répétant deux articles on se retrouve à aller à l'encontre des critères que j'ai évoqués précédemment, notamment l'article 13, il concerne les modalités liées au processus entourant la sélection des candidats. Et, à cet égard, je vous réfère à une décision du 29 novembre 2000 du président Brouillet, à l'époque : «Le fait que quelques articles se retrouvent dans les deux projets de loi proposés n'a pas pour effet de rendre la motion irrecevable. Ces articles peuvent être dans les deux projets de loi, puisqu'ils concernent des modalités [qui sont] compatibles avec les deux principes qui se retrouvent dans chacune des parties scindées.»

En ce qui a trait à l'article 16, Mme la Présidente, je ne m'étendrai pas très longtemps parce que c'est l'article qui est relatif à l'entrée en vigueur. Alors, je vous rappelle qu'il y a plusieurs décisions qui ont dit et qui ont reconnu une motion recevable lorsque cet article se retrouvait redistribué dans plus d'un projet de loi lorsqu'il y avait scission. Il y a des décisions importantes, notamment de notre ancien collègue le député François Gendron, président.

Alors, je conclus, Mme la Présidente, en faisant les remarques suivantes : les projets de loi issus de la scission, ils sont complets, ils sont cohérents, ils peuvent vivre indépendamment les uns des autres. Le président Ouimet, le 3 novembre 2015, reprend ces éléments dans la jurisprudence, puis je vais le citer : «La jurisprudence parlementaire a plusieurs fois reconnu que, pour qu'une motion de scission soit déclarée recevable, un projet de loi doit comporter plus d'un principe et chaque projet de loi résultant de la scission doit être cohérent, complet et pouvoir vivre indépendamment l'un de l'autre. Il a également été établi qu'il faut distinguer un principe, qui est un élément essentiel du projet de loi, d'une modalité qui est plutôt accessoire à ce principe. De plus, la jurisprudence parlementaire a établi que dans la détermination de ce qu'est un principe, la présidence ne doit ni rechercher ni tenir compte de l'intention de l'auteur du projet de loi, l'analyse devant uniquement se baser sur les dispositions qu'il contient.»

Alors, je vous rappelle, Mme la Présidente, et c'est le député François Gendron, qui a été notre doyen ici, à l'Assemblée, qui l'a dit dans une décision importante le 15 avril 2015 : «Le but d'une motion de scission est de favoriser la libre expression des députés afin qu'ils puissent s'exprimer et voter sur chacun des projets de loi qui en résulteraient plutôt que de le faire sur un tout alors qu'ils pourraient être en accord avec l'une des parties mais en désaccord avec l'autre. Le rôle de la présidence à cette étape-ci est de vérifier si les conditions prévues au règlement sont remplies pour permettre un débat à ce sujet. Ensuite, à l'issue de ce débat, il appartiendra à l'Assemblée [nationale] de se prononcer sur l'opportunité ou non de scinder le projet de loi tel [qu'il est] proposé.»

Alors, Mme la Présidente, à la lumière des nombreuses décisions que je vous ai proposées, de la démonstration que tous les critères nécessaires pour que vous puissiez juger recevable cette motion, je pense avoir fait le démonstration, Mme la Présidente, que vous pouvez en accepter la présentation, que vous pouvez la reconnaître et la recevoir et que nous pourrions tenir un débat sur cette motion pour proposer à l'Assemblée nationale de scinder ce projet de loi, le projet de loi n° 1, en deux projets de loi, tel qu'inscrit à la motion. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci. Merci, M. le leader.

Maintenant, je reconnais la parole au leader du gouvernement.

M. Sébastien Schneeberger

M. Schneeberger : Oui, alors, Mme la Présidente, je vais être très bref. Je vous demande de rejeter cette motion parce que, de ce côté-ci, on pense que cette motion de scission est irrecevable, étant donné que le projet de loi a un seul et même principe, c'est-à-dire elle vise l'intégrité, la neutralité et la transparence de trois institutions qui sont différentes, certes, mais qui, dans le projet de loi, sont soumises aux mêmes réglementations. Alors, je vous demande de refuser cette motion et de poursuivre le débat. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le leader. Je vais suspendre les travaux afin d'analyser la recevabilité de la motion.

Compte tenu de l'heure, les travaux sont suspendus jusqu'à 15 heures afin de tenir le débat prévu aujourd'hui aux affaires inscrites par les députés d'opposition. Alors, je vais suspendre les travaux.

(Suspension de la séance à 12 h 25)

(Reprise à 15 heures)

Le Vice-Président (M. Picard) : Bon après-midi. Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.

Affaires inscrites par les députés de l'opposition

Motion proposant que l'Assemblée demande au gouvernement
d'abolir le
cours d'éthique et culture religieuse

À l'article 17 du feuilleton, aux affaires inscrites par les députés de l'opposition, M. le chef du deuxième groupe d'opposition présente la motion suivante :

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement d'abolir le cours d'éthique et culture religieuse.»

Je vous informe que la répartition du temps de parole pour le débat restreint sur la motion inscrite par M. le chef du deuxième groupe d'opposition s'effectuera comme suit : 10 minutes sont réservées à l'auteur de la motion pour sa réplique, 49 min 15 s sont allouées au groupe parlementaire formant le gouvernement, 28 min 23 s sont allouées au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, 21 min 4 s sont allouées au deuxième groupe d'opposition, et 9 min 47 s sont allouées au troisième groupe d'opposition, 1 min 30 s sont allouées au député indépendant.

Dans le cadre de ce débat, le temps non utilisé par le député indépendant ou par l'un des groupes parlementaires sera redistribué entre les groupes parlementaires selon les proportions établies précédemment. Mis à part ces consignes, les interventions ne seront pas soumises à aucune limite de temps. Enfin, je rappelle au député indépendant que, s'il souhaite intervenir au cours du débat, il a 10 minutes à partir de maintenant pour en aviser la présidence.

Je cède maintenant la parole à M. le chef du deuxième groupe d'opposition.

M. Pascal Bérubé

M. Bérubé : Merci, M. le Président. La laïcité, la nécessaire distinction entre le religieux et l'État. Au Québec, on croyait qu'une grande partie de cet enjeu était réglée avec la Révolution tranquille. Mais jusqu'à aujourd'hui persistent des pratiques qui démontrent le contraire. Depuis quelques années, la société québécoise s'est intéressée davantage à cet enjeu, notamment à travers la crise des accommodements raisonnables, et ça a mené à des consultations. Ça a mené à une pièce législative que le gouvernement de ma formation politique a proposée, pièce qui n'a pas pu être adoptée, nous étions un gouvernement minoritaire. Donc, nous sommes toujours en attente de gestes forts pour réaffirmer la laïcité de l'État dans toutes les sphères d'activité.

Le gouvernement précédent est arrivé avec un projet de loi qui est arrivé essentiellement au résultat qu'il faut offrir les services à visage découvert. Mais la question des personnes en autorité, issue de Bouchard-Taylor, n'est toujours pas réglée. Le gouvernement du Québec actuel a proposé, avant la campagne, pendant la campagne et après, c'est important de le préciser parce que parfois les propositions changent avant, pendant et après, qu'on allait encadrer : les personnes en autorité ne porteront pas de signes ostentatoires. Ça, c'est la proposition du gouvernement, qui pourra se valider à travers le projet de loi, qu'on ne connaît toujours pas.

Nous, on pense que, si c'est la session parlementaire de la laïcité, il faut aborder l'ensemble de ces questions. Et on propose que le cours d'éthique et culture religieuse puisse être abordé aussi. Ce cours, essentiellement, M. le Président, c'est un biais sexiste. C'est un cours de propagande multiculturaliste. C'est un cours qui repose sur des préjugés. Et ce n'est pas d'hier qu'on est contre, c'est au moins depuis 2009. On l'a affirmé de toutes sortes de façons possibles.

Je ne prendrai pas tout mon temps. Je veux seulement indiquer quelques principes qui sont importants pour nous, notamment que l'enseignement de la religion dans les écoles, ça n'a pas sa place, notamment qu'on a le droit d'être athée, qu'on a le droit d'être agnostique, qu'on a le droit à une liberté de conscience pour les enfants et pour les parents, qu'on a le droit d'avoir une représentation de l'Église qui ne repose pas sur des préjugés, sur l'habillement, notamment. On a le droit de réclamer que l'État mise davantage sur l'éducation à la citoyenneté. On a le droit de demander que, si on veut régler les questions de laïcité, le moment est venu d'aborder toutes ces questions de façon franche parce qu'il y a bien plus d'enfants qui vont être touchés et qui le sont toujours par le cours d'éthique et culture religieuse que de personnes qui seront touchées par la loi telle qu'elle s'appliquera. En tout cas, à tout le moins, tel qu'on le soupçonne lorsqu'on la connaîtra.

Les parents ont été nombreux à indiquer des problèmes évidents avec le cours, avec les manuels. Même les concepteurs initiaux du programme ont indiqué qu'il y avait des failles majeures. Et ça a été noté rapidement par notre formation politique et ça a été noté rapidement par la formation politique qui forme le gouvernement. Dès 2012, dès le premier congrès de la Coalition avenir Québec, le député de La Peltrie s'était réjoui que la CAQ, nouvellement créée, était contre le programme d'éthique et culture religieuse, que, dès le primaire, on allait l'abolir. Mais ça, M. le Président, ça a tenu jusqu'en décembre dernier, où le ministre de l'Éducation a annoncé, dans une entrevue à l'émission Les francs-tireurs, que lui, il avait enseigné puis il avait trouvé que c'était bien correct. Et manifestement c'est ça, la position maintenant. Je vous le dis, M. le Président, j'ai parlé avec plusieurs membres de son caucus. C'est vrai qu'ils sont mal à l'aise, parce qu'ils sont venus me voir, dans bien des cas, aujourd'hui, ils m'ont indiqué : Je ne comprends pas pourquoi on va devoir voter pour ça tout à l'heure. Alors, s'il y avait un vote libre, je pense qu'on aurait des surprises, M. le Président.

Mais je vais poursuivre sur l'enjeu de la cohérence. L'enjeu de la cohérence, c'est de faire en sorte que... «Personnes en autorité», nous, on est d'accord. Ça s'impose, puis il y aura des débats. Le Parti libéral, jusqu'à maintenant, c'est : ça ne s'applique à personne. Québec solidaire a sa position, elle est toujours en réflexion. Puis le gouvernement va arriver avec son projet de loi. La nôtre est claire. On ajoute les enseignants, on rajoute les services de garde et on ajoute aussi l'abolition du cours d'éthique et culture religieuse, parce qu'il faut être cohérents, il faut aborder l'ensemble de ces questions-là.

La cohérence, c'est également d'appliquer les lois pour tout le monde. Quand j'entends le gouvernement dire, avant même le dépôt du projet de loi sur la laïcité, que ça ne s'appliquera pas aux écoles privées, mais pourquoi? Réponse du gouvernement : parce que les gens qui choisissent d'aller dans les écoles privées, c'est pour les valeurs religieuses. Faites-moi rire. Il y a toutes sortes de raisons : pour l'encadrement, pour le prestige social que ça offre, pour la proximité, pour des programmes spéciaux. Les gens ne vont pas dans les écoles privées pour les valeurs religieuses en 2019. Moi, je ne crois pas à ça, M. le Président. Bien, par clientélisme, là, ils s'en vont vers ça, pour préserver l'appui des parents puis des jeunes, qui deviendront adultes, qui vont dans ces écoles-là. Ça, c'est le choix de la Coalition avenir Québec.

Nous, on fait le choix de la cohérence. On a offert notre collaboration au gouvernement pour adopter la meilleure pièce législative possible. On va y contribuer, on va y participer, on a des propositions à faire. On ne sera pas nécessairement d'accord, mais on aimerait ça pouvoir l'adopter puis en être fiers, d'être allés le plus loin qu'on peut pour régler une bonne partie des enjeux actuels et des enjeux à venir, parce qu'une loi, c'est pour prévoir également. Ça, c'est pour la loi sur la laïcité, et on aura l'occasion d'y revenir à travers le débat.

Mais, sur Éthique et culture religieuse, c'est depuis 2008 que ça dure. Il y avait eu le rapport Proulx en 1999. Je m'en souviens, j'étais au cabinet du ministre de l'Éducation, maintenant premier ministre. On ne l'a pas appliqué. En 2008, le gouvernement libéral a décidé de l'appliquer. Évidemment, je ne m'attendais pas à ce qu'il l'abolisse. Ils l'ont créé, c'est leur créature. J'avais des attentes très modérées, puis, même sur la modification, le député de Jean-Talon parlait d'une révision, mais il n'y croyait pas vraiment.

Quand le gouvernement de la CAQ est arrivé, je me suis dit : Aïe! Le gouvernement qui se veut, là, de la laïcité, qui va régler ça rapidement. C'est une des premières choses qu'il a dites. Alors, j'ai dit : Ils vont finir par parler du cours, parce qu'il s'est passé beaucoup de choses. Il y a eu des contestations d'enseignants, les créateurs initiaux ont dit qu'il y avait plein de lacunes. Puis surtout c'était dans leur programme, y compris pendant la dernière campagne électorale, l'abolition au primaire. Bien, j'ai réalisé que tout ce qu'ils nous ont présenté avant, moi, j'y croyais. C'est comme les trop-perçus d'Hydro-Québec. Je pensais qu'ils étaient sincères quand ils parlaient de ça. Puis ils l'ont dit en campagne. J'ai dit : La main sur le coeur, ça doit être sérieux. Ça ne tient plus.

Alors, aujourd'hui, je fais un appel à la cohérence. La loi sur la laïcité, là, le gouvernement peut compter sur notre collaboration, c'est acquis. Je l'ai dit en privé au premier ministre, je l'ai dit en public au premier ministre. On va le faire, le débat, puis c'est moi qui serai le représentant de ma formation politique.

Mais abordons un enjeu qui touche les enfants du primaire et du secondaire pendant des années. Particulièrement tout le volet culture religieuse, c'est épouvantable. Et, si vous ne prenez pas mes mots, M. le Président, pour toute personne qui se prétend féministe en cette Chambre, que ce soit un homme ou une femme, prenez l'avis du Conseil du statut de la femme en 2016, qui dit : «Le cours ne "remet pas en question les pratiques sexistes au sein des religions" et se contente de décrire les récits religieux sans offrir de mise en contexte critique...» Pas mal, hein? «Aucun élément de contenu ne permet aux élèves de comprendre que les religions sont des institutions sociales certes significatives pour un grand nombre de personnes, mais qui ont été et demeurent responsables d'un grand nombre de violences envers les femmes, ainsi que du maintien de pratiques et de représentations inégalitaires.»

Enfin, «si le corps enseignant peut tenir compte de ces différences, dues à la socialisation différentiée des garçons et des filles, il ne devrait pas les consolider[...]. Au contraire, l'école devrait contribuer à contrecarrer les effets de la socialisation de genre en évitant de réserver certaines approches pédagogiques ou certaines activités aux filles et aux garçons.»

• (15 h 10) •

Je suis assez convaincu que c'est ce que la députée de Rouyn-Noranda voulait dire hier pour ajouter à mon argumentaire. Parce que quiconque se prétend féministe, et qui a lu l'avis du Conseil du statut de la femme, et qui ignore ce qui est là-dedans, je pense, se prive d'une connaissance importante de ce qui se passe dans les classes du Québec présentement pour ce qui est de l'égalité entre les femmes et les hommes.

Il y a plus que ça encore. Ce programme rend suspecte la critique de toute religion. Il y a des dogmes religieux qui sont érigés. Ça rend même le nationalisme suspect. M. le Président, je vous le dis sans ambages, ce cours a été conçu par des idéologues qui voulaient instaurer au Québec un prolongement de la politique multiculturaliste du gouvernement du Canada. Et ça a réussi pendant 11 ans. Et, en ce qui me concerne, je pense que ce temps est révolu. Je pense qu'il est temps d'abolir ce cours et je suis convaincu que le ministre a entendu tous ces appels-là, y compris dans son propre programme politique.

Alors, je ne sais pas si c'est lui qui a convaincu l'ensemble de ses collègues. Je lui indique que, même s'ils vont tous se lever tout à l'heure, plusieurs d'entre eux — ils se reconnaîtront, il y en a au moins deux qui sont devant moi présentement — vont lui dire que ça n'a aucun sens. Maintenez votre position. Le gouvernement se dit à l'écoute, mais au nombre... Présentement, là, au rythme où ça va, il y a plus de reculs de ce gouvernement que de dossiers d'immigration qui sont traités. Je vous le dis, là, c'est fascinant. J'étais convaincu qu'on pourrait s'entendre rapidement là-dessus, c'était dans leur programme. Peut-être que la position va changer tout à l'heure. Je le souhaite.

L'abolition de ce cours pourrait se faire en faisant notamment, bien, un constat de ce que je viens d'indiquer en matière d'égalité entre les femmes et les hommes, la discrimination, la liberté de conscience des enfants et des parents, le fait que les gens doivent se révéler : Quelle est ta religion? C'est une des questions qu'on pose. Mais vous savez qu'il y a des gens qui sont athées, puis des gens qui sont agnostiques, puis il y a des gens qui ne veulent pas révéler leurs religions, puis il y a des gens qui sont... C'est une question qui est sensible, chez eux, puis c'est une question qui est sensible pour eux, aussi, leurs propres croyances religieuses. Est-ce le rôle de l'école de perpétuer ce genre d'enseignement?

Dans la revue de presse ce matin, on peut lire toutes sortes d'analyses très intéressantes. On peut lire également Nadia El-Mabrouk, dont on a beaucoup entendu parler dans l'actualité au cours des dernières semaines, elle-même d'origine maghrébine, indiquer comment ce cours contribue à stigmatiser des communautés, à ostraciser des gens, à faire en sorte que l'école québécoise est devenue la prolongation d'une idéologie qui nie la spécificité québécoise, qui fait en sorte qu'on n'est pas une société, on est un regroupement de communautés, souvent religieuses, et c'est ce qu'il faut encourager. Mais, moi, ce n'est pas le Québec que je veux, M. le Président. L'espace religieux, c'est chez soi ou dans les lieux de culte. La connaissance de l'Église, la connaissance des grands courants religieux, la connaissance des grands mouvements, elle peut se faire notamment dans les cours d'histoire. Mais, de la manière que c'est enseigné jusqu'à maintenant...

Je vous le dis, je n'avais pas d'espoir que le gouvernement précédent modifie ça, mais je fondais des espoirs dans le gouvernement du Québec, qui va nous expliquer tout à l'heure pourquoi, jusqu'au 1er octobre 2018, c'était sa position et pourquoi ça a changé maintenant. Ça repose sur quoi? Moi, je ne suis pas convaincu que le député de La Peltrie a changé d'idée. Je les ai retrouvées, ses déclarations où il trouvait que c'était une bonne affaire. Je ne comprends pas. Pourquoi maintenant c'est une bonne idée? Comment il va expliquer ça aux gens qui ont...

J'ai vu tantôt des gens qui m'ont écrit, qui ont voté pour cette formation politique, ils disent : C'est une des raisons pour lesquelles on a voté pour eux, parce qu'ils voulaient abolir ce cours-là. J'avais envie de leur dire : On proposait la même chose, puis vous ne l'avez pas fait, là. Mais je respecte ça. Mais ils l'ont cru. Je ne les blâme pas. Un engagement dans une campagne, ça a quand même du sens. Puis ce qu'on dit en cette Chambre, ça doit avoir du sens, qu'on soit dans l'opposition ou en campagne électorale. On a eu un exemple tout à l'heure sur les trop-perçus, mais on aura l'occasion d'en reparler. Mais, sur cet enjeu-là, si on est sérieux dans ce qu'on entreprend, si on veut vraiment la laïcité de la société québécoise, on est capables d'aborder l'ensemble de ces questions. Des personnes en autorité, il n'y en a pas tant que ça. Et on s'entend qu'on va légiférer surtout pour l'avenir puis on va prévoir. Dans le cas des enseignants, ça s'applique maintenant. Dans le cas des éducatrices, éducateurs en garderie, en CPE, maintenant. Là, on va toucher davantage de gens. Mais, dans le cas du cours d'ECR, c'est toutes les écoles qui sont assujetties à ce cours-là. Il y a des gens qui ont voulu contester. On ne peut pas s'en sortir. Avant, on avait enseignement religieux puis enseignement moral. Les gens qui ne voulaient pas enseignement religieux, ils allaient en enseignement moral. On a changé ça. Et ce cours, il est plein de failles.

Le ministre le dit lui-même, il n'est pas prêt à l'abolir. Et là il a indiqué hier qu'on est prêt à le modifier. N'eût été de mon intervention d'hier... Je ne l'ai jamais entendu dire ça. Il n'en a jamais parlé avant. Il était tellement à l'aise aux Francs-tireurs, et ça allait bien, et puis il parlait de sa fierté, là, d'être ministre de l'Éducation, puis, non, il va rester là, le cours. Parfait. J'ai pris acte de ça puis j'ai dit : Entre ce moment-là et aujourd'hui, il va finir par en parler, sincèrement. Puis je crois à sa bonne foi. Ça fait longtemps qu'on se connaît, lui puis moi. On est passés par le mouvement étudiant tous les deux. Mais je ne m'attendais pas à ça, vraiment, là. Alors, qu'est-ce qui a changé? Pourquoi c'est une bonne chose? Pourquoi il ne faut plus l'abolir? Nous, on veut l'abolir. Notre position est claire. Je sais que le Parti libéral ne veut pas l'abolir. Ça rejoint leur idéologie multiculturaliste. Ce n'est pas à l'index, c'est un mot qui existe.

Dans le cas du gouvernement, je veux bien croire que c'est une coalition, mais vous n'êtes pas obligés d'aller à l'autre bout, qui est celui multiculturaliste, des gens qui sont entrés dans la coalition, là. On peut être plus en phase avec la société québécoise. Et je suis pas mal convaincu qu'il y a pas mal de monde qui trouve que ce cours-là ne rejoint pas les objectifs qu'il devrait rejoindre. Il rejoint les objectifs des idéateurs idéologues libéraux qui l'ont monté, ça, oui. Ça, c'est une réussite totale. Puis, pendant 11 ans, les enfants ont eu ce cours-là puis ils l'ont eu à chacune des années. Mais, de la part de la CAQ, ah! bien là, ça, c'est un étonnement total. Je ne m'attendais pas à ça.

Alors, si on est sérieux avec la laïcité, on va aborder cette question-là aussi, et toutes les questions de laïcité. C'est un test de cohérence qu'il a aujourd'hui, le gouvernement. Je m'adresse à la caméra, M. le Président. S'ils se lèvent puis ils votent contre l'abolition, bien, ils seront allés à l'encontre de la promesse qu'ils ont faite. C'est ça qui est en train de se passer. Mais je suis un éternel optimiste. Je pense qu'ils devraient changer de position. En fait, ne pas changer, revenir à leur position. On a une chance unique, là, d'une majorité québécoise, de poser un geste qui démontre le sérieux du gouvernement.

J'ai regardé les positions de chacune des formations politiques tout à l'heure puis j'ai regardé la cohérence. Je pense qu'on va être jugés là-dessus. Ce n'est pas d'hier qu'on parle de laïcité, bien avant la CAQ, et c'est eux qui sont au pouvoir. Et notre bonne foi, c'est de contribuer à régler cette question-là dans un cadre temporel, pendant cette session parlementaire. La collaboration est acquise. Je l'ai dit au leader, qui a le double rôle de ministre et de responsable des travaux. Mais je lui dis également : Votre gouvernement a une responsabilité à l'égard de ce qui est le plus engageant présentement en matière de laïcité, ce qui est le cours d'éthique et culture religieuse. Qu'est-ce qui est plus engageant : gardien de prison, procureur, policier, juge ou l'enseignement qui se fait dans les écoles du Québec chaque jour sur la base de manuels épouvantables? On a une représentation qui se fait qui est à faire frémir, M. le Président.

J'ai sorti des extraits tout à l'heure que j'ose à peine croire qu'ils sont véridiques, notamment la représentation qu'on se fait, par exemple, des musulmans ou des musulmanes, où, nécessairement, elles ont un voile. Bien, ce n'est pas toutes les musulmanes qui ont un voile. Ce n'est pas tous les religieux catholiques qui ont une grande croix ou qui sont des moines. Ce n'est pas l'ensemble des juifs qui portent la kippa, les hommes. C'est très stéréotypé.

Et, en plus, en plus, l'évocation qu'on fait de la place des femmes dans ces religions est épouvantable, va à l'encontre de tout ce qu'on défend à l'Assemblée nationale. Et, en plus, les différents enseignements nous indiquent qu'il ne faut pas contester ça. Au contraire, il faut défendre ça jusqu'au bout. On ne peut contester, par exemple, que, dans certaines religions, la femme n'est pas pleinement l'égale de l'homme. Pourtant, on fait des résolutions ici. On se déclare féministes. Le 8 mars, tout le monde va se lever, avec raison, pour parler des femmes. Mais là, quand ça compte, là, auprès des enfants, dans un cours, on ne fera rien? Et puis il y a des parlementaires qui vont se dire féministes une journée pendant l'année puis qui vont oublier aujourd'hui d'appliquer la même logique? Non, je ne croirais pas. Nous, on va être cohérents.

Alors, une loi sur la laïcité, vous pouvez compter sur nous, M. le Président. On va contribuer à adopter la meilleure loi possible. Il n'y a pas tant de choses que ça... En tout cas, je dis ça, mais en même temps je n'ai pas vu le projet de loi. Mais je soupçonne que ça se ressemble un peu. Puis on va contribuer à l'adopter cette session parlementaire. Le gouvernement peut compter sur nous. Il y a eu une parole là-dessus. J'ai été leader parlementaire, je sais ce que ça implique en termes de planification des travaux. Et j'ai encore parlé au ministre tout à l'heure, et leader parlementaire, puis je lui ai dit : Comment on peut aménager les travaux pour bien faire les choses, d'accord?

• (15 h 20) •

Mais éthique et culture religieuse, je ne devrais pas avoir à convaincre le gouvernement de ça. Comment se fait-il que ça se retrouve dans leur programme? Réforme, certes, le ministre va le dire, mais abolition au primaire, ça, c'est dans le programme. Ça fait que, là, ça a changé d'idée parce que le ministre, lui, il l'a enseigné puis il a aimé son expérience. D'ailleurs on l'entend : Moi, j'ai eu le cours, puis j'ai aimé mon expérience, puis moi, je l'ai enseigné, puis j'ai aimé mon expérience. Ça peut-u reposer sur autre chose que l'expérience personnelle? Est-ce que ça peut reposer notamment sur une réflexion plus collective? Le Conseil du statut de la femme, là, c'est une organisation qui est importante. On ne peut pas juste prendre ce qui fait notre affaire. C'est dévastateur, l'analyse sur le cours d'éthique et culture religieuse, dévastateur. Juste sur cet enjeu-là, ça mériterait que ce cours-là soit aboli. Mais ce n'est pas tout. La vision multiculturaliste qu'on nous a inculquée par les idéologues qui sont à l'origine de ce programme-là a fait mal à la préparation civique des élèves du Québec. J'en suis convaincu.

M. le Président, je veux assurer la population de la cohérence du Parti québécois. Nous sommes pour une loi sur la laïcité. Nous sommes pour l'abolition du cours d'éthique et culture religieuse au nom de la laïcité, au nom de la séparation de l'Église de l'État, au nom d'une volonté de mettre fin à des stéréotypes qui sont enseignés à nos enfants. M. le Président, je demande au gouvernement du Québec, de la CAQ, qui s'est présenté comme un gouvernement qui allait régler l'enjeu de la laïcité, à respecter son engagement électoral et à voter en faveur de la motion. Et, si ce n'est pas le cas, ils seront jugés là-dessus. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député. Maintenant, je cède la parole à M. le ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur.

M. Jean-François Roberge

M. Roberge : Merci bien, M. le Président. Il me fait plaisir de venir prendre la parole dans ce débat d'aujourd'hui. Mais je veux commencer par déposer une proposition d'amendement au député de Matane-Matapédia sur le cours d'éthique et culture religieuse. Donc, je propose de remplacer «d'abolir» par «de revoir en profondeur». Donc, la motion amendée se lirait ainsi :

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement de revoir en profondeur le cours d'éthique et culture religieuse.»

Je dépose l'amendement ici.

Le Vice-Président (M. Picard) : O.K., merci. Vous savez que, l'amendement, si le proposeur l'accepte, on pourra le voter tout à l'heure, mais on va le prendre ici, actuellement.

M. Roberge : Je vous remercie bien. Donc, c'est un amendement qui est extrêmement important, M. le Président, parce qu'il y a des points sur lesquels je suis d'accord avec mon collègue de Matane-Matapédia, le chef du deuxième groupe d'opposition. Certains des éléments qu'il a dénoncés dans le cours d'éthique et culture religieuse méritent d'être dénoncés, et donc le cours d'éthique et culture religieuse devrait être réformé en profondeur. Le premier ministre s'est engagé ici même, au salon bleu, hier, à ce que ce soit fait à l'intérieur du mandat. Donc, c'est assez clair.

Ceci étant dit, l'abolir de manière pure et simple serait, je pense, une erreur. La logique de toute ou pantoute ne fait pas place aux nuances, et on vit dans un monde de nuances. Encore faut-il savoir, au-delà des éditoriaux et des analyses que d'autres ont faits, encore faut-il savoir ce qu'il y a dans ce cours-là. Et donc on a un peu de temps, M. le Président, je vais vous présenter ce qu'il y a dans le cours d'éthique et culture religieuse actuel, pas pour le défendre dans son intégralité. Je viens de le dire, il y a des problèmes dans ce cours, il y a des problèmes dans les manuels, mais le cours en lui-même n'est pas au complet un problème.

Alors, la première des compétences, parce que le cours est rédigé en compétences, non plus en objectifs, c'est réfléchir sur des questions éthiques. C'est la première des compétences. Donc, ce que ça vise, c'est l'apprentissage et la réflexion éthique qui se fait à partir de situations simples et familières. Donc, ce n'est pas théorique. On essaie de partir de situations vécues par les enfants ou les adolescents dans le cadre du secondaire, des situations simples et familières. Les élèves sont invités à réfléchir sur des sujets qui les touchent, par exemple les besoins qu'ils ressentent eux-mêmes, eux, leurs amis, leur fratrie, leurs pères, leurs mères, les avantages et les désavantages de la vie de groupe, les exigences de la vie en société. D'un cycle à l'autre, ils réinvestissent leurs connaissances et développent leur compétence à réfléchir sur des questions éthiques. Des fois, on appelle ça aussi faire de la philosophie pour enfants ou pour adolescents.

Compétence deux, et je pense que c'est ici... manifestement, c'est ici que ça pose problème, autant pour ma formation politique, évidemment pour la deuxième opposition, donc : Manifester une compréhension du phénomène religieux. Une compréhension, il ne s'agit pas de transmettre la foi non plus, quand même. Donc, pour soutenir le développement de cette compétence, «les élèves doivent acquérir des connaissances relatives aux traditions religieuses présentes au Québec ainsi qu'aux représentations du monde et de l'être humain qui définissent le sens et la valeur de l'expérience humaine en dehors des croyances et des adhésions religieuses». Donc, tout ne passe pas par le prisme des religions.

Ça peut poser un problème ici, il faut faire attention. On est sortis d'un système confessionnel. Quand j'ai commencé à enseigner, et, sans doute, quand mes collègues qui siègent ici sont passés par l'école primaire et secondaire, peut-être ne s'en rendaient-ils pas compte, mais on avait des commissions scolaires confessionnelles, donc religieuses, hein? Il y avait le réseau des commissions scolaires catholiques. D'ailleurs, à Montréal, on l'appelait la CECM, la Commission des écoles catholiques de Montréal. On l'oublie, là, ce n'était pas CSDM, c'était la CECM. Et il y avait les écoles protestantes. La plupart des écoles catholiques étaient francophones, la plupart des écoles protestantes étaient anglophones. Mais ce n'était pas le cas tout le temps et partout. Et on est sortis de ce système confessionnel pour dire : Il faut arrêter de transmettre la foi, ce n'est pas le travail de l'école de transmettre la foi, d'accueillir des animateurs de pastorale dont la mission est d'apprendre aux jeunes comment prier un dieu plutôt qu'un autre. Et donc on s'est dit : Il faudrait plutôt comprendre les religions, savoir qu'est-ce que c'est, connaître les mythes fondateurs. Parce qu'on vit sur une planète où il y a des gens qui ont toutes sortes de fois différentes, et on les accueille ici, chez nous, puis il faudrait comprendre, donc manifester une compréhension du phénomène religieux pour davantage savoir, pour davantage comprendre. C'est la base de la compétence 2. J'ai de l'air de la défendre, mais je suis en train de dire qu'elle est utile, mais mal présentée dans le cours actuel et surtout, et là je rejoins mon collègue, mal représentée dans les manuels. Je le concède, dans les manuels, il y a bien souvent des stéréotypes, et on s'engage à revoir ça à l'intérieur du mandat.

Compétence 3, je m'en confesse, c'est ma préférée : Pratiquer le dialogue. Le dialogue, là, ça ne veut pas dire : Je jase avec quelqu'un. C'est au sens philosophique du terme. Ça veut dire que, pour réfléchir sur les questions religieuses, pour réfléchir sur les questions éthiques, il faut d'abord apprendre à nos jeunes à réfléchir, point, à s'extraire et à ne pas tout passer par son filtre à soi, à s'extraire d'une question, à analyser un concept. Ce n'est pas évident, mais c'est ô combien instructif, M. le Président. Donc, on leur demande de s'initier à la pratique du dialogue : «Pour ce faire, ils s'approprient des connaissances relatives aux formes de dialogue, aux conditions qui le favorisent ainsi qu'aux moyens à utiliser pour élaborer [un point de vue,] pour interroger un point de vue» soutenu par quelqu'un d'autre. Donc, on va plus loin que débattre ou s'obstiner. «Les élèves apprennent à utiliser ces connaissances de manière graduelle — évidemment, c'est une compétence qui est assez complexe. C'est pourquoi l'apprentissage se poursuit» tout le long du cours.

Et je veux vous présenter le coeur du programme ECR, qui est la pratique du dialogue à la fois sur les questions éthiques et à la fois sur les questions religieuses. Donc, pour bien pratiquer le dialogue, sans simplement s'obstiner, se chicaner, s'insulter ou même simplement débattre, bien, il faut reconnaître les entraves au dialogue. Et je vais passer avec vous, puisque j'en ai le temps, l'essentiel de la matière du cours ECR, ce qui devrait rester dans une réforme. Parce qu'on va le réformer, ce cours imparfait. Mais ce qui doit rester, c'est l'apprentissage des jeunes sur l'art de s'interroger sur des concepts et surtout l'art d'éviter les entraves au dialogue.

Première entrave au dialogue... Et ça fait partie d'un enseignement explicite qui se fait dans nos écoles. Ils apprennent à reconnaître ceux-ci de manière à ne pas les utiliser. La première, évidemment, entrave au dialogue, l'attaque personnelle, hein, «consiste à attaquer une personne de manière à détruire sa crédibilité plutôt que son argumentation». Je pense que c'est une bonne chose que nos jeunes apprennent à éviter l'attaque personnelle. Ça serait une erreur d'abolir ça. Je ne sais pas ce que vous en pensez. Moi, je pense que c'est une erreur de cesser d'enseigner que c'est une mauvaise idée, des attaques personnelles. Réformons le cours, ne l'abolissons pas.

• (15 h 30) •

Deuxième entrave au dialogue, appel à la popularité. C'est quoi, ça? «Consiste à justifier l'idée que quelque chose est vrai ou acceptable par le simple fait qu'un grand nombre de personnes l'affirme [mais] sans en avoir vérifié l'exactitude.» L'appel à la popularité, qui est souvent utilisé par ma collègue de Saint-Laurent dans le dossier des maternelles quatre ans, on nous cite un paquet de personnes qui supposément sont d'accord avec son point de vue plutôt que le nôtre.

Troisième, l'appel au préjugé. Alors, évidemment, c'est une entrave importante au dialogue. Un des objectifs du cours d'ECR, c'est de combattre les préjugés. Le préjugé «consiste à faire appel à une opinion préconçue, favorable ou défavorable, et qui est souvent imposée par le milieu, l'époque ou l'éducation». Évidemment, les préjugés évoluent dans le temps. On n'a pas les mêmes préjugés qu'on avait en 1970, en 1950, mais ils ne sont pas meilleurs, ceux qu'on a aujourd'hui. Donc, il faut apprendre à les reconnaître pour ensuite dénoncer les préjugés pour les jeunes puis aussi éviter de les utiliser comme un argument valable.

L'argument d'autorité «consiste à faire appel incorrectement ou abusivement à l'autorité d'une personne pour appuyer un argument». Des fois, on dit : Faire du «name-dropping». Bien, c'est une entrave au dialogue. Quel est ton argument à toi? devrait être la question la plus pertinente.

Généralisation abusive : «Consiste à passer d'un jugement portant sur un ou quelques cas à une conclusion générale, sans s'assurer que l'échantillonnage est assez représentatif pour que la conclusion soit valide.» Mon fils a eu un cours d'ECR aujourd'hui, là, puis il m'a dit qu'ils ont vu telle, telle affaire. Il faudrait l'enlever partout. Si lui l'a vu en classe, tout le monde l'a vu. Si son prof a commis une faute, tous les profs la font. Voilà une généralisation abusive.

Une autre entrave au dialogue qu'on apprend à déceler dès le primaire, et que ça continue tout le secondaire, et qu'on veut éliminer... la fausse causalité «consiste en une argumentation qui s'appuie sur un lien douteux de cause à effet entre deux phénomènes». On a eu un exemple tout à l'heure quand mon collègue a dit : N'eût été de son intervention, jamais le ministre de l'Éducation n'aurait dit qu'il veut revoir le cours ECR. Alors, on a assisté, tantôt, à une fausse causalité. C'est faux. C'était prévu qu'à l'intérieur du mandat nous allions réformer le cours Éthique et culture religieuse. Mais donc il y aurait peut-être une autre entrave au dialogue, je ne le sais pas, la paternité exagérée. C'est de se donner, tout à coup, la paternité à l'idée de quelqu'un d'autre. Donc, on va rajouter un élément de plus. Semble-t-il que mon collègue a ça.

Le 7, la double faute «consiste à tenter de justifier un comportement en signalant que d'autres font la même [chose] ou pire encore». Exemple, tout le monde le fait.

Le 8, l'appel au clan — ça, c'est souvent utilisé — «consiste à faire accepter ou rejeter un argument parce qu'il est endossé par une personne ou un groupe de personnes jugés estimables ou non estimables». Encore une fois, on l'a entendu tout à l'heure.

Le 9, l'appel au stéréotype, parce que le stéréotype, c'est un objet d'étude, dans le cours ECR, important pour le reconnaître, le dénoncer, éviter d'y avoir recours, parce que, dans le stéréotype, il y a parfois le racisme, il y a le sexisme, et, quand on a du racisme et du sexisme, il peut y avoir de l'intimidation, de la médisance. Ça revient très souvent. Donc, l'appel au stéréotype «consiste à faire appel à une image figée d'un groupe de personnes en ne tenant pas compte des singularités. Cette image est généralement négative et basée sur des renseignements faux ou incomplets». Et, là-dessus, le cours ECR est bien imparfait, et surtout les manuels, parce que, paradoxalement, il pourrait y avoir des appels aux stéréotypes dans les manuels d'ECR. Or, le cours vise à combattre les stéréotypes. Pour cette raison-là, il ne faut pas défendre le cours dans sa version actuelle, défendre les manuels dans leur version actuelle et dire qu'il n'y a rien de plus beau que le statu quo. On n'ira pas là, M. le Président, parce que, malheureusement, et, là-dessus, je suis d'accord avec mon collègue, il y a des stéréotypes véhiculés dans les manuels. C'est pour ça qu'on veut revoir le cours. Cependant, on ne veut pas l'abolir, parce qu'il a du bon, comme je l'ai démontré depuis tout à l'heure.

Et je continue avec ma liste d'entraves au dialogue qui sont enseignées aux jeunes du primaire et du secondaire et dont on serait bien fous de se priver. Cet enseignement est utile.

La caricature «consiste à déformer la position ou la pensée de quelqu'un, notamment en la radicalisant ou en la simplifiant [à outrance pour] la rendre non crédible». Exemple, quand des collègues, ici, disent : Là, là, avec votre maternelle quatre ans mur à mur... Ce n'est pas du mur-à-mur puisque nous voulons l'offrir et non pas l'imposer. Si c'était mur à mur, eh bien, ce serait dans toutes les écoles primaires et ce seraient tous les élèves qui devraient y passer. Or, ce n'est pas le cas. C'est une caricature que de faire ça. Et, manifestement, ceux qui utilisent ça n'ont pas bénéficié de ce cours d'éthique et culture religieuse.

Le faux dilemme «consiste à ne présenter que deux possibilités pour faire un choix. Comme l'une est indésirable, l'autre est inévitablement le choix à faire.» On l'a vu tout à l'heure, hein, si j'écoute mon collègue, il faut l'abolir, le cours, ou bien le laisser tel quel. Vous avez le choix, là, les Québécois, on abolit le cours ou bien on le laisse tel quel. C'est un faux dilemme, M. le Président. On peut le réformer en profondeur. On n'est pas obligés de l'accepter avec ses erreurs ou bien de l'abolir au complet. Bien non, c'est un faux dilemme. Ne tombons pas dans ce piège.

12, la fausse analogie «consiste à tenter de justifier une conclusion à l'aide d'une analogie établie entre deux phénomènes qui ne sont pas suffisamment semblables pour justifier ce procédé». Exemple, la lutte féministe et l'abolition du cours ECR, de dire que ces deux-là vont ensemble, vont de pair, c'est une fausse analogie, d'autant plus qu'à l'intérieur du cours ECR on veut combattre les préjugés, on veut combattre les stéréotypes et on veut reconnaître la valeur de l'autre. Il y a, dans ce que je viens de dire, évidemment, beaucoup de la lutte féministe et beaucoup de choses qu'on peut utiliser pour avoir une vraie égalité hommes-femmes. Donc, c'est une fausse analogie de dire qu'au nom de la lutte féministe il faut abolir le cours ECR. Moi, je dirais qu'au nom de la lutte féministe il faut réformer le cours ECR. Il faut le purger de ses erreurs tout en gardant ce qu'il y a de bon.

La pente fatale. Il en reste deux, M. le Président. La pente fatale «consiste à affirmer qu'une action entraînera une situation épouvantable en raison d'un enchaînement de causes et d'effets qui, après examen, se révèle douteux, voire impossible». La pente fatale, c'est lorsque le président du parti qui est aujourd'hui à l'opposition officielle a dit que, si la coalition formait le gouvernement, ce serait le chaos social. Je me souviens d'avoir dit ça en campagne électorale, et c'était vraiment ce qu'on appelle une pente fatale, c'est qu'avec l'élection, que le gouvernement de la CAQ, ça allait glisser vers quelque chose d'abominable, alors qu'on voit bien, au fond, les Québécois nous suivent, sont satisfaits. On est bien, bien loin du chaos social. La dernière fois qu'il y a eu un chaos social, c'est quand ça a brassé beaucoup, beaucoup, beaucoup et que les citoyens se sont élevés contre un gouvernement quelque part vers 2003. Souvenez-vous qui avait été élu.

Complot — le dernier — «consiste à conclure qu'une personne ou un groupe de personnes [...] profitent d'une situation, en sont l'origine ou [...] la cause». Je n'ai pas entendu ça aujourd'hui.

Donc, M. le Président, je ne prétends pas que ce cours-là est parfait. Il ne l'est pas, parfait, O.K.? Le programme n'est pas parfait. Le programme est bien pensé, mais le diable est dans les détails. On peut réformer le programme, définitivement. Est-ce qu'il fait trop de place au religieux, au phénomène religieux, à la culture religieuse? Fort probablement. Fort probablement qu'il y en a trop. Est-ce qu'il transmet la foi? Pas du tout. Mais probablement qu'il y a une trop grande place au religieux dans le cours Éthique et culture religieuse. Peut-être même est-il mal nommé, ce cours. Il laisse croire, d'ailleurs, que... Avec éthique et culture religieuse, c'est comme si l'éthique était religieuse, la culture religieuse. On a l'impression que c'est un cours de religion. Ce n'est pas le cas.

Donc, il faut le revoir, certainement, le réformer en profondeur. Ça va soulever des débats parce que, quand on touche au religieux, on touche à des valeurs qui sont fondamentales. Mais il ne faut pas faire l'économie de ce débat-là. Je pense que, quand les gens ont voulu amener de la laïcité au Québec, ont voulu sortir du système confessionnel, donc religieux, ils ont sorti l'enseignement religieux catholique, ils ont sorti l'enseignement religieux protestant. Pour instaurer ce cours, ils étaient animés des bonnes intentions. Et c'était probablement une étape nécessaire d'y aller avec le cours d'éthique et culture religieuse qu'on connaît aujourd'hui. Maintenant, il faudra passer à une autre étape en allant encore plus loin, en revoyant ce cours-là pour le purger de ses erreurs, surtout en s'assurant que, dans les manuels, il n'y ait plus de manifestation stéréotypée, souvent des femmes, mais pas seulement des femmes. Mais on peut le faire ensemble, et surtout je nous invite, en le faisant, en évitant les entraves au dialogue. Merci.

• (15 h 40) •

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci. Merci, M. le ministre.

Des voix : ...

Le Vice-Président (M. Picard) : S'il vous plaît! Merci, M. le ministre. Tel que stipulé à l'article 98.1 du règlement, une motion présentée aux affaires inscrites par les députés de l'opposition ne peut être amendée, sauf avec la permission de son auteur. Vous avez reçu copie de l'amendement, M. le...

M. Bérubé : ...

Le Vice-Président (M. Picard) : Mais je sais que vous pouvez le dire seulement à la réplique, mais pour bonifier...

M. Bérubé : ...

Le Vice-Président (M. Picard) : O.K. Si vous pouvez nous donner la réponse sur l'amendement.

M. Bérubé : M. le Président, au nom de nos convictions et au nom de leur engagement électoral, nous refusons.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci. Je suis prêt à reconnaître Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Hélène David

Mme David : Oui. Merci, M. le Président. Je suis heureuse, oui, je suis heureuse de participer à ce débat-là parce que c'est un débat de fond. C'est une question extrêmement tranchée, je pense, que nous propose le chef par intérim du Parti québécois, c'est abolir, abolir, abolir. «Abolir», c'est un mot qui a beaucoup, beaucoup de poids. C'est vraiment... on fait une chose ou son contraire. Abolir le cours d'éthique et culture religieuse pour toutes sortes de raisons, si j'ai bien compris, politiques, d'engagement, engagement de ci, de ça, désengagement... Moi, je ne vais pas aller vers la politique, je vais aller sur comment on éduque nos enfants.

À quoi sert le mot «éthique» dans l'éducation des enfants? Je pense que j'y ai consacré pas mal de temps, dans ma vie, à l'éducation. C'étaient des grands enfants, vous allez dire, mais ils avaient quand même intérêt à avoir eu un peu d'éthique et, j'oserais dire, de culture religieuse. Et je vais être d'accord avec la Coalition avenir Québec. Nous sommes d'accord avec le fait de revoir le cours. D'ailleurs, votre prédécesseur, le député de Jean-Talon, a fait... vous avez fait de nombreuses interventions, et il avait mis en place un processus de révision. Donc, nous sommes pas mal sur la même longueur d'onde.

Mais, comme je ne suis pas tout à fait le même genre que le ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur, je ferai peut-être moins de politique avec ça ou d'exemples d'ici. Je vais essayer de prendre des exemples de la vie courante, M., Mme Tout-le-monde qui nous écoutent, et qui sont chez eux et puis qui disent : Bon, ils se chicanent encore! Oui, on se chicane encore, mais cette fois-ci, là, c'est un vrai débat, c'est un vrai débat avec des conséquences importantes parce que, si la Coalition avenir Québec, le ministre de l'Éducation, disait : O.K., on va l'abolir, je pense qu'il faudrait y penser à deux fois, puis à trois fois, puis à quatre fois.

Qu'est-ce qu'on veut de nos enfants? Pourquoi? D'ailleurs, ça fait des années et des années que cette question-là se pose, et il y a des choses qu'il faut dire sur le mot «culture religieuse». Le collègue, le ministre de l'Éducation a beaucoup parlé du côté éthique, et je suis d'accord avec tout ce qu'il a dit. On a vu un exemple désolant, encore, d'un joueur de hockey de 24 ans — on a vu le vidéo — qui se fait attaquer, littéralement, traiter de babouin. C'est épouvantable. Et là on pourrait dire : Où est son cours d'éthique et de culture religieuse? Parce que je pense qu'il y a un mélange de choses où vraiment le racisme a été déployé dans sa plus sordide expression.

Donc, dans ce cours, c'est éthique et culture religieuse, culture religieuse. Si tant est que le mot «culture» veuille dire quelque chose, nous voulons des enfants cultivés. Mais qu'est-ce que la culture? Il y a des écrits, des centaines de milliers de pages sur ce qu'est la culture. Alors, la culture, c'est l'essence des civilisations. Sans culture, on redevient des animaux. On dit que la différence entre l'homme et l'animal, c'est la culture, c'est le concept de penser, de réflexion. Et là on touche à l'éthique, le concept de sublimation. Si on est capables de faire ça, c'est comme ça qu'on peut espérer — et Dieu sait qu'à travers les âges on a souvent raté notre coup — avoir un monde pacifique, un monde sans guerre. Un monde qui n'a pas de guerre de quoi? De religion.

Il y a eu beaucoup de guerres de religion, à travers les âges, et c'étaient des guerres qui, sous le couvert de la religion, étaient des guerres de toutes sortes, de territoires, de pouvoirs, et c'est effectivement le côté le plus triste de la religion, c'est quand on accole le mot «pouvoir». Et ça, on aura l'occasion peut-être d'en discuter éventuellement dans un autre débat, éventuellement, sur la laïcité.

Mais, quand on parle de former nos jeunes à la culture religieuse, ça veut dire de former nos jeunes à une réalité qui existe depuis des milliers d'années. On ne peut pas complètement nier le fait que le seul fait d'être un être humain... Puis là je ne suis pas une grande philosophe qui a eu... même si j'ai un Ph. D., ce qui veut dire philosophiae doctor, ce n'est pas pour de la philosophie que je veux faire ça aujourd'hui. Mais c'est un fait, depuis des milliers d'années, la religion est un ciment des sociétés. Pourquoi? Pourquoi on cherche à donner un sens à notre vie? Pourquoi on naît, on est une poussière et que... de poussière, tu retourneras en poussière, dit une religion. D'autres religions le disent d'une autre façon, mais on se crée un sens à notre vie, et, si on n'a pas de sens à notre vie, ça donne des conséquences très graves, des conséquences... Quand la vie n'a plus de sens, c'est la dépression, c'est toutes sortes de choses, et on ne voit pas pourquoi on se lève le matin puis on veut vivre.

La religion a donné, pour le meilleur et pour le pire, des réponses à ça. Alors, les religions, je dis bien... je ne dis pas la religion catholique, la religion bouddhiste, la religion musulmane, la religion juive, mais les religions ont été très longtemps et sont encore des ciments de société. On l'a vécu au Québec, on va dire pour le meilleur et pour le pire, des fois. Il y a encore un crucifix au-dessus de vous, M. le Président. C'est une réflexion qu'il faut se faire, mais il est là, et on est aussi peut-être déchirés entre l'enlever ou ne pas l'enlever, mais on a un patrimoine aussi. Mais les religions servent à quoi? Quand un être humain se lève le matin puis qu'il dit : Mon Dieu, aidez-moi à passer la journée, ou l'autre va parler à un autre dieu, etc., on ne peut pas passer une vie sans savoir que, depuis 2 000 ans, 3 000 ans, il y a des religions qui ont guidé des peuples entiers.

Et qu'est-ce qu'on fait quand il arrive des choses épouvantables? Je pensais, parce que le collègue, le chef intérimaire du Parti québécois a donné des exemples de stéréotypes, mais qu'est-ce qu'on fait quand il y a une tuerie à Pittsburgh le 28 octobre 2018 et que le tueur tue 11 Juifs dans une synagogue et qu'il dit : Je vous tue parce que vous êtes des Juifs? On est allés à la synagogue à Montréal, on a fait une veillée de quoi? De prière. Tous les hommes, des politiciens, des gens qui étaient venus en support, portaient tous la kippa.

Alors, quand j'entends le collègue du Parti québécois dire : On enseigne des stéréotypes, tous les hommes portent la kippa, ce n'est pas vrai que c'est ça qui est enseigné. C'est que la façon de montrer ta religion juive quand tu vas à des événements religieux comme des... appelons ça des funérailles, bien, tu portes la kippa, c'est ton signe religieux. Ça ne veut pas dire qu'ils portent la kippa toute la journée, ça ne veut pas dire que... etc. Alors, il y a des signes religieux qui peuvent être une partie intégrante, à temps plein, temps partiel, temps très, très, très partiel, ou pas du tout, les signes religieux peuvent faire partie d'une religion.

• (15 h 50) •

Mais ne pas enseigner rien de ça à nos enfants, que, depuis 2 000 ans, il existe des religions qui ont essayé d'expliquer ce qu'on fait sur la Terre... C'est souvent ça qui fait en sorte que les gens se retrouvent, sont en communauté et disent : Bien, on partage la même vision. Et ça a été le cas du IVe siècle, du VIIIe siècle, du XIIe siècle, du XVIIe siècle. Les religions sont partout, et, qu'on le veuille ou pas, il y a encore, de nos jours, beaucoup de sociétés qui sont guidées beaucoup par les religions. On peut essayer de dire : Nous, on est contre ça, on n'enseignera même pas l'histoire des religions. Parce que culture religieuse, c'est enseigner l'histoire des religions. Comme a dit le collègue le ministre de l'Éducation, il a dit : Nous ne voulons pas transmettre une foi. Moi aussi, je suis passée par une école catholique, et c'était clair qu'ils voulaient nous transmettre une foi. Bien, ils se sont un peu fourvoyés, justement, parce que les Québécois ont beaucoup perdu la foi, et pourtant... peut-être même vous, M. le Président, vous avez eu des cours, et c'était par, souvent, des religieux. On ne va pas trop longtemps partir là-dedans, mais les religieux ont aussi apporté un système d'éducation, et particulièrement les femmes religieuses au Québec ont joué des rôles importants, importants dans la création des écoles et la scolarisation. Ça, c'est autre chose. Mais, oui, ils voulaient nous transmettre une foi en laquelle ils croyaient sincèrement ou peut-être, dans le fond de leur coeur, moins sincèrement, mais, en tout cas, ils nous transmettaient une foi.

Ce n'est plus ça qu'on veut faire au Québec. On a voulu faire, avec éthique et culture religieuse, deux choses essentielles à la vie en société. La première, c'est le savoir-vivre ensemble. Quand on parle d'un cours d'éthique, c'est l'éthique de vivre ensemble, et n'entendez pas ça seulement sous le sens des communautés culturelles, le eux et nous. Le vivre-ensemble, comme le ministre a référé à un moment donné aux cours d'école, à l'intimidation, bien, si on n'est pas capables de vivre ensemble, ça peut donner justement de l'intimidation, du racisme, etc. Alors, le dialogue dont il a parlé, qui est un des critères du cours d'éthique... mais la façon de se comporter, je ne peux pas imaginer que le Parti québécois ne veuille plus qu'on enseigne ça à nos élèves.

Il va peut-être me dire, le chef : Bien là, j'exagère un peu puis je suis démagogique quand je dis une affaire comme ça, mais abolir le cours... Il y a quand même le mot «éthique» dans cette abolition. Mais, si on abolit le cours, bien, moi, je présume, c'est parce qu'il n'y aurait plus d'éthique et il n'y aurait plus de cours de culture religieuse. Mais donc abolir l'éthique, ça veut dire abolir ces moments précieux dans une école où tu te poses des questions avec tes copains et copines de classes et un enseignant, une enseignante, pour dire : Qu'est-ce que c'est que l'éthique?

Ça a l'air d'un grand mot comme ça, l'éthique, mais l'éthique, c'est avoir des principes de vie en communauté. Et Dieu sait que, sur la planète, on en a de plus en plus besoin, de principes de vie en communauté. Le vivre-ensemble, là, arrêtons de penser que c'est seulement : Bien là, il faut accueillir l'autre parce que c'est une communauté culturelle, puis on va se forcer, puis on va essayer d'aller manger telle chose, telle chose. C'est accueillir l'autre avec un a majuscule parce que l'autre a autant le droit de vivre que toi, puis il faut que tu comprennes que la planète... Et nous, au Québec, Dieu sait qu'on est privilégiés, on est dans un endroit... un des plus privilégiés au monde, bien, on peut peut-être se permettre d'accueillir les autres, et puis ça, ça se passe à tous les niveaux. Puis un jeune qui apprend ça, ça peut éviter des problèmes majeurs dans les relations humaines, puis je pense à la violence conjugale, je pense à la violence tout court, je pense à l'intimidation, je pense au harcèlement, je pense à plein de choses. Avoir une éthique dans la vie, là, bien, l'école en est pas mal responsable de pouvoir enseigner ces choses-là, et je suis contente que, dans notre système québécois, on enseigne ça.

La culture religieuse, je l'ai dit, il y a le mot «culture», et c'est comme si on disait à nos jeunes à l'université en sciences politiques : On n'enseignera plus la Russie communiste du XIXe siècle, début du XXe siècle, savez-vous pourquoi? Parce que c'est communiste, puis on ne veut pas que nos jeunes en sciences politiques deviennent tous une gang de communistes. Bien, je regrette, quand tu es dans un processus éducatif, il faut que tu sois ouvert, justement, à l'histoire des civilisations, à l'histoire des mouvements politiques et à l'histoire des religions, parce que l'histoire des religions a façonné pendant des siècles l'histoire des peuples. Alors, la culture religieuse, c'est comme ça que je l'entends et c'est comme ça que ça a été voulu, c'est la culture des religions. Ce n'est pas que ton enfant sorte avec une kippa sur la tête ou un hidjab, ce n'est pas vrai... ou une croix catholique. C'est pour que ton enfant sache qu'il n'est pas tout seul sur la planète, qu'il y a des pays, il y a plein, plein, plein de pays dans le monde. On donne des cours de géographie, on n'est pas rendus à abolir les cours de géographie, mais la géographie, c'est incarné par des peuples, des peuples qui ont des religions, et, si on fait fi de ça, c'est encore plus se refermer au Québec face à la mondialisation. C'est de comprendre que la planète... puis on a un astronaute extraordinaire, David Saint-Jacques, qui a fait des déclarations non moins extraordinaires en disant : Plus on regarde ça de loin, plus on s'aperçoit qu'on a une petite planète, et cette planète-là, on n'en a pas, de plan B, là. On a une planète, et c'est tout, puis il faut qu'on réussisse à s'entendre ensemble.

Alors, de dire : On n'enseigne plus culture religieuse, donc on fait fi de l'existence du phénomène religieux, je trouve que c'est un recul digne du temps, excusez-moi de le dire comme ça, mais de Duplessis et de la «grande noirceur». Au lieu de s'ouvrir et de dire : Ça existe, les religions, partout dans le monde, on se ferme puis là on dit : Il n'y en a plus, de religion, non, non, non, puis on ne parlera même pas de catholicisme. Dieu sait que je ne suis plus nécessairement pratiquante, mais ce n'est pas vrai que je vais renier tout l'enseignement que j'ai vécu puis ce n'est pas vrai que je ne veux pas que mes enfants, mes petits-enfants, un jour, ne sachent pas qu'il y a eu, au Québec, tout ce parcours de religion puis qu'il y a eu ce parcours de moins de religion dans les années 60. Comme disait le ministre, il y avait la Commission des écoles catholiques, les écoles protestantes. Maintenant, on va tous dans les écoles de nos comtés, et, dans toutes les écoles de nos comtés, il y a vraiment beaucoup, beaucoup... et une belle diversité culturelle. Alors, dans la diversité culturelle, il y a la culture religieuse.

Alors, moi, je ne rentrerai pas dans leur débat : Tu as dit ci en campagne, tu as dit ça, tu as dit ça. Le problème est beaucoup plus sérieux que ça. L'enjeu... et je le remercie, le collègue, pour ça, de nous permettre de parler d'un enjeu fondamental, comment on veut traiter l'histoire, l'histoire avec un grand H, pas seulement du Québec, de la planète. Puis, moi, les histoires de : Si on est pour ça, on est pour le multiculturalisme, etc., qu'est-ce que c'est que cette façon d'intellectualiser, faussement d'après moi, le fait que c'est parce que c'est le débat nationaliste versus multiculturaliste ou séparatiste, fédéraliste? Ce n'est pas ça. C'est la question de l'être humain dans son essence même, la question du vivre-ensemble planétaire. Moi, je ne pense pas aux gens de Toronto quand je parle de ça, je ne pense pas aux gens de Paris, je pense à l'ensemble des êtres humains sur la planète.

Alors, il y a eu des guerres de religion. Il y a des mouvements... En Inde, on peut avoir la religion sikhe, par exemple, qui a toute son histoire, mais la religion sikhe, c'est formidable. Allez lire dans n'importe quoi sur l'histoire des religions, il y a une histoire derrière ça qui est importante. Puis on en a, des concitoyens sikhs. J'en ai. J'ai le plus gros temple sikh dans mon comté à moi. J'y étais encore la semaine dernière. Des gens d'une très grande humanité. Et ça devrait... Au contraire, les enfants, qui aiment tant apprendre... ça devrait être formidable de pouvoir enseigner c'est quoi, un sikh par rapport à la religion bouddhiste, par rapport à la religion catholique, par rapport... C'est quoi, le monothéisme, c'est quoi, le polythéisme? C'est de la culture autant que... Quand je vois le ministre de la Santé et Services sociaux, bien, il a fait un cours de médecine. Moi, j'ai fait un cours de psychologie. On a tous fait des cours x ou y. Bien, il aimait ça, apprendre la médecine — j'espère, mais je pense que oui — la neurologie, etc. La soif de savoir doit habiter nos enfants, sinon ça va donner une société, d'abord, très dépressive, une société qui n'a plus de... on appelle ça l'anomie sociale, qui n'a comme plus de sens. On veut, nos enfants sont pleins de motivation à apprendre si tant est qu'on est capables de les intéresser. Ça, c'est une autre chose, sur la pédagogie.

Maintenant, est-ce qu'on veut ou pas modifier le cours? Bien oui, M. le chef intérimaire du PQ, on veut modifier le cours. Mon collègue l'a dit.

Une voix : ...

Mme David : Non, non, mais c'est parce qu'entre l'abolition et puis le maintien dans le statu quo il y a peut-être...

Le Vice-Président (M. Picard) : Mme la députée, on s'adresse à la présidence et on évite les débats. M. le député de Matane, s'il vous plaît!

Mme David : Alors, il y a peut-être une voie entre les deux. Donc, effectivement, il y a des choses, il y a toujours des choses à améliorer. Puis, moi, un prof qui donnerait le même cours depuis 20 ans, je dirais : Bien, peut-être que, chaque année, tu devrais être sûr que le cours est encore pertinent. On sait que le réseau primaire, secondaire, c'est énorme, puis les cours sont plus normés, etc. Ça ne veut pas dire qu'il ne faut pas suivre l'évolution de la société puis suivre l'évolution des meilleures pratiques puis des contenus.

Alors, on est extrêmement d'accord de pouvoir justement modifier, réviser ce cours-là, tellement, M. le Président, que, sans se parler avec la Coalition avenir Québec, on va vous déposer à peu près le même amendement. Donc, peut-être qu'on en sait déjà le destin puisque le destin a été prononcé tout à l'heure par l'amendement de la CAQ. Alors, je vous dirais :

«Que la motion du chef du 2e groupe d'opposition soit amendée de la manière suivante :

«[Aux 1ere et 2e lignes, après le mot "gouvernement"], remplacer les mots "d'abolir [...]" par les mots "de poursuivre la révision du";

«À la deuxième ligne, après le mot "religieuse", ajouter les mots "amorcée par le précédent gouvernement."»

La motion telle qu'amendée se lirait ainsi : «Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement de poursuivre la révision du cours d'éthique et de culture religieuse amorcée par le précédent gouvernement.»

Donc, j'en fais le dépôt. Et je ne sais pas si j'ai le droit de continuer à parler ou pas, là, quand on fait ça. Oui? J'en fais le dépôt. Mais je vais laisser mon collègue aussi pouvoir intervenir. Alors, M. le Président, on est contre la motion, mais on est pour le progressisme. Et, si, dans ce cours-là, il y a des choses à modifier, qu'on les modifie, puis on sera très satisfaits avec ça. Merci beaucoup, M. le Président.

• (16 heures) •

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée. Sous réserve de la permission de l'auteur de la motion... Tout à l'heure, on va distribuer votre amendement, et, tantôt, je demanderai à M. le député de Matane-Matapédia s'il veut amender sa motion.

Je reconnais maintenant Mme la députée de Rouyn-Noranda—Témiscamingue.

Mme Émilise Lessard-Therrien

Mme Lessard-Therrien : Merci, M. le Président. Hier, le chef du Parti québécois m'a dérangée en réclamant l'abolition du cours d'éthique et culture religieuse du programme de formation de l'école québécoise. J'ai été choquée parce que, visiblement, le chef du Parti québécois ne sait pas trop de quoi il parle quand il s'attaque au cours d'éthique et culture religieuse. Rares sont les élus, dans cette Chambre, qui ont même reçu des cours d'ECR au cours de leur parcours scolaire depuis son implantation en 2008.

M. le Président, non seulement je fais partie de ces élus qui ont eu la chance de suivre ces cours, mais je suis probablement la seule élue dans cette Chambre qui a suivi une formation universitaire spécifiquement dans ce domaine. Permettez-moi donc d'abord de vous dire ce qu'est le cours d'ECR. Dans mon parcours, j'ai souvent eu à vulgariser mon sujet d'étude, que j'ai toujours décrit comme une prémisse des cours de philosophie au cégep. En campagne électorale, j'ai parlé de mon parcours scolaire en vantant les finalités de ce programme : la reconnaissance de l'autre et la poursuite du bien commun. J'aimerais le répéter encore une fois pour être certaine que le chef du Parti québécois, qui a insisté sur le fait que le cours d'ECR véhicule des valeurs qui ne sont pas les nôtres, comprenne bien : la reconnaissance de l'autre et la poursuite du bien commun.

Par ailleurs, les compétences visées avec ce cours sont : manifester la compréhension du phénomène religieux, réfléchir sur des questions éthiques et la pratique du dialogue. Vous comprendrez ici qu'on est loin de vouloir endoctriner nos jeunes à une quelconque religion. Au contraire, et je cite le programme : «En réunissant dans un même programme l'éthique et la culture religieuse, deux dimensions essentiellement distinctes mais renvoyant l'une et l'autre à des zones d'expression particulièrement sensibles de la diversité, on compte aider les élèves à mener une réflexion critique sur des questions éthiques et à comprendre le fait religieux en pratiquant, dans un esprit d'ouverture, un dialogue orienté vers la recherche du vivre-ensemble.» Esprit d'ouverture, recherche du vivre-ensemble, poursuite du bien commun. Si ça, ce ne sont pas des valeurs chères au Québec, M. le Président, je me demande vraiment à quoi peut bien aspirer le Parti québécois.

D'ailleurs, je pense que nous avons là un élément clé du programme, la réflexion critique. Ne trouvez-vous pas important, M. le Président, que nos jeunes développent sans plus attendre la réflexion critique pour qu'ils puissent faire des choix éclairés tout au long de leur vie? Le cours d'ECR est le cours où on amène les élèves à comprendre le raisonnement de leur propre raisonnement, le seul endroit où on amène l'élève dans un processus de métacognition, c'est-à-dire de penser sur leur propre pensée. Bien sûr, d'autres cours ont une portion de critique, mais jamais aussi approfondie qu'en ECR où on enseigne les fonctionnements du raisonnement et surtout le pouvoir de recul face aux organisations qui nous entourent.

Le phénomène religieux est abordé dans ce même esprit : d'un point de vue historique, certes, mais aussi en décomposant les différents éléments qui structurent les traditions religieuses. Il ne s'agit pas d'un cours de religion, mais de culture religieuse, un cours où on amène une vision multidimensionnelle du phénomène religieux. On va utiliser l'histoire, on va utiliser l'art, l'architecture, la littérature, et autres, pour analyser sous différents angles ce phénomène. Ce n'est pas pour rien que le libellé de ce cours est culture religieuse. On enseigne la culture religieuse comme on enseigne la culture artistique ou la culture musicale. Parler de la culture religieuse, ce n'est pas une contradiction avec la laïcité.

La laïcité, M. le Président, c'est la séparation entre l'Église et l'État. C'est l'impartialité et la neutralité de l'État à l'égard des confessions religieuses. Ça ne veut pas dire qu'on ne peut pas parler de culture et d'histoire religieuse dans nos écoles, voyons! Ça veut dire que l'enseignant ne juge pas la validité ou la véracité. Il interprète des faits qu'il présente à ses élèves : Voici ce que disent et font les croyants pour telle et telle raisons, et non : Je crois ou je ne crois pas, j'accepte ou je n'accepte pas ce que disent les croyants. Nous sommes donc loin, je le répète, de l'idée que se fait le chef du Parti québécois, qui en parle comme un cours qui stigmatise les enfants en fonction d'une pratique religieuse et propage des stéréotypes. S'il veut vraiment travailler pour la laïcisation de l'État, qu'il commence par demander de mettre fin au financement public des écoles confessionnelles.

Par ailleurs, le chef du Parti québécois semble oublier la troisième compétence de ce cours : la pratique du dialogue. C'est dans le cours d'ECR que les élèves sont initiés à la rhétorique et à l'art de savoir bien communiquer. C'est dans ce cours qu'on enseigne les entraves au dialogue et les rudiments d'un argumentaire solide, pertinent et efficace, comme nous a présentés M. le ministre. N'est-ce pas là un apprentissage précieux, de doter nos futurs décideurs d'outils de communication qui permettent des débats sains et constructifs? Pour ma part, M. le Président, ce sont des connaissances que j'utilise judicieusement à tous les jours depuis mon élection.

Est-ce que le programme d'ECR peut être amélioré? Absolument. Est-ce que nous devons nous assurer de la qualité de l'enseignement? Certainement, comme toutes les autres matières, d'ailleurs. Mais est-ce que nous devons jeter aux poubelles un cours qui permet aux jeunes d'exercer leur esprit critique et de comprendre les phénomènes qui les entourent? Vous serez d'accord avec moi que ce n'est pas la voie à prendre.

En terminant, M. le Président, j'en ai un peu marre du ton paternaliste que j'entends dans cette Chambre depuis quelque temps. D'un côté, on pense que le cours d'ECR joue dans la tête de nos enfants, de l'autre, on pense que d'avoir une enseignante portant un voile va influencer les croyances de nos enfants et on va même jusqu'à remettre en cause la capacité d'une nouvelle classe d'enfants âgés de 18 à 21 ans de faire les bons choix pour eux-mêmes. Dans tous ces cas, je suis persuadée que nos enfants ont plus de jugement que ça et j'ai bien envie de leur faire confiance.

La CAQ et le PQ ont peur de leur ombre. Eh bien, qu'ils sachent que les Québécois ne sont pas des marmottes.

Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le député de D'Arcy-McGee, il vous reste 9 min 10 s à votre formation.

M. David Birnbaum

M. Birnbaum : Merci, M. le Président. Je me permets de commencer avec une définition qui vient de Larousse sur le mot «laïcité» : «Conception et organisation de la société fondée sur la séparation de l'Église et de l'État et qui exclut les Églises de l'exercice de tout pouvoir politique ou administratif, et, en particulier, de l'organisation de l'enseignement.» Bon, ça vient de l'édition française.

Par contre, deux choses qui me frappent. Dans un premier temps, il n'y a rien là qui nous interpelle à inviter nos enfants de fermer les yeux aux réalités du monde. Et, deuxièmement, si je me fie à la définition, est-ce qu'on peut reconnaître un succès collectif jusqu'à date au Québec? Bon, on va avoir nos longs débats qui continuent sur le port des symboles religieux. Ça, ce n'est pas notre débat d'aujourd'hui. Est-ce qu'on peut regarder d'où on est venu dans notre système d'éducation?

Je peux commencer par des réflexions. L'enfant de sept ans en deuxième année, à l'école Crestview School du réseau public des écoles protestantes, chaque année, comme juif non croyant, me levant, avec la plupart de mes amis de la classe, quelque 35 dans le temps, les ratios étaient différents, juifs comme moi, presque chacun des 35 qui chantaient Jésus m'aime. J'aime la mélodie, mais, en quelque part, ça a accroché. On est venu de loin. L'école est déconfessionnalisée. La commission scolaire est déconfessionnalisée. Nous avons compris que le Québec se modernisait et nous avons fait du progrès. Alors, est-ce qu'on peut en constater?

Maintenant, de faire la part des choses d'une motion : «Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement d'abolir le cours d'éthique et culture religieuse.» Abolir. Je ne veux pas... J'ai la tentation de tomber dans l'hyperbolie. Est-ce qu'on dit ça en français? Hyperbole. Mais est-ce qu'on va... et je me permets de caricaturer le geste, mais est-ce qu'on va brûler les livres après? Abolition d'un cours. Et je vous invite de me dire si la description sur le site du ministère de l'Éducation vous invite à avoir peur d'un endoctrinement.

• (16 h 10) •

Bon, pour vivre ensemble, je le cite, dans le Québec d'aujourd'hui — très menaçant, ça, comme départ : «L'école québécoise a pour mission d'instruire, de socialiser et de qualifier. Pour ce faire, elle doit notamment ouvrir les horizons, développer les talents et donner à chaque individu les outils nécessaires pour évoluer dans le monde en tant qu'adulte accompli, libre et responsable. Or, la société québécoise change : les défis collectifs concernent autant les centres urbains que les régions éloignées; les mentalités évoluent au gré des influences multiples; les valeurs ou les convictions s'affirment; les questions se [multiples] sans cesse. L'école doit s'ajuster à cette transformation. C'est dans ce contexte que le programme Éthique et culture religieuse est offert à tous les élèves du primaire et du secondaire.»

Deuxième volet, je cite toujours : «Le programme Éthique et culture religieuse permettra à votre enfant :

«D'acquérir ou de consolider, le cas échéant, la notion selon laquelle toutes les personnes sont égales sur le plan des droits et de la dignité;

«D'apprendre à réfléchir de façon responsable;

«D'explorer, selon son âge, différentes manifestations du patrimoine religieux québécois [présent] dans son environnement immédiat ou éloigné — là, j'entends un gros complot des multiculturalistes, agents qui se cachent derrière les bancs d'école;

«De s'épanouir dans une société où se côtoient plusieurs valeurs et croyances.»

Et ça continue sur le volet éthique, et je cite une autre fois : «Votre enfant apprend à :

«Réfléchir avec rigueur sur [les] aspects de certaines réalités sociales et sur [les] sujets tels que la justice, le bonheur, les lois et les règlements;

«Ainsi — je cite encore — il lui est de plus en plus facile de rassembler ses idées et de les exprimer avec respect et conviction.»

Là, on a la motion du Parti québécois, et je réaffirme, d'abolir ce cours-là. Et je me demande si, bon, Mathieu Bock-Côté, ce matin, était inspiré par le Parti québécois ou vice versa, mais est-ce que la motion est inspirée par ce que ce chroniqueur propose?

«L'ECR — je cite — dans les faits, instrumentalise la culture religieuse pour faire la promotion active du multiculturalisme au nom de la "diversité". Il entend pousser les jeunes Québécois vers une forme de relativisme extrême, où ils devront accepter tous les symboles religieux [...] identitaires, et, au premier rang, le voile islamique, du simple hidjab jusqu'au niqab.» Et il conclut : «Pourquoi les jeunes Québécois apprendraient-ils à l'école à détester leur peuple?» Wo! Wo! Wo!

Bon, en tout cas, moi, avec tout respect au député... chef intérimaire de la deuxième opposition et avec tout respect au ministre de l'Éducation, qui a l'air pas mal réceptif au propos, pas aller jusqu'à l'abolition, le programme a à être révisé, on en convient. Y a-t-il des choses à faire pour mieux refléter l'équilibre social ici, au Québec? Est-ce qu'on doit accompagner nos enseignantes et enseignants, tellement professionnels, pour qu'ils soient à la taille de présenter ce cours comme il faut? Oui, mais de là à abolir... Et qu'on remette les pendules à l'heure. Nous sommes en train, fondamentalement, de parler de notre confiance comme collectif ensemble. Est-ce qu'on a la confiance, tout dans nos réalités fières et très particulières ici, au Québec, notre langue commune, le français, nos valeurs collectives, l'égalité hommes-femmes, est-ce qu'on a la confiance d'éviter comme exemple à nos enfants de s'ouvrir sur le monde avec un cours, oui, à réviser, mais un cours qui les invite à réfléchir sur les réalités du monde ou est-ce qu'on veut abolir ça? Est-ce qu'on a besoin de se fermer sur soi pour exprimer notre confiance dans nos belles réalités du Québec?

Écoutez, dans ma vie... Bon, dans le mandat précédent, j'ai eu l'honneur de représenter notre ministre de l'Éducation à deux reprises lors des congrès du CONFEMER, qui est l'instance de l'Organisation internationale de la Francophonie pour l'éducation. Et, comme État francophone, nous sommes fièrement présents. Et, dans mes fonctions antérieures, j'ai eu à représenter des commissions scolaires aux congrès partout au Canada, au Québec et aux États-Unis, et j'ai été très fier, très fier de me faire dire souvent comment le monde était impressionné par notre Québec, notre système d'éducation, qui misait sur ces nouveaux régimes pédagogiques, qui ont eu leurs difficultés, mais qui misait sur la compétence, ainsi que la connaissance. Et c'est tout à fait pertinent à la discussion actuelle, c'est de miser sur l'esprit critique, sur la curiosité innée de nos enfants, sur l'innocence et la confiance de nos enfants, et de miser sur les voeux de leurs parents que leurs enfants soient formés pour le Québec de demain. Rien de ce cours, dans ses objectifs, dans ses détails... oui, mon collègue le député de Jean-Talon a été au rendez-vous en tant que ministre pour la révision du programme. Mais, dans ses principes fondamentaux, on devrait avoir fiers et confiants comme société, confiants dans l'habileté de nos enseignantes et enseignants, confiants dans l'innocence, comme je dis, et l'intelligence innée de nos enfants de faire la part des choses. Oui, de comprendre le monde dans lequel on se situe, c'est à notre honneur. Alors, d'abolir ce cours irait à l'encontre de toutes ces valeurs dont on tient cher. Merci.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci. Avant de céder la parole à notre prochain intervenant, M. le député de Matane-Matapédia, est-ce que vous avez pris connaissance de l'amendement pour la suite de notre débat?

M. Bérubé : M. le Président, au nom de nos convictions, de notre engagement électoral et du respect des gens qui ont voté pour leur engagement électoral, nous refusons.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci. Nous continuons notre débat. M. le député de Beauce-Nord.

M. Luc Provençal

M. Provençal : Merci. Comme vous le savez, M. le Président, notre réseau scolaire se caractérise par la laïcité puisque nous sommes à la suite d'une époque où nos écoles étaient résolument de confession religieuse. Il faut le rappeler parce que l'histoire est une mémoire essentielle, tout comme la maîtrise de l'éthique et la connaissance des religions sont également des matières essentielles à la formation scolaire et personnelle d'un jeune. La diversité et la liberté de conscience sont d'autant plus des valeurs qui doivent toujours être mises de l'avant tout au long du cursus qui accompagne nos futurs citoyens dans leur développement interpersonnel.

Il faut maintenir, dans le processus de formation générale et globale de nos jeunes, une fenêtre d'opportunité pour leur apprendre à réfléchir avec rigueur sur des aspects de certaines réalités sociales et sur des sujets tels que la justice, le bonheur, les lois, les règlements, à se poser des questions telles que : Quelles valeurs devraient me guider dans mes relations en société? Qu'est-ce qui caractérise un comportement acceptable et un comportement inacceptable? Comment peut-on reconnaître ces comportements? Il faut outiller, par une formation commune, nos jeunes pour qu'il leur soit de plus en plus facile de rassembler leurs idées et de les exprimer avec respect et conviction. C'est un fondement de notre école québécoise.

À des fins historiques, rappelons que la métamorphose de nos institutions remonte aussi loin qu'aux années 1960, entre autres avec la publication du rapport Parent, la création du ministère de l'Éducation et du Conseil supérieur de l'éducation, la création des collèges d'enseignement général et professionnel, l'instauration de la loi privée ou encore la Loi de l'Université du Québec. Il ne s'agit là que d'une mince énumération des nombreux éléments qui façonnent les étapes du fondement de la société québécoise, alors que l'on doit absolument prendre en considération que l'évolution des mentalités collectives va de pair avec notre parcours historique. En effet, nous continuons à avoir pour objectif de réformer la laïcité de l'État québécois et des institutions publiques tout en tenant compte du processus de laïcisation déjà amorcé.

• (16 h 20) •

Fondamentalement, l'esprit derrière cet exercice se destine à offrir aux enfants une avenue où les valeurs et les principes fondamentaux sont enseignés. Mis à part les vestiges religieux qui nous préoccupent, nous oublions trop souvent de souligner que le tournant de l'éducation au Québec se précise au cours des années 2000 justement avec l'avènement éventuel du programme dont il est question aujourd'hui. Au grand déplaisir de certains, la Constitution du Canada octroie des droits au Québec, dont le droit d'instaurer une organisation des écoles primaires et secondaires sur une base linguistique plutôt que religieuse, et ce, depuis 1997. Cette modification constitutionnelle faisait non seulement progresser le Québec sur le plan éducationnel et social, mais aussi sur le plan linguistique et du nationalisme, puisque c'est cette même année que le gouvernement remplaçait les commissions scolaires confessionnelles par des commissions scolaires linguistiques. Finalement, ce n'est qu'en l'an 2000 que nous complétons concrètement l'abolition des structures confessionnelles, telles que le poste de sous-ministre associé à la foi catholique et protestante, le service scolaire d'animation pastorale ou encore le statut confessionnel des écoles.

C'est un peu plus tard, en 2005, que le gouvernement de l'époque présentait le projet de loi n° 95, aussi appelé Loi modifiant diverses dispositions législatives de nature confessionnelle dans le domaine de l'éducation. L'adoption de cette loi instaurait, pour la rentrée scolaire 2008, la mise en place d'un programme de formation commun d'éthique et de culture religieuse. Plus précisément, la loi supprime la possibilité de choisir entre l'enseignement moral, religieux, catholique ou protestant et influence le droit des parents d'inculquer une éducation religieuse ou morale à leurs enfants. Cette loi, qui instaurait la création du cours d'éthique et culture religieuse, est aujourd'hui la raison pour laquelle on s'en parle.

Dans le cas qui nous intéresse, les règles sont déjà existantes et l'encadrement nécessaire est déjà en place en vue d'assurer que les enfants reçoivent un service adéquat. Concrètement, cela signifie que nous devons aller plus loin dans nos actions, tout en évitant de réanimer des tensions qui sont issues de débats qui ne sont plus à l'ordre du jour depuis déjà plusieurs années.

Instauré depuis 2008, le cours se scinde en deux volets distincts de formation en éthique et culture religieuse tout en conservant une spécialisation particulière. Ce jumelage des matières dans un même programme se trouve à pallier en continuité aux éléments qui se trouvaient malheureusement facultatifs selon les paramètres du cursus précédant les changements de 2005. Quoi qu'il en soit, les points de rupture que le programme optionnel pouvait constituer forment l'évolution ainsi que l'amélioration de nouvelles notions nécessaires au développement global de l'individu.

Nous nous attendons et souhaitons à ce que le personnel enseignant continue de collaborer pleinement à la mise en oeuvre de ce programme, et ce, malgré les exigences croissantes quant au niveau du professionnalisme dont il faut faire preuve lorsqu'on enseigne un sujet aussi délicat. Les valeurs de respect, de dignité de la personne s'imposent, et les opinions émises sont toutes les bienvenues, tant qu'elles sont en collégialité avec les orientations que nous mettons de l'avant dans l'optique d'un bien commun et d'une réflexion collective.

C'est pourquoi nous sommes à l'écoute des préoccupations des intervenants, mais surtout des élèves qui nous exhortent de faire des choix intelligents qui se baseront sur des valeurs de respect, d'équité, de diversité et de justice sociale. La moralité, telle que notre gouvernement la conçoit, ne se limite pas à adopter un projet de loi de manière moralisatrice. Nous souhaitons exercer le pouvoir d'influence que la politique nous donne afin d'accroître la compréhension des traditions religieuses et réduire les tensions sociales. Toutefois, il est important de souligner que le gouvernement n'accompagne pas les élèves dans une quête spirituelle quelconque. Le rôle du gouvernement se destine plutôt à assister les élèves dans un processus d'intégration à une société pluraliste et démocratique.

L'aspect éthique du cours d'éthique et culture religieuse est plus pertinent que jamais dans le Québec moderne, car il contribue au développement du sens moral de nos jeunes. Il est un outil clé dans leur socialisation et la construction de leur tolérance. Un enseignant du cours d'ECR décrivait, dans Le Devoir il y a quelques années, l'éventail de sujets qu'il abordait dans le cadre de son cours. Il disait commencer l'année en parlant de tolérance, en donnant l'exemple de Nelson Mandela. Suivaient ensuite l'intolérance et ses victimes, les gens discriminés ou tués pour leur couleur, leur orientation sexuelle, leur croyance religieuse. C'était l'occasion pour lui de parler de nazisme, forme la plus extrême de xénophobie.

Venaient ensuite les inégalités sociales, le manque de respect envers la nature, les défis à confronter pour assurer l'avenir de l'humanité. La question du sens de la vie, de la justice et de l'ambiguïté humaine, le dopage sportif, la tricherie, et autres, étaient également au menu de ce professeur, qui a compris la portée qu'il pouvait donner à un cours sur l'éthique qu'il appuyait par la pensée d'Hubert Reeves, de Pierre Dansereau et de Michel Jordan. Son cours d'ECR, il le traitait en précurseur aux cours de philosophie que les jeunes ont au cégep, ce qui est très intéressant quand on considère... le développement moral de l'individu se met en marche très tôt dans sa vie.

Pour reprendre la pensée de Jürgen Habermas, un des grands théoriciens de l'éthique du XXe siècle, c'est vers l'âge de sept ans que les enfants entrent dans ce qu'il appelle la période conventionnelle, pendant laquelle s'effectue une intériorisation des normes sociales régulant leur monde. C'est le moment où ils développent un sens de la totalité des interactions tenues pour légitimes dans un groupe social parce qu'elles émanent d'un ordre institutionnel qui constitue l'axe autour duquel les perspectives sociales tournent. Dans d'autres mots, c'est là que se construit leur compréhension des choses acceptables et inacceptables dans un groupe social donné, le moment où ils apprennent à justifier leurs actions en se basant sur un contexte normatif existant. C'est donc là qu'ils forgent leur propre idée des valeurs qui régulent la société québécoise. Cette période conventionnelle se termine quand le jeune atteint ses 15 ans et qu'il entre dans la période postconventionnelle pendant laquelle on le juge mature pour prendre des décisions morales plus complexes, pendant laquelle on s'attend à ce que son sens critique dépasse le simple respect des conventions.

C'est là le territoire du cours de philosophie, territoire qu'il faut bien préparer, puisqu'un individu qui n'aurait pas été doté des bases conventionnelles appropriées verrait sa perspective de l'éthique en décalage avec celle que veut mettre en place le Québec. Sans le respect de l'enseignement des enjeux éthiques et de la manière normale dont ils doivent être traités, on prend le risque d'affecter le développement du sens critique de nos jeunes. En se gardant de faire la démonstration d'une éthique québécoise généralisée, on nuit potentiellement à leur capacité de socialiser. J'en conclus que le cours d'ECR doit être maintenu dans le cursus de formation générale de nos jeunes. Cependant, ce programme mérite d'être repensé, révisé, réinventé, bonifié ou reconsidéré dans son contenu.

Je ne peux terminer sans saluer le travail des enseignants de ce cours qui, au quotidien, amènent nos jeunes à découvrir l'ensemble des cultures de notre société québécoise dans une approche d'ouverture et de respect. Merci de votre attention.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci. Je cède la parole à Mme la députée de Sherbrooke. 3 min 30 s.

Mme Christine Labrie

Mme Labrie : Merci, M. le Président. D'abord, je voudrais faire un constat. Le cours d'éthique et culture religieuse n'est pas parfait, ça a été mentionné souvent ici, mais est-ce que ça veut dire qu'il faut l'abolir? Certainement pas, comme on ne devrait pas non plus abolir la démocratie scolaire sous prétexte que la participation est trop faible.

Vous savez, M. le Président, moi, je pense qu'on peut améliorer ce qui fonctionne mal, et même que c'est notre mandat ici de chercher des solutions ensemble. Ma collègue, qui a elle-même enseigné le cours d'éthique et culture religieuse, a déjà démontré la pertinence des objectifs de la formation de ce cours, qui, je le rappelle, sont la reconnaissance de l'autre et la recherche du bien commun, ce qui correspond tout à fait aux valeurs québécoises et aux valeurs que devrait transmettre notre système d'éducation.

• (16 h 30) •

Moi, je veux répondre au député de Matane-Matapédia, qui a fait allusion au rapport du Conseil du statut de la femme. Le Conseil du statut de la femme a recommandé une réforme du contenu pour que la présentation des récits religieux soit accompagnée d'une mise en contexte critique, notamment en matière de sexisme. C'est une recommandation qui est très pertinente, et j'aimerais rappeler au député de Matane-Matapédia que, dans ce même rapport, le Conseil du statut de la femme dénonçait aussi des éléments sexistes dans le programme d'histoire. Est-ce que, selon lui, on devrait le retirer du programme? Je ne pense pas que c'est son intention, du moins je l'espère. Il faut plutôt prendre acte de ces critiques-là et voir comment on peut y remédier. Et, dans ce cas-ci, les critiques portaient sur du matériel pédagogique et non sur les objectifs du cours. C'est clairement la responsabilité du ministère de l'Éducation de s'assurer que le matériel pédagogique est adéquat et qu'il est constamment mis à jour, comme on le fait d'ailleurs pour le matériel utilisé en histoire et dans toutes les autres matières.

Par ailleurs, un des problèmes principaux avec ce cours est que trop peu d'enseignants sont formés pour le donner. Dans toute leur formation au baccalauréat en éducation au primaire, préscolaire, les enseignants ne reçoivent qu'un ou deux cours sur leur programme de quatre ans pour enseigner l'éthique et la culture religieuse. Et, pour le secondaire, le programme spécialisé n'est offert que dans quelques universités. Et les premiers diplômés sont sur le marché du travail depuis quelques années seulement, ils ne sont certainement pas assez nombreux pour répondre à la demande.

Donc, moi, j'ai une proposition à faire au ministre de l'Éducation, ce serait d'envisager que le programme spécialisé soit aussi offert ailleurs au Québec et qu'on y forme des enseignants qui pourraient enseigner à la fois au primaire et au secondaire pour que le cours soit toujours donné par des spécialistes. C'est ce qu'on fait déjà d'ailleurs pour l'anglais, la musique et l'éducation physique, par exemple, donc pourquoi pas pour l'éthique et la culture religieuse? Ça nous permettrait de nous assurer que le matériel choisi par les enseignants est adéquat et que le contenu est enseigné avec toutes les nuances nécessaires.

Vous savez, M. le Président, le cours d'éthique et de culture religieuse est un excellent véhicule pour aborder avec les élèves des enjeux comme l'égalité des sexes, qui inquiète mon collègue, et pour permettre aux élèves de développer leur esprit critique. Moi, je suis rassurée que le gouvernement ait annoncé son intention de l'améliorer et non de l'abolir. Et ma formation aurait voté en faveur des amendements qui ont été proposés si le Parti québécois avait accepté le dialogue. Je pense qu'on doit offrir, dès le primaire, un cours qui permet aux enfants d'apprendre à réfléchir de manière critique sur le monde dans lequel ils vivent. On a besoin d'un cours qui donne les outils aux jeunes pour apprendre à vivre ensemble, et je dirais même qu'on en a besoin plus que jamais. Je rappelle qu'on était unanimes, ce matin, à dénoncer le racisme ici. Et d'ailleurs le fait que très peu de personnes de cette Assemblée ont pu bénéficier de ce cours-là explique peut-être les difficultés qu'on a ici à faire fonctionner l'Assemblée nationale. Je ne vous cacherai pas que je suis très souvent déçue par les prises de position idéologiques qui vont à l'encontre du bien commun, et je pense à des exemples qui viennent de chaque côté de la Chambre. Des entraves au dialogue, on en voit très souvent ici. Merci.

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci. Merci, Mme la députée.

Je cède la parole à Mme la députée de Soulanges, en vous rappelant qu'il reste 18 minutes au gouvernement.

Mme Marilyne Picard

Mme Picard : Merci beaucoup, M. le Président. Intervenir sur le sujet aujourd'hui, c'est pour moi une belle occasion de démontrer que le cours d'éthique et culture religieuse n'est pas qu'un cours de remplissage pour nos jeunes. Ce n'est pas non plus, comme certains le prétendent, un lieu où nos enfants sont endoctrinés.

Permettez-moi de revenir un instant sur le grand objectif poursuivi par ce cours : préparer nos enfants à vivre dans une société démocratique et diversifiée. En fait, c'est assez simple, on veut former des jeunes lucides et critiques. Dans notre société, vous le savez, l'immigration est très présente. Il est donc absolument nécessaire pour nos jeunes de connaître les grandes religions du monde et les gens qui les pratiquent.

Mais le cours d'éthique et culture religieuse, comme son nom le dit, ce n'est pas seulement un endroit où on parle de religions, c'est aussi un cours d'éthique, comme l'a mentionné la collègue. On y apprend donc à mieux vivre en société, à traiter les autres avec respect, à faire de meilleurs choix dans nos comportements, à acquérir des valeurs de partage et d'entraide. Tout cela n'a rien à voir avec les religions, ce sont des aspects de la vie en groupe qui sont valables dans tous les milieux et dans toutes les cultures.

Le cours d'éthique et culture religieuse, c'est tout ça, bien sûr, mais, pour moi, M. le Président, c'est encore plus que ça. Pour moi, c'est aussi une invitation pour les jeunes à développer leur acceptation de la différence pas seulement sur le plan des religions et de la culture, mais aussi sur les particularités de chacun d'entre nous : l'apparence physique, la façon de s'exprimer ou bien un handicap, par exemple. Grâce au cours d'éthique et culture religieuse, les jeunes apprennent que la différence peut être une richesse si on la regarde avec les yeux de l'acceptation, ils y développent leur jugement et leur sens critique, ils y apprennent que les différences d'une personne lui accordent de la valeur en tant qu'être humain. Quand on élargit ses horizons et qu'on apprend à connaître la diversité sous toutes ses formes, on ne peut pas faire autrement, on devient plus tolérant, et je suis parfaitement convaincue qu'un cours comme celui-là peut grandement aider en ce sens. On parle beaucoup d'intimidation, de la lutte contre l'intimidation. Voilà un cours qui ouvre les jeunes à se rendre compte que nous sommes tous différents, et heureusement que nous le sommes.

M. le Président, le programme d'éthique et culture religieuse n'est certainement pas parfait. Il faut quand même souligner l'importance de ce moment où nos enfants sont assis sur les bancs d'école et qu'ils peuvent parler de différences entre eux et avec leur enseignant ou enseignante, parce que c'est bien de ça qu'on parle actuellement, de la différence, à quel point, dans notre société pourtant moderne, nous avons encore de la difficulté à l'accepter.

Si on considère la définition même de l'identité, c'est l'ensemble des traits physiques, personnels et culturels qui font qu'une personne est ce qu'elle est, en d'autres termes, qui font qu'elle est différente d'une autre personne. Notre identité est déterminée en bonne partie par le type d'environnement dans lequel on grandit. Chaque être humain est capable d'apprendre n'importe quel langage ou se conformer à n'importe quel modèle culturel. Et c'est en grandissant qu'on prend racine dans la société, qu'on développe un ensemble de préférences, de croyances et de règles de conduite que nous partageons largement avec le groupe auquel on appartient.

La nature humaine a horreur du vide. Aucune personne ne peut vivre sans groupe de référence. Nous imitons ceux que nous admirons, et c'est à force d'être stimulés dans nos interactions quotidiennes que nous adoptons des coutumes qui finissent par nous rassembler. C'est pourquoi il est important d'apprendre à nos enfants, sur les bancs d'école, que leur groupe de référence est une construction. Et cette construction, bien que solide, doit être totalement flexible pour accepter ceux qui ne sont pas tout à fait pareils ou ceux même carrément très différents dans leur environnement. Je dis «accepter», mais ce qu'il faut surtout, c'est penser à les intégrer complètement.

Je vous dis tout cela, M. le Président, parce que j'ai vécu, et je vis encore actuellement, et je vivrai peut-être encore longtemps cet énorme défi que représente l'acceptation des différences. Je milite pour qu'on accueille la différence à bras ouverts tous autant que nous sommes, et j'inclus les membres de l'Assemblée nationale ainsi que l'ensemble des citoyens qui nous écoutent. Ceci fait partie de mon ADN, et c'est pourquoi je vous parle depuis cette banquette du salon bleu. C'est avec la volonté d'améliorer le sort de mes enfants, de tous nos enfants, M. le Président, que je me suis lancée en politique pour défendre les positions de la Coalition avenir Québec. Je veux faire la différence pour ma petite fille, Dylane, mais aussi pour tous les autres petits et petites Dylane du Québec qui sont différents. Les enfants sont les plus curieux et sans filtre. J'entends souvent quelqu'un me dire : Pourquoi elle a un fauteuil? Pourquoi elle ne parle pas? Pourquoi elle ne mange pas? Il est important de répondre aux curiosités des enfants. Et je peux aussi vous dire que mon fils de neuf ans est arrivé à l'école un jour en me disant : Maman, j'ai appris c'était quoi, Hanoukka, aujourd'hui. J'étais contente qu'il ait cette connaissance, et je lui n'aurais peut-être pas appris à la maison.

Faire la différence pour qu'on accepte la différence, faire la différence pour qu'on intègre la différence, faire la différence pour qu'on l'aime, cette différence, parce que l'acceptation des différences, M. le Président, c'est beaucoup plus que la tolérance, c'est beaucoup plus que la simple connaissance des différences, c'est vivre ensemble en harmonie et avec respect, empathie.

Sans rentrer dans les débats sémantiques, je peux faire une différence entre ce qu'on appelle le vivre-ensemble et vivre ensemble, sans trait d'union, les deux mots, «vivre» et «ensemble». On partage tous un quartier, une ville, une province, un pays et une toute petite planète bleue. On doit s'accepter, sans égard à notre apparence, notre origine ou nos croyances. C'est pourquoi je crois en cette initiative pour nos enfants qui prend la forme, actuellement, d'un programme d'éthique et culture religieuse. Et, pour moi, ce n'est ni le nom du programme ni son contenu à la virgule près qui m'importe. Ce qui compte vraiment, M. le Président, c'est d'en parler, de la différence, à l'école, certainement, et à la maison, assurément. Merci.

• (16 h 40) •

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée.

Un autre intervenant? M. le député de Vachon.

M. Ian Lafrenière

M. Lafrenière : Merci, M. le Président. Alors, je suis très heureux de me lever dans cette Chambre, ici, aujourd'hui, pour la première fois, afin de prendre part à un débat, d'autant plus que le sujet d'aujourd'hui n'est pas de moindre importance pour notre société. Au contraire, c'est un sujet qui m'interpelle beaucoup. En effet, la proposition de notre collègue de Matane, le chef de la deuxième opposition, qui propose d'abolir le cours d'éthique et de culture religieuse, bien, ça mérite une franche réflexion, une franche discussion. Certains peuvent se demander — puis j'en suis, en passant, M. le Président : Est-ce que le contenu est à jour? Est-ce que le contenu est adéquat? Donc, a priori, je suis d'accord avec le collègue de Matane, on doit revoir le contenu. C'est une question qui est pertinente, et je suis content de pouvoir en discuter devant vous aujourd'hui, M. le Président.

Je vais l'aborder, cette discussion-là, aujourd'hui, M. le Président, en prenant en compte mes expériences personnelles et professionnelles, mon expérience comme policier, comme communicateur, où j'ai passé une vingtaine d'années à travailler pour le Service de police de la ville de Montréal, donc sur l'île de Montréal, une île qui compte plus de 80 communautés culturelles, mon expérience comme formateur pour l'UNESCO, les Nations unies, mais surtout mon expérience comme député pour la merveilleuse circonscription de Vachon et aussi mon expérience en tant que papa de deux magnifiques filles de neuf ans et 11 ans. C'est avec tout ce bagage-là que j'aborde la discussion aujourd'hui parce que l'ensemble de mes expériences personnelles et professionnelles, comme c'est le cas de plusieurs d'entre nous, bien, c'est mes expériences où j'ai dû aller à la rencontre des autres, M. le Président.

Comme je l'ai mentionné plus tôt, j'ai exercé le métier de policier pendant près de 26 ans et je peux vous dire que les relations humaines, les relations entre les citoyens, les relations entre les gens de divers milieux, de diverses cultures, c'est ça qui est au coeur du travail des policiers terrain, des policiers de première ligne. C'est un enjeu de cohabitation entre les citoyens, et ça, c'est de plusieurs façons qu'ils sont différents.

Vous savez, depuis plusieurs semaines, on parle beaucoup d'immigration dans cette Chambre. Au Québec, on en parle. Notre gouvernement a proposé une réforme du système pour mieux arrimer l'immigration avec les besoins du marché du travail et donc mieux intégrer les gens qu'on accueille ici, chez nous. Parce qu'au fond l'essentiel dans tout ça, c'est quoi? C'est qu'on devrait toujours... ce qui devrait toujours nous intéresser, M. le Président, c'est le vivre-ensemble, c'est la cohabitation.

M. le Président, si j'en reviens à notre discussion principale qui nous réunit aujourd'hui, une des façons de mieux vivre ensemble, c'est de connaître l'autre. Les gens ont souvent peur de l'inconnu, c'est un réflexe qui est normal. Alors, il faut, comme société, faciliter les opportunités pour que les gens puissent apprendre à se connaître davantage, apprendre à apprivoiser les différences.

À ce sujet, dans leur cours d'éthique et de culture religieuse, mes filles reçoivent de très belles informations, notamment sur les Premières Nations. Et je vous dirais que, personnellement, je trouve qu'au Québec... moi, j'aime beaucoup l'histoire et je trouve qu'on est dans un déficit de connaissances historiques. Dans leur cours, mes filles apprennent aussi à mieux connaître les cultures, les valeurs de plusieurs de leurs camarades de classe.

Et je l'ai mentionné dès le début de mon intervention, est-ce qu'il y a des choses à revoir dans cette formation, à repenser, à mettre à jour? Certainement, M. le Président. Il y a une chose qui est certaine : le savoir, la connaissance de l'autre, ça ne peut pas être mauvais. Je vous dirais même, pour les émissions pour enfants... J'écoutais ma collègue de Taschereau, ce matin, qui me parlait de Passe-Partout. Moi, je vais oser vous parler d'une autre émission que mes filles écoutent beaucoup, qui est Subito texto. Et, suite à ces émissions-là, elles ont été en mesure de chanter Bonne fête en arabe et de me parler du ramadan. Donc, c'est des émissions que nos enfants écoutent, et, encore là, la connaissance de l'autre, mais ça passe parfois par les émissions aussi.

M. le Président, j'ai envie de vous donner un autre exemple tangible. Comme policier, j'ai eu le privilège de servir la population pendant plusieurs années et à Montréal, je l'ai dit plus tôt, ça, c'était dans... une île où il y a plusieurs communautés culturelles. Certaines communautés vivent plus de difficultés, et comme porte-parole du SPVM, j'ai dû, à de nombreuses reprises, gérer des situations délicates. Mes connaissances et surtout mes informations sur chacun, ça m'a permis de mieux informer les médias, la population et de choisir les bons mots pour ne pas blesser les uns et les bons mots pour ne pas stigmatiser les autres.

Pour éviter le profilage racial, M. le Président, pour la police de Montréal, nous avons instauré une formation qui a été donnée à tous les employés afin d'augmenter le niveau de connaissance de l'autre. La connaissance, la découverte, la main tendue vers l'autre, c'est comme ça qu'on peut concrètement régler des problèmes très complexes, M. le Président. Mon collègue de Matane a parlé hier de l'importance de la police dans la société. Bien, justement, cette police doit être bien formée, elle doit être le reflet de la société, et, en ce sens, je ne crois pas qu'il serait opportun ou à propos de couper dans la formation de nos jeunes, puisque ces jeunes-là, ce sont nos adultes de demain, M. le Président.

J'ai également eu la chance, comme formateur pour les Nations unies, d'aller faire des missions dans près d'une dizaine de pays sur trois continents, donc plus de 26 formations, et mon travail était de faire en sorte que les médias et les forces de l'ordre travaillent mieux ensemble. Mon plan de cours était assez simple : j'essayais de faire en sorte que les gens en connaissent plus sur le métier de l'autre. Et d'ailleurs ce qui avait un grand succès, c'est... je demandais à des forces de l'ordre de jouer le rôle de journalistes et à des journalistes de jouer le rôle de forces de l'ordre. Et, quand je leur demandais, à la fin de la journée, ce qu'ils trouvaient difficile, c'est exactement ce qu'ils reprochaient à l'autre. Alors, quand on vit un peu dans les souliers de l'autre... et ce n'est pas une grande expression que j'ai inventée moi-même, avant de le juger, il faut avoir marché un mille dans ses souliers. Et je vous dirais, M. le Président, quand on en apprend davantage sur l'autre, c'est plus facile de le comprendre.

Afin d'améliorer le vivre-ensemble, afin d'assurer la paix sociale, il faut augmenter les connaissances sur l'autre, M. le Président. Oui, la formation doit être bonifiée, puis je le redis encore à mon collègue de Matane, améliorée, mise à jour, et merci à ma collègue, aussi, de Marguerite-Bourgeoys qui nous l'a bien mentionné tout à l'heure. Cependant, je suis d'avis que ça serait une grande erreur de ne pas éduquer nos jeunes sur la diversité que l'on retrouve dans la société dans laquelle ils évoluent. Je le répète, le danger, c'est la peur de l'inconnu, M. le Président.

Pas plus tard que cette semaine, puis on en a parlé, l'actualité nous montre que nous avons encore du chemin à faire comme société. Vous avez tous vu ce qui est sorti dans les médias, ce jeune hockeyeur qui a été victime d'insultes racistes, des partisans s'en sont pris à sa famille dans les estrades. Oui, en 2019, au Québec, c'est arrivé. Ce genre d'incident est déplorable, et malheureusement ça se fait encore. Et je regardais ces déclarations dans les médias, et, M. le Président, mon Québec avait mal ce matin. Je ne pouvais pas croire qu'on était encore comme ça, que des gens s'en prennent même à sa famille. Quand je vous dis ça, ce n'est pas le député qui vous parle, ce n'est pas l'ex-policier, c'est un père de famille, et ça m'interpelle. Je ne veux pas que nos enfants, nos jeunes grandissent dans une société où les gens ont peur de l'autre, M. le Président. Je ne veux pas que mes filles grandissent dans une société où les différentes communautés évoluent en parallèle. Au contraire, j'aimerais les voir vivre dans un Québec où les gens font preuve d'ouverture, où les gens n'ont pas de difficulté à s'intégrer.

On peut se questionner sur le comment transmettre ces valeurs d'ouverture à nos enfants. On peut se questionner sur ce qui doit être transmis, de quelle façon ça devrait être fait. On peut se questionner sur ce qui devrait être appris à l'école. Mais, M. le Président, jamais on ne devrait mettre en doute l'importance de transmettre ces valeurs fondamentales à nos enfants. La connaissance de l'autre, ça évite d'avoir des préjugés, puis ça fait de nous de meilleurs citoyens, et ça aide à maintenir la paix sociale, M. le Président. Nos jeunes doivent être plus connaissants, mieux renseignés afin d'avoir des citoyens, demain, qui seront plus critiques.

Et d'ailleurs tout à l'heure je vous parlais de notre jeune hockeyeur qui a été ciblé, et j'ai lu certaines de ses déclarations. Je vais vous en citer quelques-unes, M. le Président, quand il dit : «Les gens de ma famille n'étaient plus en sécurité dans les estrades, et j'ai pu le sentir sur la glace.» Ça, c'est un hockeyeur qui nous dit ça, un bagarreur en plus. «On est en 2019, il faut que les gens acceptent la différence, et c'est juste déplorable, ce qui s'est passé.» Mais ça, M. le Président, c'est arrivé ici en 2019.

Et vous allez me permettre, M. le Président, étant donné qu'il est question d'une formation avec un volet éthique, je me permets de souligner que cette formation est importante pour nos jeunes, mais il en va de même pour les parlementaires aussi, M. le Président. Je prends pour exemple le débat d'hier dans cette Chambre sur le projet de loi n° 1. Nous avons assisté hier, M. le Président, à un autre bel épisode des Beaux malaises ici, dans cette salle. Hier, le mauvais théâtre d'été était encore en place. Et, pour les gens qui nous écoutent qui n'ont pas eu le bonheur de voir ça hier, les collègues de l'opposition ont décidé d'utiliser ma circonscription, de me cibler à plusieurs reprises. Et, M. le Président, je dois vous avouer une chose, je suis coupable parce que j'ai même rigolé, j'ai même trouvé ça drôle au début. Je l'avoue, je ne suis pas fier de ça, mais pas du tout. Ça m'a amusé sur le coup, j'ai même souri. Et même, pendant un bout de temps, je me suis dit : Merci à l'opposition, ils m'ont aidé à remplir mon mandat. J'avais promis aux gens de Vachon qu'on parlerait souvent de ma circonscription, alors hier, c'était un très beau placement publicitaire. Je vous en remercie.

Mais, une fois que ça, c'est dit et que je suis revenu chez moi, je me suis rendu compte que d'avoir gardé le silence hier, j'avais encouragé cette mascarade-là hier. Alors, en cette journée aujourd'hui qui est une journée spéciale, c'est la journée de sensibilisation à l'intimidation, je rappelle à mes distingués collègues de l'opposition que ce n'est pas ça, faire de la politique autrement. Je pense qu'on devrait monter notre débat, notre discours d'un niveau pour éviter ces dérives-là. Alors, je pense qu'on pourrait faire une petite pensée, on pourrait faire une introspection sur le sujet. Et je propose à mes distingués collègues aussi des sujets de lecture. Je rappellerais que la commission Chamberland a existé, qu'il existe de beaux livres, il existe aussi des extraits sur le Web, et je les invite à aller l'écouter.

Vous savez, M. le Président, la devise Je me souviens ne devrait pas se retrouver uniquement sur nos plaques de véhicules, on devrait aussi s'en rappeler à tous les jours. On a le devoir de mémoire. M. le Président, je me souviens.

• (16 h 50) •

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député de Vachon.

Je cède maintenant la parole à M. le chef du deuxième groupe d'opposition pour sa réplique de 10 minutes.

M. Pascal Bérubé (réplique)

M. Bérubé : Merci, M. le Président. Ce à quoi on est conviés maintenant, c'est un test de cohérence en matière de laïcité. M. le Président, ma motion s'adresse essentiellement au gouvernement. Je n'entretiens pas beaucoup d'espoir sur la capacité du Parti libéral du Québec et de Québec solidaire d'avancer davantage sur la nécessaire laïcité et les moyens pour y parvenir. Je m'adresse essentiellement au gouvernement du Québec pour lui dire qu'il y a là une opportunité exceptionnelle. D'abord, une volonté politique exprimée du gouvernement et de ma formation politique pour régler cette question durant cette session parlementaire.

D'abord, la question d'une loi sur le port des signes religieux chez les personnes en autorité. Je réitère notre volonté de collaborer et de contribuer à adopter la meilleure pièce législative possible. J'indique également que c'est l'occasion d'aborder l'enjeu de la laïcité de façon plus large, parce que cette question-là est abordée au quotidien dans toutes les écoles du Québec, au primaire et au secondaire.

J'indique que l'enseignement du cours Éthique et culture religieuse cause de nombreux problèmes, essentiellement dans sa partie culture religieuse. Alors, tout ce qu'on a évoqué sur la nécessité de l'éthique, j'en suis, mais je pense qu'on doit abolir ce cours pour le refonder sur de nouvelles bases.

Alors, je suis d'accord avec le côté éthique, tout ce qui a été dit. Sur le côté culture religieuse, j'ai trouvé qu'on a occulté beaucoup de choses. D'abord, des dérives importantes dans le matériel scolaire. Qui a dénoncé ça ici, là? Des chrétiens en soutane et grosse croix, des musulmanes portant le voile, des Autochtones avec des plumes sur la tête, des questions comme «quelle est ta religion?», on demande la religion de tes amis, des questions inquisitoires, à la limite inconstitutionnelles, les enfants appelés à dévoiler leur religion et la façon dont ils la pratiquent, régime alimentaire, prière, circoncision, ce qui constitue une intrusion dans l'intimité des familles.

Comment ignorer en particulier l'inquiétude formulée par les parents musulmans à travers de nombreux témoignages, selon qui ce cours exerce une pression sur leurs enfants en les présentant... une version fondamentaliste de l'islam et le voilement des femmes musulmanes comme une norme? Ça, c'est ce qu'on retrouve dans les manuels. Qui a dénoncé ça tout à l'heure? Il faut croire qu'à bien des égards le discours que j'ai entendu de certaines formations politiques, Justin Trudeau aurait pu le prononcer de ce côté-ci de la Chambre, excluant le Parti québécois, mot pour mot.

Aucune place pour les non-croyants. Il y a des gens, au Québec, qui sont non-croyants, qui sont athées, qui sont agnostiques. Aucune place pour ces personnes-là dans le programme. Aucune réelle critique des religions. Ah non! Ça, c'est suspect. On ne peut pas critiquer les religions, on est des intolérants. Ça fait partie également de l'essentiel de ce cours. Manque de formation des enseignants, ils nous le disent eux-mêmes, manque de formation.

Tous ces enjeux-là concourent pour arriver à une conclusion, cette volonté politique manifeste du Parti libéral, en 2008, d'instaurer un cours qui, en plus, fait l'apologie d'une vision qui s'appelle le multiculturalisme canadien à travers l'endroit le plus vulnérable, les cours de classe au primaire, s'applique... Je ne suis pas surpris du Parti libéral, mais surpris de la Coalition avenir Québec. Qu'est-ce que le ministre omet de dire? De 2012 jusqu'au 1er octobre 2018, leur position, c'était l'abolition du programme au primaire, mais ce n'est plus le cas. Alors, toutes les personnes qui ont cru qu'ils étaient sincères se retrouvent bien déçues de l'abandon d'un autre engagement électoral, un autre, ça s'accumule, mais il n'y a pas de conséquences. On trouve un autre argumentaire, on trouve des vertus qu'on n'a jamais trouvées avant, on écrit des lignes pour les députés, qu'ils ont lues, auxquelles ils croient à moitié.

L'engagement de la Coalition avenir Québec d'abolition, c'est le même que le nôtre. Il y a une différence : il y a une cohérence puis une conviction profonde qu'on a depuis 2009, qu'on a réaffirmé à maintes fois en Chambre à travers des questions, à travers des motions, à travers des propositions. Cet intérêt soudain de la Coalition avenir Québec pour ce cours-là est très particulier. Il tient essentiellement à l'expérience personnelle du ministre. Il l'a exprimé en toute candeur : il a aimé ça, lui, il trouve ça correct. Mais moi, je ne trouve pas ça correct.

Quand le Conseil du statut de la femme nous indique qu'il y a des dérives quant à la représentation de l'égalité entre les femmes et les hommes, c'est préoccupant. Est-ce qu'on devrait s'y attarder? Bien sûr. Alors, on peut repartir ce cours sur d'autres bases en conservant les éléments sur le vivre-ensemble, sur l'éthique, sur la participation citoyenne, qui sont importants. Mais, sur la place de la religion à l'école de cette façon-là, non. En tout cas, pas au Parti québécois. C'est incroyable.

Le ministre, là, je le connais depuis près de 25 ans. On a milité ensemble dans le mouvement étudiant, au Parti québécois, puis maintenant on se voit à l'Assemblée nationale, d'accord? Il est toujours disponible. Il est tellement content de nous dire qu'il est ministre de l'Éducation, vous ne pouvez pas savoir, et il nous le répète de toutes les façons possibles, et il a quelque chose à dire sur absolument tout. Quand il indique que : Oui, oui, on y avait pensé, je n'en crois pas un mot, M. le Président. N'eût été notre intervention d'hier, on n'aurait pas appris la volonté soudaine du premier ministre de réformer le programme et d'abandonner sa promesse, le fait échéant, puis du ministre de dire : Effectivement, il faudrait changer ça. Il n'y avait pas de notes d'écrites dans son cahier, le ministre, avant que je n'en parle hier. Je suis sûr de ce que j'annonce. Je le dis de mon siège, M. le Président, je suis convaincu de ça.

Alors, est-ce qu'il dénonce ce qu'on retrouve dans le programme? Plus ou moins. Ce qu'il veut... Il a été très ferme pour dire aux gens : Votez pour nous, on est pour ça. Mais, maintenant qu'ils sont élus, ils ont changé bien des affaires. D'ailleurs, ce n'est pas la première. Aujourd'hui, là, sur les trop-perçus d'Hydro-Québec, c'en est un autre, puis ça a l'air qu'il y en a un autre qui s'en vient demain. Ça s'accumule.

Mais moi, je crois à la cohérence. Si on est sérieux dans ce qu'on entreprend, on va aborder toutes ces questions-là. On va collaborer au projet de loi sur la laïcité. Mais on dit au gouvernement : Abordez cette question qui touche les enfants, elle est importante. C'est un test de cohérence. Si on réalise que ce gouvernement n'est pas prêt à aborder cette question-là, il se retrouvera seul, au bout de la session parlementaire, à essayer de nous faire adhérer à ses principes, et je ne pense pas que c'est dans son intérêt.

Le gouvernement se plaît aussi de nous rappeler sa majorité parlementaire, 75 sièges. Je lui réitère qu'il est le gouvernement élu majoritaire avec le moins d'appuis de l'histoire contemporaine du Québec. Ça invite à l'humilité, à l'ouverture et au partage.

Tout à l'heure, j'ai été interpelé de tous côtés par une coalition spontanée qui veut maintenir ce cours : Coalition avenir Québec, Parti libéral et Québec solidaire. Puis on m'a interpelé de toutes sortes de façons : Est-ce que le Parti québécois réalise ce qu'il dit? C'est à l'encontre de principes, il ne faut pas stigmatiser. Je veux bien dire, très humblement, en me tournant vers la députée de Rouyn-Noranda—Témiscamingue : Je n'ai pas de leçons à recevoir de stigmatisation. Je croyais qu'elle aurait utilisé son temps peut-être, peut-être pour revenir sur ses propos malheureux qui stigmatisent les Sino-Québécois — ils sont 100 000 au Québec. Elle a proposé des propos qui, quant à moi, portaient justement à la stigmatisation d'une communauté. Je n'ai pas entendu d'excuses là-dessus. C'est son choix. Et je n'ai pas de leçons à recevoir là-dessus, d'accord? Le Parti québécois est cohérent sur ces enjeux-là, il choisit de maintenir ses convictions. C'est comme ça qu'on fonctionne, nous, et on pense qu'on a là un élément essentiel sur lequel il faut intervenir au nom de la liberté de conscience des enfants et des parents. C'est important de le faire.

Puis on m'a lancé un autre défi, on m'a dit : Ah! mais il faudrait mettre fin au financement des écoles privées. M. le Président, ça tombe drôlement bien, en ce qui nous concerne, parce qu'une de mes convictions les plus profondes en politique, personnelle, je l'ai déjà dit puis je vais le révéler à nouveau, en ce qui me concerne personnellement — ça n'engage pas ma formation politique — si c'était juste de moi, pas un sou n'irait dans les écoles privées, d'accord, comme au Nouveau-Brunswick, comme en Ontario, parce qu'il n'y a pas de véritable choix. Il n'y en a pas, d'écoles privées dans ma région, et tout le monde paie pour ça. Et je suis fils d'enseignants du réseau public, formé moi-même en enseignement, cette conviction-là, je la porte personnellement depuis des années et, lorsqu'on a des débats là-dessus, c'est ça que j'exprime. Alors, la Chambre est au courant, puis les gens de ma circonscription aussi, c'est une de mes convictions les plus profondes.

Alors, il va falloir trouver autre chose pour nier cette nécessité d'intervenir pour protéger les enfants d'une vision établie par des idéologues multiculturalistes qui implantent au Québec, dans les programmes scolaires, dans les classes, auprès des enfants, une vision qui tend à banaliser le vivre-ensemble, à stéréotyper des religions, à faire en sorte d'avoir une vision passéiste de ce que représente la société québécoise, à nier la nécessité de critiquer, même, les religions. Non, ça suffit. Après 11 ans, le Parti québécois, je réalise, sera le seul parti à souhaiter l'abolition de ce programme et aura été cohérent jusqu'au bout. Et je regrette puissamment, pour les gens qui ont appuyé cette formation politique, qu'aujourd'hui ils réalisent bien tristement qu'ils ont abandonné leur engagement électoral et qu'ils se rallient à ceux qui veulent le maintien de ce programme. M. le Président, c'est triste, mais moi, je suis heureux d'être debout et cohérent comme je l'étais avant l'élection, pendant l'élection, et encore maintenant avec mes collègues du Parti québécois. Quand on va se lever, on saura que nous sommes les seuls qui auront été cohérents jusqu'au bout, M. le Président.

• (17 heures) •

Le Vice-Président (M. Picard) : Merci, M. le député.

Je vais mettre maintenant aux voix la motion de M. le chef du deuxième groupe d'opposition, qui se lit comme suit :

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement d'abolir le cours d'éthique et [de] culture religieuse.»

Cette motion est-elle adoptée? M. le leader du deuxième groupe d'opposition.

M. Ouellet : On demande le vote par appel nominal, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Picard) : M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Schneeberger : M. le Président, je demanderais de reporter le vote demain, jeudi, aux affaires courantes.

Une voix : ...

Le Vice-Président (M. Picard) : Non, non, on a demandé le vote nominal. Là, on demande le report du vote, tout simplement. C'est correct, là. Parce que, la demande du député de René-Lévesque, on aurait pu exécuter le vote immédiatement. C'est la prérogative du gouvernement de demander le report.

Vote reporté

Donc, alors, conformément à la demande du leader du gouvernement, le vote sur la motion de M. le chef du deuxième groupe d'opposition sera tenu à la période des affaires courantes de demain.

M. le leader du gouvernement.

M. Schneeberger : Oui, M. le Président. Alors, je vous demande d'appeler l'article 1 du feuilleton.

Projet de loi n° 1

Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Picard) : À l'article 1 du feuilleton, l'Assemblée reprend le débat, ajourné au cours de la présente séance, sur la motion de Mme la ministre de la Sécurité publique proposant l'adoption du principe du projet de loi n° 1, Loi modifiant les règles encadrant la nomination et la destitution du commissaire à la lutte contre la corruption, du directeur général de la Sûreté du Québec et du directeur des poursuites criminelles.

Je vais suspendre quelques secondes pour permettre à la deuxième vice-présidente de rendre sa décision sur la demande de motion de scission.

(Suspension de la séance à 17 h 2)

(Reprise à 17 h 5)

Décision de la présidence sur la recevabilité de la motion de scission

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Dans le contexte du débat sur l'adoption de principe du projet de loi n° 1, je vais maintenant rendre ma décision sur la recevabilité de la motion de scission présentée par le député de Jacques-Cartier.

Selon le leader de l'opposition officielle, cette motion de scission divise le projet de loi en deux parties, soit une première qui concerne le système policier et une seconde qui concerne le système judiciaire.

En se basant sur les critères établis par la jurisprudence, il rappelle que, pour juger la recevabilité d'une motion de scission, la présidence doit examiner les notes explicatives et le contenu du projet de loi. Il souligne également qu'en le faisant la présidence ne doit pas tenir compte de l'intention de l'auteur du projet de loi.

Selon le leader de l'opposition officielle, tant les notes explicatives que les différentes sections du projet de loi démontraient qu'il contient trois principes distincts, soit un principe par organisme visé par le projet de loi.

Il fait valoir que, dans les organismes visés par le projet de loi, ils ne peuvent être considérés comme de simples modalités, et ce, même s'ils pourraient être regroupés sous un même thème.

Il allègue finalement que, puisque la motion de scission remplit tous les autres critères de recevabilité d'une telle motion, elle doit être déclarée recevable.

Pour sa part, le leader adjoint du gouvernement affirme que le projet de loi ne contient qu'un seul et même principe, soit l'intégrité, la neutralité et la transparence des trois institutions. Pour cette raison, il est d'avis que le projet de loi ne peut être scindé.

Je remercie les leaders pour leurs arguments, dont j'ai pris connaissance pour l'analyse de la recevabilité de la motion.

Je rappelle d'abord que la jurisprudence parlementaire a plusieurs fois reconnu que, pour qu'une motion de scission soit déclarée recevable, un projet de loi doit comporter plus d'un principe. De plus, chaque projet de loi résultant de la scission doit être cohérent, complet et pouvoir vivre indépendamment l'un de l'autre.

La présidence a aussi mentionné à plusieurs occasions que l'analyse de la recevabilité d'une motion de scission ne peut se baser sur l'objectif du projet de loi. Il faut plutôt en considérer leurs dispositions pour déterminer s'il contient ou non plus d'un principe.

À la lumière de ces critères, la présidence a pris connaissance du projet de loi afin de déterminer s'il contient plus d'un principe. Je dois maintenant décider s'il peut être scindé de la manière prévue dans la motion de scission présentée par le député de Jacques-Cartier.

Après lecture des dispositions du projet de loi et analyse, la présidence constate la présence de plus d'un principe dans le projet de loi.

En effet, comme le mentionne la jurisprudence parlementaire, ce n'est pas parce que des principes peuvent être regroupés sous un même thème qu'ils doivent être considérés comme simples modalités.

Une fois que l'on constate qu'un projet de loi contient plusieurs principes, il reste à déterminer si la manière dont les articles sont répartis dans les différents projets de loi résultant de la scission en fait des projets de loi distincts, cohérents en eux-mêmes, et peuvent être considérés de manière autonome.

La motion de scission propose de scinder le projet de loi en deux, à savoir un premier projet de loi concernant le Commissaire à la lutte contre la corruption et le directeur général de la Sûreté du Québec et un second qui concerne le Directeur des poursuites criminelles et pénales.

Je constate que les deux projets de loi qui résulteraient de la scission sont cohérents, complets et pourraient vivre indépendamment l'un de l'autre, comme le prévoit la jurisprudence.

Comme l'a mentionné le leader de l'opposition officielle, il est vrai que les articles 13 et 16 du projet de loi se retrouveraient dans les deux projets de loi issus de la scission. Tel que l'a établi la jurisprudence, cela n'a toutefois pas pour effet de rendre la motion irrecevable, puisque ces articles concernent des modalités compatibles avec les projets de loi qui se trouvent dans chacune des parties scindées.

Considérant ce qui précède, je viens donc à la conclusion que la motion de scission, telle que présentée, respecte les critères énoncés par la jurisprudence. Je déclare donc la motion de scission présentée par le député de Jacques-Cartier recevable.

En vertu de l'article 241 du règlement, cette motion fait donc l'objet d'un débat restreint de deux heures. Je vous informe que la répartition du temps de parole pour ce débat restreint s'effectuera comme suit : 59 min 15 s sont allouées au groupe parlementaire formant le gouvernement, 35 min 4 s sont allouées au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, 12 min 6 s sont allouées au deuxième groupe d'opposition, 12 min 6 s sont allouées au troisième groupe d'opposition et 1 min 30 s sont allouées au député indépendant. Dans le cadre de ce débat, le temps non utilisé par le député indépendant ou par l'un des groupes parlementaires sera redistribué entre les groupes parlementaires selon les proportions établies précédemment. Mis à part les consignes mentionnées précédemment, les interventions ne seront pas soumises à aucune limite de temps. Enfin, je rappelle au député indépendant que, s'il souhaite intervenir au cours de ce débat, il a 10 minutes à partir de maintenant pour en aviser la présidence.

Débat sur la motion de scission

Je cède maintenant la parole à un député... à Mme la ministre de la Sécurité publique. Madame, la parole est à vous.

Mme Geneviève Guilbault

Mme Guilbault : Oui, merci beaucoup. Merci, Mme la Présidente. Alors, je prends note, évidemment, de votre décision, j'en prends acte aussi. Nous en prenons tous acte, d'ailleurs. Et, bien sûr, je la respecte. Vous l'avez étayée notamment en vous basant sur les critères, les articles qui sont prévus, la jurisprudence évoquée par les collègues à l'origine de... qui ont motivé, finalement, cette motion qui a été déposée. Alors donc, je respecte votre décision.

• (17 h 10) •

Évidemment, de notre côté, nous sommes en désaccord avec les arguments avancés pour justifier cette motion qui a été déposée par le collègue de Jacques-Cartier. Il a toujours été très clair pour nous que ce projet de loi ne contient qu'un seul principe, qui est celui d'assurer la neutralité, la transparence, l'indépendance des processus de nomination et de destitution de trois postes névralgiques, dont j'ai déjà abondamment parlé, d'ailleurs : le directeur général de la Sûreté du Québec, le commissaire de l'Unité permanente anticorruption, le Directeur des poursuites criminelles et pénales. Et donc, pour nous... Et ajoutons l'enjeu d'harmonisation, qui est en filigrane partout dans ce projet de loi là. On a eu ce souci d'harmonisation à la fois dans le processus de nomination et de destitution de ces trois postes-là, et ce souci d'harmonisation, à notre sens, ajoute à l'unicité du principe qui est fondateur de ce projet de loi.

Alors, tout en respectant la décision que vous venez de rendre, je me devais de faire cette précision, du moins ce commentaire à l'égard du fait que nous maintenons le principe selon lequel il n'y a qu'un objectif derrière ce projet de loi. Bien sûr, bon, on parle de trois postes distincts, mais par contre, comme je le disais, que ce soit dans la nomination ou dans la destitution, on sent vraiment qu'il y a une harmonisation et qu'il y a une communauté dans les intentions qui touchent les trois postes qui sont concernés.

Et, vous savez, Mme la Présidente, encore une fois, en tout respect de cette décision et en tout respect des collègues qui sont ici, je vous dirais que je déplore les motivations qui sont peut-être aussi à l'origine du dépôt de cette motion, c'est-à-dire que... Vous savez, le député de La Pinière l'a dit hier lui-même, c'est un projet de loi qui a valeur de symbole, c'est le projet de loi n° 1 déposé par notre gouvernement. Ce n'est pas un hasard s'il porte sur la nomination aux deux tiers de trois postes névralgiques pour l'administration publique. C'est un projet de loi qui, entre autres, a pour objectif, outre ce qu'on a déjà énoncé, de cristalliser le rôle des députés de l'Assemblée nationale dans le processus de nomination et de destitution de trois institutions policières et judiciaires très importantes dans l'administration publique. C'est un projet de loi qui, à notre sens, devrait rallier l'adhésion, la collaboration de tous les collègues en ce qu'il, justement, leur confère un rôle accru dans ce processus de nomination et de destitution de trois postes importants de l'administration publique.

Combien de fois avons-nous dit, Mme la Présidente — vous étiez d'ailleurs des nôtres — dans les dernières années, qu'il est crucial de rétablir la confiance du public à l'endroit de ces trois postes-là? Et une des façons évidentes pour nous de le faire était de modifier le mode de nomination de ces trois personnes-là, de ces trois dirigeants-là d'organisations importantes au Québec.

Aussitôt arrivés au gouvernement, que faisons-nous? Le 29 novembre... On a été assermentés le 18 octobre comme gouvernement. Le 29 novembre, je déposais le projet de loi n° 1, qui a valeur de symbole, comme on l'a dit, et qui porte sur la réforme de ce fameux processus de nomination des trois personnes. Alors donc, nous joignions l'action aux intentions. Nous faisions un pas important vers cette conquête, cette reconquête de la confiance du public en nos institutions policières et judiciaires.

Et, pour avoir discuté avec certains collègues ici, pour avoir eu toutes sortes de conversations, à gauche, à droite, là-dessus, j'avais l'impression qu'on avait vraiment, en toute collégialité, une adhésion généralisée ici, dans la Chambre, sur la pertinence et, je dirais même, la noblesse des intentions qui sont sous-jacentes à ce projet de loi. Or, on s'aperçoit, depuis hier, depuis qu'on a amorcé l'adoption de principe, l'étape importante qu'est l'adoption de principe du projet de loi n° 1, on s'aperçoit, à travers, je dirais, l'abondance et la diversité des interventions des collègues de la première opposition, que... on sent une volonté, je dirais, d'exploiter...

Une voix : ...

Mme Guilbault : ...de l'opposition officielle, on sent une volonté d'exploiter au maximum les outils qui leur permettent de retarder l'adoption de principe de ce projet de loi là...

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : ...

M. Tanguay : Très clairement, la ministre déplore les motivations en parlant de notre action, nous impute des motifs de retarder alors qu'on fait juste notre travail de députés. Si vous me reconnaissez la parole, c'est parce que j'ai le droit de parler, puis on va parler. Alors, je vous demande, s'il vous plaît, de la rappeler à l'ordre, en vertu de l'article 35.6°.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Mme la ministre... M. le leader adjoint du gouvernement, allez-y.

M. Schneeberger : Mme la Présidente, la ministre ne fait juste énumérer ce qui se passe actuellement, alors c'est tout à fait... L'opposition officielle a tout à fait le droit de procéder ainsi, mais c'est la conséquence, qu'on va... le projet de loi sera retardé.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le leader adjoint. Écoutez, nous savons tous que nous ne devons pas imputer des motifs, alors je vous demanderais à tous votre collaboration et de faire attention à ne pas imputer des motifs aux autres partis.

Alors, Mme la ministre, je vous redonne la parole.

• (17 h 20) •

Mme Guilbault : Merci, Mme la Présidente. Alors, loin de moi l'idée d'imputer des motifs, je vais reformuler. Mais je ne peux pas m'empêcher de constater, effectivement, l'abondance et la diversité des interventions depuis hier. Et je ne crois pas me tromper en disant qu'un des députés de l'opposition officielle a même amorcé son intervention en parlant, peut-être par inadvertance, du projet de loi n° 2, ce qui me fait demander... me fait m'interroger sur le sérieux et la concentration des collègues quand il s'agit de débattre de l'adoption de principe du projet de loi n° 1. Parce que, Mme la Présidente, je sais qu'on dispose des outils parlementaires qui sont les nôtres, que les gens doivent faire leur travail, et c'est tout à fait à leur honneur de le faire, d'avoir resté jusqu'à 21 h 30 hier soir pour intervenir puis partager leurs réflexions. La question n'est pas là. Mais, quand je discute avec d'autres collègues et quand je regarde la façon générale dont ça se passe, je vous dirais que, quand on a eu les consultations particulières, je ne pouvais pas présumer de la suite, mais, quand je regarde la façon dont ça se passe depuis qu'on a amorcé cette étape importante qu'est l'adoption de principe, j'ai la malheureuse impression qu'on n'est peut-être pas tous sur la même longueur d'onde et qu'on ne souhaite pas tous le meilleur pour cette réforme, nécessaire à notre sens, pour le mode de nomination aux deux tiers de ces trois postes, encore une fois, névralgiques pour l'administration publique.

Et, sans présumer, encore là, des intentions de qui que ce soit, mais j'ai eu des indices qui me portent à croire que la deuxième opposition va aller dans le sens du principe, va voter en faveur du principe du projet de loi n° 1. Je ne présumerai pas de la troisième opposition, mais les indices, à date, me portent à croire qu'ils sont, eux aussi, favorables du moins à l'adoption de principe du projet de loi n° 1. Parce que rappelons que, par la suite, il y aura l'étude détaillée. Donc, laissons-nous au moins le temps, la chance d'aller vers l'étude détaillée, et après on aura des discussions sur place, peut-être, sur des questions d'amendement, des questions d'articles précis. Mais, si déjà à l'adoption de principe on se bute à une certaine opiniâtreté de la part d'un des groupes parlementaires — je n'étais pas certaine si le terme «opiniâtreté» est accepté, tant mieux — donc, si on se bute déjà à une certaine opiniâtreté de la part de l'opposition officielle, je vais vous dire, Mme la Présidente, c'est extrêmement malheureux, et pas seulement... évidemment, pas seulement pour ma petite personne, moi, la députée de Louis-Hébert, et pas pour mon collègue, et pas pour nous ici; pour la population du Québec.

Et là je vais en arriver à un passage obligé, soit le rappel, pour le bénéfice, entre autres, des collègues de l'opposition officielle, de l'issue de la dernière élection, Mme la Présidente, le 1er octobre dernier. Et là c'est difficile de s'opposer ou de contredire les propos que je vais tenir parce que ce sont les chiffres qui parlent. De manière tout à fait objective, nous avons, bien humblement, accueilli une victoire assez importante. Nous avons un nombre de collègues ici qui ont été élus démocratiquement et qui sont tenus de représenter, bien sûr, les citoyens des circonscriptions dans lesquelles ils ont été élus et de participer à la mise en place, à la réalisation de l'ambitieux programme que nous avons présenté pour changer le Québec.

Évidemment, on voit grand, on voit loin, nous, pour le Québec, je n'embarquerai pas dans tous les volets de ce qu'on veut faire pour faire progresser le Québec, mais un de ces volets-là importants touchait l'intégrité, touchait la confiance du public, touchait l'indépendance des institutions, la séparation des pouvoirs judiciaire, exécutif, législatif. Toutes ces suspicions, tous ces questionnements, toutes ces inquiétudes, légitimes ou non, mais qu'on a sentis, qu'on a entendus dans les médias, dans les débats publics, dans les dernières années, tous ces éléments-là nous ont poussés à faire de cette promesse de réformer le mode de nomination aux deux tiers de l'Assemblée nationale une promesse-phare de notre programme politique. Et nous avons été élus avec cette forte majorité. Alors, on tient pour acquis que les gens sont d'accord avec la réforme de ces modes de nomination et de destitution de trois postes névralgiques. On considère, comme je l'ai dit dès le départ, que c'est noble, que c'est pertinent, que c'est approprié de vouloir non seulement rétablir la confiance du public, mais donner un rôle accru aux députés de l'Assemblée nationale dans ces mêmes processus.

La deuxième opposition est déjà d'accord sur le principe. La troisième, on ne le sait pas. Et là on se bute à l'opposition officielle, qui pourtant, ce même 1er octobre, a, elle aussi, reçu un fort message de la population mais dans le sens inverse. La population, qui était tannée de cette attitude, de cette attitude de fermeture, d'opposition, d'arrogance — est-ce que j'ai le droit, «arrogance»? — d'opposition, d'opposition...

Une voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : ...

M. Tanguay : O.K. Bien, Mme la... faire un rappel au règlement...

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je vous écoute. Je vous écoute, monsieur.

M. Tanguay : ...demander à la ministre de retirer, parce que vous lui avez demandé, mais ce n'était pas... Le mot «arrogance» a été prononcé, et ce sera dans les galées. J'aimerais que vous le demandiez et que ce soit dans les galées, qu'elle retire ce mot-là. Si, son projet de loi, elle commence avec ce ton-là, Mme la Présidente, ce ne sera pas un gage de sérénité de nos débats. Elle est capable d'en faire; on est capables de répliquer.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Écoutez, je vous invite à faire attention à vos propos, tel que je l'ai mentionné, et je vous invite à poursuivre. Et tout va bien jusqu'à maintenant. Il faut continuer de faire attention, s'il vous plaît, à vos propos. Merci.

M. Schneeberger : Mme la Présidente, hier, lors des...

Une voix : ...

M. Schneeberger : Comment?

Une voix : ...

M. Schneeberger : Bien, moi, je veux répondre...

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Non, mais c'est correct, je viens tout juste de... À moins que vous ayez autre chose à rajouter. Sinon, bien, je pense que...

M. Schneeberger : ...j'aurais pu aussi intervenir à plusieurs reprises quand le député de La Pinière, notamment, est intervenu. Alors, je pense qu'on va, tout le monde, se calmer...

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : O.K. Merci, M. le leader adjoint. Là, on perd, actuellement, un petit peu de temps. Et j'invite la ministre à poursuivre et je l'invite également à faire attention à ses propos. Mme la ministre.

Mme Guilbault : Donc, je vais retirer «arrogance». Mais cette attitude de fermeture, d'opposition, d'une certaine suffisance... Est-ce que ça, c'est permis? Bon, disons un dérivé, que je ne nommerai pas. Et donc cette attitude, cette attitude... Notez bien, Mme la Présidente, que moi, je suis en toute bonne foi ici ce soir. Je réplique à une motion qui a été déposée par l'opposition officielle, que vous avez jugée recevable, alors on se doit de répliquer, et je réexplique très sereinement et très objectivement la réalité des choses.

Alors donc, revenons au 1er octobre. L'opposition officielle a, elle aussi, reçu un message très clair à l'effet que cette attitude, qu'ils ont depuis des mois, des années, déplaît aux Québécois. Les Québécois étaient justement tannés de ce genre de comportement là. Et ça vaut pour tous les parlementaires. Les Québécois sont saturés de ce genre de comportement : s'opposer pour s'opposer, bloquer des projets et des idées qui peuvent être bénéfiques pour la population sous prétexte de partisanerie, de caprice, de je ne sais trop.

Une voix : ...

M. Tanguay : Mme la Présidente, rappel au règlement. En vertu d'une décision rendue le 20 novembre 2013, page 5776, de Carole Poirier, «bloquer» les projets de loi, c'est antiparlementaire. Je vous demanderais, encore une fois, de rappeler la ministre à l'ordre.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je vous rappelle, Mme la députée, qu'il faut faire attention à nos propos, ne pas porter des intentions aux autres. Je vous invite à poursuivre en faisant attention et ne pas employer d'autres adjectifs qui veulent dire la même chose. Alors, je vous redonne la parole.

Mme Guilbault : Merci, Mme la Présidente. Alors, qu'est-ce que je disais? Parce qu'avec toutes ces interruptions je finis par perdre le fil. Mais on en revient toujours à la même chose, de toute façon, Mme la Présidente, donc, cette attitude pour laquelle les Québécois ont une aversion. Et, encore une fois, ça vaut pour tous les parlementaires, les parlementaires qui, en 2018, en 2019, adoptent ce genre d'attitude qui va à l'encontre de la souhaitable collaboration, qui va à l'encontre de la collégialité à laquelle les gens s'attendent de nous.

On a tous été élus, M. le Président, dans nos 125 circonscriptions. Donc, indépendamment du fait qu'on soit au gouvernement ou dans l'opposition, là, on est tous des députés, et les gens s'attendent à ce qu'on les représente.

Par contre, le nombre de députés élus, et ça, c'est la responsabilité ministérielle dans sa plus simple et primaire expression, la responsabilité ministérielle est faite d'une manière telle que le parti qui élit le plus grand nombre de députés forme le gouvernement. Alors, en ce sens-là, nous, on prend notre responsabilité et on réalise le programme qu'on a présenté aux Québécois et pour lequel ils nous ont majoritairement élus. Et ces mêmes Québécois sont tannés de ce genre d'attitude.

Moi, j'ai déposé un projet de loi n° 1, on l'a dit, symbolique, mais vraiment en toute bonne volonté. Et, je vais vous dire, très sincèrement, Mme la Présidente, je suis surprise du comportement de l'opposition officielle. Je croyais sincèrement et peut-être même naïvement que ce projet de loi là pourrait cheminer sans encombrement, sans désagrément, sans chicane, sans agressivité latente, sans problème, quel qu'il soit. Je pensais qu'on pourrait cheminer, en arriver à l'adoption de ce projet de loi là et, je vais en profiter pour le rappeler parce qu'il y a une certaine urgence en ce qui me concerne, pour la simple et bonne raison que je dois nommer un nouveau commissaire à l'Unité permanente anticorruption au maximum le 3 novembre prochain. Donc, j'en réinforme les collègues, si ça les intéresse. Si on n'a pas adopté le projet de loi actuel et que je n'ai pas eu le temps de lancer l'appel de candidatures — il y a un premier comité qui doit le rencontrer, le deuxième comité éventuellement formé de parlementaires, et tout ça — et que tout ça n'a pas le temps de se faire avant le 3 novembre, je devrai, Mme la Présidente, et là les gens concernés devront en prendre la coresponsabilité... je devrai nommer moi-même un commissaire à l'UPAC pour une durée d'au moins un an. Puis normalement c'est au moins trois ans, parce que, là, les gens aiment ça avoir... savoir un peu à quoi ils s'attendent. On ne nomme pas des postes aussi importants pour des durées trop brèves, donc. Et là les gens devront vivre avec la conséquence d'une nomination faite par le gouvernement, alors qu'on a tellement protesté, on s'est tellement dit qu'on veut des commissaires nommés par l'Assemblée nationale, qu'on veut tasser le politique, le... c'est-à-dire le policier du gouvernement, du politique. On a une occasion en or, là, sous les yeux, à portée de main, Mme la Présidente. On a une urgence temporelle, parce qu'on sait comment fonctionne le Parlement, il y a des étapes à franchir pour l'adoption d'un projet de loi. Il y a des étapes à franchir pour un appel de candidatures, pour la sélection d'un candidat, etc., la nomination, l'entrée en poste. Et on a une échéance : le 3 novembre. Donc, je voulais redéposer ça ici pour alimenter la réflexion des collègues, parce que cette échéance-là, elle existe, indépendamment de nous, de l'amour ou non qu'on peut avoir l'un pour l'autre, indépendamment des désaccords qu'on peut avoir. Ça n'a rien à voir. Cette réalité-là, elle existe.

Et donc c'est ça, alors, je vous le disais, j'ai été très surprise, très franchement surprise de cette attitude parce que je croyais bien humblement, bien naïvement, encore une fois, que le projet de loi allait pouvoir cheminer rapidement, facilement, aisément et, je dirais même, agréablement, parce que j'estimais que, pour un premier projet de loi, non seulement nous en sommes fiers parce que ça vient opérationnaliser un engagement-phare qu'on a pris depuis longtemps, mais que ça pourrait être un projet de loi qui aurait pu nous rallier puis donner un peu le ton à une collaboration de bon augure, une collaboration franche, respectueuse, qu'on aurait pu maintenir pour la suite des quatre années. Parce qu'on va passer quatre ans ensemble, Mme la Présidente. Donc, comme le dit le collègue de LaFontaine, le temps pourrait être long si on adopte des attitudes qui ne sont pas de nature à favoriser l'avancement des dossiers.

Et donc, dans ce sens-là, c'est ça, comme je vous dis, je suis déçue. J'espère... Parce qu'évidemment, à la façon dont les choses sont faites, il y aura un vote sur cette motion-là, et qui, selon toute vraisemblance, ne sera pas retenue, parce que nous allons voter contre, mais on aura pris ces deux heures encore pour débattre de ça. Et je présume que, par la suite, il y aura d'autres interventions sur le principe. Je veux juste rappeler aux collègues que ce projet de loi là...

Vous savez, on a des sujets qui nous divisent de manière beaucoup plus manifeste, de manière évidente et de manière connue depuis longtemps. Prenons l'exemple de la laïcité. On s'attend à ce qu'au dépôt du projet de loi sur la laïcité... qui est piloté par mon collègue, dont je ne veux pas me mêler outre mesure, mais on s'attend à ce qu'il y ait de l'opposition de la part du Parti libéral. Mais on n'en sera pas surpris parce que c'est bien connu, c'est historique que nos positions sur la laïcité sont diamétralement opposées. Ça fait que je ne me lèverai pas sur un tel projet de loi pour avoir le même discours que je peux avoir là, parce qu'on s'y attendrait puis on jugerait, jusqu'à un certain point, que c'est normal. On sait que... On connaît leurs valeurs, on connaît, disons, le créneau très circonscrit dans lequel ils logent sur cette question, et donc on n'en serait pas surpris.

• (17 h 30) •

Par contre, encore une fois, je m'attendais à ce que, sur un projet de loi comme celui qu'est le projet de loi n° 1, qui porte sur un sujet qui devrait être transpartisan entre autres parce qu'il, justement, vise à rendre les nominations transpartisanes puis à permettre le concours des députés des oppositions dans le processus... je m'attendais, bien sincèrement, à ce qu'on puisse procéder plus rondement, parce que je pense que les citoyens s'attendent à mieux de nous. Je pense que les citoyens voient d'un très bon oeil qu'on puisse nommer ces trois personnes-là aux deux tiers de l'Assemblée nationale.

Encore une fois, des collègues ont une opinion favorable connue, alors j'encourage, Mme la Présidente, l'opposition officielle à se rallier, je dirais, à notre groupe majoritaire de députés qui sont favorables à ce projet de loi, qui se demandent pourquoi ça a été si long avant qu'on se donne des moyens concrets pour rétablir la confiance du public envers des institutions aussi importantes que l'UPAC, le DPCP, la Sûreté du Québec et qui, en toute bonne foi, et même avec bonheur, peut-être, jusqu'à un certain point, vont voter pour le principe, vont participer à l'étude détaillée, vont voter pour l'adoption finale, et qu'enfin on puisse procéder sur ces fameuses nominations aux deux tiers une fois pour toutes. Et, vous savez, à la même époque où nous, dans notre formation politique — dont vous étiez, Mme la Présidente — on a demandé inlassablement ces nominations aux deux tiers... dont vous étiez, mais maintenant vous êtes tout à fait indépendante, là, je veux le noter... Et donc, à l'époque où on faisait ces inlassables demandes, quelle réponse avions-nous du précédent gouvernement, qui forme actuellement l'opposition officielle? Nous avions, pour toute réponse, un refus, un refus catégorique. Et j'ai rappelé, la semaine dernière, là, dans le cadre d'une question ici que j'ai reçue de la collègue d'Acadie, j'ai rappelé les propos du précédent premier ministre, qui était le chef du Parti libéral, qui insinuait ni plus ni moins que ce peut être dangereux, inusité pour une démocratie de laisser une assemblée législative se mêler de la nomination d'une charge publique telle que le commissaire de l'UPAC. Je ne l'invente pas. Le précédent premier ministre, qui était assis ici, là, l'a répété autant comme autant. À chaque fois qu'on a pu avoir des questions ou des motions là-dessus, le premier ministre disait : Ça ne se fait nulle part, puis il n'y a personne qui fait ça, puis ce serait dangereux, puis ça n'a pas de bon sens.

Donc, on sait que le Parti libéral a toujours été contre les nominations aux deux tiers, mais, au moment où on est arrivés au gouvernement et au moment où on a déposé notre projet de loi n° 1, comme je vous dis, sur la base des premières discussions, des premières impressions, le ton, le climat dans les consultations particulières, j'avais l'impression, encore une fois, probablement naïvement, qu'on pensait tous à peu près la même chose, qu'on s'en allait tous dans le même sens et qu'on avait tous même hâte de pouvoir adopter ce projet de loi et procéder à une première nomination incessamment, le commissaire de l'UPAC, comme je vous l'exposais tout à l'heure. Donc, j'avais vraiment cette impression qu'on allait procéder rondement. Et là, force est de nous demander : Est-ce que finalement le Parti libéral serait toujours contre les nominations aux deux tiers? Est-ce qu'ils sont contre le principe de ce projet de loi? Parce que ce n'est pas clair à date. Il y a eu diverses interventions, dont une qui a fini explicitement en disant : Comme mes collègues, je ne dirai pas si je vote pour ou contre, mais on va continuer de parler.

Bon. Alors, on ne sait pas à quelle enseigne exactement loge le Parti libéral officiellement sur le principe de ce projet de loi là. J'ai pensé qu'il y serait favorable, et je m'en réjouissais, on s'en réjouissait tous. Et donc, là, je me demande si finalement cette ancienne opposition aux nominations aux deux tiers n'est pas en train de ressortir à travers toutes ces procédures et cette utilisation, disons, maximale de toutes les façons de faire disponibles ici dans le cadre de chacune des étapes du cheminement d'un projet de loi. Donc, je me dois encore une fois de le déplorer. Mais, en même temps... j'ai l'air négative peut-être, Mme la Présidente, mais, en bout de ligne, on va y parvenir. Dans tous les cas, ce projet de loi va être adopté un jour. Ça, c'est certain, là. Et donc, ce jour-là, on sera bien heureux puis on va s'applaudir, on va s'en réjouir, les collègues de la deuxième opposition et peut-être de la troisième aussi, on sera tous très heureux, puis, si on est chanceux... de pouvoir procéder bientôt, dans les prochains mois, à la nomination du prochain commissaire de l'UPAC.

Mais, en attendant, Mme la Présidente, c'est mon travail... L'opposition officielle passe leur temps à dire que c'est leur travail d'intervenir les uns après les autres. Donc, moi, c'est mon travail, aujourd'hui, comme ministre de la Sécurité publique qui a déposé ce projet de loi, et au nom, bien sûr, de tous mes collègues du gouvernement, c'est mon travail de déplorer le fait que je ne puisse compter sur la collégialité espérée, l'adhésion espérée, le ralliement de tous les collègues autour de ce projet de loi, qui aurait pu être non seulement un premier projet de loi symbolique pour notre gouvernement — déjà, évidemment, nous, ça nous satisfait, puis on en est heureux — mais ça aurait pu être un premier projet de loi symbolique pour toute l'Assemblée législative, pour toute l'Assemblée nationale, pour tous les collègues ensemble. Imaginons, Mme la Présidente, qu'on vote tous pour à l'adoption finale du projet de loi, qu'on vote tous en faveur de ce projet de loi là et que, par la suite, on désigne tous ensemble ces trois postes-là aux deux tiers. C'est quand même un pas immense pour la démocratie.

Et là je vais reprendre des propos qu'on a entendus en consultations particulières, d'une chaire de recherche, des gens qui sont venus, trois personnes qui sont venues, d'éminents chercheurs d'une chaire de recherche universitaire, évidemment, donc, et l'un d'eux précisait que c'est rare de voir un gouvernement qui accepte de délaisser de son pouvoir au profit du législatif, parce que le pouvoir de nommer ces trois personnes-là, actuellement, là, est entièrement sous la responsabilité de l'exécutif, donc du gouvernement, et, nous, ce qu'on veut faire avec le projet de loi n° 1, c'est une translation d'une partie de ce pouvoir-là vers le législatif, vers l'Assemblée législative, vers les 125 collègues qui représentent les 125 circonscriptions qui forment le Québec, pas uniquement les 75 qui forment le gouvernement. Et cet éminent chercheur disait mot pour mot que c'est rare de voir ça de la part d'un gouvernement. Ce n'est quand même pas rien, là, Mme la Présidente. On parle d'une personne qui a une grande expertise, qui a fait de la recherche, qui enseigne, fort probablement... ou, en tout cas, du moins, qui participe à une chaire de recherche sur les institutions parlementaires, le parlementarisme, et tout ça, et qui vient nous dire ça. Puis évidemment les collègues savent comment ça fonctionne, les consultations particulières. Il n'y a rien qui est arrangé avec, comme on dit, le gars des vues, là, les gens viennent, ils ont leur point de vue, l'exposent. Et, tout bonnement, cette personne-là dit ça. Alors, moi, ça m'a réjouie d'entendre ça. Je ne savais pas que cet homme-là allait venir dire ça. Et, quand j'ai entendu ça, ça m'a confortée, ça nous a confortés dans l'impression qu'on fait foncièrement la bonne chose en déposant le projet de loi n° 1, en cherchant à départir le gouvernement du seul pouvoir de nommer ces trois postes-là, à conférer une partie du pouvoir de nomination, de destitution aux collègues des oppositions, aux collègues de l'Assemblée nationale.

Des chercheurs le disent, Mme la Présidente. On est, au minimum, 85 députés ici à être d'accord, sur 125, avec ça, avec ce principe-là, Mme la Présidente. Le public, en général, est avide, avide de gestes qui vont lui permettre de retrouver sa confiance, oui, en les trois institutions qui sont l'objet du projet de loi n° 1, mais en leur gouvernement en général, en leurs députés en général, en la classe politique.

• (17 h 40) •

On a souvent évoqué le fameux cynisme ambiant. Le cynisme, je peux vous dire qu'il est ambiant et il est intense, mais je pense qu'en posant des gestes comme celui qu'on a fait en déposant ce projet de loi là c'est de nature à ramener un certain optimisme dans la population, qui se dit : Ah! bien, regardez. Parce que, là, on va tous s'entendre sur le fait que ce projet de loi là, un, ce n'est pas un projet politique. Ce n'est pas un projet avec lequel on veut faire de la politique, avec lequel on veut créer des guerres, des chicanes, essayer de se faire valoir au détriment d'un autre groupe. Bien au contraire, c'est un projet de loi qui enchâsse une fois pour toutes le pouvoir de tous les partis représentés à l'Assemblée nationale dans des processus de nomination, de destitution de gens très importants dans l'administration publique.

Alors, que voulez-vous de plus, Mme la Présidente? Je cherche d'autres arguments pour vous convaincre du caractère merveilleux de ce projet de loi. Je pourrais en trouver, j'imagine, jusqu'à la fin de cette heure, je pense. Je pense, j'ai 59 minutes qui me sont dévolues. Mais il m'apparaît évident, évident, Mme la Présidente, que, pour toutes les raisons que j'ai abondamment évoquées et détaillées, le projet de loi n° 1 est un excellent projet de loi symboliquement, factuellement. Il accomplit le premier devoir qu'on devrait tous avoir comme députés, c'est-à-dire reconquérir, mériter et conserver la confiance de nos concitoyens, les gens qui nous ont élus, les gens qui nous élisent, Mme la Présidente. Évidemment, il y a beaucoup de gens qui sont allés voter en ne pensant pas nécessairement au projet de loi n° 1, en ne pensant pas nécessairement à la nomination de l'UPAC ou du D.G. de la Sûreté du Québec, là. Ça, on en est tous bien conscients. Par contre — on en a souvent parlé, dans les dernières années, des nominations aux deux tiers — je dirais, de manière presque subliminale, ça fait partie des propositions de la CAQ qui sont ancrées dans l'imaginaire collectif, ça fait partie... et tout le thème de l'intégrité, d'ailleurs, je vous dirais, Mme la Présidente, mais nommément cet élément-là des nominations aux deux tiers, tout comme les propositions qu'on a faites sur la laïcité, tout comme la grande priorité qu'on a voulu faire de l'éducation, tout comme ce qu'on veut faire pour nos aînés qui sont dans des conditions innommables dans certains CHSLD, l'ensemble de ces propositions-là qu'on a répétées, encore une fois, inlassablement dans les dernières années, malgré les oppositions, malgré les revers, malgré, des fois, le temps qui nous paraît long, parce qu'on veut avoir les moyens de pouvoir mettre en place toutes ces belles propositions là.

Et là on a cette chance-là, depuis le 1er octobre, d'être au gouvernement, d'avoir la possibilité de réaliser tous ces engagements. Et on commence, comme je le disais, par ce projet de loi n° 1, qui fait référence à un engagement de très longue date mais qui touche, comme je le disais, le thème plus général de l'intégrité. Les gens sont saturés de tous les scandales qu'on a connus dans les dernières années. Je ne reviendrai pas sur la commission Charbonneau, mais on sait tous que ça a laissé ses traces dans la confiance de la population. Il y a eu d'autres commissions, il y a eu d'autres scandales, il y a eu d'autres histoires déplorables qui sont sortis dans les médias aussi. Je pense, sous toute réserve, et c'est mon opinion bien personnelle de citoyenne, je pense que toutes ces histoires-là ont concouru à l'issue de la dernière élection. Je pense, encore une fois, que les gens sont avides de députés, de ministres, de représentants politiques... à tous les paliers de gouvernement d'ailleurs, mais parlons pour celui qui nous concerne ici, au provincial, sont avides de représentants politiques qui leur ressemblent, qui parlent pour eux, qui comprennent leurs préoccupations, qui agissent en conformité avec ces préoccupations, qui travaillent pour leurs intérêts et qui s'occupent beaucoup plus de faire avancer des projets de loi comme le projet de loi n° 1, transpartisans, objectivement pertinents et bons, qui devraient rallier tout le monde, donc qui s'occupent à faire avancer des éléments comme des projets de loi n° 1 plutôt que de faire des guerres, plutôt que d'alimenter l'animosité qu'on peut sentir, des fois, entre partis, entre collègues, plutôt que de chercher la confrontation. Les gens ont envie que les députés, que les ministres, que les partis travaillent ensemble.

Et on l'a vu — vous l'avez peut-être vu, Mme la Présidente — récemment, ma collègue ministre de la Justice est allée à l'émission Tout le monde en parle avec la collègue de Marguerite-Bourgeoys... je ne sais pas si c'est encore Marguerite-Bourgeoys...

Une voix : ...

Mme Guilbault : ...oui, Marguerite-Bourgeoys, de Sherbrooke et de Joliette. Elles sont allées ensemble... pas débattre, c'est-à-dire, mais discuter d'un tout autre sujet qui concerne les agressions sexuelles, et tout le monde a salué cette tribune-là, ce panel-là transpartisan à quatre, où, encore une fois, tous les partis représentés à l'Assemblée nationale se mettent ensemble pour l'avancement d'une cause qui est noble, qui dépasse nos petites personnes respectives, qui dépasse un parti, qui dépasse un statut à l'Assemblée nationale mais qui vise à faire avancer une cause qui est noble et qui est salutaire pour l'ensemble de la population, entre autres pour les femmes, en l'occurrence, pour ce sujet-là, parce qu'on sait qu'elles sont énormément touchées par la problématique en question. Mais donc tout le monde a salué cette façon-là de travailler ensemble.

Et moi, Mme la Présidente, je caresse encore le rêve de pouvoir faire de même dans les dossiers qui me concernent, donc avec mes vis-à-vis, avec les collègues en général, d'ailleurs, mais plus particulièrement avec mes vis-à-vis, donc la députée d'Acadie, la députée de Duplessis et le député d'Hochelaga-Maisonneuve. Et donc, c'est ça, je caresse ce rêve de pouvoir travailler de manière collégiale et transpartisane sur des dossiers qui nous sont chers. Et je caressais le rêve que ce projet de loi n° 1 puisse être ce premier dossier qui allait permettre de jeter les bases d'une collaboration agréable, voire amicale et qui aurait pu s'étirer sur les quatre prochaines années tout en satisfaisant la population, qui, encore une fois, est assoiffée de gestes concrets pour rétablir l'impression d'intégrité et la confiance du public envers nos institutions policières et judiciaires.

Alors, je vais, je pense, terminer là-dessus, Mme la Présidente, parce que je crois avoir un collègue qui, lui aussi, a envie d'intervenir sur la question. Mais, pour terminer sur ce qui est à l'origine de mon intervention, à savoir la motion en question, bien, j'invite les collègues... évidemment, là, on a deux heures de débat là-dessus, mais j'invite, par la suite, les collègues... encore une fois, qui ne risque rien n'a rien, j'invite les collègues de l'opposition officielle, par la suite, à faire preuve, disons, de concision... ou, en tout cas, tout en faisant leur travail, évidemment, mais à se rallier à ce principe du projet de loi n° 1, à voter en faveur du principe du projet de loi n° 1, à participer avec nous, en toute collégialité, à l'étude détaillée, qui, de toute façon, devra avoir lieu. On pourra avoir des discussions. Et sachez, Mme la Présidente — et j'espère que le collègue de LaFontaine écoute — que je ne tiens pas rigueur au collègue de ce qui se passe en ce moment et je ne veux pas partir sur des mauvaises bases. Je fais un dernier appel à leur collaboration, mais, en même temps, Mme la Présidente, il faut tenir compte du fait qu'on a été élus pour certaines promesses et qu'on se doit, par responsabilité de député, de ministre, de gouvernement, par responsabilité ministérielle politique, de réaliser les engagements pour lesquels les gens nous ont élus, et ce serait irrévérencieux envers la population de chercher à nous dissuader ou à faire en sorte qu'on ne puisse pas réaliser les engagements pour lesquels nous avons été portés au gouvernement.

Sur ce, Mme la Présidente, je vous remercie de votre patience, je remercie tous les collègues et je cède la parole à mon successeur.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la ministre de la Sécurité publique. Maintenant, je cède la parole au député de LaFontaine.

M. Marc Tanguay

M. Tanguay : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je vais reprendre la balle au bond de la ministre de la Sécurité publique : je pense, en ce qui nous concerne, qu'il serait irrévérencieux envers la population du Québec de ne pas faire notre travail de député, la motion de scission qui est l'objet du débat, qui est devant vous aujourd'hui et qui ouvre un débat de deux heures, puis je vais revenir sur le bien-fondé de cette motion de scission là, qui existe en vertu de nos règles parlementaires, qui a été utilisée bien avant nous aujourd'hui.

Le parlementarisme québécois a force au Québec depuis 1792. Il y en a eu une et d'autres, Mme la Présidente, des motions de scission, et j'en veux pour preuve ce que disait notre collègue député et évidemment ministre du Transport sur une motion de scission qu'avait présentée son collègue aujourd'hui ministre de l'Éducation, mais, à l'époque, ils étaient dans l'opposition. Le ministre du Transport disait, et je le cite : «La motion de scission existe depuis fort longtemps, comme vous le savez, dans notre système parlementaire, et prévoit que toute motion de fond qui contient plus d'un principe peut être scindée, sauf exception qui est prévue au règlement.» Des motions de scission — Mme la Présidente, on n'a jamais remis en cause la bonne foi des collègues de l'opposition, lorsqu'on était au pouvoir dans la 41e, parce qu'ils déposaient des motions de scission — ça fait partie de nos débats parlementaires. Et, si on ne le faisait pas dans des cas qui, comme aujourd'hui... est jugé recevable, parce que vous l'avez jugé recevable... Ça prend évidemment l'expression de plus d'un principe. Vous avez déclaré et reconnu qu'il y avait, dans le projet de loi, plus d'un principe. Ça, c'est un élément important qu'il faut soulever, et j'aurai l'occasion, lors de mon intervention, Mme la Présidente, d'aller au fond des choses.

• (17 h 50) •

Pourquoi c'est pleinement justifié, la motion de scission? Parce que deux choses sont en cause aujourd'hui par le projet de loi n° 1 : le mode de nomination des policiers que sont le directeur, la directrice de la Sûreté du Québec et le directeur, la directrice de l'Unité permanente anticorruption. UPAC, SQ, c'est la police. DPCP, le Directeur, la directrice des poursuites criminelles et pénales, ça, ce n'est pas la police, c'est le quasi-judiciaire. Et on voit ce qui se passe à Ottawa présentement. Les gens, les femmes et les hommes, les citoyens et citoyennes qui nous écoutent à la maison savent ce qui se passe à Ottawa, savent l'importance de distinguer l'exécutif du judiciaire. Ça fait des semaines qu'à Ottawa le débat fait rage, et aujourd'hui l'ex-ministre de la Justice est devant un comité parlementaire à Ottawa pour venir, entre autres, donner sa version quant à ce qui s'est passé dans un contexte où il y avait, semble-t-il, des discussions, il y avait des discussions à savoir : Est-ce que, dans un dossier donné, la ministre de la Justice, de laquelle relève la directrice des poursuites pénales au fédéral, parce qu'au fédéral c'est la directrice des poursuites pénales... Au Québec, c'est la directrice des poursuites criminelles et pénales. Dans le cas d'Ottawa, la ministre de la Justice, de laquelle, donc, relève la directrice des poursuites pénales, elle devait conserver évidemment une distance avec l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire qui relève d'abord de la directrice des poursuites pénales et qui, ultimement, en vertu de la loi, en vertu de la constitution, lui permet de passer outre et de donner des indications : Vous poursuivez ou vous ne poursuivez pas dans un certain dossier donné.

Et là, le débat qui fait rage, et aussi évident qu'il faut être sur une autre planète pour ne pas savoir ce qui se passe à Ottawa, aussi évident que l'on sait tous qu'il y a une distinction nette entre l'exécutif et le judiciaire, bien, Mme la Présidente, on peut, par analogie... toute analogie est imparfaite par définition, mais on peut, par analogie, venir justifier la motion de scission aujourd'hui, où on vous dit, sous le même souffle, on dit : La directrice des poursuites criminelles et pénales, le quasi-judiciaire, c'est une chose, et la police, également, c'est une autre chose. La motion de scission vient faire en sorte que l'on veut distinguer ces deux institutions-là. Et, sur le fond des choses, sur le fond du mécanisme, Mme la Présidente, ce serait de faire en sorte donc d'aborder par nature deux institutions distinctes, de faire un débat qui soit, je vous dirais, efficace et cohérent. La ministre veut de l'efficacité. Bien, mal lui en prit, Mme la Présidente, nous avons, chacune et chacune d'entre nous, le droit de parler et nous allons utiliser notre droit de parole. Et nous ne ferions pas notre travail si nous ne le faisions pas, Mme la Présidente, et c'est pour ça.

Et, sur le même souffle, je me rappelle, moi, mon collègue député, à l'époque où il était leader adjoint du deuxième groupe d'opposition... aujourd'hui, il est leader adjoint du gouvernement, et il disait, et je le cite, sur une motion de scission qui avait été présentée par notre collègue député de Lévis, qui est aujourd'hui président de notre Assemblée nationale... mon collègue de la CAQ leader du gouvernement disait, et je le cite, sur la même motion de scission qui aujourd'hui est décriée par la ministre, en ces termes... ministre de la Sécurité publique, il disait, le collègue leader adjoint du gouvernement, qu'il fallait préserver, et je le cite, «préserver le droit des parlementaires à exprimer leurs opinions». Plus loin — ça, c'était dans un débat en 2015 — il dit, et je le cite toujours : «Et donc de faire un amalgame de deux choses qui sont totalement distinctes...» Parce qu'il parlait de deux éléments d'un projet de loi qui, selon lui... dépôt de motion de scission. La présidence avait reconnu qu'il y avait là deux principes et que la motion de scission était débattable. Après ça, les collègues voteront. Mais la motion de scission était débattable parce qu'il y avait deux principes : possibilité de faire deux projets de loi distincts, et ainsi d'augmenter notre efficacité, puis c'est justement à ce souci d'efficacité là auquel faisait écho, donc, le leader adjoint du gouvernement en 2015 et auquel, aujourd'hui, la ministre de la Sécurité publique aimerait nous rappeler à l'ordre en disant : Bien, soyez efficaces. Bien, l'efficacité passe, entre autres, parfois par une motion de scission. Mon collègue de l'époque disait : «Et donc de faire un amalgame de deux choses qui sont totalement distinctes l'une de l'autre dans un seul projet de loi restreint mon privilège, comme parlementaire, d'exprimer non seulement par les opinions, mais par mon vote... parce que — M. le Président, n'oublions pas une chose — nous sommes tous ici, comme législateurs, appelés à voter, et ça, c'est l'expression ultime qu'on peut avoir par rapport à un projet de loi, car, par le vote qu'on va s'exprimer ultimement, donc, là, on restreint ma capacité d'expression en faisant cet amalgame-là.» Fin de la citation.

Donc, le leader, aujourd'hui, adjoint du gouvernement l'avait bien compris en 2015, à l'époque, quand il était toujours leader adjoint mais de la deuxième opposition, en disant que ça participe de l'efficacité de nos débats, ça participe également de l'expression pleine et entière de nos droits de parlementaire que de pouvoir aborder un sujet, un principe qui tient debout par lui-même et qui appelle des institutions qui, par définition, par nature, ne se mélangent pas, Mme la Présidente. Tout comme, encore une fois, l'analogie avec ce qui se passe à Ottawa. On dit : La ministre de la Justice et la directrice des poursuites pénales ne devaient pas subir de pression de l'exécutif, du premier ministre et du cabinet. C'est le débat qui fait rage là-dedans. Je ne me prononce pas sur le fond des choses, on n'était pas là, personne, puis ils sont capables de faire le débat, mais tout le monde reconnaît, peu importe la position qu'ils ont, tout le monde reconnaît qu'effectivement il ne peut pas y avoir ingérence, on ne peut pas faire en sorte que l'exécutif vienne court-circuiter, court-circuiter l'expression du pouvoir discrétionnaire. Ça, c'est à Ottawa, c'est l'exécutif, d'une part, et la ministre de la Justice et la directrice des poursuites pénales, d'autre part. À Québec, aujourd'hui, le projet de loi met dans le même bain... Mon collègue leader adjoint du gouvernement, à l'époque, le disait : On met dans le bain deux principes différents, distincts. Moi, je dois aborder les deux en même temps. Par définition, on ne peut pas aborder les deux en même temps. Et, dans les représentations que l'on fait, que ce soit à l'article par article, sur le principe ou sur les autres étapes, dépôt du rapport de la commission et ultimement sur l'adoption finale, Mme la Présidente, la façon de s'exprimer sur un projet de loi pourrait nous faire dire : Bien, sur cette partie-là, on est pour puis, sur cette partie-là, on est contre, Mme la Présidente.

Et donc, en ce sens-là, il est important de le souligner, que la motion de scission vise justement à quoi?, à faire en sorte de ne pas mélanger deux choses qui ne se mélangent pas. On le voit à Ottawa, jusqu'à quel point ça ne se mélange pas. La police, d'un côté, et la directrice des poursuites criminelles et pénales, de l'autre. En ce sens-là, ils participent donc de l'expression de notre travail de député et de pouvoir se prononcer sur ces éléments-là, et qui, le cas échéant, Mme la Présidente, amènera des amendements d'une certaine nature, dans certains cas, et d'une tout autre nature, dans d'autres cas. Et ça, c'est faire avancer le Québec. Et les signaux qu'elle a eus justement par rapport à l'UPAC, par rapport à la Sûreté du Québec et à l'ouverture qu'il y a en ces matières... Elle dit qu'il faut absolument qu'elle remplace l'actuel directeur intérimaire, je crois, de l'UPAC d'ici novembre. Mais, si d'aventure ce projet de loi là était mis sur les rails de façon distincte après avoir voté et adopté la motion de scission, je peux vous dire que là-dessus il y aurait de très, très forts consensus qui seraient exprimés, toujours en prenant sous réserve le fait qu'il faut faire attention parce que ce n'est pas parce que c'est la police qu'il n'y a pas évidemment une préoccupation d'indépendance, préoccupation, donc, de perception également d'indépendance et de neutralité et d'exercice pleinement discrétionnaire de son pouvoir de mener des enquêtes à son rythme — des enquêtes, parfois, c'est court, des enquêtes souvent c'est long — et faire en sorte, donc, de compléter les dossiers sans avoir de pression partisane, médiatique, ou autre. Et ça, c'est important.

Donc, en faisant en sorte que ce train-là avance et que le DPCP, qui participe d'une tout autre nature, Mme la Présidente... mais ça, c'est important de le souligner, et d'où le débat que nous avons sur la motion de scission. Puis son problème qu'elle a, de dire : Bien, il faut que je le nomme en novembre... si on y va avec ce premier projet de loi là, je peux vous le dire, que, Mme la Présidente, le débat serait assez circonscrit. Faire en sorte que l'on puisse, donc, faire avancer le Québec sur cet élément-là, toujours en ayant des débats constructifs. Ça veut dire qu'il va y avoir des amendements, puis il y aura discussion il y aura vote, ultimement, mais on a voix au chapitre.

Puis, Mme la Présidente, tous mes collègues, que je défendrai, des collègues des 125 comtés... les 124 comtés — je suis le 125e — les 124 comtés, Mme la Présidente, ont le droit de prendre leur temps, d'utiliser leur temps. Ils ne le font pas en vain. Ils ont des choses à dire, des femmes et des hommes, oui, qui ont mis leur face sur le poteau puis qui ont des opinions également. Puis l'unanimité, Mme la Présidente, dans une démocratie, là, des fois, c'est antinomique. Il faut faire en sorte, oui, d'entendre des gens qui ne pensent pas comme nous autres puis des gens qui... C'est peut-être un peu plus long, mais, vous savez, on va plus vite quand on est seul, mais, quand on est en groupe, on va plus loin.

Et, avec votre permission — je vois que vous me faites signe, l'heure avance — j'aurai l'occasion de poursuivre sur cette lancée demain.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député de LaFontaine.

Ajournement

Alors, compte tenu de l'heure, les travaux de l'Assemblée sont ajournés et ils reprendront demain, jeudi le 28 février 2019, à 9 h 40. Merci.

(Fin de la séance à 18 heures)