(Huit heures cinquante et une minutes)
Mme
Hivon
:
Bonjour, tout le monde. Alors, ce matin, on demande au gouvernement, de manière
urgente, d'investir tous les efforts et tous les moyens requis pour en arriver rapidement
à une entente avec les travailleuses de la petite enfance. On le voit, les
parents sont derrière les travailleuses de la petite enfance, et ce n'est pas
rien dans le contexte actuel où les parents vivent des inconvénients importants
que tout le monde aimerait éviter.
Mais la cause des travailleuses de la
petite enfance, c'est une cause juste avec laquelle nous sommes 100 %
solidaires. C'est la cause de l'égalité pour les femmes, pour du travail
majoritairement féminin. C'est la cause d'un rattrapage salarial qui aurait dû avoir
lieu de longue date. C'est une cause de respect, d'équité, de justice, c'est
une cause aussi de simple logique pour freiner l'exode et les départs dans le
réseau des CPE.
Mais cette cause pour laquelle se battent
les travailleuses de la petite enfance, c'est une cause qui est aussi beaucoup
plus grande que la seule cause de leurs conditions de travail, c'est la cause
de l'avenir, carrément, de la qualité et du réseau des CPE. C'est la cause
aussi, vous le savez, de la place des femmes sur le marché du travail, de la
conciliation famille-travail et du développement du Québec dans son ensemble.
Donc, il serait urgent, grandement temps que le gouvernement comprenne enfin
l'urgence de la situation et la justesse de cette cause-là, et qu'il soit
solidaire de cette cause, et qu'enfin il débloque les négociations pour que
tout le monde en soit gagnant.
La situation est très sérieuse, et je dois
vous dire qu'au-delà de l'entêtement du gouvernement dans le conflit avec les
travailleuses de la petite enfance, ce qui nous inquiète profondément, c'est le
fait que le gouvernement envoie des signaux comme quoi il est en train de
laisser tomber les CPE et de valoriser le privé. On a des signes très clairs de
ça. Non seulement il y avait une règle traditionnelle où 85 % des
nouvelles places en CPE… des nouvelles places créées devaient être en CPE, et
il est en train de s'en éloigner, dans les dernières annonces qui ont été
faites, c'est 50 % à peine de places qui sont créées en CPE. Vous l'avez
vu jeudi dernier dans le minibudget, le gouvernement a augmenté de manière
significative le crédit d'impôt pour la fréquentation des garderies privées,
1 milliard de dollars d'investissement. Il va complètement à contre-courant
de ce que les parents veulent, de ce que les experts demandent, ce que le
milieu demande et ce que nous demandons. Nous l'avons demandé formellement, il
faut prendre le virage 100 % CPE, ça veut dire 100 % de création des
nouvelles places dans les CPE, et ça veut dire 100 % de conversion des
places de garderies privées en CPE. Et avec le milliard qu'il investit pour
rehausser le crédit d'impôt, il pourrait convertir et créer des dizaines de
milliers de places.
Donc, c'est extrêmement inquiétant, cette
attitude. On demande au gouvernement de changer de cap, de changer de cap dans
les négociations, de changer de cap parce qu'on a le sentiment qu'il revient
vers le passé, vers le passé libéral des garderies privées.
Sur ce, je vais laisser la parole à mon
chef, Paul St-Pierre Plamondon.
M. St-Pierre Plamondon (Paul) :
Merci, Véronique. Un petit mot sur l'échangeur Turcot qui sera carboneutre dans
100 ans. Ce n'est pas sans faire penser à l'annonce absurde du gouvernement
caquiste à l'effet que le troisième lien serait lui aussi carboneutre parce
qu'on planterait des arbres.
Première chose, dans 100 ans, on va
tous être morts. Quand on parle de carboneutralité, c'est rapidement pour des
raisons d'urgence climatique. Deuxièmement, j'aimerais apprendre à la CAQ qu'on
peut planter des arbres sans faire de troisième lien. Il n'y a pas de lien
entre les deux. Donc, c'est vraiment une insulte à notre intelligence que
d'affirmer qu'on va faire un troisième lien carboneutre, et l'exemple de
l'échangeur Turcot est éloquent, c'est n'importe quoi.
Parlant de nouvelles plus réjouissantes,
il y a les Barbades que je veux féliciter parce qu'ils se sont libérés de la
monarchie britannique, et c'est la preuve que peu importe la taille des pays,
peu importe le profil d'un pays, la liberté, c'est quelque chose d'essentiel,
la démocratie, c'est une valeur essentielle. Donc, aujourd'hui, on va déposer
une motion pour les féliciter, pour rappeler que l'abolition de la monarchie, c'était
dans le programme de la CAQ, mais que, malheureusement, à chaque fois que le Parti
québécois a essayé, par motion ou par toutes sortes de démarches, de vraiment
agir par rapport à la présence de la monarchie britannique au Québec, jamais,
jamais, jamais la CAQ n'a daigné lever le petit doigt. Nous, on est clair sur
nos orientations et on est cohérent dans nos gestes. Sur ce, vos questions.
La Modératrice
: On va
prendre vos questions. Une question, une sous-question.
Mme Côté (Claudie) : Bonjour,
M. St-Pierre Plamondon.
M. St-Pierre Plamondon (Paul) :
Bonjour.
Mme Côté (Claudie) : Je veux
revenir sur, bon, l'histoire de planter des arbres, là, pour atteindre la
carboneutralité. C'est quand même une façon de l'atteindre, là. Planter des
arbres, c'est quand même une méthode qui est reconnue. Visiblement, c'est une
méthode qui est longue, mais qu'est-ce qu'on peut faire sinon pour atteindre
cette carboneutralité? Est-ce qu'il y a façon de le faire?
M. St-Pierre Plamondon (Paul) :
Poser des gestes intelligents dans nos décisions de transport. C'est que l'idée
de l'écoblanchiment, là, c'est de prendre une mauvaise décision mais ensuite
dire : On va planter des arbres qui potentiellement... Prenons l'exemple
du troisième lien. Supposons que le troisième lien est ouvert en 2032, bon, on
aurait des résultats de carboneutralité en 2132. Mais on se comprend, là, en
2132, il est trop tard. Le problème, c'est que la décision du troisième lien
est indéfendable et vraiment irresponsable sur le plan environnemental, et ensuite
on fait de l'écoblanchiment pour un résultat potentiel dans 100 ans. C'est
une insulte à notre intelligence. C'est des mauvaises politiques publiques. Et
on ne peut pas ensuite se réclamer d'une carboneutralité suivant des mesures
comme celles-là.
Mme Côté (Claudie) : C'est un
argument qui ne passe plus, dans l'opinion publique, de dire : On va
planter des arbres?
M. St-Pierre Plamondon (Paul) :
Les gens sont plus intelligents que ça. Ils s'attendent à des décisions
gouvernementales intelligentes sur le plan de l'environnement mais aussi sur le
plan des finances publiques et sur le plan des transports. Malheureusement, les
trois critères, là, ne sont aucunement remplis par le projet du troisième lien.
Mme Côté (Claudie) : Un petit
mot peut-être sur les garderies, peut-être Mme Hivon, sur les CPE plutôt. Bon,
un des points d'achoppement, c'est la reconnaissance de… l'augmentation
salariale des autres corps de métier. Bon, vous nous avez entendus, là, vous,
est-ce que vous accepteriez d'augmenter ce…
Mme
Hivon
: Ça
va de soi. Il faut qu'il y ait un rattrapage salarial. C'est assez incroyable d'entendre
le premier ministre dire : Il faut qu'ils aient les mêmes salaires.
Justement, dans les CPE, ils n'ont pas les mêmes salaires. Un préposé,
16 $ en CPE, 20 $ dans le réseau de l'éducation, même chose pour les
responsables de l'alimentation, des différences de 4 $, 5 $, 6 $
de l'heure avec le réseau de la santé. Donc, justement, l'équité, la justice
commande un rattrapage salarial pour tous ces employés de soutien aussi.
M. Carabin (François) : M.
St-Pierre Plamondon, j'aimerais vous parler de CHSLD. Mme Rosebush revient
devant la coroner ce matin. Qu'est-ce que vous voulez entendre de sa part?
M. St-Pierre Plamondon (Paul) :
La vérité. Premièrement, là, on doit comprendre ce qui s'est passé hier. Mme
Rosebush est venue dire, dans son premier témoignage : Il n'y a pas de
rapport écrit. Hier, la coroner a dit carrément au gouvernement : Les
rapports écrits, je les ai parce que des sources confidentielles me les
fournissent. En d'autres mots, ce que vous ne voulez pas me donner, pour nuire
à mon enquête, là, je l'ai obtenu. Puis là, tout d'un coup, le gouvernement
sort puis dit : Ah! nous, on va donner tous les rapports. Donc, il y a eu
vraiment un manque d'intégrité de la part du gouvernement. Donc, on va demander
à Mme Rosebush : Pourquoi avoir dit qu'il n'y avait pas de rapport écrit,
alors que, là, le gouvernement est prêt à les fournir?
Mais moi, je suis curieux de savoir, j'aimerais
qu'on demande à Mme Rosebush également : Est-ce qu'on vous a demandé de
mentir? Parce qu'il ne faut pas présumer de l'intention de l'individu en
question, est-ce qu'on a, dans la préparation des témoignages, est-ce qu'on a
demandé à Mme Rosebush d'omettre que les documents présentés ont été créés le
16 novembre, d'omettre que les rapports écrits existent puis que tout le
monde le sait dans le ministère que les rapports écrits existent, pour s'en
tenir à une version dans le cadre duquel il y a juste des documents… il y a
juste des rapports de manière verbale? Moi, je pense qu'on peut lui poser la
question : Est-ce qu'on vous a demandé de faire ça? Est-ce qu'il y a eu
une coordination dans les témoignages? Parce que c'est une mesure de l'intégrité
du gouvernement, une mesure de la confiance qu'on doit ou non leur accorder
dans cette enquête-là.
M. Carabin (François) : Puis
vous me parlez de rapports écrits. Vous, hier, qu'est-ce que vous avez compris
de la période des questions, les rapports d'inspection, les rapports de vigie?
M. St-Pierre Plamondon (Paul) :
Rien. On ne comprend plus rien, mais c'est que, des fois, à force de s'empêtrer
puis s'enfarger dans ses menteries, ça crée une confusion, et on est à ce
point-là. Et heureusement la coroner a mis fin à ça en disant : Écoutez,
les rapports que vous voulez me cacher, je les ai, parce que des gens,
confidentiellement, me les ont remis. Donc, arrêtez de jouer, là, je le sais
que vous ne me dites pas la vérité, donnez-moi les rapports. Mais dans les communications
du gouvernement, la réponse, c'est : il n'y a rien à comprendre.
M. Carabin (François) : Juste
pour finir. Ça fait à peu près une semaine et demie que les partis d'opposition
martèlent, tapent sur le clou des CHSLD ensemble. Est-ce que vous avez
l'impression d'avoir peut-être déstabilisé le gouvernement ou d'avoir fait une
craque dans son armure?
M. St-Pierre Plamondon (Paul) :
On ne demande pas grand-chose, on demande à ce qu'il n'y ait pas d'obstruction
ou d'entrave à l'enquête de la coroner, ce qui veut dire de collaborer puis
dire la vérité. Donc, les oppositions, d'une seule voix, sont intervenues pour
obtenir la vérité, puis c'est à coup de travail confidentiel de gens qu'on ne
connaît pas qui donnent l'information à la coroner qu'on découvre que le gouvernement
est en train de mentir sur ces questions-là. Donc, c'est très inconfortable.
Nous, on fait notre travail dans l'espoir que le travail se fasse de manière
complète puis que la vérité soit dite, ce qui est normal quand on est sous
serment. Rappelons-le, ce sont des témoignages sous serment.
La Modératrice
: Dernière
question en français.
M. Lavallée (Hugo) : Oui.
Bonjour. Une question pour Mme Hivon concernant les CPE. Donc, vous avez
évoqué, tout à l'heure, une stratégie 100 % CPE, là, si j'ai bien compris.
Donc, vous voulez, si je comprends bien, éliminer complètement le modèle du
milieu familial, de la garderie privée. Pourquoi?
Mme
Hivon
: On
ne veut pas éliminer le modèle de la garderie en milieu familial, c'est une
cohabitation. Le 100 % CPE, c'est pour les places en installation.
Pourquoi? Parce qu'étude après étude, c'est là que la qualité se trouve, parce
que, sondage après sondage, c'est les places que les parents souhaitent, et on
va voir de plus en plus des écarts. Et là c'est ça qui est très inquiétant, c'est
cette espèce de parti pris pour le privé qui est en train de revenir nous
hanter. On se croirait vraiment au retour des années libérales.
Pour nous, le choix, il est clair, là, le
1 milliard qu'ils investissent dans l'augmentation du crédit d'impôt,
nous, c'est le 1 milliard qu'on dit qu'on va investir en cinq ans et qui
permettrait de convertir l'ensemble des places de garderies privées pour les
mettre en CPE, c'est le coût de fonctionnement que ça représente. Donc, c'est
un vrai choix de société, là, qui est devant nous.
Puis le gouvernement n'a même pas dit :
On hausse ça de manière temporaire, non, non, non, c'est minimum pour cinq ans,
là. Ça fait que, je veux dire, c'est une mesure pérenne d'augmenter le crédit
d'impôt plutôt que de dire : On va se retrousser les manches, on est à la
croisée des chemins, il faut développer des dizaines de milliers de places, on
va les développer en CPE, ce qui est la demande, ce qui est l'expertise, ce qui
est ce que tout le monde a comme consensus.
Ce n'est pas des farces, même les
garderies privées, la semaine dernière, en commission parlementaire sur le
projet de loi n° 1 sur l'avenir des services de garde, demandent un
programme de conversion, parce que les garderies privées non subventionnées, ça
ne fonctionne plus. Les tarifs sont beaucoup trop élevés. Les pénuries sont
trop grandes. Les parents, plusieurs parents préfèrent rester à la maison que
de payer 60 $, 70 $ de la journée.
Donc, ça a été développé de manière
anarchique, ça ne marche plus. Donc, les propriétaires, les représentants des
garderies privées ont dit la semaine dernière : On souhaite un programme
de conversion massif. Évidemment, c'était avant la hausse substantielle du
crédit d'impôt, mais ça ne tient pas la route. Donc, oui, c'est ce qu'on
demande, une cohabitation milieu familial, parce que ça va toujours répondre à
certains besoins, notamment dans les petits milieux, et 100 % des places
en installation en CPE sur une période de transition de cinq ans.
M. Lavallée (Hugo) : Mais est-ce
qu'on ne risque pas d'arriver à ce résultat-là de toute façon? Parce que le
gouvernement dit : On va parachever le réseau des garderies publiques
d'ici quatre ans, on va créer 37 000 places. Vous dites
vous-même : Les parents recherchent ces places-là. Donc, s'ils ont le
choix d'aller là ou dans une garderie privée, naturellement, ils vont se
diriger vers le réseau public. Le crédit d'impôt aura beau être là, pas
beaucoup de gens vont l'utiliser, là, s'il y a assez de places dans les CPE, si
on suit votre logique.
Mme
Hivon
: Non.
Bien, en fait, justement, malheureusement, le gouvernement, depuis des années,
il y avait une norme minimale traditionnelle de 85 % des nouvelles places
qui devaient être créées en CPE. Ce qu'on a vu dans les dernières annonces qui
ont été faites dans les derniers mois, la comptabilisation, c'est qu'environ
seulement 50 % des nouvelles places annoncées, créées, le sont en CPE
versus des garderies privées.
Et le premier ministre, vous vous
rappellerez que dans son annonce de fin septembre, il a dit : «Moi, je
veux des places — je reprends son expression — au plus
sacrant». Et ce qu'on voit sur le terrain, c'est que ce n'est pas juste les
places en CPE qui sont retenues, au contraire, il est en train vraiment de
prendre n'importe quel projet de garderie privée, alors que tout le monde le
dit : Vaut mieux tout de suite donner le coup de barre, investir l'argent
qui est requis, mettre l'argent dans les CPE pour avoir de la qualité, pour
avoir des ratios d'éducatrices qualifiées.
Écoutez, on a de la misère en ce moment,
il y a une pénurie d'éducatrices dans les CPE. Imaginez la pénurie dans les
garderies privées. C'est l'hécatombe. Ils sont venus en témoigner la semaine
dernière, les propriétaires de garderies privées, on est à la croisée des
chemins.
Nous, on a un programme clair, sur
cinq ans, on est capables de faire la transition, il suffit d'investir les
montants. Le gouvernement va complètement à contre-courant. Puis lui, il
investit pour bonifier un crédit d'impôt qui va juste consacrer la place du
privé, voire lui redonner un coup de pouce pour qu'il se développe, alors que
la qualité n'est pas là, tout le monde en convient.
La Modératrice
: On
prend les questions en anglais.
Mme Fletcher (Raquel) : Sure. Yes, I have a question following that as well. I just want to
go back to the strike. You said the support staff earn less than in the
education system, and therefore it's legitimate that they would want a raise.
Can you explain that point?
Mme
Hivon
: Yes, for sure. It's totally equitable and it's a question of
justice that the support employees just have an increase in their salaries to
be competitive with what we see in the health and education sector. It's a
question of justice. And the closeness... the closed mind of the Government is totally astonishing about this
issue, because it is a question of justice. And we won't be able to go forward
with the future of the day care system if they don't understand that.
Mme Fletcher (Raquel) : Yesterday, we heard again the Premier say : You know, we're
close to an agreement, we're close to an agreement. But we're also still
hearing that there could be a special law. So, what do we believe? Are we close
to an agreement or will there be a special law? How do we get closer to an
agreement?
Mme
Hivon
: Well, we get closer to an agreement with the good will of the Government and a government that will step away from a false premise, which was to say :
We need to give a 2% increase to have equality and
equity with the rest of the support employees of the
public sector. It's the total opposite, because they are lacking... they've
been lacking an increase for years and years, so that the difference is often $4, $5, $6 an hour between the systems.
So, if he wants to talk
about justice and equality, he needs to give a substantial increase. And so we
need to see the good will of the Government. And the last thing he should be
doing now is to wave this threat of a special law. The employees have said :
It's the negotiation of the last chance. I hope that the Government understands
that, because we don't want to be facing the same thing as in CHSLDs and
hospitals when everybody is leaving the system. It is time now to get things straight.
Une voix
:
Merci beaucoup.
La Modératrice
:
Merci beaucoup. Bonne journée.
(Fin à 9 h 8)