(Dix heures quarante-huit minutes)
Mme Anglade : Alors, merci et
bonjour à tout le monde.
D'entrée de jeu, vous allez me permettre de
saluer tous les candidats qui ont porté différentes couleurs de formations politiques
dans cette élection fédérale, parce que c'est au coeur de ce que c'est que notre
démocratie. Alors, je souligne leur engagement lors de cette campagne. Je tiens
à féliciter tout particulièrement Justin Trudeau pour sa victoire et lui dire
qu'on va collaborer, certainement, en autant que les champs de compétence des
provinces soient respectés.
Je pense que le grand perdant de cette
élection, c'est François Legault. François Legault a parié gros et il a perdu,
et, dans cette défaite, il a entraîné tous les Québécois. La réalité, par
contre, c'est que notre formation politique, nous allons travailler avec le gouvernement
fédéral à faire en sorte qu'on avance pour les intérêts du Québec, à défendre
les intérêts du Québec, encore une fois dans l'intérêt des Québécois, et
surtout en respectant les champs de compétence des Québécois. En termes de
priorités, la question, évidemment, des familles, la question de
l'environnement, et, bien sûr, comment nous allons continuer à soutenir nos
entreprises…
Je suis maintenant prête à répondre à vos
questions.
M. Lacroix (Louis) : Le
Québec sort perdant de ce… Outre François Legault, là, qui a joué une game
politique, là, mais le Québec sort comment de cette élection-là, à votre avis,
dans quelle position?
Mme Anglade : Bien, si ça
avait été tout simplement… Lorsqu'on regarde les résultats au Québec, il y a eu
quelques changements, mais il y a eu peu de changements au niveau de la carte
électorale. Donc, ça aurait changé peu de choses si ça n'avait pas été de
l'implication de François Legault, qui nous a tous amenés dans sa défaite, dans
la situation actuelle, et je crois qu'il va falloir rebâtir les ponts avec le
fédéral.
Mme Prince (Véronique) : Mais
qu'est-ce que ça dit au niveau de notre rapport de force qu'on va avoir au Québec
pour, au minimum, les 18 prochains mois, là?
Mme Anglade : Encore une fois,
encore une fois, François Legault, dans le pari qu'il a fait, a entraîné tous
les Québécois là-dedans. Et c'est malheureux, parce que c'est sûr que le
rapport de force en a pris un coup par rapport au gouvernement fédéral. Mais encore
une fois notre formation politique, on va faire en sorte de collaborer et de
faire en sorte que les intérêts des Québécois soient défendus, et ça, c'est peu
importe la formation politique qui est au gouvernement. Là, c'est le gouvernement
libéral.
M. Laforest (Alain) : Vous
l'avez abordé, là… Compte tenu qu'on a une copie conforme, à 612 millions,
est-ce que ça donne de la légitimité à Justin Trudeau — vous l'avez
abordé, mais j'aimerais vous entendre plus là-dessus — de venir
envahir les champs de compétence puis imposer des conditions dans les
transferts en santé?
Mme Anglade : En aucun cas
l'élection actuelle ou n'importe quelle élection ne devrait donner de la
légitimité à un gouvernement fédéral d'intervenir dans nos champs de compétence.
Les champs de compétence, là, il faut les défendre bec et ongles sur toutes les
tribunes. Donc, je pense que c'est un message très fort que l'on doit envoyer
au gouvernement fédéral. Cela dit, notre relation avec le fédéral, encore une
fois, à cause du pari que François Legault a pris, qui nous a entraînés dans sa
défaite, ça fait en sorte que les relations vont certainement être plus
complexes. Mais en aucun cas un gouvernement fédéral ne devrait intervenir dans
les champs de compétence du Québec.
Mme Prince (Véronique) : …qu'un
gouvernement minoritaire va prévenir justement le gouvernement de venir jouer
dans les champs de compétence parce qu'il aura moins le pouvoir de le faire?
Mme Anglade : Qu'il soit
minoritaire ou majoritaire, le gouvernement fédéral ne doit pas intervenir dans
les champs de compétence du Québec, point. Il n'y a même pas de discussion à
avoir là-dessus. Je pense que notre position doit être extrêmement ferme par
rapport aux champs de compétence du Québec.
M. Lacroix (Louis) : Mais
est-ce que le Bloc n'est pas l'espèce de police d'assurance, justement? Parce
que le Bloc, quand même, a fait élire beaucoup de députés, peut présenter une
certaine partie du pouvoir, là. Alors, est-ce que ça ne nous protège pas justement
contre un gouvernement libéral qui pourrait être centralisateur?
Mme Anglade : Je pense que la
plus grande force pour le Québec, honnêtement, là, c'est la force de ce que
l'on envoie, nous, comme formation politique, à l'Assemblée nationale, c'est de
défendre les champs de compétence du Québec ici, à l'Assemblée nationale, puis
d'être très clairs avec le gouvernement fédéral, parce que, si je m'en vais
dans la direction dans laquelle vous vous en allez, ça voudrait dire que, s'il
y avait un gouvernement majoritaire, ce serait différent. Que ce soit
majoritaire ou minoritaire, peu importe, on doit défendre les champs de
compétence du Québec.
M. Lacroix (Louis) : Je
comprends, mais là le fait, c'est que c'est un gouvernement minoritaire avec une
délégation de peut-être 34 députés du Bloc. C'est quand même une délégation
assez importante, qui peut représenter une certaine partie… en fait, la balance
du pouvoir jusqu'à un certain point. Est-ce que ça n'empêche pas, cette forte
députation là du Bloc, Justin Trudeau d'envahir les champs de compétence?
Mme Anglade : Bien, j'ose
espérer que tous les Québécois qui ont été élus hier, tous les Québécois sous
toutes les couleurs politiques, vont défendre les champs de compétence, que ce
soit le Bloc québécois, que ce soient les libéraux, que ce soient les
conservateurs, que ce soit le NPD, que tous vont défendre les champs de
compétence du Québec au Parlement canadien.
M. Laforest (Alain) : Au Québec,
vous vous fiez plus aux conservateurs ou aux 34 bloquistes?
Mme Anglade : Au Québec, on se
fie à toutes les formations politiques pour défendre les intérêts du Québec. Ce
sont des Québécois qui ont été élus au Parlement canadien. Alors, pour le bien
de la fédération canadienne, dans laquelle on croit, pour le bien de la
fédération canadienne, on veut que ça fonctionne et que la notion de respect
des compétences soit clairement promue par l'ensemble des élus, peu importe sa formation
politique, au Québec.
Journaliste
: …Justin
Trudeau est aujourd'hui affaibli et le Québec peut en profiter?
Mme Anglade : C'est sûr que je
pense que Justin Trudeau aurait souhaité un gouvernement majoritaire, mais la
réalité, c'est que les Canadiens ont choisi de rester un peu dans la même
situation. Maintenant, il a quand même le mandat de gouverner pour les
prochaines années, hein?
M. Chouinard (Tommy) : Est-ce
que le Québec peut tirer profit de ce résultat-là, de la faiblesse…
Mme Anglade : J'aimerais toujours
que le Québec puisse tirer profit et avoir une relation de collaboration avec
le fédéral. Cela dit, la relation dans laquelle on se trouve aujourd'hui est
différente parce que François Legault a décidé d'intervenir et de dire aux gens
comment voter puis il a perdu son pari. Alors, cette relation-là va être à
rebâtir avec le gouvernement fédéral.
M. Bossé (Olivier) : …avec le
Parti libéral du Canada est bonne. On l'a compris un peu plus encore la semaine
passée avec l'implication de M. Fortin. Donc, est-ce que ça vous place
dans une meilleure position?
Mme Anglade : J'aurais
travaillé avec peu importe le parti qui aurait été élu au gouvernement fédéral.
Ce qui est important, je pense, c'est de vraiment saisir ce qui est fondamental
puis ce qui anime les Québécois. Les questions au niveau de la famille, les
questions en matière environnementale, les enjeux de nos entreprises, c'est ça
qui anime les Québécois et c'est ça que nous allons vouloir défendre avec le
gouvernement fédéral.
M. Lacroix (Louis) : La
semaine dernière, vous ne vouliez pas dire aux Québécois comment voter,
Mme Anglade. Hier, vous avez voté pour qui? Pourquoi vous ne répondez pas?
Le Modérateur
: Mme
Senay.
Mme Prince (Véronique) :
J'aimerais juste poser une question sur la loi n° 96,
par exemple, s'il vous plaît, parce que les consultations commencent
aujourd'hui. Alors, cette loi-là, on comprend qu'elle ne va pas assez loin si
même le Parti libéral est d'accord avec le projet de loi, au fond.
Mme Anglade : Écoutez, je
pense que, premièrement, sur le projet de loi, vous avez vu la lettre ouverte
de Mme David sur un certain nombre d'enjeux. Je pense qu'il reste beaucoup
de choses à discuter lors du projet de loi, puis c'est pour ça qu'il y a des
consultations. On va attendre les consultations, mais il reste quand même un
certain nombre d'enjeux à discuter. Alors, on est quand même loin de la coupe
aux lèvres.
Mme Prince (Véronique) : Vous
pouvez nous dire sur lesquels vous allez vouloir…
Mme Anglade : Comme ça a été
mentionné, il y a des sujets qui vont revenir à l'ordre du jour par rapport au
projet de loi n° 96, que ce soit la question de la clause dérogatoire…
Alors, toutes ces questions-là vont revenir, et ça va être débattu lors des
prochains mois, alors qu'on aura amplement l'opportunité d'en discuter.
Mme Senay
(Cathy) : Ms. Anglade, Mr. Legault
said that he wanted a minority government, so he won yesterday.
Mme Anglade :
I believe that the biggest loser of this election is François Legault. François
Legault gambled a lot and he lost his gamble. And I believe that the situation
in which he lost brought all Quebeckers with him, and it's really unfortunate.
I'd like to take a few moments to congratulate Mr. Trudeau for his
election, but again I think the biggest loser is François Legault.
Mme Senay (Cathy) : But you know exactly how politics will work. People will forget
about… that Mr. Legault gave a tacit endorsement to Mr. O'Toole, and
then he'll work again with Mr. Trudeau. Mr. Trudeau is a minority
government, so he doesn't have a choice but to listen to Mr. Legault, that
is still quite popular.
Mme Anglade :
I still believe that it's going to be a bit more complicated than that, in the
sense that there's something that happened during this election. And, clearly,
I don't believe that Quebeckers are going to forget that easily that François
Legault decided to go in favor of a particular party, I don't think they will,
and I think it will be an issue. I certainly hope, though, that the interests
of Quebeckers are going to be well represented.
Mme Senay (Cathy) : How do you imagine the phone call between the two?
Mme Anglade : I think there were a lot of simulations on Twitter last night, so
you could… You'll ask him how the conversation went. That's probably the best
thing to do.
Mme Senay (Cathy) : Last question. We're just barely a year before the next provincial
election. Mr. Legault will have an easy job because he already said that Quebeckers should stay away from Prime
Minister Justin Trudeau, nationalist Quebeckers. So he's got his message, he
has his target all ready to make gains. So his life, Mr. Legault's life,
is much easier this morning than if it was Mr. O'Toole, probably, in order
to win his next provincial election.
Mme Anglade : Well, I think, when you talk about the next election, there will be
a lot of things on the plate. I can think of the health care system, right now,
and people that are in emergencies that are closing. I can think of people not
being able to access day care. I can think of companies that are going bankrupt
today. So a lot of questions are going to be in the debate in a year from now.
A year is a long time.
Mme Senay (Cathy) : And my last question, about Bill 96, because we saw
Ms. David at the entrance, and she is worried about the notwithstanding
clause, but this is not the only worry for Liberals.
Mme Anglade : There are many questions about the bill. The bill has 200 articles.
There are many questions that still need to be answered. And today, like, we're
starting the hearings, and that's going to be helpful, but again there's a lot
of work ahead of us.
Mme Senay (Cathy) : Merci
beaucoup.
Mme Anglade : Merci. Thank you.
(Fin à 10 h 59)