(Huit heures quarante-trois minutes)
La Modératrice
: Alors,
bonjour. Bienvenue à ce point de presse du Parti québécois. S'adressera à vous
aujourd'hui Mme Véronique Hivon, porte-parole en matière de famille. Mme Hivon,
c'est à vous.
Mme
Hivon
: Oui,
bonjour. Merci beaucoup de votre présence. Je sais qu'il y a au même moment,
donc, une autre activité avec un briefing technique, donc je vous remercie d'être
ici.
En fait, ce matin, on fait une
interpellation du ministre de la Famille sur le bilan désastreux du
gouvernement de la CAQ en matière de service de garde, de places en service de
garde éducatif à l'enfance pour les familles du Québec. Alors, je veux juste
vous rappeler quelques données qui parlent d'elles-mêmes sur ce bilan
désastreux qui nous mène carrément dans une crise en ce moment pour les
familles du Québec.
Quand la CAQ est arrivée, la situation
était déjà difficile, il y avait 42 000 familles qui attendaient une place
sur le guichet 0-5 ans. C'est passé, un an après, à 46 000, et maintenant
on en est à 51 000 familles qui attendent une place. Et ça, ce n'est
pas le chiffre à jour, donc j'espère aujourd'hui que le ministre va nous donner
le chiffre à jour. Donc, 51 000 familles qui attendent une place.
Par ailleurs, un an après leur arrivée au
pouvoir, il y avait 8 000 places en milieu familial qui n'étaient pas
comblées. C'est-à-dire que, faute d'éducatrices, compte tenu de la pénurie d'éducatrices,
il y avait 8 000 places qui, en théorie, existent, sont budgétées,
mais n'étaient pas occupées.
Où on en est? En août dernier, le nouveau
chiffre du ministre, c'étaient 24 000 places. Donc, on a
24 000 places qu'on appelle des places fantômes, qui pourraient être
occupées par des enfants, qui pourraient aider les familles, mais faute d'éducatrices
et faute de plan adéquat du ministre pour valoriser et recruter des
éducatrices, bien, on a 24 000 places, et ça, c'est le chiffre d'août
dernier.
Alors, on s'imagine qu'aujourd'hui on doit
être rendus près du 30 000 places en milieu familial qui existent,
mais qui, compte tenu de toutes les éducatrices qui désertent la profession, ne
sont carrément pas occupées. Et donc, dans la dernière année, là, pour vous
donner un exemple, c'est 837 éducatrices en milieu familial qui ont fermé
leurs portes. Et donc, le chiffre, en ce moment même, du manque minimal
d'éducatrices pour cette année, ce serait 3 000 éducatrices de plus
qu'on doit trouver. Et la projection d'ici 2024, c'est qu'il va manquer
10 000 éducatrices au Québec.
Et pendant ce temps, le ministre n'a rien
fait, posé aucune action ni pour contrer la pénurie de places en elle-même ni
pour contrer, évidemment, la pénurie d'éducatrices, qui est directement reliée
au fait qu'on n'est pas capable de pouvoir occuper les places en service de
garde.
Et là, aujourd'hui, il y a quelque chose
d'absolument hallucinant qui se produit. Le ministre, donc, nous a annoncé, en
toute fin de journée hier, qu'il allait faire une conférence de presse à
9 heures, juste avant l'interpellation. D'ailleurs, on est très heureux
qu'il y ait des interpellations parce que, si ce n'était que de notre
interpellation, j'imagine que le ministre n'aurait toujours rien annoncé aujourd'hui
malgré la crise. Mais donc, au moment où on se parle, il y a un briefing
technique suivi ensuite d'un point de presse du ministre.
Il y a quelque chose d'un peu surréaliste
que le ministre, aujourd'hui, prenne une heure de conférence de presse pour
annuler des étapes. J'imagine, il dit qu'il va resserrer le processus, donc on
va voir. Est-ce qu'il va passer de 17 étapes, à huit étapes, à
10 étapes, à cinq étapes? C'est un processus administratif, purement et
simplement, dont personne n'avait entendu parler avant que, le mois dernier, le
ministre lui-même se réfugie derrière ce processus-là pour essayer de justifier
son échec, sa promesse brisée, pour essayer de justifier qu'il n'était pas
arrivé à livrer les 13 500 places qu'il s'était engagé à livrer, la
main sur le coeur, il y a deux ans presque jour pour jour.
Donc, aujourd'hui, grande nouvelle, il va
nous annoncer qu'il peut changer le processus administratif, comme ce qu'on
s'évertuait à lui dire, ce que ça fait deux ans et demi qu'il aurait pu changer.
Donc, c'est un aveu non seulement d'échec, mais c'est un aveu qu'il, en fait,
n'a pas donné l'heure juste aux Québécois quand il a essayé de rejeter le
blâme, le mois dernier, sur son ministère, sur le réseau, pour dire que c'était
inefficace et que c'est à cause de ça qu'il n'avait pas pu créer les
13 500 places qu'il s'était engagé à créer.
Donc, ce matin, le ministre fait la propre
démonstration de ce qu'on lui disait, qu'il était le responsable et qu'il n'en
tenait qu'à lui de changer, depuis son arrivée en poste, les éléments du
processus qui pouvaient amener de l'inefficacité. Et, comme je lui ai souligné
il y a quelques semaines, il n'a qu'à revenir au processus qui était en place
lorsque le gouvernement du Parti québécois était en place, à partir de 1997, où
c'était très fluide, très efficace, ça se développait rapidement et on en
faisait 10 000 places par année à ce moment-là, des places en CPE, et
la loi était la même. Donc, comment le ministre a-t-il pu nous dire, le mois
dernier, que ça prenait des changements législatifs, que ça prenait un livre
blanc, alors que ce matin même il va faire la démonstration qu'il n'en tenait
qu'à lui, du moins pour l'aspect du processus administratif, de le changer?
Alors, ce matin, ce qu'on espère de l'interpellation,
c'est que le ministre va, un, nous donner l'heure juste, qu'il va accepter ses
responsabilités et son inaction et qu'il va la reconnaître, qu'il va, bien sûr,
admettre qu'on a perdu deux ans et demi face à son inaction et à son manque de
volonté de changer les choses, mais surtout, j'espère qu'il ne va pas juste
annoncer des petits changements au processus administratif, mais qu'il va nous
annoncer un plan de match clair pour l'accélération du développement des
places, qu'il va nous annoncer des budgets supplémentaires, parce que si, pour
les maternelles quatre ans, le gouvernement n'arrête pas de répéter que ça
coûtera ce que ça coûtera, on aimerait ça avoir le même engagement que, pour
les CPE et la crise que ça provoque, ça coûtera ce que ça coûtera aussi pour le
gouvernement et les familles du Québec.
prévalente lorsqu'on était au gouvernement,
c'est-à-dire qu'il n'y avait aucune mise de fonds qui était demandée, donc, au
milieu, quand il développait des places — c'est toujours 25 %
qui est exigé, ça, c'est un frein énorme — qu'il va accepter tous les
projets qui lui sont soumis, qu'il va mettre les cartes pour évaluer les
besoins à jour. Parce que vous avez peut-être vu cette semaine qu'alors que la
zone de Longueuil est vue comme une zone à faibles besoins, bien, il y a eu
près de 1 000 parents qui ont levé la main pour un nouveau CPE de 80
places dans une zone qui, selon ses propres cartes, serait donc à faibles
besoins. Donc, ça, c'est un autre élément.
Puis finalement ce qui est vraiment,
vraiment urgent, au-delà de l'injection de fonds supplémentaires, d'avoir un
plan d'accélération, c'est d'avoir enfin un vrai programme de valorisation, de
formation et de recrutement des éducatrices, parce qu'en ce moment on fonce
dans le mur tout droit, comme le gouvernement a foncé dans le mur pour la
question de la pénurie de préposés aux patients, aux bénéficiaires dans les
CHSLD. Ça fait des mois, ça fait des années qu'on alerte toutes les lumières,
qu'on allume les lumières, qu'on agite les drapeaux face au ministre pour lui
dire qu'on s'en va dans le mur avec la pénurie d'éducatrices. Il n'y a toujours
rien de mis en branle. Pourtant, l'AQCPE a dit publiquement qu'elle lui avait
remis un plan de formation et de recrutement d'éducatrices dès le mois de
septembre dernier. Il y a des tonnes de partenaires autour de ce plan-là, et le
ministre n'a toujours rien annoncé. Donc, on espère que, ce matin, ce n'est pas
juste une annonce de révision d'un processus administratif, mais qu'il va avoir
des budgets supplémentaires et un vrai programme de valorisation et de
recrutement d'éducatrices.
Mme Gamache (Valérie) : Donc,
lorsque, ce matin, M. Lacombe dit : Bon, ma réforme, là, de limiter les
étapes, tout ça, pour l'obtention de CPE, ça fait en sorte qu'on va être
capable rapidement de créer quelque 4 359 places supplémentaires à l'été
2021, ça devient automatiquement des places fantômes? Parce qu'on n'a pas les
éducatrices. Est-ce que c'est un peu…
Mme
Hivon
:
Bien, en fait, c'est à voir. C'est sûr qu'on a besoin des deux. On a besoin des
éducatrices. Dans le réseau des CPE, il en manque plus de 1 000, puis dans
le réseau du milieu familial, il en manque encore beaucoup plus que ça
puisqu'on en était, aux derniers chiffres, à 24 000 places. Ça fait que
mettez, à peu près, six enfants par éducatrice, ça veut dire qu'il vous en
manque plus de 10 000, si on se fie à ça, O.K.? Donc, c'est excessivement
costaud, le problème de la pénurie des éducatrices.
Puis l'autre chose qui ne fonctionne pas,
s'il vous dit qu'il va en créer 4 300 d'ici l'été, c'est que, un, je vous
rappelle que c'était 13 500 qu'il devait livrer pour maintenant. En deux
ans, là, à l'hiver, on devait en avoir 13 500 de plus. Donc, ce n'est pas
des farces, ils font pire que les libéraux dans leur dernier mandat. Les
libéraux, en deux ans et demi de leur premier mandat, en avaient créé 4 000.
Puis on sait que ce n'étaient pas les champions des CPE et les plus grands fans
des CPE. Bien là, il en a créé 2 000 à peine en deux ans et puis là il
nous annonce que, cet été, il réussirait, avec son gros plan puis ses
changements, à en créer peut-être 4 000, alors que son engagement, c'était
13 500.
Ça ne tient juste pas la route, là, je ne
sais pas comment il peut essayer de se présenter puis essayer d'être crédible
aujourd'hui, là.
Mme Gamache (Valérie) : Puis
l'allègement, quand même, des processus administratifs, est-ce que c'est
quelque chose que vous saluez? De passer de 17 à neuf étapes, réduire de 12
mois, toutes les étapes administratives...
Mme
Hivon
:
C'est sûr que nous, ce qu'on espérait, c'est qu'il revienne au processus qui
était en place quand on était là, qui était très simple, qui avait beaucoup
moins d'étapes. Donc, ça, c'est un pas dans la bonne direction. Mais la
question qui se pose, c'est : Pourquoi, si c'était si simple puis qu'il n'en
revenait qu'au ministre, comme on lui disait depuis des mois, de changer le
processus... comment se fait-il qu'il a attendu deux ans et demi pour le
changer puis qu'il a attendu qu'on en soit rendu à 51 000 familles
qui attendent une place?
Aujourd'hui, il a vraiment des comptes à
rendre, le ministre de la Famille. Comment se fait-il qu'il n'ait pas bougé? C'est
juste la pression de son propre aveu d'échec d'il y a un mois, et toutes les
conséquences négatives que ça a créé, et la pression supplémentaire qu'il a
ressentie, parce que tout le monde a dit que ça n'avait aucun sens d'essayer de
se dédouaner en disant que c'était la faute de son ministère, quand c'était lui
qui était le responsable? C'est quand même hallucinant, là.
Mme Gamache (Valérie) : ...dû
être fait dans les six premiers mois...
Mme
Hivon
:
Bien, tout à fait. Quand il s'est présenté devant vous en février 2019 puis qu'il
a dit : Aïe! Moi, là, ça ne sera pas comme les libéraux, puis moi, là,
toutes les places qui dorment, on va les créer, puis il va y en avoir
13 500 en deux ans, puis je vous dis que ça va être efficace, bien, s'il
est venu vous dire ça solennellement que, lui, il allait les créer, ces
places-là, puis qu'il prenait l'engagement, comment se fait-il qu'il ne savait
pas ce que ça prenait pour les créer? Puis comment se fait-il qu'il n'ait pas
agi pendant tout ce temps-là pour rendre le processus plus efficace? Puis
comment se fait-il qu'il ait osé venir dire le mois dernier que c'était la
faute du processus, alors qu'aujourd'hui il nous montre que ce processus-là, il
n'en tenait qu'à lui de le changer?
Donc, je pense que là, à un moment donné,
il faut qu'il assume ses responsabilités puis surtout il faut qu'il nous dise
qu'est-ce qu'il va faire pour la suite, parce que, là, la confiance n'est pas
vraiment là, et la crise, elle est réelle, puis les conséquences sont énormes.
C'est quoi, les conséquences? C'est que c'est
des milliers de femmes, très majoritairement, qui restent à la maison faute de
pouvoir retourner travailler. Et ce que ça fait, c'est un déséquilibre,
évidemment, dans les ménages, un déséquilibre social, des conséquences
économiques très sérieuses.
Quand c'est rendu que la fédération de
l'entreprise indépendante sort conjointement avec l'AQCPE pour dire qu'il y a
urgence en la matière, c'est parce que les conséquences économiques sont
réelles. Quand c'est rendu que les maires, que les fédérations municipales
sortent pour dire : Ça nuit au développement de nos régions de ne pas
avoir un nombre suffisant de places en CPE parce que les familles ne viennent
pas s'installer chez nous, c'est que l'heure est grave.
Alors, comment se fait-il que le ministre
ait attendu tout ce temps-là? Puis là la pandémie a le dos vraiment large, là,
mais la pandémie, là, elle n'existait pas de 2019 au printemps 2020. Or,
quand il a pris son engagement la main sur le coeur de 13 500 places
en deux ans, bien, on était en février 2019. Il avait tout un an pour rendre
les choses beaucoup plus efficaces, créer ces places, accélérer les processus,
développer des budgets, obtenir des budgets, enlever le 25 % d'exigence
des milieux.
Donc, le ministre, en ce moment, il est
responsable de la crise que l'on vit, qui s'aggrave jour après jour à cause de
son inaction. Puis aujourd'hui j'espère qu'on va sentir que le ministre a
réalisé que c'était lui, le responsable du ministère de la Famille, qu'il n'en
tenait qu'à lui à changer les choses et qu'il ne va pas juste annoncer des
changements administratifs, mais qu'il va nous annoncer un programme de
recrutement massif, de formation d'éducatrices, des budgets supplémentaires et
une facilitation réelle avec un vrai plan de match accéléré.
La Modératrice
: D'autres
questions?
M. Grillo (Matthew) : Juste
en anglais, s'il vous plaît.
La Modératrice
: Oui,
en anglais, allez-y.
M. Grillo (Matthew) :Good morning.
Mme
Hivon
: Good morning.
M. Grillo (Matthew) : Do you think these administrative changes will actually make a
difference?
Mme
Hivon
: I think they can make a difference. It's one thing that can make a
difference. The problem is that the crisis is so big right now because those
changes weren't brought when they came into power, when the Minister arrived at
the Ministry, even if he said, you know, hand on the heart, that he would
change things and that there would be 13,500 new places created in two years, and
we are facing... 2,000 places that were created.
So, the question today
for the Minister is : How come, if today he's announcing this, because
he's under a lot of pressure and that the crisis is really growing and growing,
and the parents… I've never seen this in 10 years, so many parents calling, you
know, the office of their Member of the National
Assembly, in despair, to say : How can we get help? We cannot go back to
work. So, how come he had to face such pressure? How come he had to face such a
failure to finally start to do something, which he was able to do by himself
for the last two and a half years, you know?
So, this is why today he
has to answer that. How come, if today he is in front of journalists saying :
Oh! You know, we're changing the administrative process that nobody had heard
about before he, himself, talked about that last month, how come he wasn't able
to do that in the last two and a half years? And it's one thing, but there
needs to be a lot more action. We need to have a real program of valorisation,
and formation, and recruitment of workers, of «éducatrices» in the
domain, because there are 1,000, at least, that left in the… about 15 last
months. And there are more than 3,000 that are needed just right now. And we
don't see, although we have been asking this for two years now, we don't see
any plan from the Minister to tackle this issue.
M. Verville (Jean-Vincent) : …that the CAQ and the Liberals are the same thing. Why?
Mme
Hivon
:
Oh! The CAQ is worst. No, but I have to say that. And
it's quite astonishing, because everybody was feeling that the Liberals didn't
care at all about the CPE, because they were not doing enough. And, you know, when we were there, we were
creating 10,000 places per year. And in the last Liberal mandate, in two and a
half years, they created the double of what the CAQ created in their first two
years. So, for the same period, the Liberals, which were seen as the worst for
creating CPE places, well, the CAQ is doing worse.
So, you know, this is why today we say that it
is just disastrous, and we are facing a crisis, because there was no leadership
and because they put all their eggs in the four-year-old kindergarten. All
their eggs were put there, and they didn't care about the rest, and we see the
results today.
M. Verville
(Jean-Vincent) : What would you do differently
if you were at the place of M. Lacombe?
Mme
Hivon
: Well, I mean, first of all, you need to really have a program to
value and recruit new day care workers. It's an emergency. And you have to
accelerate the process of creating places. You have to increase the budget. You know, it's weird to hear and it's quite
disconcerting to hear the Prime Minister saying : You
know, for four-year-old kindergarten, it's going to
cost what it's going to cost, and when it comes to places in the day care
centers, all we hear is : Ah! well, you know, your plan is going to cost
10,000 more than what was budgeted for, so, go back to your table, draw
something new, come back.
So, it's super strict, you know, there's no money, they don't
budget enough. They still ask for 25% of financing from the «milieu», which
doesn't make any sense. When we were there, we didn't ask any of that. The
Liberals asked for 50%. The CAQ is asking for 25%. They have to abolish that. They
have to make it easier like it was when we were there. They have to have a real
plan for the workers. And they have to increase the budgets. So, this is what
they need to do. Thank you.
La Modératrice
: Merci
beaucoup. Bonne journée.
(Fin à 9 h 3)