(Huit heures cinquante-trois minutes)
Mme Labrie : Bonjour.
Donc, ce matin, on a vu que le ministre de l'Éducation, Jean-François Roberge,
commençait à manifester de l'ouverture pour faire des ajustements au niveau des
examens ministériels au secondaire. Moi, je voudrais lui lancer un appel
aujourd'hui. Je voudrais qu'il comprenne que ce n'est pas seulement la
pondération qu'il faut modifier, mais, vraiment, il faut prendre en compte la
réalité de ce qui se passe dans les classes et il faut envisager d'annuler
complètement ces examens ministériels là.
Le ministre a dit que, pour une raison
d'équité, il voulait les maintenir. Mais, au contraire, pour une raison
d'équité, il faudrait les annuler parce que ce n'est pas vrai que le contexte
d'apprentissage vécu par les élèves est pareil partout au Québec en ce moment. Donc,
d'imposer une épreuve qui serait uniforme à tous les élèves, en ce moment, ça
va faire en sorte qu'on va évaluer la même chose partout, alors que les élèves
n'auront pas nécessairement eu la même qualité d'enseignement. On peut penser,
par exemple, qu'il y a des élèves qui vont avoir passé beaucoup plus de temps
en mode virtuel que d'autres. On peut penser qu'ils n'auront pas eu accès à
tous les contenus qui étaient prévus au programme. Et, s'ils doivent se
soumettre à une même évaluation ministérielle que les autres, ils risquent d'en
être pénalisés.
Donc, ce qu'il faudrait faire, c'est
plutôt laisser aux enseignants le droit d'élaborer eux-mêmes des évaluations de
fin d'année qui vont tenir compte de ce qui a effectivement été vu en classe
avec les élèves pour pouvoir évaluer ce qui a vraiment été fait en classe, et
ça, ça garantirait une équité pour tout le monde. Donc, j'invite le ministre à
considérer cette option-là. Puis ça viendrait enlever une pression énorme en ce
moment sur les enseignants et sur les élèves, les enseignants qui se rendent
compte qu'ils ne seront pas nécessairement en mesure de passer à travers tout
le programme de cette année, par exemple en sciences, en mathématiques, en
histoire, des enseignants qui viennent à peine, dans certains cas, de rattraper
ce qui avait été retardé, là, avec la dernière année scolaire.
Donc, évidemment qu'en ce moment ils sont
inquiets de ne pas être capables de passer tout le contenu d'ici les examens
ministériels. Voilà.
M. Marissal : Merci,
Christine. Bonjour. Merci d'être là. Ça, c'est un matin typique de café de
travers quand j'ai lu ce matin les histoires touchant le casino. C'est le genre
de matin où ça passe mal, et tu te dis : Mais, bon sang, on a vraiment
laissé faire ça et on a vraiment encouragé ça? Vous avez vu comme moi les
reportages, là, des médias de Québecor, ce matin, qui nous apprennent que le
crime organisé est infiltré au Casino de Montréal pour toutes sortes
d'activités, notamment de blanchiment d'argent.
Soyons clairs, là, l'ombre de la mafia
plane sur tous les casinos de la planète. Le jeu attire la mafia, c'est connu.
Ça, c'est comme vous dire qu'il va faire noir à soir. Ce qui n'est pas normal
puis ce qui est totalement inacceptable, c'est que, sachant cela, non seulement
on a laissé faire, mais on a encouragé, avec des petites cartes VIP, des cartes
privilège, des cartes bijoux — il faut le faire, ils sont même
créatifs, à Loto-Québec, pour attirer les gens de la mafia — le
blanchiment d'argent. On connaît ces gens-là. Ils sont fichés. Il y a
probablement des enquêtes qui ont eu lieu vu qu'on a toutes ces
informations-là. On le savait, que ça allait arriver.
Moi, j'étais journaliste ici, là, quand on a
fait le débat sur le rapatriement des activités de jeu, notamment des casinos,
dans le giron de l'État. J'étais ici, je m'en souviens. Il y avait notamment
Claude Ryan qui débattait de ça, les libéraux de Daniel Johnson fils, après ça
le gouvernement de Jacques Parizeau. On a débattu de ça. Et l'argument
principal de l'État à l'époque… il y en avait deux, mais le principal, c'était
de dire : On va éliminer l'activité occulte et la mafia, le crime organisé,
des activités de jeu. Le deuxième, évidemment, c'était de faire de l'argent
pour les services publics. C'était comme le deal qu'on faisait. Bien, de toute
évidence, il y a juste une partie du deal qui a été respectée. Oui, ça fait de
l'argent, mais on a laissé volontairement le crime organisé s'infiltrer et, en
plus, on l'a encouragé. Vraiment, là, à matin, là, je lis ça, là, j'avais
l'impression de voir un remake cheap du Parrain. C'est scandaleux.
Alors, sans grande surprise, on va réagir.
Je vais déposer une motion, ce matin, à l'Assemblée nationale demandant que la
lumière soit faite, qu'elle soit faite publiquement, en toute transparence,
donc, par une commission d'enquête publique parce que ce genre de chose, personne
ne va me faire croire que ce n'était pas su, que ce n'était pas connu en haut
lieu. Ça s'est fait jusqu'à récemment avec du monde, là, qui sortait de prison,
puis il y avait presque une porte tournante qui les amenait au casino. En bon
latin, là, «come on, come on», je pense que, là, vraiment, on a dépassé les
bornes et on doit faire absolument la lumière là-dessus. Merci.
M. Lacroix (Louis) : Je me
souviens de ce débat-là. Moi aussi, j'étais journaliste à l'époque, puis
l'idée... On parlait, en même temps, des casinos, d'enlever toutes les machines
vidéopokers. Vous vous souvenez que c'était dans le même encadrement, parce
qu'on faisait ce constat-là à l'époque. Comme vous l'avez dit, ça a été débattu
ici même, en cette Chambre, à de nombreuses reprises. Qu'est-ce qui s'est passé
depuis pour que tous les gouvernements successifs se ferment les yeux et ne
fassent absolument rien?
M. Marissal : Je ne sais pas
ce qui s'est passé dans la tête des gens qui le savaient, là, notamment à Loto-Québec.
Et est-ce que c'est monté jusqu'au politique.? C'est pour ça que ça prend une enquête.
Qui savait quoi là-dedans?
M. Lacroix (Louis) : Est-ce
que l'appât du gain a été plus fort que la raison sociale?
M. Marissal : Pourquoi
traiterait-on des gens comme ça aux petits oignons avec des rondes de golf,
avec des soupers, avec des cartes bijoux? Je présume que c'est parce que ces
gens-là dépensaient beaucoup, beaucoup d'argent, en effet.
M. Laforest (Alain) : ...est-ce
que c'est les dirigeants de Loto-Québec? Est-ce qu'il y a des têtes qui doivent
rouler parce que, sciemment, là, on a laissé le crime organisé s'infiltrer, là?
C'est impossible qu'on ne savait pas que le dirigeant principal de la mafia de Montréal
était traité aux petits oignons dans le casino, là. Est-ce qu'il y a des têtes
qui doivent rouler ou on doit juste demander des explications?
M. Marissal : Non, je suis d'accord
avec vous que c'est impossible qu'on ne le sache pas. Je veux dire, au Casino
de Montréal puis dans les casinos au Québec, il y a un programme
d'auto-exclusion pour des gens qui sont malades du jeu puis qui flaguent Loto-Québec
en disant : Arrêtez-moi quand je rentre dans un casino, je ne veux plus
jouer, je veux me protéger de moi-même.
Puis la sécurité du casino… J'ai déjà
visité les installations du casino, là. Il y a des caméras partout. Ils ont un
service d'enquête interne. Ils sont capables de spotter Joe Bleau qui rentre, puis
qui s'est auto-exclu, puis ils vont le reconduire à la porte en disant :
Monsieur, vous n'avez pas le droit de jouer. Pendant ce temps-là, par le
garage, il y a des gens qui rentrent de l'argent plein les poches puis qui vont
dépenser des millions de dollars en quelques années. Vous avez parfaitement
raison, c'est impossible. Mais là on est sur des rapports de presse qui sont
étoffés. C'est pour ça qu'on a besoin d'une commission d'enquête. On a besoin
de poser toutes les questions.
Alors, avant de sortir la guillotine,
M. Laforest, on doit faire une enquête. Mais, de toute évidence, il y a
des gens qui savaient, qui ont encouragé ça, qui ont mis des programmes sur
pied. Alors, je pense qu'à la fin, oui, il est fort possible qu'il y ait des
gens qui soient totalement responsables. Moi, j'aimerais savoir jusqu'où c'est
monté. Loto-Québec, c'est une société d'État. Donc, à la fin, la responsabilité,
elle est aussi politique. Où l'information s'est arrêtée? Pourquoi est-ce qu'on
n'est pas allés plus loin? Comment ça se fait qu'on a toléré ça pendant des
années? On parle quand même, là, d'un temps d'une dizaine d'années. Mais une
bonne enquête publique, là, pour aller faire la lumière là-dessus… Ensuite, on
prendra les décisions.
Mme Gamache (Valérie) : Mais,
selon vous, est-ce que c'est possible et pensable qu'un jour, dans ces
10 ans là, là, plus ou moins, ça soit monté justement jusqu'au politique?
M. Marissal : La réponse
théorique à votre question est oui. Il est probable ou possible... Il est
possible, mais je ne le sais pas, je n'ai pas cette réponse-là. C'est pour ça
qu'on doit entendre les gens qui ont été en charge notamment du service de
sécurité, notamment la direction de Loto-Québec. Qui a organisé ces beaux
programmes de gratification des mafieux? À ce moment-là, on aura une idée beaucoup
plus claire.
M. Lacroix (Louis) : Mais, M.
Marissal, je veux bien, là, présumer du fait que les politiciens n'étaient pas
au courant, mais moi, je n'ai rien appris dans l'article en question, qui est
très bien fait. Puis ce n'est pas pour minimiser le travail des journalistes,
là, qu'on soit bien clairs, là, mais c'est des choses dont moi, j'avais déjà
entendu parler, dont vous aviez entendu parler, visiblement, ce que vous dites,
etc. Si nous, là, on en a entendu parler, comment ça se fait que les
politiciens, eux autres, regardaient ailleurs puis ils ont décidé de ne rien
faire?
M. Marissal : Même réponse. C'est
pour ça que prend une enquête. C'est pour ça que ça prend une enquête publique
pour être capable de tourner toutes les pierres et puis de voir qui était
responsable, qui était au courant. Y a-t-il eu des enquêtes? Où se sont-elles
arrêtées? Ont-elles été arrêtées? Combien de temps ça a duré? Est-ce qu'il y a
d'autres choses qu'on ne sait pas? Je pense qu'il est plus que temps de faire
la lumière sur les activités de casinos au Québec.
M. Larin (Vincent) : Si, par
exemple, il est prouvé que la P.D.G. de Loto-Québec savait que ça se déroulait
dans les casinos, est-ce qu'elle doit démissionner? Est-ce qu'elle doit être
renvoyée?
M. Marissal : Je n'ai pas dit
que la P.D.G. du casino ou de Loto-Québec le savait. Je dis que ça prend une
enquête publique justement pour déterminer ça. Et puis je pense qu'on se rendrait
service en le faisant parce que, là, la confiance est sérieusement ébranlée. Ça
se peut qu'il y ait des gens, comme M. Lacroix ou comme moi, qui ont déjà
travaillé dans ce domaine-là… On n'est pas totalement renversés de savoir que
la mafia tourne autour des casinos. Et je l'ai dit d'entrée de jeu, l'ombre de
la mafia est au-dessus de tous les casinos de la planète.
M. Laforest (Alain) : …
M. Marissal : Bien, c'est
aussi tout ce que le gouvernement a fait pour encourager ça. C'est un
volontariat, ma foi, assez surprenant. Mais je pense que le commun des mortels
et le public, la population, là, qui veut avoir confiance en ses institutions. Loto-Québec,
ce n'est pas une binerie, là, c'est quand même une immense société d'État. La
population veut avoir confiance. Puis là, en ce moment, si vous lisez ça, bien,
votre confiance, elle est sérieusement ébranlée.
La Modératrice
: Une
dernière question.
M. Pilon-Larose (Hugo) :
Concernant la DPJ à Granby, je ne sais pas si... la commission Laurent ne
rendra pas son rapport avant plusieurs mois encore, en 2021. Entre-temps, on
lit encore des histoires d'horreur, notamment ce matin. Qu'est-ce que vous
demandez au gouvernement de faire dès maintenant pour s'assurer de la
protection des enfants?
Mme Labrie : Bien, écoutez,
des rapports, il y en a déjà eu dans le passé. Donc, effectivement, je pense,
c'est des choses qu'on peut mettre en place avant d'attendre d'avoir le rapport
de la commission Laurent. Moi, je suis affligée chaque fois que je vois une
histoire comme celle-là. En plus, ce n'est pas la première fois à Granby. C'est
sur le territoire du CIUSSS de l'Estrie, où je siège.
Ce qui m'inquiète, notamment, actuellement,
c'est qu'on nous a avisés, dans les dernières semaines, qu'il y avait une
hausse des signalements à la protection de la jeunesse, et qu'ils avaient des
inquiétudes à savoir s'ils allaient être en mesure de les traiter parce que,
même s'ils ont réussi à réduire la liste des dossiers en attente dans les
derniers mois, la hausse des signalements, en ce moment, est importante.
Donc, évidemment, les mesures qui ont été
prises dans les derniers mois, depuis la première histoire qu'on a eue à Granby,
n'ont pas été suffisantes pour résoudre le problème à long terme. Ça, c'est
clair. J'avais déjà, justement, une rencontre prévue avec la direction de la
protection de la jeunesse de l'Estrie et avec le syndicat aussi, l'APTS, qui
représente beaucoup de travailleurs du centre jeunesse. C'est vendredi, là, la
rencontre prévue. Donc, évidemment, on va discuter de ça. Moi, je veux savoir
quelle piste de solution on peut et on doit mettre en oeuvre tout de suite pour
les aider à traiter les signalements rapidement.
Ce qu'on sait, c'est que, souvent, les
intervenantes, elles ont beaucoup, beaucoup de dossiers sous leur responsabilité,
ce qui fait en sorte que c'est très difficile, quand elles ont plusieurs
dizaines de dossiers, d'en faire un suivi qui va être rigoureux, qui va leur
permettre d'aller en présence, sur place, voir ce qui se passe dans la famille.
C'est presque impossible lorsqu'on leur met entre les mains, là, de réaliser
tout ça puis de le faire avec le professionnalisme qu'on attend d'elles. Ce
n'est pas possible quand on a trop de dossiers. Donc, il faut trouver des
solutions pour ça.
La Modératrice
: On va
passer en anglais.
M. Giroux
(Stéphane) : Good morning. Mr. Marissal.
Ça va bien?
M. Marissal :
Good, and you?
M.
Giroux (Stéphane) : Excellent. Écoutez, je vais commencer...
Minister Boulet, the Employment Minister, he's announcing a plan he talked
about earlier this year about convincing workers to requalify in other jobs,
those who are unemployed now because of COVID, hotel workers, restaurant
workers. All of the workers will say: Wait a second, I don't want to be requalified
to start a new career. Do you think the Government is sending the right message by telling workers currently
unemployed : You really should be… try something else in life?
M. Marissal : No. I mean, in the fiscal update two weeks ago, the Government tabled like half a billion
dollars for doing just that. We said it was a good idea. We still think that it
is a good idea, but it's not one-size-fits-all. You cannot tell someone who was
working in the cultural industry, all of a sudden, you know, you will requalify
as a plumber. It doesn't work this way. So we should not see people and
unemployed people just like a workforce that is waiting for the money to
requalify. It is more complicated than that.
But, for some people, I
mean, to switch from one sector to another, it might be possible. We should do
it with respect of these people and not just see them as a workforce in
waiting, you know. So I think it's still a good idea. I'm still waiting for the
detail of the plan from Mr. Boulet. But, at this time, I will keep our position
that it is probably a good idea in some sectors. But, don't get me wrong, I
don't want the Government to
hide behind that and say we have nothing to do else for people who are
suffering, especially in the cultural industry, in the tourism industry,
fisheries, agriculture, and so on.
M.
Giroux (Stéphane) : Merci beaucoup.
(Fin à 9 h 9)