(Quatorze heures dix-sept minutes)
M.
Bérubé
:
Alors, bonjour. En cette veille de budget, il est important pour le Parti
québécois de réitérer un certain nombre de préoccupations mais également de propositions
qui vont permettre, je l'espère, de convaincre le gouvernement de la CAQ
d'aller dans la bonne direction.
Vous savez, on juge d'un gouvernement en
fonction de ses choix qu'il fait avec les disponibilités financières dont il
dispose. Or, il se trouve qu'il dispose de moyens considérables, dont il n'est
nullement responsable, et on va le juger sur sa capacité de bien saisir les
priorités des Québécois. Et c'est un test à nouveau, pour le gouvernement de la
CAQ, qui sera réussi ou pas demain.
Je réitère que le Parti québécois a fait
part de ses propositions pour le budget. Essentiellement, c'est : on veut
un budget nationaliste, on veut un budget juste, on veut un budget vert. Ça se
décline à travers plusieurs propositions qui visent essentiellement à offrir
des services de qualité aux citoyens, à s'assurer d'un Québec plus vert, à
s'assurer également que le Québec peut parler davantage en son propre nom,
notamment en culture. Toutes ces propositions sont connues, et elles, je
l'espère, pourront convaincre le gouvernement de faire des choix appropriés.
Je rappelle que l'argent du budget, ce n'est
pas l'argent de la CAQ, c'est l'argent du travail et de l'argent durement gagné
des travailleurs du Québec. Et les gens qui se lèvent tôt, qui travaillent dur,
qui paient de l'impôt, qui paient des taxes ont besoin de sentir que le
gouvernement est au bon endroit, qu'il investit selon les priorités de la
population. Donc, je veux rendre hommage aux citoyens du Québec qui nous
envoient leurs taxes et leurs impôts, et il en revient au gouvernement de bien
les gérer et à l'opposition de faire en sorte de proposer des avenues, je
dirais, appropriées en ce sens.
J'ajouterais qu'il y a un contexte
particulier, cette année. Vous savez, on a une inquiétude planétaire face à ce
virus, ce coronavirus qui s'est muté non seulement dans le nom, mais dans l'augmentation
d'inquiétude qu'on retrouve partout sur la planète, y compris au Québec. Il y a
de l'anxiété, il y a des gens qui ont peur et avec raison. Et ça va plus loin
que ça. C'est des marchés maintenant qui ont peur. C'est la bourse, c'est le gouvernement
de l'État de New York, M. Cuomo, qui déclare l'état d'urgence dans un État qui
est à quelques kilomètres du Québec, qui est même frontalier du Québec. Et, en
ce sens, le budget de demain devrait clairement démontrer non seulement une
préoccupation, mais une planification à l'égard de cette épidémie.
Et la ministre de la Santé nous a
habitués, depuis quelques jours, à des points de presse réguliers où elle nous
fait part de l'état de préparation du réseau de la santé pour ce virus. Alors,
est-ce que le ministère des Finances en fera autant, quotidiennement, à
partir... d'après le budget? C'est une proposition qu'on fait. Les Québécois
sont attachés à leur santé, mais ils sont aussi attachés à leur argent. Alors,
qu'on veille sur leur santé, très bien, qu'on donne l'heure juste, qu'on donne
toute l'information régulièrement, on applaudit cela, et c'est ce que la
ministre de la Santé souhaite vouloir faire à intervalles réguliers.
J'indique aujourd'hui, au nom du Parti
québécois, une proposition très concrète : qu'il y ait autant de points de
presse du ministre des Finances sur l'état de l'économie du Québec qu'il y en
ait en santé.
Et comment ça va pouvoir se vérifier, ce
degré de préparation en économie? Bien, à travers le budget. Il est toujours
possible, à l'heure où on se parle, pour le gouvernement de modifier son
budget, d'être prévoyant, d'avoir de l'argent disponible pour faire face aux
intempéries, d'une certaine façon, pour préparer l'économie québécoise, pour
pallier aux contrecoups, pour faire en sorte d'intervenir de façon spécifique
dans l'économie.
Là, présentement, ce matin, ce que j'ai
vu, c'est un ministre des Finances qui, manifestement, patine littéralement
parce qu'il n'a pas la même version que son premier ministre, à quelques heures
du budget, sur les solutions qui seront prises. Quand on parle du fonds de
stabilisation, ça veut dire essentiellement qu'on envoie le message, on
télégraphie le message qu'il y aura un déficit. Alors, si on revient à ça, ce
n'est pas rien. Le gouvernement du Québec devrait être très clair demain, même
dans un préambule, devrait expliquer aussi qu'il s'en va là-dessus.
Donc, le degré de préparation pour faire
face à cette crise ne semble pas totalement à la hauteur de ce qu'on aimerait
avoir. Alors, le gouvernement sera jugé là-dessus. Mais, au-delà de ça, c'est
nous tous qui est à risque, notre économie, nos acquis, notre vivre-ensemble.
Ce n'est pas seulement la santé qui va être importante, dans cette crise-là, c'est
la gestion de ce qu'on contrôle au Québec, de ce que le gouvernement du Québec
contrôle. Quant au gouvernement du Canada, bien, il devrait en faire autant
pour protéger l'autre moitié du Québec qu'il contrôle.
Alors, c'est les attentes du Parti
québécois et c'est surtout une attitude qu'on veut voir du ministre des
Finances. On aimerait qu'il y ait autant de mises au point, de points de presse
du ministre des Finances, quant à l'état de santé de l'économie du Québec, que
ceux faits par la ministre de la Santé pour rassurer les Québécois quant à l'évolution,
là, de ce virus dans notre société et ses conséquences. Voilà.
Mme Gamache (Valérie) : De
façon très claire, est-ce que, dans le budget de demain, vous voudriez voir,
concernant le coronavirus, de l'aide aux entreprises, un fonds particulier? Les
libéraux nous disaient ce matin, par exemple : Bon, ça prend 1 milliard
vraiment dédié à ça.
M.
Bérubé
:
Bien, il faut noter les choses, il faut noter... il faut écrire les choses
aussi. Vous savez, moi, j'ai un souvenir très clair du budget du Parti
québécois post 11 septembre, évidemment, dans un contexte très différent. Mais
l'actualité fait en sorte qu'on peut s'ajuster, on peut anticiper, on peut
avoir des disponibilités. Le gouvernement, qui a des moyens considérables, dont
il n'est pas le responsable, mais il en fait la gestion, devrait considérer ça.
Sa première préoccupation ne devrait pas être de s'assurer de sa propre
visibilité, mais de la protection des Québécois et, notamment, à travers leur économie.
Donc, quelle forme ça peut prendre? Le gouvernement
a énormément de moyens. Alors, moi, je lui demande de tenir compte de l'inquiétude
des Québécois. On va applaudir un gouvernement qui est prévoyant, qui protège
les Québécois, qui sent l'inquiétude et qui a les marges de manoeuvre
nécessaires pour y faire face si c'est le cas. Et, quand je vous dis que l'État
de New York, qui est frontalier au Québec, a un gouverneur qui a déclaré l'état
d'urgence pas plus tard qu'en fin de semaine dernière, moi, ça m'inquiète.
Mme Gamache (Valérie) : Est-ce
que, par exemple, en santé, il devrait y avoir... vous souhaiteriez voir des
sommes, un budget illimité, par exemple, pour faire face à la crise...
M.
Bérubé
:
Bien, jusqu'à maintenant, on a annoncé ce matin trois cliniques. Moi, je savais
déjà qu'il n'y aurait pas de clinique dans l'est du Québec, et j'avais été
informé de cela. Est-ce que ça sera suffisant? Est-ce qu'on ne pourrait pas
déployer davantage, sur les territoires du Québec, des cliniques où on va
tester les gens, on va valider s'ils sont atteints? Moi, c'est une préoccupation
que j'ai. Toute la région de l'Est du Québec, encore une fois, est laissée pour
compte et d'autres régions aussi.
Pour le reste, évidemment, il faut prendre
la parole de la ministre. C'est la seule façon qu'on a de valider
l'information. Chaque communication est importante. Il faut dire tout aux
Québécois. On est dans un monde où on ne peut plus dire les choses à moitié. En
matière de santé publique, il faut tout dire. Les gens sont bien informés. Je
pense que le gouvernement du Québec a une responsabilité de tout dire en santé,
mais aussi en économie.
Et la nouveauté que je vous amène,
aujourd'hui, c'est que le ministre des Finances puisse faire des états de
situation de notre économie très réguliers, voire quotidiens, pour nous
démontrer comment ça se passe et voir si les mesures qu'il va annoncer seront à
la hauteur du défi qu'on va devoir relever.
Mme Gamache (Valérie) : Mais
des points de presse en lien avec cette crise-là du coronavirus?
M. Bérubé : Absolument, quant
à l'économie. Un point de presse en santé, un point de presse en économie.
Est-ce qu'il y a des fermetures d'entreprise? Est-ce qu'il y a des gens qui
sont mis à pied? Est-ce qu'il y a de la délocalisation? Est-ce qu'il y a de la
pression sur certains quarts de métier? Il va falloir, par exemple, aller
chercher rapidement des retraités? C'est ce genre d'élément là où le
gouvernement va être capable de s'ajuster. Moi, je veux que les Québécois
soient en mesure d'apprécier les mesures qui seront mises en place en économie
pour faire face à un péril annoncé. Voilà.
Mme Gamache (Valérie) : Est-ce
que le gouvernement doit, comme par exemple le gouvernement du Yukon l'a fait,
annuler des événements sportifs, que ce soit la compétition de patinage
artistique à Montréal, la semaine prochaine, ou... Est-ce qu'on doit aller en
ce sens-là, vous pensez?
M. Bérubé : Bon, dans ce
cas-là, ce n'est pas un enjeu de notoriété, de visibilité pour l'État, c'est un
enjeu de santé publique. Si la santé publique nous dit qu'il y a un risque, il
faut suivre ça. Donc, M. Legault a balayé ça du revers de la main, tout à
l'heure, il ne faut pas annuler d'événements. Est-ce qu'il est épidémiologiste?
J'en doute. Moi, je préférerais me référer aux instances appropriées. Il y a
déjà beaucoup de choses qui circulent sur Internet. S'il faut que le premier
ministre en rajoute lui-même, on ne s'en sortira pas.
Donc, les meilleures pratiques possibles
dans la vie publique, dans les transports en commun, il faut les suivre. Il
faut avoir reçu un message. Et, s'il faut annuler des événements, bien sûr.
Là, les Québécois entendent toutes sortes
de choses. Ils entendent, par exemple, que les journalistes ne sont plus admis
dans la chambre des joueurs. Bien, ce n'est pas le cas en politique. On est
toujours en relation, on va se croiser toute la semaine. Alors, est-ce qu'il y
a des mesures qui sont toujours celles qui devraient être appliquées? Parfois,
ça répond à des critères scientifiques et de santé publique, parfois, c'est de
la peur, parfois, c'est du symbole. Moi, je préfère avoir toujours les
meilleures pratiques qui me sont proposées par la santé publique.
Mme Gamache (Valérie) : Donc,
dans la cour de la santé publique essentiellement?
M. Bérubé : Mais, s'il le
faut, oui. Si on considère, par exemple, que d'avoir une foule importante dans
un amphithéâtre, par exemple, est problématique pour toutes les personnes qui
s'y trouve, bien, bien sûr qu'il ne faut pas hésiter. Il y a de la prévention à
faire. Ça se fait ailleurs, ça se fait dans des stades de foot, en Europe, ça
se fait en Italie, ça se fait de toutes sortes de façons.
Et, à la base, je pense qu'il faut
rappeler aussi que chaque citoyen a un double rôle : le rôle, d'abord, de
se protéger lui-même en se lavant les mains, mais aussi en rapportant ce qu'il
pourrait voir, ce qu'il pourrait être témoin, de gens qui pourraient représenter...
être atteints de symptômes. Alors, ça, c'est notre rôle qu'on a comme citoyens.
Mais l'État a un rôle important à jouer, justement sur des événements. Des organisations
pourraient se référer à la santé publique en disant : Croyez-vous que
c'est une bonne chose qu'on poursuive? Et, si la réponse vient de la santé
publique, moi, je dis oui. Je ne vais pas me substituer aux spécialistes de la
santé publique.
Mme Gamache (Valérie) : Merci.
M. Bérubé : Merci.
(Fin à 14 h 27)