(Douze heures trente-quatre minutes)
Mme
St-Pierre
:
Alors, tout d'abord, je vais vous nommer les personnes qui nous accompagnent.
Elles ont fait cinq heures de route pour venir ici, à l'Assemblée nationale,
pour parler du dossier de la route 117, de son élargissement que nous avions
annoncé, que notre gouvernement avait annoncé au mois de mai 2018.
Donc, nous sommes accompagnés de Mme
Céline Beauregard, mairesse de La Macaza, M. Denis Charette, maire de Rivière-Rouge,
Mme Francine Asselin-Bélisle, mairesse de Lac-Saguay, Luc
St-Denis, maire de L'Ascension, Marc Coiteux, membre de la famille d'une
victime, Cyndi Lévesque, membre de la famille d'une victime, Lucie Léveillée,
membre de la famille d'une victime, Gaétan Gargantini, qui est commerçant, M. Johan
Sarrazin, membre de la famille d'une victime et homme d'affaires, Steve
Bouchard, président du syndicat du CSSS Antoine-Labelle, Élizabeth Émard, qui
est une jeune citoyenne, et Manon Guénette, du syndicat du CSSS
Antoine-Labelle.
Alors, cher collègue Gaétan, la parole est
à toi.
M. Barrette : Merci. Merci,
Christine. D'abord, à moi aussi, de remercier les gens qui se sont déplacés
aujourd'hui. Un merci plus particulier à Mme Léveillée qui m'a donné un livre
racontant l'histoire de sa fille, une belle fille, une jeune fille qui est
décédée sur la 117, dans la région où on devrait élargir la voie. Ce sont des
histoires dramatiques. Comme vous le voyez, on a avec nous des élus et aussi
des gens qui sont des parents de gens qui sont décédés. La route 117, c'est une
des routes les plus meurtrières dans le segment Labelle—Rivière-Rouge. C'est
une moyenne de neuf morts par année depuis 2010. C'est trop, et à un moment
donné il y a des décisions qui doivent être prises.
Lorsque nous étions au pouvoir, nous avions
pris la décision d'élargir à quatre voies ce segment de route là. Et aujourd'hui,
même si la réflexion a été faite, même si les conclusions ont été tirées
d'aller de l'avant avec ce projet-là, le projet n'avance pas. C'est la raison
pour laquelle les gens qui nous accompagnent, ils sont ici aujourd'hui pour
faire avancer les choses, parce qu'encore cet automne il y a eu plusieurs décès
par accident sur ce segment de route.
Le ministre des Transports,
M. Bonnardel, a le pouvoir aujourd'hui de faire avancer le projet.
Manifestement, il n'exerce pas ce pouvoir-là. Et je dirais qu'il y a pire parce
que ce qu'on entend des propos de M. Bonnardel, c'est que peut-être il ne
l'élargira pas à quatre voies. C'est d'ailleurs ce qu'on a conclu de ses
propres propos lorsqu'il est allé récemment dans la région pour dire
essentiellement qu'il réévaluait la situation et que peut-être il ferait autre
chose, comme un élargissement à trois voies. Mais trois voies, vous comprenez,
on comprendra tous, là, ça veut dire que ça va rencontrer lors de dépassements.
Et, même si ça ne rencontrait pas dans certaines zones, je pense que c'est un
risque quand même.
La population est inquiète. La population
a attendu depuis longtemps. C'est une des régions au Québec qui est très
accidentogène. Et c'est normal qu'elle le soit compte tenu de la circulation
qu'il y a là, la difficulté de la route, une route qui remonte aux
années 40, en passant, et qui est l'objet, pour ceux qui connaissent un
peu la région, d'un trafic lourd constant, jour et nuit. Alors, la route
elle-même et la circulation qu'il y a là, ne serait-ce que par le Nord,
l'Abitibi, les grands projets de poids lourds...
Écoutez, à un moment donné, il faut la
prendre, la décision. Nous l'avions prise. Et le ministre, au moment où on se
parle, non seulement ne va pas de l'avant, a la capacité d'aller de l'avant,
mais en plus sous-entend que peut-être il fera autre chose que ce qui avait été
convenu par tout le monde et que ce que tout le monde veut avoir.
D'ailleurs, à ce sujet, je vais passer la
parole à M. le maire de Rivière-Rouge, M. Charette, qui vous en dira
plus, vu de la population et des élus qui les représentent. M. Charette.
M. Charette (Denis) :
Merci beaucoup, tout le monde. Je crois que je suis ici pour représenter la
population de la Rouge élargie. Les gens nous demandent depuis des années la construction
de quatre voies, de maintenir le projet. Ce qu'on vient demander aujourd'hui, c'est
de dire au gouvernement et M. Bonnardel de maintenir ce qui avait été
entendu pour l'élargissement de la route 117, assurer la sécurité de notre
monde, assurer le développement économique, assurer la fluidité au niveau du
transport. Comme M. Barrette le disait, c'est une route très achalandée...
des familles endeuillées qu'on rencontre régulièrement dans notre communauté.
Je crois que, rapidement, il faut se positionner.
Notre objectif ici, c'est de s'assurer, auprès
du ministre des Transports puis M. Legault... Nous allons être sur leurs
épaules. Nous allons assurer une vigie. Puis on attend avec impatience la
proposition. Mais, nous, dans la Rouge, on s'est positionnés pour... par la
population et par les élus, c'est vraiment quatre voies pour desservir notre
région.
M. Barrette : Merci,
M. Charette. M. Coiteux.
M. Coiteux (Marc) :
Bonjour. Je fais partie de ce que j'appellerais les victimes collatérales des
accidents de la 117, victimes collatérales parce que les victimes, elles ne
sont plus ici aujourd'hui pour s'adresser à vous, et on ne serait pas ici
justement s'il n'y en avait pas.
Moi, le 2 janvier 2018, mon
fils, sa maman et la tante de sa maman ont eu un accident sur la 117, dans ce
secteur névralgique et critique. Sa tante a perdu la vie. Exactement deux ans
plus tard, un citoyen ici, M. Sarrazin, la même date, le
2 janvier 2020, perdait deux personnes de sa famille à peu près au
même endroit. Et, il y a un an, il y a la maman de Cindy ici qui perdait sa
jeune fille dans un accident dans le même secteur. On parle d'un secteur de
12 kilomètres entre Labelle et Rivière-Rouge qui est extrêmement
accidentogène. Ça fait une vingtaine d'années que les citoyens et les élus des
Hautes-Laurentides exigent sinon un axe à quatre voies entre Labelle et
Mont-Laurier, à tout le moins un axe de 12 kilomètres entre Labelle et
Rivière-Rouge, un axe à quatre voies, ce qui nous a été promis il y a deux ans
par l'ancien ministre des Transports André Fortin. J'étais présent. Il y a
beaucoup de gens ici qui étaient présents et qui ont entendu la même chose.
Je ne suis pas un élu. Je suis un citoyen.
Je prends cette route-là depuis 56 ans. On en a vu, des accidents. On a
entendu beaucoup aussi parler de gens qui ont perdu des membres de leur
famille. Tant que ça ne t'arrive pas, tu n'y crois pas, puis, quand ça
t'arrive, ça fesse. Ce qu'on demande au ministre Bonnardel aujourd'hui, c'est
de respecter ce qui a été inscrit au PQI il y a deux ans et de procéder à une
annonce pour nous annoncer qu'il y aura un nouvel axe à quatre voies sur
12 kilomètres entre Labelle et Rivière-Rouge pour éviter que la fréquence
à peu près de trois décès par année sur cette portion de la 117, sur quelques
dizaines de kilomètres, continue de se répéter parce que ça devient intenable,
insupportable. Et j'aimerais ça qu'on ne soit pas ici dans 10 ans pour en
parler à nouveau. Merci.
Mme
St-Pierre
:
J'ajouterais que c'est vraiment l'incompréhension la plus totale parce qu'en
mai 2018 notre collègue, ici, qui était ministre des Transports, André Fortin,
a annoncé l'élargissement de la route à quatre voies. Il a annoncé une
inscription au Plan québécois des infrastructures. Il a annoncé la création
d'un bureau de projet. Donc, tout était en place pour poursuivre ce travail. Alors,
ce que nous demandons à la Coalition avenir Québec, au ministre des Transports,
c'est de poursuivre ce travail. La population veut l'élargissement à quatre
voies. C'est une question de sécurité. C'est une question de sauver des vies. Alors,
il est temps d'agir. Et ces personnes-là n'ont pas fait cinq heures de route
pour rien aujourd'hui. Alors, nous espérons que le dossier va débloquer le plus
rapidement possible.
Je veux saluer, en terminant, le travail
de Sylvain Pagé, qui était à l'époque député de Labelle. Sylvain a travaillé en
collaboration avec nous, a travaillé d'arrache-pied sur ce dossier-là. Et je
pense que, s'il était avec nous aujourd'hui, il dirait exactement la même
chose. Tout le monde a entendu et compris la même chose, élargissement à quatre
voies sur 12,5 kilomètres. Merci.
La Modératrice
: Alors,
merci beaucoup, Mme St-Pierre, M. Coiteux, M. Charette, donc, et merci à vous
tous pour avoir été présents. Alors, tel que mentionné plus tôt, je prends les questions
uniquement sur le sujet du jour. Alors, par la suite, Mme St-Pierre et M.
Barrette seront disponibles pour une mêlée de presse.
M. Lecavalier (Charles) : Oui,
bonjour. Charles Lecavalier, du Journal. Je voulais savoir qu'est-ce qui
vous fait croire que le ministre s'apprête à reculer. Qu'est-ce qui fait que
vous sortez aujourd'hui, là...
M. Barrette : C'est très
simple, ce sont ses propres propos. Alors, il est allé... Vous savez, ce n'est
pas la première fois que j'en parle. J'ai fait personnellement des entrevues
dans les différents médias de la région, journaux, radio. Et, à la suite de ces
démarches-là, entrevues-là, le ministre s'est senti obligé, manifestement,
d'aller rencontrer les gens sur place et il a évoqué clairement lui-même que...
D'abord, il n'a pas mentionné le projet à quatre voies. Il a évoqué lui-même
qu'il pouvait y avoir d'autres solutions.
Alors, vous savez, en politique, quand on
évoque qu'il y a d'autres solutions, bien, ça veut probablement dire la plupart
du temps que ce qui a été écrit dans les documents officiels n'est pas la
première option. C'est lui qui fait cette situation-là. C'est lui, par ses
propos non rassurants, non engagés, non engageants, qui fait en sorte que ces
gens-là sont ici aujourd'hui. Ils sont ici aujourd'hui parce qu'au lieu d'aller
les voir puis leur dire : On va de l'avant, il y a un bureau de projet, on
commence les réflexions et on va faire la construction le plus rapidement
possible, non, on va voir les gens pour leur dire : Bien, savez-vous, il y
a peut-être d'autres possibilités.
Ce qui m'importe, c'est la sécurité. On
s'entend là-dessus, hein, avec le ministre, la sécurité d'abord. On s'entend.
Mais tout le monde convient, et c'est ce qu'on avait compris, tout le monde,
que la sécurité passait par un réaménagement à quatre voies. Aujourd'hui, ce
n'est presque plus prononcé par le ministre.
M. Lecavalier (Charles) : Vous
le dites vous-mêmes, on le sait depuis longtemps, là. Vous citez les
statistiques de 2010. Pourquoi les gouvernements précédents ont tardé à agir? Pourquoi
c'est aussi long de faire cet élargissement?
M. Barrette : Bien,
c'est-à-dire que nous, on a fait notre travail. Vous le savez comme moi, pour
arriver à inscrire un projet au PQI, il faut avoir fait une réflexion avant. Il
faut avoir regardé les pour, les contre, consulté de façon au moins
préliminaire pour aller de l'avant et l'inscrire. Et vous savez qu'au PQI on a
passé une loi, notre gouvernement. On n'inscrit pas un projet s'il n'est pas
budgété. Alors, nous, on a fait la réflexion pendant notre mandat et, au bon
moment, au moment approprié, on l'a inscrit parce qu'on savait qu'on allait le
faire et qu'on pouvait le faire parce qu'on avait budgété. Alors, nous, pour
nous, c'est un dossier qui était clos, clos au sens où la réflexion, elle est
terminée. La prochaine étape, c'est : On avance dans les travaux, les plans
et ainsi de suite. Là, aujourd'hui, là, on recule, et ça, ce n'est pas
acceptable.
M. Lecavalier (Charles) :
Est-ce que vous croyez que le ministre, quoi, veut faire du ménage dans le PQI?
Il veut tasser des projets pour...
M. Barrette : Bien, écoutez,
il faudra lui poser la question. Mais il y a une chose qui est claire, c'est
qu'aujourd'hui on ne passe pas à l'étape de la planification, là. Au moment où
on se parle, on est encore à la réflexion, réflexion qui a déjà été faite.
Alors, je voudrais bien que le ministre vienne dire à tous ceux qui ont
réfléchi et travaillé là-dessus, incluant les gens qui nous entourent... ont
mal fait leur travail. Si c'est ça qu'il veut dire, qu'il le dise, mais il ne
dira jamais ça.
Alors, moi je pense qu'actuellement il y a
un enjeu réel, décisionnel d'aller de l'avant. Le ministre ne le fait pas. Je
l'ai dit à plusieurs reprises dans le passé, je vous l'ai dit à vous-même et à
la plupart des journalistes, ils font des choix budgétaires qui ne sont pas les
bons. Alors, l'argent qui est dépensé à une place, il n'est pas dépensé à
l'autre place. Est-ce que les choix budgétaires de ce gouvernement-là vont
continuer à mettre à risque la population qui circule sur la 117 entre Labelle
et Rivière-Rouge? Il ne faudrait pas. Et il faudrait donc que maintenant la
décision soit prise. Il y a un budget, là, dans quelques semaines. Qu'est-ce
qu'on va voir dans le budget? Est-ce qu'on va juste voir une écriture ou on va
voir que le projet passe à la prochaine étape, l'étape qui fait qu'on commence
toute la démarche pour en arriver à la réalisation? Là, actuellement, on n'a
pas cette réponse-là. Et en fait la réponse que l'on a va un peu dans le sens
contraire.
M. Zappa (Pierre-Olivier) :
Bonjour, M. Barrette. D'abord, je voudrais saluer l'engagement des citoyens qui
vous accompagnent, là, qui veulent améliorer la sécurité de leurs concitoyens.
Je vois qu'il y a de l'émotion, quand même. Néanmoins, sur le plan politique,
M. Barrette, si je ne m'abuse, en 2018, votre gouvernement n'avait pas précisé
les termes du réaménagement, et on se trouve aujourd'hui avec un gouvernement
qui, encore là, si je ne me trompe pas, analyse le dossier et veut présenter ses
intentions au cours des prochains mois.
M. Barrette : Alors, je vais
d'abord m'allier à vous. Il y a quatre familles ici qui sont représentées, qui ont
un proche qui est décédé. Il y en a quatre. Bon, tout le monde ne pouvait pas
venir, mais il y en a quatre. C'est beaucoup parce qu'il y a eu beaucoup de
décès dans les accidents. Il y en a eu trop.
Maintenant, pour ce qui est de notre
intention, je vais vous corriger. Si vous allez voir le PQI de 2018, les termes
sont clairs : «Réaménagement à quatre voies de la route 117 entre Labelle
et Rivière-Rouge». Moi, je ne sais pas comment plus clair ça peut être, là,
mais c'était clair. Et, dans le PQI de 2019, c'est encore ça qui est écrit. Et
là, aujourd'hui, ce qui est prononcé dans la bouche du ministre, ce n'est pas
ça.
M. Zappa (Pierre-Olivier) :
Est-ce que vous avez discuté directement avec le ministre des préoccupations
des gens qui vous entourent au cours des dernières semaines?
M. Barrette : Bien, aux
dernières nouvelles, savez-vous quoi, ils ont une députée caquiste. Ils ont une
voix là qui peut parler au ministre à l'intérieur même de leur caucus. Alors,
fait-elle son travail, ne fait-elle pas son travail? Ça, c'est une autre chose.
Mais ils ont une députée caquiste, là. Et moi, je peux vous dire que les gens
qui sont ici représentent une fraction des gens qui s'expriment sur ce
dossier-là dans les Laurentides et ils s'expriment très clairement. Vous n'avez
qu'à lire les journaux là-bas et écouter les radios là-bas. Je ne peux pas
croire que la députée de Labelle ne les écoute pas. Si elle ne les écoute pas,
c'est son problème. Mais le canal de communication pour se rendre au ministre,
il n'est pas juste ouvert, le volume est au maximum. Alors, s'il y a quelqu'un
là-bas qui ne fait pas sa job comme la députée de Labelle, c'est son problème.
La population jugera. Mais il y a une chose qui est certaine, les voix sont
exprimées et doivent ipso facto se rendre au ministre. J'en rajoute aujourd'hui
avec le plus grand des plaisirs parce que c'est un enjeu qui est réel et il
faut trouver une solution rapidement.
M. Zappa (Pierre-Olivier) :
Merci.
M. Barrette : Il n'y a pas de
quoi.
La Modératrice
: Merci
beaucoup. Merci à tous.
M. Barrette : Ça va? Merci.
(Fin à 12 h 49)