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Point de presse de M. Joël Arseneau, porte-parole du troisième groupe d’opposition en matière de transports

Version finale

Le mardi 27 août 2019, 9 h

Salle Bernard-Lalonde (1.131), hôtel du Parlement

(Neuf heures une minute)

M. Arseneau : Alors, bonjour, tout le monde. Aujourd'hui, on est convoqués en commission parlementaire transports et environnement pour parler du projet de loi n° 17, donc le projet de loi qui va transformer de bout en bout l'industrie du taxi.

Je vous rappelle qu'au Parti québécois on s'est prononcés contre le principe même du projet de loi pour une raison bien simple, c'est que le gouvernement n'a pas fait la preuve qu'effectivement, à travers ce projet de loi, on modernisait une industrie. Ce qu'on devine plutôt, c'est que le gouvernement met à sac une industrie qui fonctionne, qui était déjà en processus de modernisation, pour tout simplement ouvrir les portes aux entreprises internationales et, au premier chef, Uber.

Donc, pour un gouvernement nationaliste, qui prend une industrie québécoise, ancrée dans chacun de nos milieux, de Montréal à Québec, en passant par les régions, ce sont les propriétaires, chauffeurs pour la plupart, et finalement on les désapproprie de leurs permis. On va tout simplement les exproprier pour donner la place grande ouverte à Uber, une compagnie de San Francisco.

En fait, on se plaint beaucoup lorsqu'un siège social va déménager du Québec, et là c'est le gouvernement qui fait la promotion d'un siège social de l'extérieur du pays pour venir prendre le contrôle de l'industrie du taxi au Québec. C'est évidemment le fondement qu'on comprend. Toutes les analyses du gouvernement ont été gardées secrètes jusqu'à présent, y compris les chiffres. On n'a pas encore les données précises sur la valeur des permis. Le chiffre de 1,3 milliard de dollars circule, le gouvernement ne veut pas aller jusque là pour compenser les chauffeurs dont on va priver finalement plus de 7 000 propriétaires d'un revenu d'abord, d'une propriété qu'ils avaient acquise et développée et évidemment d'un gagne-pain, d'un fonds de retraite pour plusieurs d'entre eux.

Alors, aujourd'hui, évidemment, une fois qu'on a parlé des grands enjeux et des principes, bien, on est là pour travailler comme parlementaires pour bonifier le projet de loi. Il y a plusieurs enjeux qui demeurent, outre la pleine compensation des permis à leur valeur marchande, qui est un peu à l'extérieur du projet de loi en tant que tel. Ce qu'on veut, c'est axer sur l'amélioration des articles du projet de loi qui touchent, par exemple, à la sécurité des passagers et des chauffeurs, également à la desserte dans différents secteurs urbains, également dans les régions du Québec.

Toute la question du transport adapté, qui a complètement été omise, là, dans le projet de loi, on voudrait le faire par règlement éventuellement. Nous, on demande que ce soit inscrit dans le projet de loi pour s'assurer qu'une clientèle comme celle qui a recours à des services adaptés soit desservie et qu'on nous rassure de ce côté-là.

Il y a également la question de la tarification. La tarification dynamique, on la présente comme une panacée, alors que plusieurs des représentations qui nous ont été faites sont à l'effet qu'il faut prévoir des planchers et des plafonds, donc un minimum de règles. Il n'est pas vrai que la main invisible du marché va régler tous les problèmes de l'industrie du taxi. C'est ce qui sous-tend la logique du projet de loi. On pense, au contraire, que ça peut provoquer le chaos dans le transport des personnes rémunéré, et c'est sur ces principaux éléments là que l'on va défendre l'industrie du taxi.

Il n'est pas vrai non plus que l'on change les règles, qu'on fait venir un joueur majeur et qu'avec les conditions qu'on donne à l'industrie du taxi actuelle, qu'on va pouvoir maintenir une part de marché, là. Donc, le nombre de courses qui est évoqué par le ministre Bonnardel, à savoir 50 millions de courses qui sont faites au Québec, 40 millions par les chauffeurs de taxi traditionnel, et que ces parts-là vont demeurer, alors qu'on change toutes les règles de l'industrie, je pense qu'à ce moment-là, là, il y a des questions sérieuses qu'on doit poser, des réponses auxquelles on est en droit de s'attendre dans le cadre du processus qu'on commence aujourd'hui.

Voilà, c'est ce que j'avais à vous dire ce matin. Est-ce qu'il y a des questions?

M. Dion (Mathieu) : Il y a des manifestations présentement. Les chauffeurs de taxi, eux, ce qu'ils souhaitent, c'est qu'on augmente à 1 milliard, dans le fond, la compensation. Vous, peut-être que ça m'a échappé, mais qu'est-ce que vous exigez à cet égard-là?

M. Arseneau : Bien, en fait, vous remarquerez que, dans la première étape, là, de discussion sur le projet de loi n° 17, on n'a pas abordé, de notre côté, la question des compensations parce qu'on voulait insister sur le fait... avec le peu de temps qu'on a aussi en commission parlementaire, insister sur le fait que le justificatif du gouvernement pour changer toutes les règles qui régissent le transport rémunéré de personnes n'était pas valide ou n'était pas avancé de façon claire et transparente.

Maintenant, aujourd'hui, on peut dire que, puisque le principe du projet de loi a été adopté et que, de toute évidence, le gouvernement, avec sa majorité, va vouloir aller de l'avant, bien là, on est prêt effectivement à appuyer l'industrie du taxi dans sa demande d'une compensation juste pour la valeur des permis de taxi. Et il faut avoir pour ça, évidemment, une évaluation aussi sur laquelle on puisse se baser. Moi, les chiffres qui sont les plus couramment utilisés sont de l'ordre de 1,3 milliard de dollars, qui datent d'avant l'arrivée d'Uber au Québec, avant 2014, des chiffres qui pourraient être indexés parce qu'on est en 2019. Et je pense qu'un gouvernement qui serait sérieux, qui voudrait véritablement compenser ceux à qui on va retirer leur gagne-pain et leur patrimoine dans lequel ils ont investi, devrait faire cette étude-là, démontrer les chiffres, chiffres à l'appui que l'offre est juste et raisonnable, et c'est ce qui se passe dans l'ensemble de l'industrie où, dans tous les domaines, on exproprie des gens.

Et même dans des cas où on a des permis... Je connais très bien le domaine des pêches, et, lorsque le gouvernement veut racheter des permis de pêche, ce sont des permis qui sont distribués par le gouvernement, ils prennent de la valeur parce que les gens de l'industrie lui ont donné une valeur. Et ensuite le gouvernement, s'il veut retirer des permis et les donner à quelqu'un d'autre, dans ce cas-là Uber, bien, qu'il compense, mais il peut compenser non seulement avec des fonds publics, mais il doit aller chercher l'argent là où il est et chez ceux qui feront du profit sur la base du changement législatif, c'est-à-dire les grandes compagnies.

M. Dion (Mathieu) : Doit-on comprendre qu'au Parti québécois on serait prêt à octroyer une compensation supérieure à 1 milliard de dollars?  

M. Arseneau : Tout à fait. On est prêt à accorder la compensation aux chauffeurs de taxi, mais on n'est pas obligé d'aller la piger dans les poches des contribuables. Au contraire, il faut aller chercher les argents nécessaires pour compenser les détenteurs actuels de permis à ceux qui vont faire de l'argent dans l'avenir... dans l'industrie, c'est-à-dire, ceux qui vont s'accaparer le marché, et évidemment on parle ici d'Uber, Lyft et compagnie.

Si on a actuellement une industrie qui a investi dans son secteur et qui a donné de la valeur à un certain nombre de permis puis qu'on dit : Bien, on vous retire cette capacité-là, là, à faire évoluer votre domaine et à faire évoluer la valeur des permis pour les ouvrir ou pour les offrir à quelqu'un d'autre, mais ce quelqu'un d'autre là, qu'on a tous identifié, doit payer. C'est d'ailleurs ce qui a été fait, par exemple, au Maroc. Lorsqu'Uber a voulu s'accaparer le marché, on lui a dit : Bien, si tu veux tasser l'industrie actuelle du taxi, mais il va falloir payer, et Uber l'a fait. Pourquoi, au Québec, on donne l'impression que le marché est disponible gratuitement à ceux qui veulent s'y aventurer, alors qu'on a déjà des gens qui sont détenteurs de permis, qui font généralement du bon travail?

Alors, il y a quelque chose là qui doit être plus nuancé que le fait de donner de l'argent à des chauffeurs de taxi à même les fonds publics. Elle n'est pas là, l'équation.

M. Bergeron (Patrice) : On comprend que vous allez déposer des amendements. Vous avez parlé de la tarification dynamique, qui représente un problème. Est-ce qu'il pourrait y avoir... Vous imposeriez un genre de mécanisme de plafonnement dans la tarification dynamique, quoi, pour empêcher que ce soit des sommes faramineuses? Est-ce que...

M. Arseneau : Bien, on a déjà des exemples où Uber, encore une fois, s'il doit sortir dans des conditions où l'offre de véhicules est moindre, par exemple, dans une tempête, on peut avoir des tarifs astronomiques pour aller de la colline Parlementaire à l'aéroport, qui vont dépasser les 100 $. Est-ce que c'est le juste prix? En fait, ce n'est surtout pas le prix qu'on paie actuellement, qui est de l'ordre de 35,10 $.

Plusieurs gens sont d'avis qu'il faut plafonner, donc, les tarifs que pourrait charger une entreprise comme celle-là. Et, de la même façon, couper les prix pour éliminer certains joueurs du marché, c'est aussi... Bien, actuellement, c'est un peu ce qu'Uber fait déjà. Jusqu'où est-ce qu'on peut continuer de faire ça pour éliminer la concurrence entre les entreprises de taxis, pour éliminer complètement les gens du taxi... qui oeuvrent dans l'industrie du taxi traditionnelle? Je pense qu'il y a un mécanisme là effectivement qui doit...

M. Bergeron (Patrice) : Donc, vous pourriez déposer un amendement dans ce sens-là.

M. Arseneau : Oui, oui, on va le faire, sans aucun doute. Il faut trouver la façon de protéger les gens du taxi qui oeuvrent aujourd'hui, en empêchant, finalement, que les plus gros joueurs arrivent et puissent évacuer tous les plus petits.

M. Bergeron (Patrice) : On sait que c'est un gros projet de loi, qui comprend, je crois, au-dessus de... quasiment 300 articles, et vous voulez aussi, par exemple, ajouter, donc, des modalités sur le transport adapté, qui est une question qui a été soulevée en commission parlementaire.

Est-ce que vous seriez prêt, dans la logique actuelle, donc, à vous assurer de tout faire pour que vos amendements puissent... puisque vous n'avez pas eu le choix d'accepter le principe, de tout faire pour que ce projet de loi là puisse ressembler le plus possible à ce que vous souhaitez puis quitte à étirer le processus?

M. Arseneau : Ah! bien, je pense qu'on a tout notre temps. Il ne faut surtout pas arriver ici, là, vers la fin août, là, puis, en douce, adopter rapidement, à toute vapeur, un projet qui va transformer fondamentalement l'industrie du taxi et la vie des gens qui en vivent. Alors, le temps, c'est la denrée la plus précieuse qu'on a actuellement pour s'assurer que le travail, même si le principe est vicié, que le travail à l'intérieur du projet de loi soit fait consciencieusement, dans la protection des gens, des travailleurs, des propriétaires de permis et aussi de la clientèle, parce que ça, on l'oublie souvent. On donne l'impression qu'en modernisant, ce qui est un terme, comme je l'ai dit, là, qui est un petit peu de la fausse représentation, mais, en voulant amener une nouvelle loi, on semble penser que la clientèle, les consommateurs vont y gagner beaucoup. Et avec la tarification dynamique, il y a plein d'exemples qui nous prouvent que ça peut être tout à fait le contraire également. Et avec la clientèle que vous évoquez, du transport adapté, on a des sérieuses inquiétudes, et les organismes qui représentent ces gens-là sont très, très inquiets aussi et particulièrement pour ce qui est du transport en région.

M. Bergeron (Patrick) : Mais vous comprenez que ce gouvernement-là a des précédents en matière d'adoption de projets de loi, même pour des projets de loi assez importants. Est-ce que vous ne redoutez pas que le gouvernement veuille presser le pas?

M. Arseneau : Bien, en fait, nous, on pense que le gouvernement avait une échéance, qui était la fin des travaux parlementaires de l'été, dans les dossiers auxquels vous faites référence : l'immigration, question de la laïcité.

Pour ce qui est du transport, il y a effectivement une échéance qui est celle du 14 octobre. C'est la fin des projets pilotes. Ça nous donne quand même passablement de temps pour faire l'étude du projet de loi. Mais on ne sacrifiera pas, disons, la qualité d'un projet de loi sur une base temporelle, sur une base de quelques jours, quelques semaines. Il y a des moyens d'arriver à un projet de loi qui soit sensiblement amélioré dans le temps qui nous est imparti, jusqu'au 14 octobre. C'est une question de calendrier puis de volonté gouvernementale.

M. Dion (Mathieu) : Pour revenir aux questions de Patrice parce que... plus directement, là, pour l'industrie du taxi, allez-vous être prêts en quelque sorte à filibuster? C'est un peu ça, là... Allez-vous être prêts à dire : S'il faut le faire pour défendre l'industrie du taxi, on va le faire?

M. Arseneau : Bien, oui, on va certainement déployer tous les efforts pour défendre l'industrie du taxi. Est-ce qu'on va faire de l'obstruction? Non. On le fait de bonne foi et on souhaite que le gouvernement le fasse de la même façon, mais on va prendre le temps que ça prend pour aller jusqu'au bout des modifications et des amendements au projet de loi pour le bonifier. Mais, à l'heure actuelle, notre approche n'est pas de faire du blocage, n'est pas de faire du filibust ou encore de l'obstruction.

L'objectif, c'est de forcer le gouvernement enfin à aller plus loin dans son argumentaire que de dire que ce projet de loi est nécessaire après 40 ans, puis qu'on va tout changer les principes qui dictent la façon de fonctionner du transport rémunéré des personnes, et que ça ne changera rien en bout de ligne pour personne, sauf pour les consommateurs qui vont y gagner. Tout ça, là, c'est un peu, là, une vue de l'esprit. C'est de la pensée magique. Et moi, j'ose espérer que le gouvernement va se mettre à table, que le ministre va arriver avec des faits, avec des études, avec des analyses s'il veut démontrer que son projet de loi, il est valide. Puis on va certainement lui faire toutes les suggestions pour qu'il devienne un peu plus acceptable pour les Québécois.

Mme Senay (Cathy) : Can I ask a couple of questions in English?

M. Arseneau : Yes.

Mme Senay (Cathy) : I'm just wondering... You said that you're ready to raise the compensations, the amount, but many Quebeckers are against compensations given to taxi drivers. They say : Well, it's a competitive market, and, you know, we are hoping for a better service. So why are you asking today? How are you going to start this detailed examination of Bill 17?

M. Arseneau : Yes, I think there's a misunderstanding. People feel like, you know, the Government gave some privilege to the taxi industry or as they... All of the people involved in the industry invested time and money into an industry, to give it more value, and that's what we do in all sorts of fields, and when we abide by the rules, we expect the Government to do so as well.

Now, today, the Government is changing the rules and saying : Well, the licence that you used to have is worth nothing, and we'll compensate you maybe 50% or 60% of what it's really worth. We're pushing you towards bankruptcy and, you know, please accept that because, you know, that will be better for you, and for Québec, and for consumers.

The main question is : Who is going to pay? If the Government changes the rules in order to favor foreign companies, well, who should pay for that? I think foreign companies should chip in and I think they should be the ones paying because they're the one benefitting from the changes, the new law.

Mme Senay (Cathy) : So, basically, you're saying... Well, what's the amount the PQ is ready to put on the table for taxi drivers?

M. Arseneau : Well, we are willing to compensate the taxi industry for what they're worth, and I think this is mathematics. I think we can, you know, have analysis of what the industry used to be worth back in 2014. The number that we hear more often is $1.3 billion and if it's what it's worth, and the Government really wants to go ahead and change the rules completely, well, he's got to find the money where the benefits will be. And where will they be is for the newcomers in the industry, and we knew who they are : Uber and other companies, foreign companies.

Must I say, for a nationalist government, there's something very peculiar that you want to change the rules in order to favor foreign companies when you have local investors, and drivers, and families that are living, you know, and abiding by the rules for decades. This is something that, you know, we have to put forward, and I don't think any Quebecker would accept, no matter what industry they're involved in, that the Government will, you know, basically change all of the rules and say : Well, now you can compete with whoever is not competent in your field.

Let's say you're a dentist and say : Well, anyone can be a dentist now. You know, it's just... you know, you can offer the price you want, you know. Of course, there is a caricature here, but when you say that, to be a taxi driver, you just need to own a driver's licence and own a car, I mean... taxi drivers now are professionals. And I think the Government, if they want to say that just anyone can improvise themselves as, you know, taxi drivers, could... they should be compensated. And, as I said, take the money where it is or where it will be. And there is an example, I should repeat this in English, in other countries, namely Morocco. That's what Uber wanted, take the market. Well, they had to buy it, more than a billion dollars. Do it here, and it's done.

Mme Senay (Cathy) : Great. Merci. Thank you.

Des voix : Merci.

(Fin à 9 h 19)

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