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Point de presse de M. Sol Zanetti, porte-parole du troisième groupe d’opposition en matière d’institutions démocratiques

Version finale

Le jeudi 28 février 2019, 11 h 04

Salle Bernard-Lalonde (1.131), hôtel du Parlement

(Onze heures cinq minutes)

M. Zanetti : Bonjour. Alors, comme vous le savez, le 17 octobre dernier, les 10 députés solidaires ont prêté leur serment d'allégeance à la reine en privé, et c'était pour exprimer un malaise qui n'est pas nouveau. En 2008, Amir Khadir avait fait son entrée à l'Assemblée nationale et avait porté un serment à la reine en attendant la déclaration de la république indépendante du Québec.

Et donc c'est de circonstance que je présente mon projet de loi aujourd'hui parce que c'est l'anniversaire de la déclaration d'indépendance de la République du Bas-Canada par Robert Nelson, un patriote d'origine anglaise, là, anglo-canadienne à l'époque, qui avait fait cette déclaration importante, le frère, d'ailleurs, de Wolfred Nelson, qui, lui, avait mené la seule bataille victorieuse des Patriotes dans la rébellion. Et donc ce projet de loi, ça a du sens que je le présente aujourd'hui pour cette raison-là. Et ce que ça vise, en fait, c'est de libérer les députés québécois de l'obligation de prêter serment à la reine lors de leur assermentation.

Le serment à la reine, c'est une pratique qui est humiliante pour tous les peuples qui ont subi le colonialisme britannique, ici comme ailleurs. Parlez-en aux Acadiens, parlez-en aux Premières Nations, parlez-en aux nouveaux arrivants qui doivent se soumettre au même rituel. Parlez-en à même Zachary Richard, qui n'a jamais voulu devenir citoyen canadien pour cette raison-là même si ça aurait été avantageux pour sa carrière. C'est inacceptable qu'en 2019 on demande aux gens de choisir entre leur conscience et leurs fonctions. Un serment d'allégeance, là, c'est censé être une déclaration solennelle, un engagement ferme et sincère.

Mais, depuis un demi-siècle, c'est devenu un rituel de soumission idéologique pour les députés, pour qui la seule allégeance véritable, c'est celle qu'ils portent au peuple. J'en fais partie. Le caucus de Québec solidaire en fait partie. Les collègues du Parti québécois en font partie aussi. Puis je suis certain qu'une grande majorité, sinon la totalité, des députés du gouvernement en font aussi partie. Je leur demande aujourd'hui de respecter leurs convictions et d'appeler le projet de loi n° 192 dès cette législature pour qu'à l'ouverture de la prochaine législature toutes les représentantes et tous les représentants du peuple québécois puissent faire leur entrée à l'Assemblée nationale la tête haute.

On ne leur demande pas de rouvrir la constitution pour ce faire parce que, comme les constitutionnalistes Alexandre Cloutier et Patrick Taillon, on croit que la prestation du serment, ça relève d'une caractéristique de la constitution interne du Québec et qu'en conséquent, bien, le serment d'allégeance à la reine, il peut être éliminé par une simple loi. Il s'agit d'un test pour le nationalisme rassembleur, entre guillemets, là, de François Legault parce que, s'il y a une chose qui rassemble au-delà des allégeances politiques, c'est bien celle-là. 83 % des Québécoises et des Québécois sont pour l'abolition de la monarchie au Québec. Il faut se rappeler ça.

Donc, c'est, on pense, quelque chose qui pourrait vraiment convenir à tout le monde et qui est important. François Legault veut redonner aux gens de la fierté d'être Québécois. Bien, qu'il commence par abroger l'expression la plus évidente de la soumission de notre peuple à ces institutions.

M. Cormier (François) : Bonjour. Est-ce que vous pensez réellement que la CAQ va appuyer ça?

M. Zanetti : Je vais faire tout en mon pouvoir pour que ça se fasse. Je voulais d'abord déposer le projet de loi pour qu'on ait un objet de discussion. Puis ensuite je vais vraiment aller faire un véritable démarchage auprès de certaines personnes clés, là, qui restent à identifier, à la CAQ pour qu'ils l'appellent, et je pense que ça se peut.

M. Cormier (François) : Mais, dans la perspective où il y a toute cette théorie selon laquelle M. Legault prépare tranquillement l'indépendance du Québec...

M. Zanetti : Oui. Je ne crois pas à ça.

M. Cormier (François) : Non, j'en conviens. Mais cette théorie-là, quand même, existe, là. Vous le convenez. Est-ce que ça ne ferait pas juste rajouter de l'eau au moulin de cette théorie-là en faisant un désaveu à la reine comme ça?

M. Zanetti : Bien, je pense qu'il faut gouverner dans l'intérêt du peuple, dans l'intérêt de la dignité aussi des représentants du peuple. Et la liberté de conscience devrait primer sur les considérations d'ordre stratégique à court terme de gens qui évoquent des théories du presque complot, là, parce que...

M. Cormier (François) : Ce serait quand même vu comme : François Legault désavoue la reine.

M. Zanetti : Mais en même temps ça serait vu comme : Ah! O.K., ce qu'il disait en campagne, c'était vrai. Il disait qu'il voulait aller chercher des nouveaux pouvoirs, là. Ce n'est pas exactement un nouveau pouvoir parce que nous, on dit : On a le pouvoir de le faire. Mais c'est vrai qu'il y a une forme de nationalisme dans sa démarche. C'est vrai qu'il veut que le Québec se tienne debout, mettons. C'est ça, le signal que ça enverrait. Ça nous redonnerait de la fierté parce que ça n'a pas de bon sens de tolérer ça. Puis, lui-même, il doit trouver ça très désagréable.

Mme Richer (Jocelyne) : Est-ce que ça respecterait la Constitution canadienne?

M. Zanetti : Ce que nous, on prétend, c'est que c'est de constitution interne. C'est un enjeu de constitution interne au Québec, qui peut être modifié. Il y a bien des choses dans l'Acte d'Amérique du Nord britannique qui ne sont aujourd'hui plus appliquées, parce que le serment à la reine est inscrit dans la constitution de l'Acte d'Amérique du Nord britannique. Mais on a aboli le Sénat en 1968, alors qu'il est dans la Constitution canadienne et dans l'Acte d'Amérique du Nord britannique aussi. Donc, l'idée, c'est de dire, et c'est une thèse que soutiennent beaucoup de constitutionnalistes : Cet enjeu du serment, il relève de la constitution interne du Québec, et il peut le modifier unilatéralement.

Mme Lajoie (Geneviève) : Et, si François Legault ne l'appelle pas, qu'est-ce que ça vous dit sur ses convictions?

M. Zanetti : Bien, ce que ça nous dit s'il ne l'appelle pas, c'est qu'il fait peu de cas de la liberté de conscience, il fait peu de cas de la fierté des représentants québécois puis il fait peu de cas aussi de la démocratie du Québec.

Mme Lajoie (Geneviève) : Mais, sur ses propres convictions personnelles, avec son parcours, est-ce que maintenant il est content, fier d'être canadien?

M. Zanetti : J'ai peine à y croire. Mais, même si c'était vrai, qu'importe ce que M. Legault pense de la question d'être Canadien ou Québécois, là, c'est quelque chose qu'on doit faire pour la liberté de conscience des gens.

Récemment, là, en Ontario, un élu municipal autochtone a refusé son poste parce qu'il fallait prêter serment, et on a reconnu... C'est l'Ontario, là, ça concerne l'Ontario. Ils ont reconnu que ça n'avait pas de bon sens, et que c'est une atteinte grave à la liberté de conscience, puis ils l'ont soustrait à cette obligation-là que proposait l'Ontario.

Moi, je pense que cet enjeu-là, il est important, puis il faut justement qu'on établisse ça. Si on est sérieux quand on dit que la liberté de conscience, c'est important, si on est sérieux quand on dit qu'on est dans une démocratie, il faut qu'on arrête de perpétuer inutilement des traditions archaïques comme celles-là.

M. Croteau (Martin) : Diriez-vous que, s'il refuse de débattre ou d'accepter ce projet de loi, ça ferait de lui un colonisé?

M. Zanetti : C'est des gros mots.

Mme Lajoie (Geneviève) : Vous l'avez posée hier. Vous avez parlé de colonisé hier.

M. Zanetti : C'est vrai.

M. Croteau (Martin) : Ça ferait-u de lui un colonisé?

M. Zanetti : Ça ferait de lui quelqu'un qui est prêt à vendre sa liberté de conscience, et ça, ça ne me rendrait pas fier, puis je pense que ça ne rendrait fier personne. Tu sais, au Québec, on a été colonisés. Et puis aujourd'hui on est dans un État postcolonial, là, parce que ce n'est plus, hein, l'Angleterre qui mène la barque. Mais c'est sûr que ça laisse des traces sur ce qu'on est prêts à faire comme compromis pour diriger, et je pense que ce compromis-là, de soumission idéologique, on doit arrêter de le faire.

M. Croteau (Martin) : Peut-être, si on prend un pas de recul, là, dans la vraie vie, là, il y a la face de la reine partout, là, sur les pièces de monnaie. Tu sais, qu'est-ce que ça change, là? Tu sais, sentez-vous qu'il y a vraiment un fort mouvement d'appui, là, à la fin de la prestation du serment à la reine? C'est assez mineur comme enjeu, vous en conviendrez.

M. Zanetti : Bien, si ça ne change rien puis que 83 % des Québécoises et Québécois sont en faveur d'abolir ça, arrêtons de mettre 50 millions de dollars là-dedans par année puis mettons ça dans le système d'éducation, tu sais, ou mettons ça dans le système de santé, ou ailleurs. Tu sais, ce n'est pas les projets qui manquent au Québec. Ça fait qu'arrêtons de faire ça. Pourquoi est-ce qu'on tolère ça? C'est peut-être difficile à comprendre pour des gens qui sont à l'aise avec le serment, mais il faut, je pense, se mettre dans la peau de ceux qui trouvent que c'est grave puis qui trouvent que c'est... Tu sais, moi, je pense à tout ce que ça représente, la couronne britannique, puis je ne peux pas prêter serment d'allégeance à ça. Ça n'a pas de maudit bon sens. Tu sais, je veux dire, c'est vraiment, là... Pourquoi on le fait?

M. Croteau (Martin) : Quand vous l'avez fait, donc, derrière des portes closes, vous vous êtes senti comment?

M. Zanetti : Ah! ça a fait mal. C'est dur de dire que j'ai ressenti ça physiquement, là, mais c'était très, vraiment, vraiment, grave. Je m'en sens, je pense, souillé à jamais, et j'espère que je vais... Bien, je veux dire, j'espère qu'au moins je vais pouvoir réussir à faire en sorte qu'il n'y ait plus personne qui va être obligé de faire ça. On n'est pas obligés de le faire, mais on se sent obligés, puis la pratique, tout ça, mais on pourrait laisser ça de côté puis enfin se respecter, puis être fiers, puis rentrer la tête haute, puis dire : Regarde, c'est le peuple qui m'a élu, ce n'est pas la reine qui m'a choisi. Elle n'a rien à voir là-dedans, en tout respect, là.

Mme Lajoie (Geneviève) : Sur le pont de Québec, est-ce que le gouvernement doit mettre de l'argent supplémentaire parce qu'il avait déjà prévu un montant de 200 millions, si je ne me trompe pas, à investir? Est-ce que le gouvernement Legault doit mettre de largement supplémentaire dans le pont de Québec?

M. Zanetti : Il doit mettre l'argent nécessaire.

Mme Lajoie (Geneviève) : Peu importe la somme?

M. Zanetti : Bien là, peu importe la somme, je ne pense pas qu'il ait 1 milliard à mettre sur le pont de Québec, mais il doit mettre l'argent que les experts reconnaissent comme nécessaire pour qu'on ait un pont qui tienne longtemps parce que... Et moi, je n'en reviens pas, de l'hésitation du ministre à mettre des centaines de millions dans un pont qui est là, qui sert vraiment le monde, qui est vraiment utile, qui est à la bonne place, à l'ouest, mais que, là, quand il s'agit d'un troisième lien à l'est inutile, ah! là, les milliards peuvent pleuvoir, il peut y en avoir 4 à 10, là. Peu importe le coût, on va y aller, ah oui! Tu sais, je veux dire, ça n'a aucun bon sens. Il ne prend pas ses responsabilités. Puis, en plus, il va faire un projet qui est complètement à l'encontre de la lutte aux changements climatiques qu'on doit faire puis il va mettre des milliards là-dedans. C'est aberrant. C'est hallucinant.

Mme Lajoie (Geneviève) : Pensez-vous que justement il est réticent envers le pont de Québec justement pour son troisième lien?

M. Zanetti : Bien, j'espère qu'il n'irait pas mettre la sécurité des gens en jeu à ce point-là, sauf que, clairement, il n'a pas les priorités à la bonne place. Et moi, je trouve que... Tu sais, on a quelque chose qui est là, qui sert, qui pourrait être réparé à peu de frais, toutes proportions gardées, là, par rapport au troisième lien. Mais là, non, tu sais, on met un bureau de projet, puis là on envoie... Puis, en plus, les chiffres ne sortent pas, ils gardent ça secret. Moi, je trouve que c'est problématique. Ils nous préparent un bel éléphant blanc. Puis je trouve qu'il y a un gros manque de transparence dans le dossier du troisième lien. Merci.

(Fin à 11 h 16)

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