(Onze heures vingt-huit minutes)
Mme
Hivon
:
Alors, bonjour. À la suite du point de presse du ministre de la Famille, de ce
matin, il y a une question qui se posait déjà mais qui se pose avec encore plus
d'acuité aujourd'hui, c'est : Pourquoi tant de précipitation, la semaine
dernière, de déposer le projet de loi sur les maternelles quatre ans, alors
que, de toute évidence, on n'est pas capables d'avoir le plan détaillé du
déploiement des 5 000 nouvelles classes sur cinq ans, annoncées par
le ministre Roberge?
Et, de toute évidence, on pensait ce matin
qu'on aurait le début de réponse à nos nombreuses questions, avec le point de
presse de son collègue de la famille en ce qui concerne la complémentarité avec
les places en centre de la petite enfance et en service de garde éducatif, et
on ressort du point de presse plus inquiets, plus dubitatifs encore. Et je
pense que c'est le grand retour du «on verra» : On verra ce qu'on peut
vous donner, au cours des prochaines semaines, des prochains mois, des
prochaines années, comme précision. C'est le grand retour du «on verra».
Une fois que le projet de loi sera adopté,
comment on peut travailler avec ça? Eh bien, évidemment, aujourd'hui, nous
réitérons de toute urgence la motion que nous avons déposée hier, qui demandait
précisément qu'avant de débuter l'étude du projet de loi sur les maternelles
quatre ans le ministre de l'Éducation, avec son collègue de la famille, nous
dépose le plan de match détaillé, la planification détaillée du déploiement des
5 000 nouvelles classes de maternelle quatre ans et des places
supplémentaires qui vont être créées en centre de la petite enfance pour que le
gouvernement puisse, évidemment, réaliser les choses correctement, dans
l'ordre, mais aussi qu'il puisse réaliser son engagement de donner le choix à
tous les parents d'une place soit en maternelle quatre ans, soit en centre de
la petite enfance.
Alors, hier, le ministre a indiqué, visiblement,
devant le tollé que le projet de loi sur les maternelles quatre ans suscite,
qu'il allait aujourd'hui, donc, clarifier les choses, faire un point de presse.
Et, au sortir du point de presse, je pense que tout le monde va convenir que la
confusion est encore plus grande et que les inquiétudes des partenaires sont
assurément encore plus grandes. Donc, on demande de toute urgence le dépôt du
plan détaillé.
On demande aussi des réponses à de très
nombreuses questions. Alors, je vous en donne juste quelques-unes pour
démontrer à quel point ce plan-là, il est requis.
Le gouvernement parle de 5 000 nouvelles
classes de maternelle quatre ans. Si on calcule le nombre d'enfants de quatre
ans qu'il y a en ce moment, au Québec, autour de 86 000, et qu'on a 17 enfants
par classe, ça veut dire que, quand on fait le calcul, on arrive presque à
5 000 classes pour répondre à l'ensemble des besoins des enfants de
quatre ans au Québec. Est-ce à dire que, si on maintient 5 000, il n'y
aura plus d'enfants de quatre ans dans les services de garde éducatifs au Québec?
C'est une question qui est très importante. Ou est-ce à dire que le gouvernement
a évolué dans sa position en constatant que les parents ne souhaitaient pas,
loin de là, aller tous en maternelle quatre ans, et qu'ils souhaitaient beaucoup
plus des places en CPE, et que, donc, il est arrivé avec cette idée de laisser
le choix aux parents? Si c'est le cas, il doit nous dire de toute urgence
combien de places en maternelles quatre ans et combien de places en centres de
la petite enfance, comment ça va se déployer sur cinq ans, des réponses qu'on
n'est toujours pas capables d'avoir.
Par ailleurs, autre question qui est très
pertinente. Il a dit, en campagne électorale, qu'il y aurait 50 000 places
de libérées, avec le plan des maternelles quatre ans, dans les services de
garde éducatifs. Bien sûr qu'on n'en est pas là du tout parce qu'il y a eu un
réalignement, avec cette idée du choix, et nous, on trouve que c'est déjà au
moins un petit pas qui a été franchi par le gouvernement. Mais il faut donner
l'heure juste. De quoi on parle en ce moment?
Autre question. Le ministre Roberge a
déposé dimanche un petit échantillon de son plan en parlant des 250 classes
qui seraient déployées à partir de l'automne prochain. Mais, déjà, on voit,
dans plusieurs commissions scolaires, dans plusieurs régions du Québec, qu'on
ne pourra pas répondre à la demande qui est faite. Donc, s'il y a de la difficulté
pour 250 classes pour l'automne prochain, qu'est-ce que ça va être pour
répondre à l'objectif de 5 000 classes sur cinq ans?
Puis une autre grande question qui est
soulevée, après le point de presse de ce matin, une autre parmi tant d'autres.
On nous indique, le ministre de la Famille nous indique qu'il y a 42 000 familles
qui sont en attente d'une place sur le guichet unique, donc, 0-5 ans, et
il nous annonce aujourd'hui la création de seulement 2 500 nouvelles
places en centres de la petite enfance. Donc, comment on va réconcilier l'idée
du vrai choix de nos familles du Québec avec ce chiffre qui est annoncé qui
n'est pas du tout cohérent avec le nombre de parents qui sont sur la liste
d'attente?
Donc, voici, en ce qui concerne,
évidemment, tous les questionnements qu'on a. Pourquoi cette précipitation du
projet de loi sur les maternelles quatre ans, alors qu'aucun changement n'était
requis pour déployer celles qui seront déployées à l'automne prochain? Pourquoi
ne pas pouvoir avoir de la prévisibilité? Pourquoi ne pas prendre le temps de
faire les choses dans l'ordre avant d'aller plus loin dans ce débat-là?
Et, évidemment, il y a tout un autre
niveau qui vient de s'ajouter dans la confusion où dans l'inquiétude qui se vit,
en ce moment, c'est lié aux études d'impact qui ont été déposées en douce sur
le site du ministère de l'Éducation, en lien avec le projet de loi sur les
maternelles quatre ans, qui viennent faire des hypothèses sur les impacts du
projet de loi des maternelles quatre ans sur les services de garde éducatifs. Donc,
pourquoi le premier ministre Legault, pourquoi le ministre Roberge, depuis une
semaine, s'évertuent à dire qu'il n'y en aura pas, d'impact, que tout ça va se
faire correctement, dans l'ordre, que ça va être un long fleuve tranquille,
quand leurs propres études qu'ils ont déposées sur le site du ministère de
l'Éducation disent le contraire et parlent de milliers de pertes d'emplois
possibles chez les éducatrices au Québec.
Donc, évidemment, il faut comprendre, il
faut avoir des réponses claires de la part du gouvernement. Comme le
gouvernement aimerait dire, c'est loin d'être banal. Donc, on attend des
réponses le plus vite possible pour rassurer tout le monde qui est impliqué et
pour s'assurer, surtout, qu'un programme, qu'un plan qui est aussi important
pour l'avenir se fasse correctement et qu'on en connaisse tous les tenants et
aboutissants avant de s'embarquer plus loin là-dedans.
M. Cormier (François) :
Mme Hivon, vous dites que le gouvernement a agi dans la précipitation,
mais, en même temps, vous lui demandez de déposer un plan dans la
précipitation, vous lui demandez que son plan soit là. Est-ce qu'il n'est pas
mieux de dire : O.K., on va créer 2 500 places en CPE, on va
créer 250 classes en maternelle quatre ans, là, on va partir ça, on va se
donner le temps de faire un plan qui est sur le sens du monde puis on le
déposera par la suite? Parce que ce que vous demandez, c'est de déposer quelque
chose en précipitation.
Mme
Hivon
:
Moi, je n'ai aucun problème à ce qu'évidemment il y ait 2 500 places
en CPE d'annoncées. Je pense que c'est une bonne chose parce qu'il en manque
beaucoup plus que ça, quand on voit qu'il y a 42 000 personnes qui
sont en attente sur le guichet unique. Donc, moi, je trouve que c'est un bon
pas. À chaque fois qu'il va y avoir des places de créées dans les centres de la
petite enfance, qui offrent la plus grande qualité, je vais me réjouir de ça. Ce
n'est pas du tout ça, l'enjeu, aujourd'hui. L'enjeu, c'est de dire :
Est-ce qu'on peut savoir où on s'en va? Est-ce qu'on peut sortir du «on verra»
en lien avec cette réforme qui est très, très importante des maternelles quatre
ans?
On nous dit, là, que ça va être la pierre
angulaire pour la suite des choses. Évidemment, au-delà de, nous, de toutes les
questions qu'on a sur l'opportunité et sur la faisabilité de cet engagement-là,
évidemment, qu'on ne partage pas dans son aspect mur à mur, dans son aspect,
donc, pour tous les enfants du Québec, on veut une planification parce que c'est
la chose responsable à faire. Si on décide d'aller investir autant d'argent, on
parle de 700 millions, sans compter les infrastructures, si on décide que
c'est la priorité de toutes les priorités en éducation, la moindre des choses,
c'est qu'on puisse avoir un plan devant nous.
Et, quand on parle de précipitation, ce n'est
pas nous qui avons décidé que ce projet de loi là devait être déposé dès la
semaine dernière, alors qu'il n'y avait aucune urgence pour la prochaine
rentrée. Donc, ce qu'on dit, c'est : Donnez-nous la planification,
dites-nous comment tout ça va se faire, les impacts qui vont être réels sur le
réseau des services éducatifs, puis on pourra débattre de tout ça, autant sur l'opportunité,
est-ce que c'est la meilleure chose pour l'apprentissage, pour l'accompagnement
de nos tout-petits, sur, donc, ces aspects-là, et en même temps sur la
faisabilité et la planification. C'est ça qu'on demande, tout simplement. Je
pense que c'est la chose responsable à faire quand on s'engage dans une réforme
aussi importante et qui, on le voit, suscite énormément de questionnements dans
la population et chez les groupes qui sont associés à cette réforme-là.
Quand on voit que tous les groupes qui
sont au coeur de l'implantation de la réforme y sont réfractaires, bien, c'est
le temps de rassurer et de dire comment ça va se faire. Donc, ce n'est pas
juste les oppositions qui soulèvent les questions, c'est à peu près tous les
groupes qui sont concernés par la réforme et un nombre très important
d'experts. Encore aujourd'hui, André Lebon, qui publie une lettre ouverte,
on a vu hier la Direction de la santé publique, à Montréal, on a vu
Camil Bouchard, donc, il y a plein d'experts aussi qui se positionnent
pour dire : Pourquoi cette réforme-là? Donc, est-ce qu'on peut avoir le
plan complet avant de s'y engager?
M. Cormier (François) :
Quand vous voyez qu'il y aura des conséquences financières importantes pour les
milieux familiaux et les garderies non subventionnées, est-ce que ça vous inquiète,
vous, par rapport à ces emplois-là?
Mme
Hivon
:
Nous, ce qu'on pense, c'est que le gouvernement a la responsabilité, un, de
dire ce qu'il va en être. Parce que, ce matin, il y avait encore de la
confusion parce que le ministre de la Famille nous disait qu'il y avait 8 000 places
de libres en milieu familial, et en même temps il dit qu'il va y avoir des
impacts qui vont faire en sorte qu'il va y avoir des pertes pour le milieu
familial. Donc, un, clarifier tout ça.
Nous, ce qu'on pense qui est essentiel, c'est
que, s'il y a des impacts, une fois que la planification va vraiment être faite
et déposée, il faut qu'il y ait un plan d'accompagnement. Moi, je me serais
attendue, ce matin, à ce que le ministre dise : On va rassurer tout le
monde et puis on va faire en sorte d'accompagner, s'il y a des impacts sur les
éducatrices, on va essayer de les accompagner. Parce qu'il va y avoir des
besoins énormes, si on crée autant de classes qu'on le dit dans les maternelles
quatre ans, pour avoir des éducatrices en classe ou en service de garde.
Donc, je me serais attendue... la moindre
des choses pour essayer de rassurer tout le monde, à dire : Il va y avoir
un plan d'accompagnement pour faire en sorte que la transition se fasse
correctement parce qu'il y a pénurie, et donc on va avoir besoin de ces
gens-là. Mais ce n'est pas ça du tout qu'on a entendu ce matin. Donc, c'est un
autre aspect sur lequel j'aimerais que le ministre de la Famille nous revienne.
Une voix
: C'est tout.
Mme
Hivon
:
Merci.
(Fin à 11 h 40)