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Point de presse de Mme Catherine Fournier, porte-parole du deuxième groupe d’opposition en matière d’immigration

Version finale

Le jeudi 7 février 2019, 12 h 30

Salle Bernard-Lalonde (1.131), hôtel du Parlement

(Douze heures trente-trois minutes)

Mme Fournier : Merci. Alors, il va de soi aujourd'hui que nous sommes déçus par le projet de loi n° 9 qui a été déposé par le gouvernement, étant donné que, pour nous, l'enjeu le plus important pour une intégration réussie des nouveaux arrivants au sein de la société québécoise, c'est la connaissance de la langue française. En fait, ce n'est pas seulement nous qui le disons, les experts le confirment, c'est vraiment de cette façon-là que l'on peut assurer le succès de l'immigration au sein de notre société.

Pourtant, le projet de loi n° 9 ne dit rien à ce sujet-là. Même, pire, dans le plan d'immigration de la CAQ déposé à la session dernière, il y avait des baisses de connaissance du français, à l'admission des nouveaux arrivants, plus basses que sous le précédent gouvernement libéral. Ça, ça nous inquiète, parce qu'encore une fois la CAQ vient admettre que, pour eux, ça ne les dérange pas que 60 % des immigrants qui arrivent au Québec ne connaissent pas notre langue.

Eux, ils disent qu'ils vont améliorer la francisation, et on pense qu'on est capable de faire beaucoup mieux au Québec. Il faut évidemment améliorer les programmes. Il y a beaucoup de travail à faire là-dessus. On ne peut pas non plus s'imaginer qu'il va y avoir un renversement de tendance magique qui va arriver comme ça du jour au lendemain. Si on veut vraiment avoir un impact significatif sur la connaissance de notre langue par les nouveaux arrivants, eh bien, ce qu'il faut faire, c'est hausser les cibles de façon très significative pour la connaissance du français avant l'arrivée au Québec. Autrement, on se retrouve avec une situation où il y a 90 % des nouveaux arrivants qui échouent dans les cours de francisation, puis ça, c'est quand ils ont accès à une place, parce qu'il faut savoir qu'il y a juste un tiers des immigrants qui s'inscrivent aux cours de francisation. Les deux tiers ne s'inscrivent pas pour toutes sortes de considération, que ce soit de nature monétaire, parce qu'ils ne sont pas capables de joindre les deux bouts pour nourrir leur famille à la fin du mois ou encore tout simplement parce qu'il n'existe pas assez de places dans les programmes de francisation.

Donc, nous, on aurait voulu, comme premier geste du gouvernement, comme premier signal fort en faveur d'une meilleure intégration des immigrants, que ce soient des gestes en ce sens-là qui soient posés. Mais pire, ils ont rejeté la motion que j'ai déposée mardi à l'Assemblée nationale, au salon bleu. Aujourd'hui, le ministre a refusé de corriger son erreur en ce sens. Nous, on se serait attendu à ce que le nouveau gouvernement, qui se prétend nationaliste, puisse avoir une posture beaucoup plus forte à cet égard-là. C'est quelque chose qui est réclamé par la majorité des Québécois pour s'assurer de donner un élan positif à la situation de la langue française au Québec, mais c'est également de donner tous les outils aux personnes qui décident de venir au Québec, pour qu'elles puissent bien s'intégrer et réussir au sein de notre société.

M. Laforest (Alain) : Juste une précision. Est-ce que votre position est toujours celle de votre ancien chef, Jean-François Lisée, c'est-à-dire qu'avant de rentrer il faut savoir si les gens connaissent le français? Est-ce que c'est toujours la position du Parti québécois?

Mme Fournier : Idéalement, oui, nous aimerions...

M. Laforest (Alain) : Je ne vous demande pas si c'est idéalement, je vous demande si c'est toujours la position du Parti québécois.

Mme Fournier : C'est toujours notre position. Par contre, vous aurez remarqué que, dans la motion qu'on a déposée, on a laissé la chance au gouvernement, quand même, d'avoir une position, disons, plus de consensus.

Quand on lui demande de hausser significativement les cibles de nouveaux arrivants qui parlent déjà français au moment de leur admission au Québec, on leur tend la main. C'est un peu une espèce de position mitoyenne entre notre position, par exemple, défendue lors de la campagne électorale, et la leur, parce qu'on est bien conscients qu'on a des points de divergence. Nous, on essaie de trouver des points de rassemblement, alors on est vraiment déçus que le gouvernement ne se rende pas à l'évidence que, pour améliorer la situation de la langue française au Québec, mais également pour assurer une meilleure intégration des immigrants, bien, ça prend une connaissance plus grande au point d'arrivée et non pas plus basse que celle qui était sous le précédent gouvernement libéral.

M. Laforest (Alain) : Une petite dernière. Concernant... Vous êtes toujours un parti indépendantiste?

Mme Fournier : Oui.

M. Laforest (Alain) : Lorsque la CAQ dit qu'elle veut rapatrier des pouvoirs du fédéral, entre autres sur la sélection de la résidence permanente, êtes-vous déçus de ça?

Mme Fournier : Non, nous ne sommes pas déçus. Bien sûr que nous serons toujours militants pour que le Québec puisse avoir davantage de pouvoirs. C'est vrai en immigration, mais c'est vrai pour toutes les autres compétences, hein? Nous, justement, on est un parti indépendantiste, alors on veut que le Québec puisse jouir de l'ensemble de ses pouvoirs.

Maintenant, la réalité politique telle qu'elle est et à laquelle la CAQ va se buter, c'est que nous n'avons pas ces pouvoirs-là entre les mains et que le projet de loi aujourd'hui qui est déposé par le ministre de l'Immigration va se buter aux lois du fédéral, et on...

M. Laforest (Alain) : Mais le Québec les a déjà eus. Le Québec les a déjà eus. C'est le gouvernement Couillard qui, dit-il, les a abandonnés.

Mme Fournier : À l'heure actuelle, c'est détenu par le fédéral, et je pense que ce serait très présomptueux d'affirmer que le gouvernement, du moins le gouvernement actuel de Justin Trudeau, accepterait de céder ces pouvoirs-là à la Coalition avenir Québec, mais, écoutez, nous, on est très, très ouverts à ça. On croit que le Québec devrait jouir de tous ses pouvoirs.

M. Duval (Alexandre) : Mme Fournier, vous parlez de la connaissance préalable du français avant l'arrivée sur le territoire québécois. Sauf que, dans le projet de loi n° 9 qui a été déposé, on parle de la possibilité que le ministre aura d'envoyer davantage d'immigrants et de travailleurs en région. Donc, nécessairement, ils seront exposés au français.

Est-ce qu'il n'y a pas là une forme presque de contrition, c'est-à-dire qu'ils vont devoir l'apprendre, parce que, de toute façon, ils ne seront pas à Montréal?

Mme Fournier : Bien, c'est certain que l'immigration en région peut favoriser l'acquisition, la connaissance de la langue plus rapidement, mais, par les expériences passées, on a vu, en fait, que ça prend quand même un certain temps. Puis quand on pense, par exemple, aux considérations en matière de santé et sécurité au travail, ça pose problème que les personnes, donc les travailleurs qui viennent dans nos entreprises un peu partout en région ne comprennent pas nécessairement la langue, autant la langue d'affichage que la langue de travail.

Alors, pour nous, c'est important que les gens qui viennent travailler ici puissent avoir une connaissance de la langue, ne serait-ce que pour ça, mais également pour faciliter leur intégration. Nous, ce qu'on dit, c'est que tout le monde est le bienvenu, peu importe où on habite sur la planète, qu'on soit d'un pays francophone ou pas.

Ce que nous demandons, c'est que le gouvernement puisse déployer plus de ressources pour que des cours soient dispensés dans les pays. Ça se fait déjà, par exemple, avec les alliances françaises, et le MIDI, le ministère de l'Immigration et de la Diversité, a déjà des liens avec plusieurs partenaires partout sur la planète pour donner ces cours-là. Alors, nous, c'est ce qu'on souhaite. On ne souhaite pas qu'ils aient une connaissance parfaite du français avant d'arriver au Québec, mais au moins une certaine maîtrise qui permet, déjà en arrivant, de bien s'intégrer à la société puis de bien s'intégrer au marché du travail.

M. Duval (Alexandre) : Je m'interroge sur ce que vous avez répondu à M. Laforest au sujet d'Ottawa et de la présomption de la CAQ qu'elle sera capable d'aller chercher ce pouvoir-là auprès du fédéral. N'est-ce pas là un peu le discours qu'aurait tenu le Parti québécois, s'il avait été au pouvoir, c'est-à-dire on va demander la possibilité d'aller chercher ce pouvoir-là pour que nous, on ait plus de contrôle sur la résidence permanente? Est-ce que ce n'est pas le discours que vous auriez tenu?

Mme Fournier : Nous, on aimerait beaucoup ça avoir le plus de pouvoirs possibles, mais la réalité puis la réalité historique nous démontrent que dans le régime fédéral actuel, c'est impossible de réformer le Canada de sorte à avoir plus de pouvoirs pour le Québec. On aimerait bien, mais les expériences passées nous démontrent le contraire.

M. Bellerose (Patrick) : Mme Fournier, le projet de loi est un premier pas vers le test des valeurs, là, selon le ministre. Qu'est-ce que vous en pensez de ce test-là?

Mme Fournier : On a hâte de voir. On n'a pas confirmé. On parle de décider par règlement un test de, peut-être de français, ou de valeurs, ce qui peut être sous-entendu. Alors, bien sûr, on va rester aux aguets des futures annonces.

M. Bellerose (Patrick) : Est-ce que ça vous inquiète qu'on impose un test au bout de trois ans et qu'on puisse expulser éventuellement si la personne ne réussit pas le test?

Mme Fournier : Bien, évidemment, ça pose une épée de Damoclès sur la tête des personnes qui font le choix de venir s'établir au Québec. Nous, ça nous a toujours préoccupés, on l'a dit. Puis par ailleurs, on n'en voit vraiment pas la nécessité, étant donné que, quand une personne arrive au Québec, elle doit déjà signer une déclaration de valeurs qui, à notre sens, est assez complète. On pourrait rajouter des dispositions, comme, par exemple, sur le droit des homosexuels, peut-être, qui est manquante, mais outre ça, on ne voit pas ce que le test de valeurs va apporter de plus sinon qu'une situation d'incertitude qui, à notre sens, va être néfaste autant pour les nouveaux arrivants que pour l'ensemble de la société.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Que pensez-vous de la décision d'annuler toutes les 18 000, 19 000 demandes d'immigration qui avaient été faites?

Mme Fournier : Bien, je pense que c'est un grave manque de considération pour, justement, ces 18 000 personnes qui avaient formulé des demandes. C'est des gens qui entretiennent beaucoup d'espoir à l'idée de venir au Québec. Ça fait, dans certains cas, trois, quatre ans qu'ils ont déposé ces demandes-là.

De ce qu'on avait cru comprendre de la position du ministre, il y a une semaine, lorsqu'il était sorti à ce sujet-là, c'est qu'il allait faire, disons, tout en son pouvoir pour accélérer le traitement des demandes. Nous, on trouve ça vraiment dommage que ça soit rejeté comme ça, du revers de la main. Je pense que le noeud du problème, c'est justement les délais qui sont beaucoup trop longs. Nous, on aurait voulu que la CAQ, là, fasse montre d'ambition et se disent qu'ils sont capables de régler le problème des délais, parce qu'on considère que c'est tout à fait possible d'y arriver. Mais de simplement rejeter le problème sous le tapis, on considère que ce n'est pas la bonne solution puis c'est vraiment un manque de considération.

M. Bélair-Cirino (Marco) : Donc, le remboursement des frais encourus, là, parfois qui avoisinent le 1 000 $, c'est un minimum, selon vous?

Mme Fournier : Oui.

M. Duval (Alexandre) : In English, maybe? Mrs. Fournier, how do you react to the Government's will to send a maximum of immigrants into the regions and to favour their learning of French?

Mme Fournier : Well, that's a good thing to make incitatives for immigrants to go work in the regions, because the labor shortage is mainly in our regions, but we are disappointed that the bill that the minister presented today doesn't focus on the learning of French, because, for us, it's the best way to integrate immigrants in the Québec society, to know the common language and to be able to work in that language also. C'est bon? Merci.

(Fin à 12 h 43)

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