Journal des débats (Hansard) of the Committee on Institutions
Version préliminaire
42nd Legislature, 1st Session
(November 27, 2018 au October 13, 2021)
Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.
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Wednesday, November 25, 2020
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Vol. 45 N° 104
Special consultations and public hearings on Bill 75, An Act to improve justice accessibility and efficiency, in particular to address consequences of the COVID-19 pandemic
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Intervenants par tranches d'heure
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Bachand, André
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Jolin-Barrette, Simon
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Lévesque, Mathieu
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Tanguay, Marc
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Tanguay, Marc
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Bachand, André
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Jolin-Barrette, Simon
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Jolin-Barrette, Simon
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Bachand, André
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Lecours, Lucie
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Tanguay, Marc
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Bachand, André
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Jolin-Barrette, Simon
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Short, Edward
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Jolin-Barrette, Simon
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Bachand, André
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Tanguay, Marc
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Hivon, Véronique
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Bachand, André
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Jolin-Barrette, Simon
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Lévesque, Mathieu
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Tanguay, Marc
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Tanguay, Marc
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Bachand, André
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Hivon, Véronique
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Jolin-Barrette, Simon
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Lecours, Lucie
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Lévesque, Mathieu
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Lévesque, Mathieu
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Bachand, André
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Tanguay, Marc
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Hivon, Véronique
11 h 30 (version révisée)
(Onze heures trentre-trois minutes)
Le Président (M. Bachand) :
Bon matin. À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. Ayant
constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des institutions
ouverte en cette belle journée de neige.
Alors, la commission est réunie afin de
poursuivre les auditions publiques dans le cadre des consultations
particulières sur le projet de loi n° 75, Loi visant à améliorer l'accessibilité
et l'efficacité de la justice, notamment pour répondre à des conséquences de la
pandémie de la COVID-19.
Avant de débuter, Mme la secrétaire, y
a-t-il des remplacements?
La Secrétaire
: Oui, M.
le Président. M. Fontecilla (Laurier-Dorion) sera remplacé par M. Nadeau-Dubois
(Gouin) et M. LeBel (Rimouski), par Mme Hivon (Joliette).
Le Président (M. Bachand) :
Y a-t-il des droits de vote par procuration?
La Secrétaire
: Oui.
M. Lévesque (Chapleau) pourra voter pour Mme Lachance (Bellechasse),
M. Lamothe (Ungava) et M. Lemieux (Saint-Jean) et M. Tanguay
(LaFontaine) pourra voter pour Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce).
Auditions (suite)
Le Président (M. Bachand) :
Merci. Ce matin, nous débutons avec l'Association des étudiantes et étudiants
en droit de McGill conjointement avec l'Association des étudiantes et étudiants
en droit civil de l'Outaouais, auxquels je souhaite la bienvenue. Alors, je
vous invite à débuter votre présentation. Vous avez un total de 10 minutes,
et, après ça, on aura un échange avec les membres de la commission. Merci
beaucoup de participer aux travaux. La parole est à vous.
Association des étudiantes et étudiants en droit
civil de l'Outaouais (AEEDCO) et Association des étudiantes et étudiants en
droit de McGill (AÉD - Université McGill)
(Visioconférence)
M. Monastiriakos (George) :
Merci, M. le Président. Merci également au ministre de la Justice, mesdames et
messieurs, et aux députés distingués. Je me présente : George
Monastiriakos, président de l'Association des étudiantes et étudiants en droit
civil de l'Outaouais, un gouvernement étudiant reconnu par le Syndicat étudiant
de l'Université d'Ottawa. Nous représentons plus de 600 étudiants inscrits
à la licence en droit à la section de droit civil de la Faculté de droit de
l'Université d'Ottawa.
Aujourd'hui, l'AEEDCO tient à souligner
son soutien pour la modification de la Loi sur le Barreau et de la Loi sur le
notariat afin de permettre aux étudiants de jouer un rôle plus important dans
l'accès à la justice au Québec.
Premièrement, nous soulignons que la
plupart des personnes consultant des cliniques juridiques ne peuvent pas se
permettre de payer des frais juridiques notoirement dispendieux. Pourtant, nous
constatons qu'un marché existe pour les services juridiques à coût abordable
ainsi qu'une main-d'oeuvre capable de fournir ces services susmentionnés.
Deuxièmement, étant donné que le but
ultime des cliniques juridiques est de favoriser l'accès à la justice, la
manière dont elles opèrent en ce moment n'est aucunement efficace. D'une part,
les étudiants ont de la difficulté à naviguer autour de la mince ligne
distinguant l'information juridique du conseil juridique. D'autre part, les
étudiants ne peuvent pas répondre à des questions juridiques qui, autrement,
auraient des réponses très claires et ne nécessiteraient aucune analyse
approfondie. En fait, laisser à des personnes n'ayant aucune formation
juridique le soin d'interpréter des principes juridiques et appliquer le droit
à leur situation personnelle est absurde et ne contribue en rien à l'accès à la
justice.
Troisièmement, et je... le deuxième
critère des articles... de 128.1, excusez-moi, de la Loi sur le Barreau et
l'article 15.1 de la Loi sur le notariat diminuent de façon importante la
portée du projet de loi et ses retombées quant à l'accès à la <justice...
M. Monastiriakos (George) :
...
et je... le deuxième critère des articles 128... de 128.1,
excusez-moi, de la Loi sur le Barreau et l'article 15.1 de la Loi sur le
notariat diminue de façon importante la portée du projet de loi et ses
retombées quant à l'accès à la >justice. Étant donné que les étudiants
travaillent également dans des cliniques juridiques communautaires, dans des
cabinets d'avocats ainsi que dans des bureaux de notaires et qu'ils sont tous
supervisés par des avocats ou des notaires, pourquoi ne pas les laisser
accomplir les mêmes... que leurs collègues en clinique juridique universitaire?
Quatrièmement, les étudiants en droit
civil rejoignent un ordre juridique professionnel à un plus jeune âge que leurs
homologues canadiens. Ayant souvent moins d'expérience personnelle et
professionnelle, cela peut avoir des conséquences lorsqu'ils se trouvent en
pratique, peu importe leur réussite académique. Or, les étudiants en droit au
Québec sont non seulement les plus jeunes et les moins expérimentés au Canada,
mais également les plus limités dans leurs opportunités de mettre en oeuvre
leurs apprentissages théoriques. Je vous invite de consulter le tableau aux
pages 8 et 9 de notre mémoire, qui résume la façon dont chaque province et
territoire traite certaines des questions clés liées à la prestation de
services juridiques par les étudiants en droit.
Cinquièmement, plusieurs ordres
professionnels québécois, où les enjeux ont une importance égale ou même
supérieure, permettent aux étudiants d'accomplir des actes réservés aux
professionnels sous supervision. À titre d'exemple, la première fois que j'ai
eu une luxation d'épaule, en 2010, c'était un étudiant de la Faculté de
médecine de l'Université de Montréal, travaillant à l'hôpital Sacré-Cœur, qui a
remis mon bras dans mon épaule. Dans le cas où il aurait commis une faute, cela
aurait été une atteinte à mon intégrité physique qui aurait engagé la
responsabilité civile de l'étudiant, du médecin superviseur ainsi que de
l'hôpital, tout dépendamment de leur police d'assurance et le conseil de mon
avocat. Bref, en ce qui concerne les activités permises par certains ordres
professionnels et organismes réglementaires pour les étudiants au Québec, je
vous invite de consulter le tableau à la page 10.
Ayant considéré tout cela, et avec égard
pour le ministre de la Justice et l'Assemblée nationale du Québec, nous tenons
à souligner que le projet de loi n° 75 ne va pas
assez loin pour favoriser l'accès à la justice, raison pour laquelle l'AEEDCO
recommande que le deuxième critère de l'article 128.1 de la Loi sur le
Barreau proposé par l'article 3 du projet de loi n° 75
soit modifié pour inclure : «Il pose ces actes au sein d'un cabinet
d'avocats, d'une clinique juridique communautaire ou d'une clinique juridique
d'un établissement d'enseignement de niveau universitaire.»
De même, nous recommandons également que
le deuxième critère de l'article 15.1 de la Loi sur le notariat proposé
par l'article 52 du projet de loi n° 75 soit
modifié pour inclure : »Il pose ces actes au sein d'un bureau de notaire,
d'une clinique juridique communautaire ou d'une clinique juridique d'un
établissement d'enseignement de niveau universitaire.»
Merci d'avance pour votre considération. Et
je passe la parole à ma collègue, Beatrice Mackie, la présidente de
l'association des étudiants en droit de McGill.
Mme Mackie (Beatrice) : Merci
beaucoup, George. Bonjour, je m'appelle Beatrice Mackie et je voudrais,
premièrement, remercier la commission pour nous avoir invités aujourd'hui.
En tant que présidente de l'association
des étudiants et étudiantes en droit de <McGill...
M. Monastiriakos (George) :
...ma
collègue, Beatrice Mackie, la présidente de l'association des étudiants
en droit de McGill.
Mme Mackie (Beatrice) :
Merci beaucoup, George. Bonjour, je m'appelle Beatrice Mackie et je voudrais
premièrement remercier la commission pour nous avoir invités aujourd'hui.
En tant que présidente de l'association
des étudiants et étudiantes en droit de >McGill, j'appuie les articles 2,
3, 51, 52 et 56 de la loi n° 75 pour les raisons
suivantes. Premièrement, ces articles ont pour but d'améliorer l'accès à la
justice. Ce principe est fondamental dans notre système de droit, comme
priorisé dans la disposition préliminaire du Code de procédure civile. Donc,
cette valeur devrait encore une fois être priorisée par l'Assemblée nationale.
• (11 h 40) •
En effet, le Forum canadien sur la justice
civile a établi que 48,4 % des adultes canadiens éprouvent au moins un
problème juridique, civil ou familial, pendant une période triennale.
Cependant, bien que beaucoup de personnes sont confrontées à des problèmes
juridiques, plusieurs individus n'ont pas les moyens financiers pour recevoir
de l'aide. Le projet de recherche intitulé Accès au droit et à la justice,
fondé par l'Université de Montréal, a trouvé qu'une majorité des avocats au
Québec demandent aux alentours de 200 $ par heure pour de l'aide
juridique. Par conséquent, les parties n'ont pas toujours les outils pour bien
défendre leur position en conflit.
Si le projet de loi n° 75 est adopté,
la population aurait une meilleure chance à recevoir de la véritable justice.
Au-delà de l'accessibilité financière, le projet de loi aiderait les gens à
naviguer le système juridique, qui est souvent compliqué pour ceux qui n'ont
pas une formation juridique. Recevoir de l'aide d'une étudiante en droit ferait
en sorte que le système judiciaire soit moins intimidant pour le profane.
Deuxièmement, la COVID-19 a posé plusieurs
nouveaux problèmes pour notre système judiciaire. Il y a maintenant des
nouvelles disputes entre les locateurs et les locataires, entre les parties
dans le contrat et entre les patrons et les employés. L'accroissement de la COVID
a aussi apporté des changements au taux de chômage au Québec, démontrant que
l'emploi est particulièrement instable. En conséquence, c'est même plus difficile
pour les Québécois de financer l'aide juridique.
En outre, il faut reconnaître que la COVID
pose plusieurs obstacles pour la santé mentale aussi. Les procès et les
problèmes juridiques sont déjà assez stressants, donc avoir des services qui
sont accessibles et gratuits pourrait promouvoir la tranquillité d'esprit. Bien
que la pandémie ne fera pas partie de notre vie perpétuellement, les effets de
la pandémie sur notre système de droit et sur notre société vont être visibles
à long terme. La COVID a mis au clair le fait que du changement à notre système
existant est nécessaire.
En troisième lieu, la loi n° 75
donne l'opportunité aux étudiants en droit d'appliquer leurs connaissances
juridiques. Cela leur donnerait de l'expérience concrète et réelle en
promouvant l'importance de la responsabilité et de la confidentialité. Ceci
représente une occasion d'apprentissage enrichissante pour les étudiants et
ferait en sorte que les gradués seront plus prêts pour leur future carrière. À
McGill, les étudiants sont bien préparés pour ce nouveau défi. Dans la première
année du programme, les élèves prennent un cours pratique pour apprendre la
recherche juridique, la rédaction de mémoire et la plaidoirie.
Maintenant, je vais parler du contexte de
la clinique d'information juridique de <McGill, ou CIJM…
Mme Mackie (Beatrice) :
...en sorte que les gradués seront plus prêts pour leur future carrière. À
McGill, les étudiants sont bien préparés pour ce nouveau défi. Dans la première
année du programme, les élèves prennent un cours pratique pour...
(panne
de son) ...la recherche juridique, la rédaction de mémoire et la plaidoirie.
Maintenant, je vais parler du contexte
de la clinique d'information juridique de >McGill, ou CIJM
spécifiquement. La majorité des dossiers traités par la clinique sont des
dossiers de bail résidentiel, de contrat, de famille ou d'emploi. La CIJM ne
traite pas de dossiers dans des domaines de droit qui sont ce que j'appellerais
de risque élevé, comme le droit pénal, le droit fiscal et le droit de la
construction. Lorsque j'étais une bénévole, les dossiers étaient souvent très
simples, avec des réponses noir ou blanc, et j'avais reçu une formation robuste,
soulignant l'importance de mes responsabilités et de l'éthique.
Les services de la CIJM sont très
populaires. Et, dans le mois de septembre, ils ont accepté 230 nouveaux
dossiers après le triage, mais, parce que les bénévoles peuvent seulement
donner de l'information et non des avis, il faut souvent référer les clients à
d'autres cliniques qui ont des ressources d'avis juridiques pour répondre à
leurs questions, même si les réponses étaient simples. Cela provoque une
surcharge sur ces autres cliniques communautaires et, de plus, complique les
pistes que les clients doivent suivre.
En dernier lieu, je voudrais ouvrir la
discussion de comment la loi n° 75 pourrait aller
plus loin pour les buts énumérés. Nous pensons que le projet de loi devrait
s'appliquer à toutes les cliniques juridiques communautaires. Si l'Assemblée se
sent confortable à donner cette nouvelle responsabilité aux étudiants en droit
dans les cliniques universitaires, pourquoi faudrait-il limiter le type de
clinique où les étudiants peuvent utiliser ce pouvoir? Si le véritable but du
projet, c'est l'accès à la justice, élargir les contextes où les étudiants en
droit peuvent donner des avis juridiques est dans le meilleur intérêt de la
population. Merci beaucoup.
Le Président (M. Bachand) :
Merci infiniment pour votre présentation. M. le ministre, vous avez la parole
pour un maximum de 15 minutes. Merci.
M. Jolin-Barrette : Oui, merci,
M. le Président. Bonjour. Merci beaucoup de participer à la commission
parlementaire sur le projet de loi n° 65, les deux
associations étudiantes de McGill et de l'Outaouais. On a séparé... Bien, le
secrétariat de la commission a séparé les associations en trois blocs de deux
associations étudiantes. Je pense que vos propos sont très pertinents et je
tiens à vous remercier.
Donc, je comprends que vous êtes en faveur
du projet de loi n° 75, mais que vous souhaiteriez
qu'on aille encore plus loin, notamment au niveau de la justice communautaire,
les cliniques communautaires, également même dans les bureaux d'avocats. Je
lisais, là, le mémoire de l'association des étudiants en droit civil de
l'Outaouais. Même dans les bureaux d'avocats, les étudiants en droit devraient
pouvoir donner des avis et des conseils juridiques, le tout dans un souci
d'avoir davantage d'accès à la justice. Je pense que vous l'avez bien dit tout
à l'heure, de dire, bien, que, pour les citoyens, ça donne davantage accès à
des conseils, à des avis.
Je vais vous poser la question suivante, parce
qu'hier on a entendu les doyens des facultés de droit civil, et ils nous ont
dit : Nous, écoutez, ce qu'on souhaite, pour l'instant, là, ce qu'on est
prêts à faire, ce sur quoi on est prêts à travailler déjà, dès maintenant,
c'est vraiment sur les cliniques juridiques universitaires. Ils nous ont dit :
On n'exclut pas éventuellement le communautaire, mais, nous, où on est prêts
présentement, là, c'est le juridique <universitaire...
M. Jolin-Barrette :
...on
a entendu les doyens des facultés de droit civil, et ils nous ont
dit : Nous, écoutez, ce qu'on souhaite, pour l'instant, là, ce qu'on est
prêts à faire, ce sur quoi on est prêts à travailler déjà, dès maintenant,
c'est vraiment sur les cliniques juridiques universitaires. Ils nous ont dit :
On n'exclut pas éventuellement le communautaire, mais nous, où on est prêts
présentement, là, c'est le juridique >universitaire, et, ça, on est
prêts à mettre ça de l'avant vraiment rapidement. Comment recevez-vous ces commentaires-là
de la part des doyens, qui disent : Bien, peut-être qu'on devrait y aller
dans un second temps sur des cliniques communautaires?
Mme Mackie (Beatrice) :
Personnellement, je comprends complètement le sentiment des doyens. Je dirais
que ça ferait du sens de faire comme un mouvement en deux parties, mais il
faudrait quand même faire une promesse que ça arriverait dans le futur juste
pour s'assurer que, vraiment, le but de l'accès à la justice est priorisé.
M. Jolin-Barrette : O.K.
Donc, pour vous, ça vous satisferait que le gouvernement et les parlementaires
prennent un engagement de dire : Bien, dans un premier temps, on se
concentre sur les cliniques juridiques universitaires et, dans un deuxième
temps, éventuellement, on pourrait revenir pour élargir peut-être la définition
en fonction de voir comment ça se déroule, les avis, les conseils juridiques
dans le cadre d'une clinique juridique universitaire. Et, par la suite, éventuellement,
peut-être l'année prochaine, on pourrait revenir pour dire... en fonction de
l'expérience qu'on a vécue. Ça, ça vous conviendrait.
Mme Mackie (Beatrice) : Pour
moi personnellement, je pense que ça me convient, parce qu'on pourra voir les
effets, dans un premier temps, de comment ça va aux cliniques juridiques
universitaires et voir les conséquences avant d'aller plus loin.
M. Jolin-Barrette : Dans
votre mémoire, là, je remarque que vous avez fait un comparatif avec les autres
ordres professionnels. Et puis votre collègue, aussi, de l'Université McGill
nous le disait tout à l'heure, il disait : Moi, quand je me suis fait
soigner à l'hôpital pour ma luxation de l'épaule — j'espère,
d'ailleurs, que c'est bien réparé puis que tout fonctionne très
bien — c'était un étudiant, à l'hôpital, sous la supervision d'un
médecin, qui a procédé à cet acte médical là. Donc, vous relatez, dans votre
mémoire, dans le fond, les différentes situations où il y a d'autres ordres
professionnels qui délèguent ce genre d'acte réservé là pour des étudiants qui
sont très bien encadrés. Donc, vous faites le comparatif dans votre mémoire.
M. Monastiriakos (George) :
Oui. Donc, nous, l'Association des étudiantes et étudiants en droit civil, à la
page 10… qu'on a relaté ces faits. Donc, il y a les psychologues, l'Ordre
des pharmaciens du Québec, le Collège des médecins du Québec, les sciences
infirmières et le travail social, donc, avec tous les règlements cités dans le
tableau. Et nous, on a... Pardon?
M. Jolin-Barrette : Allez-y,
allez-y.
M. Monastiriakos (George) : Ah
non! C'est tout.
M. Jolin-Barrette : C'est ça.
Donc, vous donnez des exemples que, dans d'autres ordres professionnels, eux,
ils permettent de faire des actes qui sont réservés à la profession, pour les
étudiants, mais avec encadrement. Puis, à la page 9, aussi, de votre
mémoire, vous faites le comparable où les autres provinces et les autres
territoires, eux, offrent des cliniques juridiques et permettent, dans les
autres juridictions canadiennes, de donner des conseils et des avis <juridiques.
C'est...
M. Jolin-Barrette :
...eux,
ils permettent de faire des actes qui sont réservés à la
profession pour les étudiants mais avec encadrement. Puis, à la page 9
aussi de votre mémoire, vous faites le comparable où les autres provinces et
les autres territoires, eux, offrent des cliniques juridiques et permettent,
dans les autres juridictions canadiennes, de donner des conseils et des avis >juridiques.
C'est bien ça?
M. Monastiriakos (George) :
Oui, absolument. Bien, ça dépend de la province en question. Donc, en Ontario,
c'est différent qu'en Manitoba ou en Saskatchewan. Donc, en Ontario, les
étudiants peuvent se faire déléguer toutes les tâches qu'un avocat ou un
parajuriste… qu'ils croient qu'ils sont compétents à accomplir. Donc, ça, c'est
une grande marge de manoeuvre quant à la responsabilité et l'indépendance
qu'ils donnent aux étudiants, comparé à nous, qui... On travaille dans une clinique
à justice à proximité ou un bureau d'information juridique. Donc, c'est très
limitant. C'est très limitant, à mon avis.
M. Jolin-Barrette : Donc, je
comprends de votre propos que le Québec est en retard par rapport aux autres
juridictions canadiennes par rapport aux étudiants pour l'accès à la justice,
pour offrir des services juridiques aux justiciables?
M. Monastiriakos (George) :
Nous sommes absolument d'accord. Je suis absolument d'accord. Je ne peux pas...
pour l'association des étudiantes et étudiants en droit civil, mais, moi, en
tant que président, personnellement, je pense que je suis absolument d'accord
avec vous.
M. Jolin-Barrette : J'aurais
une question. Je ne sais pas si vous avez suivi les consultations hier, mais on
a des associations d'avocats qui sont venues nous dire : Attention, c'est
très, très dangereux de permettre à des étudiants en droit de donner des
conseils et des avis juridiques même s'ils sont sous la supervision bien
encadrée d'un avocat en exercice ou d'un notaire en exercice. Les étudiants en
droit ne disposent pas des connaissances suffisantes, et ça serait dangereux
pour le public. Qu'est-ce que vous leur diriez si je vous laissais la parole
pour répliquer à cela?
• (11 h 50) •
Mme Mackie (Beatrice) :
Personnellement, je répondrais que les étudiants en droit sont prêts. La
manière dont les cours fonctionnent… Aux facultés, il y a vraiment un élément
pratique qui est priorisé. Puis on peut aussi penser que, si la loi n° 75
passe, <que >les facultés vont peut-être changer comment les cours
se vont dérouler pour avoir même plus de pratique. On a vu que, dans les autres
provinces comme l'Ontario et la Colombie-Britannique… que ça a fonctionné
d'avoir des lois similaires. Donc, pour moi, je n'ai pas cette même peur. Les
responsabilités qui viennent avec donner des avis juridiques, comme la
confidentialité, c'est quelque chose que les étudiants en droit doivent apprendre
que c'est à leur profession, que c'est en cours d'éthique, que c'est au
Barreau. Donc, pourquoi ne pas leur donner une autre opportunité de pratiquer
ces responsabilités dans le contexte où ils sont supervisés et ils sont dans
une clinique qui est administrée par l'université?
M. Jolin-Barrette : Est-ce
que vous pensez que, si on permet aux étudiants en droit de donner des conseils
et des avis juridiques, il y a beaucoup de citoyens qui vont pouvoir en
bénéficier, de ces services-là, à faible <coût ou gratuitement...
Mme Mackie (Beatrice) : ...et
ils sont dans une clinique qui est administrée par l'université?
M. Jolin-Barrette :
Est-ce que vous pensez que, si on permet aux étudiants en droit de donner des
conseils et des avis juridiques, il y a beaucoup de citoyens qui vont pouvoir
en bénéficier, de ces services-là, à faible >coût ou gratuitement? Quel...
si on permet ce pouvoir-là aux étudiants?
Mme Mackie (Beatrice) : Pour
moi personnellement, je pense que ça aurait un vraiment bon effet sur la population.
Quand moi, j'étais une bénévole à la clinique d'information juridique de
McGill, souvent, je dirais, à peu près 95 % des gens voulaient avoir plus
que juste de l'information. Ils voulaient avoir des avis juridiques, mais ils
n'avaient pas les moyens de recevoir des avis. Donc, je pense que ça aura un
bon effet sur la population, c'est sûr.
M. Jolin-Barrette : O.K. Peut-être
une dernière question avant de céder la parole à mes collègues. Le fait de
pouvoir donner des avis et des conseils, pensez-vous que ça va permettre aux
étudiants en droit d'améliorer, un, leurs connaissances, mais aussi d'être de
meilleurs avocats dans le cadre de leur... lorsqu'ils seront gradués et de
permettre aussi de comprendre davantage la réalité des justiciables puisqu'ils
les rencontreront préalablement?
M. Monastiriakos (George) :
Oui. Tout d'abord, nous avons abordé ce point comme le... au paragraphe 14
de notre mémoire. Donc, comme le conseil des doyens de droit du Québec, nous
sommes d'avis qu'un apprentissage fondé sur l'expérience rendrait les avocats beaucoup
plus qualifiés... Ça, c'est sûr et certain. Et je pense, personnellement, que c'est
démontré par les autres provinces du Canada et les territoires surtout. Donc
oui.
M. Jolin-Barrette : Parfait. Bien,
je souhaite vous remercier grandement pour la présentation et la qualité de la présentation
pour l'association en droit des étudiants de l'Université McGill et celle des
étudiants en droit civil de l'Outaouais. Un grand merci. Je sais que j'ai des collègues
qui veulent vous poser des questions.
Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup, M. le ministre. M. le député de Chapleau, s'il
vous plaît.
M. Lévesque (Chapleau) : Oui, merci
beaucoup, M. le Président. Bonjour, M. Monastiriakos, également Mme Mackie.
Je dois vous avouer, d'entrée de jeu, que mon coeur balance entre vous deux,
étant un représentant de la très belle région de l'Outaouais, mais également
étant un gradué de McGill, de la Faculté de droit. Donc, fort... Donc, bienvenue
à cette commission. J'aimerais peut-être vous demander de me décrire
respectivement comment ça se passe les activités actuellement dans les
cliniques juridiques d'information qui ont lieu dans vos facultés respectives,
donc, un peu le portrait, qui vous supervise, qui est, bon, votre clientèle,
pour me donner, là, une bonne idée à ce niveau-là.
M. Monastiriakos (George) : Si
vous me permettez de commencer, donc, à Ottawa, la plupart des étudiants, ils
travaillent dans les cliniques à justice à proximité. Donc, c'est un bureau qui
fournit des services juridiques sans donner des avis juridiques, surtout. Donc,
ils fournissent des informations. Ils sont supervisés par des <avocats...
M. Monastiriakos (George) :
...la plupart des étudiants, ils travaillent dans les cliniques à justice à
proximité. Donc, c'est un bureau qui fournit des services juridiques sans donner
des avis juridiques, surtout. Donc, ils fournissent des informations, ils sont
supervisés par des >avocats et, je pense, même des notaires. Je n'ai
jamais travaillé... de cette clinique.
Par contre, il y a beaucoup d'étudiants, à
l'Université d'Ottawa, qui s'impliquent dans d'autres cliniques juridiques
communautaires. Donc, si je vous invite de regarder le paragraphe 8 de
notre mémoire, c'est le témoignage d'un étudiant qui a travaillé dans une
clinique, dans la Clinique de droit notarial de l'Outaouais. Et donc lui, il
nous a dit que, dans les cliniques juridiques communautaires, ils leur demandent…
pour des avis juridiques, et eux, ils doivent les détourner, n'est-ce pas,
donc, parce qu'ils ne peuvent pas fournir des avis juridiques.
Dans le… au paragraphe 9, de plus, il
y a un autre étudiant qui nous a témoigné que, parfois, le client les... leur
demande pour un avis juridique. Ensuite, l'étudiant prend l'information. Il
leur dit : Je vais te rappeler dans un temps... en temps et lieu. Et
ensuite il vérifie auprès de l'avocat et, après, rappelle le justiciable ou le
client potentiel pour ne lui fournir que de l'information juridique. Donc, ça, c'est,
à notre avis… À mon avis, ce n'est pas efficace du tout.
De plus, il y a même d'autres étudiants…
une étudiante, au paragraphe 11, je crois, qui nous a raconté que, parfois,
il y a des questions qui sont assez simples de répondre. Ensuite, ils ne
peuvent pas le répondre, «right, so»… Je ne pense pas que c'est efficace en ce
moment. Et j'espère que ça a bien répondu à votre question et je cède la parole
à Beatrice.
Mme Mackie (Beatrice) : Donc,
chez McGill, à la clinique d'information juridique, c'est vraiment un service
populaire dans la communauté de McGill, mais aussi dans la communauté
montréalaise et québécoise.
La manière dont ça fonctionne, il y a
souvent quatre étudiants ou cinq étudiants par quart, puis ils sont supervisés
par les dirigeants de la clinique. Il y a une première étape de triage où les
étudiants prennent les appels, puis, après les appels, ils doivent décider si
on peut prendre le cas ou non. Si c'est un cas qui est assez simple, quelque
chose de bail résidentiel ou quelque chose de famille, la clinique est capable
de le prendre. Si c'est quelque chose de droit pénal, droit fiscal, droit de
construction, ils ne le touchent pas. Ce qui arrive souvent, par contre, <c'est…
>après que les bénévoles donnent l'information, c'est normal que les
gens veuillent plus d'information, ils veulent plus d'avis, puis souvent on
doit les référer à une autre clinique.
Donc, souvent, les clients sont référés à
la clinique communautaire Mile End parce qu'eux, ils ont des avocats qui
peuvent donner des avis juridiques, mais ce qui arrive, c'est que ces cliniques
<juridiques...
Mme Mackie (Beatrice) :
...c'est
normal que les gens veuillent plus d'information, ils veulent
plus d'avis, puis souvent on doit les référer à une autre clinique.
Donc, souvent, les clients sont référés
à la clinique communautaire Mile End parce qu'eux, ils ont des avocats qui
peuvent donner des avis juridiques, mais ce qui arrive, c'est que ces cliniques
>juridiques, comme Mile End, sont débordées, parce qu'ils reçoivent
plein de cas de leur communauté, mais aussi ceux des communautés
universitaires. Donc, je pense que, vraiment, ce qui est vraiment fort de la
loi n° 75, c'est qu'il y aurait moins de surcharge sur ces autres cliniques
communautaires aussi.
M. Lévesque (Chapleau) : Et
donc parce que mon point… Donc, il y a des enjeux d'efficacité, de simplicité
également. Le Barreau nous disait que, bon, il avait certaines craintes par
rapport à la protection du public. Pensez-vous que les procédures actuellement
mises en place ou qui pourraient être négociées par la suite pourraient être
satisfaisantes dans la protection du public? Est-ce que c'est une crainte que
vous partagez ou vous êtes confiants qu'on pourrait arriver à quelque chose de
positif pour le public?
Mme Mackie (Beatrice) : Pour
moi personnellement, je n'ai pas vraiment cette peur, parce que, déjà, il y a
vraiment des manières robustes, qui sont en place, de supervision, de
confidentialité, aux cliniques juridiques universitaires. Maintenant, il
faudrait juste vraiment y penser puis faire de la consultation de comment on
pourrait changer ça puis rendre ça même plus robuste dans ce nouveau contexte.
Donc, je ne pense vraiment pas que c'est une crainte pour nous. Il faudrait
juste vraiment bien le planifier.
M. Lévesque (Chapleau) : Merci
beaucoup. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Bachand) :
...député de Chapleau. M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît.
M. Tanguay
: Merci
beaucoup, M. le Président. Bien, à mon tour de vous saluer, Mme Mackie,
également M. Monastiriakos. Merci beaucoup de répondre à nos questions.
Dans le document que l'Association des
étudiantes et étudiants en droit civil de l'Outaouais nous a remis, il y a un
bout qui a attiré mon attention, puis j'aimerais peut-être vous entendre
là-dessus, c'est la page 6, où vous disiez, puis j'aimerais mettre le
focus là-dessus puis vous entendre, les deux, «…la formation des jeunes
juristes et futurs avocats [serait] beaucoup plus complète», autrement dit, que
ça participe, cet exercice-là... puis on va revenir, dans nos discussions, sur
l'accès à la justice pour les justiciables, mais ça participe également d'une
façon de toucher à la pratique.
Puis je lisais un peu plus en avant, dans
le mémoire, que certains étudiants, où ils avaient l'obligation uniquement de
donner l'information, devaient se mordre les lèvres, ne pouvaient pas parler,
mais connaissaient la réponse. Puis, comme on sait, quand on est étudiant en
droit, puis que la question est claire, puis qu'on connaît la réponse, la
première chose qu'on veut faire, c'est l'écrire puis aller chercher nos points,
mais bref…
• (12 heures) •
Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus,
sur l'aspect formation pratique plus complète… que, nonobstant cela, même sous
la forme seulement d'information juridique, nonobstant cela, du
pratico-pratique, durant les trois ans du bac, quatrième année si vous faites
common law et le Barreau, on touche... à toutes fins pratiques, on ne touche
pas à l'aspect pratique, et, quand on commence, on a encore un monde à
apprendre là-dessus. J'aimerais vous entendre sur cette complétude-là qu'on va <chercher
dans la formation des futurs juristes...
>
12 h (version révisée)
<11789
M.
Tanguay
: ...si vous faites common law. Et, le Barreau, on
touche…
à toutes fins pratiques, on ne touche pas à l'aspect pratique.
Et, quand on commence, on a encore un monde à apprendre là-dessus. J'aimerais
vous entendre sur cette complétude-là qu'on va >chercher dans la
formation des futurs juristes.
Mme Mackie (Beatrice) : Je
peux débuter d'abord. Donc, je pense que ce qu'il est vraiment important de
travailler avec une clinique juridique puis de donner des opinions, c'est vraiment
apprendre l'importance de la confidentialité, puis c'est vraiment une
expérience que tu peux seulement avoir lorsque tu rentres… la profession, mais
je pense que c'est une des obligations les plus importantes en tant qu'avocat. Donc,
je pense que, de cette manière-là, vraiment, appliquer la théorie de la classe
puis avoir de la vraie responsabilité, c'est vraiment important puis c'est vraiment
un gros plus de la loi n° 75, mais aussi, je pense, c'est
important parce que ça donne l'expérience aux étudiants en droit de donner à
leur communauté, ce qui est, pour moi, une morale puis une éthique qui est vraiment
importante de notre profession.
M. Tanguay
: Est-ce
qu'on peut entendre M. Monastiriakos?
M. Monastiriakos (George) :
Oui, merci. Oui, donc, nous partageons le même avis que la présidente de l'association
des étudiants en droit de McGill, tel qu'on a déjà démontré au paragraphe 13.
Donc, c'est sûr et certain que ça rend la formation beaucoup plus pratique et beaucoup
plus complète, et c'est pour cette raison qu'on a comparé à la formation que… Les
étudiants en droit des autres territoires et provinces canadiens ont tout à
fait une formation beaucoup plus complète que nous. Ça, c'est abordé aux paragraphes 17
et 18.
Ensuite, on a même comparé ça à la formation
professionnelle que les autres étudiants des autres professions d'ordres
professionnels… même au Québec, tant les étudiants en pharmacie, ou médecins,
ou travail social, ou psychologie, etc. Donc, nous soutenons ce point à
100 % que, vu que c'est une profession professionnelle et c'est la
pratique… Tout à fait, l'apprentissage théorique, ça ne fait pas... ça nous
aide… c'est 50 % ou même 40 % de la réalité qu'on va suivre lorsqu'on
se rend au marché de travail ou en pratique de droit.
M. Tanguay
: Je suis
tout à fait d'accord avec vous. Je dois vous avouer, la première semaine où
j'étais stagiaire en droit, en litige commercial, c'était une relation de vente
régulière sur plusieurs années, de vente de pièces, et l'avocat m'a dit :
Bon, bien, Marc, il faut avoir tous les documents. Puis j'avais dit : Ah! O.K.
Qui, chez le client, va me donner... va me dire les documents que j'ai de
besoin? Puis là il m'avait regardé puis il m'avait dit : Bien, c'est toi
qui vas lui dire ce que tu as de besoin. Alors, c'est là que j'avais dit :
Wow! O.K., on fait une sorte d'enquête.
Alors, tu dis au client : J'ai besoin
du contrat initial, le contrat-cadre, depuis 10 ans, est-ce qu'il y a eu des
«purchase orders», des bons de commande? Oui, je veux tous les <bons de
commande...
M. Tanguay
: ...
il
faut avoir tous les documents. Puis j'avais dit : Ah! O.K. Qui, chez le
client, va me donner... va me dire les documents que j'ai de besoin? Puis là il
m'avait regardé puis il m'avait dit : Bien, c'est toi qui vas lui dire ce
que tu as de besoin. Alors, c'est là que j'avais dit : Wow! O.K. On fait
une sorte d'enquête.
Alors, tu dis au client : J'ai
besoin du contrat initial, le contrat-cadre. Depuis 10 ans, e
st-ce qu'il
y a eu des «purchase orders», des bons de commande? Oui? Je veux tous les >bons
de commande. Est-ce que vous avez des bons de livraison? Est-ce que c'est signé
ou pas signé? Avez-vous des factures? Je veux avoir les dates, l'échéancier, le
document Excel des paiements, et ainsi de suite, parce que, là, on apprend
aussi une notion qu'on voit rapidement en théorie, c'est que l'exécution que
les parties font du contrat vaut contrat… Alors, ce n'est plus juste de dire :
Allez relire le contrat d'il y a 10 ans, mais, si vous avez toléré que je vous
payais dans les 50 jours après 10 ans, ne venez pas me taper sur les doigts
puis réclamer quand vous l'avez accepté pendant 10 ans.
Alors, c'est plein de choses que l'on
apprend du point de vue pratique, puis l'élément très pratico-pratique d'avoir
une personne devant soi puis de poser les questions, parce que, quand on
s'assoit puis qu'on est dans un examen de droit pénal, on sait que ça va être
des questions de droit pénal, mais, souvent, dans la vraie vie, une question en
faillite va déboucher sur d'autres questions en matière d'obligations, de
succession ou même de droit familial, et ainsi de suite. Je trouve très, très
intéressant le tableau comparatif que vous avez fait. Dans les autres
universités, on peut voir qu'il y a différentes approches, puis merci pour
cette analyse-là.
Au niveau de la rémunération, j'aimerais
revenir là-dessus, évidemment, quand on dit : L'accès à la justice… il
coule de source que le justiciable n'aurait pas à payer pour ça. J'aimerais
peut-être que vous me détrompiez si j'ai tort, peut-être paiement d'une somme
minimale… Je veux savoir où vous, vous logez là-dessus, mais, selon moi, il
n'aurait pas à payer, de un.
Et, de deux, l'aspect de la rémunération,
est-ce qu'on peut très clairement envisager ça? Parce que, dans d'autres
provinces, parfois, il y a une rémunération des étudiants. Est-ce que, ça,
vous, vous ne le demandez pas, puis ce serait peut-être même mieux, même, que
ça ne le soit pas, ou peut-être oui? J'aimerais vous entendre là-dessus.
M. Monastiriakos (George) :
Bien, je peux commencer. Moi, je pense que ça dépend… À mon avis, d'ici, peut-être,
une quinzaine d'années, on va voir, dans le domaine du droit, que ça va changer
d'un taux horaire de l'heure à un droit comme service, «law as a service». Je
pense que ça va changer totalement. Donc, les étudiants doivent... vu qu'ils
ont leurs propres dépenses, il faut les payer, mais on peut fournir ces
conseils juridiques sous la supervision étroite et la responsabilité d'un
avocat pour un coût de moins que... Je pense que c'est au paragraphe 7
qu'on a dit que ça coûtait entre 195 $ à 380 $ de l'heure. Donc, on
peut le payer 20 $, 25 $ de l'heure pour fournir ce service
juridique, donc, le payer comme un technicien juridique ou un parajuriste.
Donc, ça dépend, et je cède la parole également à Beatrice.
M. Tanguay
: Oui,
peut-être juste pour finir avec vous sur cet aspect-là. Par contre, si ça
participe d'un cours qui est crédité, évidemment, là, il n'y aurait pas
l'aspect de la rémunération, là, dans la <réglementation, n'est-ce pas?
M. Monastiriakos (George) :
Oui...
M. Monastiriakos (George) :
...
donc le payer comme un technicien juridique ou un parajuriste. Donc,
ça dépend. Et je cède la parole également à Beatrice.
M. Tanguay
: Oui,
puis peut-être juste pour finir avec vous sur cet aspect-là, par contre, si ça
participe d'un cours qui est crédité, évidemment, là il n'y aurait pas l'aspect
de la rémunération, là, dans la >réglementation, n'est-ce pas?
M. Monastiriakos (George) :
Oui, ça, ça dépend, ça reste à combler. Moi, je ne me prononce pas sur cela en
ce moment.
M. Tanguay
: C'est bon.
M. Monastiriakos (George) : Je
tiens…
M. Tanguay
: Mme Mackie?
Mme Mackie (Beatrice) : …
M. Monastiriakos (George) : Je
voulais également vous... La quatrième colonne du tableau à la page 8, ça
dit, et à la page 9… Dans certaines provinces, ce n'est pas seulement les
étudiants en droit qui ont le droit de donner des conseils juridiques sans rémunération.
Dans certaines provinces, c'est même tout non-pratiquant de droit qui peut
fournir les conseils juridiques. Donc, ça, c'est… Je ne pense pas qu'il faut
suivre cette démarche, mais c'est juste une observation que j'ai faite au cours
de nos recherches. Donc, je cède la parole à Beatrice.
Mme Mackie (Beatrice) : Dans
le contexte de chez McGill, pour répondre à votre question, je pense que les
services devraient rester gratuits à la population et aux clients juste parce
que, je pense, c'est vraiment toujours ce que notre communauté a fait. Puis, je
pense, d'une manière... moralement, si on veut vraiment parler d'accès à la
justice, c'est la meilleure manière de procéder. En tant que… la rémunération
des étudiants qui donnent des avis juridiques, à mon avis, ce n'est pas nécessaire.
Il y a déjà certains bénévoles qui reçoivent des crédits pour... comme cours,
un peu, vers leurs programmes. Mais aussi je pense que nous avons beaucoup de
bénévoles, parce que les gens veulent aider, puis je pense qu'avoir cet esprit
de vouloir aider les autres devrait rester même si on commence à donner des
avis juridiques et non juste de l'information. Je ne suis pas fermée à l'idée, par
contre.
M. Tanguay
: Bien
compris. Et l'aspect, maintenant, d'essayer de couvrir le plus largement toutes
les régions du Québec, considérant que le pôle serait des pôles universitaires,
des universités… Évidemment, lorsqu'on inclut Ottawa, on en dénombre six,
facultés de droit. Il y a Sherbrooke qui est plus en région, trois à Montréal,
Laval, à Québec. Comment on fait pour que les autres régions aient accès aussi
à cela? Avez-vous une réflexion par rapport à l'accès pour les résidents des
autres régions non couvertes par une faculté de droit?
Mme Mackie (Beatrice) : Oui. Donc,
chez McGill, avec notre clinique juridique, on prend des appels de partout au Québec.
Donc, ça pourrait être intéressant de peut-être faire… vraiment, comme,
promouvoir nos services aux régions qui n'ont pas ces services, travailler avec
les municipalités. Peut-être, ça serait une bonne idée. Mais aussi, je pense, c'est
pour ça que George, mon collègue, et moi, on recommande vraiment que le projet
de loi va plus loin, parce qu'on est en train de couvrir un certain territoire,
mais il y a plein d'autres, comme, cliniques juridiques communautaires qui
peuvent servir d'autres <régions aussi....
Mme Mackie (Beatrice) :
...mais aussi, je pense, c'est pour ça que George, mon
collègue, et moi,
on recommande
vraiment que le projet de loi va plus loin, parce qu'on
est en train de couvrir un certain territoire, mais il y a plein d'autres,
comme, cliniques juridiques communautaires qui peuvent servir d'autres >régions
aussi.
M. Tanguay
: Merci. Est-ce
que, monsieur, vous avez d'autres commentaires à ajouter à ce chapitre-là?
• (12 h 10) •
M. Monastiriakos (George) :
Oui. Je pense que, comme Beatrice nous a dit, c'est pour cette raison qu'on
souhaite étendre ou élargir la portée du deuxième critère pour inclure les
étudiants travaillant dans des cliniques juridiques communautaires ou même des
cabinets d'avocats, oui. Donc, nous sommes absolument, entièrement d'accord
avec la position de la présidente de McGill.
M. Tanguay
: Et
j'aimerais... Une dernière question, dernier point que j'aimerais aborder avec
vous si vous pouvez l'étayer. Vous avez dit qu'il serait peut-être pertinent et
justifié de classer les types de dossiers qui pourraient faire l'objet de
conseils juridiques selon certains facteurs de risque, soit des risques très élevés
ou des risques très faibles, et peut-être de se tenir loin, peut-être, comme
vous avez mentionné, je pense, Mme Mackie, des dossiers qui relèvent du
droit pénal. On peut même envisager le droit criminel, mais là c'est, comme on
dit, «handle with care», là, comme vous avez dit. Il y a des dossiers qui sont excessivement
risqués. J'aimerais vous entendre élaborer là-dessus, sur, peut-être, la
nécessité de peut-être limiter les risques en faisant une analyse initiale sur
le type de dossier qui serait accepté, donc, certains qui ne seraient pas
acceptés, là.
Mme Mackie (Beatrice) : Oui. Donc,
c'est une vraiment bonne question. Quand j'ai parlé de ça dans mon discours, je
voulais vraiment mettre au centre le fait que, déjà, à la clinique juridique de
McGill, ils ne touchent pas le droit pénal, le droit fiscal ni le droit de
construction. Et la majorité des gens qui viennent à la clinique, c'est pour le
droit familial, le bail résidentiel et les contrats. Je pense que ce qui serait
vraiment fort, c'est que chaque clinique universitaire devrait avoir un
mouvement de triage au début pour voir si c'est vraiment un bon cas qui est
assez simple et non trop de risque élevé pour les étudiants. Mais, si on fait
ça, on est un peu dans, comme, un territoire compliqué où il faut choisir qu'est-ce
qui est trop difficile puis qu'est-ce qui est trop risque élevé. Donc, je pense
que ça ferait du sens de limiter un peu, mais il faut considérer que ce n'est
pas trop... ce n'est pas assez facile de dire quels cas sont assez simples et
quels cas sont assez difficiles.
M. Tanguay
:
M. Monastiriakos.
M. Monastiriakos (George) : Je
pense que ça, ça pourrait également favoriser notre point d'étendre ou
d'élargir la portée du deuxième critère, parce que, si on a un cabinet qui se
spécialise en droit fiscal, peut-être, dans ces circonstances, ce cabinet peut
s'occuper des cas de droit fiscal. Dans les cabinets de droit de... qui portent
sur le droit du divorce ou du droit de <la famille...
M. Monastiriakos (George) :
...
point d'étendre ou d'élargir la portée du deuxième critère, parce
que, si on a un cabinet qui se spécialise en droit fiscal, peut-être, dans ces
circonstances, ce cabinet peut s'occuper des cas de droit fiscal. Dans les
cabinets de droit de... qui portent sur le droit du divorce ou droit de >la
famille, ils se consacrent sur ça. Donc, je partage le même avis que Beatrice
et je pense que c'est un appui de plus sur nos deux mémoires.
M. Tanguay
: En tout
cas, merci beaucoup. Merci beaucoup, M. Monastiriakos et Mme Mackie,
pour votre temps puis vos éclairages. Merci.
Le Président (M. Bachand) :
À mon tour de vous remercier. Ce fut très intéressant et très inspirant. Alors,
merci beaucoup de votre participation à la commission. Très apprécié.
Et je suspends les travaux quelques
instants. Merci à vous deux encore.
(Suspension de la séance à 12 h 13)
(Reprise à 12 h 14)
Le Président (M. Bachand) :À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux.
Alors, il nous fait plaisir d'accueillir les représentants et représentantes de
l'Association des étudiantes et étudiants en droit de l'Université de Montréal
et l'Association des étudiants en droit de l'UQÀM. Alors, je vous invite à débuter
votre présentation, mais d'abord en vous identifiant, s'il vous plaît, et merci
d'être avec nous aujourd'hui. Alors, je ne sais pas qui débute.
Association des étudiantes et étudiants en droit de
l'Université de Montréal (AED – Université de Montréal) et Association des
étudiants en droit de l'UQÀM (AÉDUQÀM)
(Visioconférence)
M. Ammari (Issa) : Merci
beaucoup, M. le Président, M. le ministre et Mmes et MM. membres de la commission.
Je m'appelle Issa Ammari. Je suis le président de l'association étudiante de
droit de l'Université de Montréal. Sont présents avec moi Dalia Mihai,
présidente de l'association étudiante de droit à l'UQAM, et mon collègue
Patrick Cajvan. Nous sommes extrêmement reconnaissants d'être parmi vous
aujourd'hui et nous vous remercions à l'avance pour votre écoute.
En ce qui concerne le projet <de loi
n° 75...
M. Ammari (Issa) : …je
m'appelle Issa Ammari. Je suis le président de l'
association étudiante
de droit de
l'Université de Montréal. Sont présents avec moi Dalia
Mihai, présidente de
l'association étudiante de droit à
l'UQAM,
et mon collègue, Patrick Cajvan. Nous sommes extrêmement reconnaissants d'être
parmi vous aujourd'hui et nous vous remercions à l'avance pour votre écoute.
En ce qui concerne le projet >de
loi n° 75, nous sommes particulièrement interpelés par ses articles 2,
3, 51, 52 et 56, qui apporteront une modification nécessaire à la Loi sur le Barreau
et à la Loi sur le notariat. Dès notre entrée au baccalauréat en droit, en tant
qu'étudiants, on se fait souvent dire que le droit mène à tout. Bien que nous
aurons plusieurs opportunités de carrières qui s'offriront à nous en tant
qu'étudiants, il est important de se poser où est-ce que le droit mènerait le
justiciable.
À l'heure actuelle, force est de
reconnaître que le justiciable moyen, souvent dans une situation précaire, est
confronté à des obstacles réels d'inaccessibilité à la justice, notamment à la
lumière de la crise sanitaire actuelle, qui l'empêchent de connaître
concrètement ses droits. En effet, dans l'ouvrage de Pierre Noreau, professeur
titulaire au Centre de recherche en droit public de l'Université de Montréal,
il est souligné qu'environ 80 % des Québécois et Québécoises estiment ne
pas avoir accès aux services d'un avocat, et ce pourcentage ne cesse
d'augmenter.
Imaginez-vous ce justiciable, M. et Mme
Tout-le-monde, qui se trouve victime d'un abus de pouvoir par son locateur,
d'un congédiement injustifié ou de l'écroulement de sa petite entreprise dû à
tous les changements associés à la COVID-19. Ce même justiciable se présente à
la clinique juridique. Pourquoi? Parce qu'il n'a pas les moyens d'aller
consulter un avocat et il ne répond pas au seuil pour se prévaloir de l'aide
juridique. Arrivé à la clinique, tout ce qu'il reçoit en échange est un article
de loi qui comporte souvent des alinéas et des sous-alinéas remplis de virgules
et d'exceptions à ne plus en finir. C'est ce qu'on appelle la simple
compilation d'informations juridiques, qui, rappelons-nous, est le seul acte
permis par les étudiants en droit au Québec en ce moment, même sous
supervision. Donc, il est sans surprise que la simple compilation
d'informations juridiques est souvent mal comprise par le justiciable. Ici, on
se pose la question : Le droit l'a mené où? Et malheureusement la réponse,
c'est : Pas très loin.
À la suite d'un sondage effectué par le Comité
Accès à la justice de l'UdeM, plus de 94 % des étudiants expriment qu'ils
se sentent limités dans leurs fonctions et que cela nuisait fondamentalement au
bon déroulement du dossier du client. Nous tenons également à souligner que les
modifications apportées au projet de loi n° 75 vont permettre de
conscientiser et ancrer en nous, jeunes juristes, des enjeux d'accès à la
justice qui gouvernent notre domaine.
Bref, en ayant comme fil conducteur la
protection du public, et ce, à tous les niveaux, nous sommes confiants qu'il
est grand temps de s'allier aux autres provinces du Canada afin de permettre
aux étudiants d'offrir des consultations et des avis juridiques au public sous
la supervision, bien sûr, étroite d'un avocat ou d'un notaire, et ce, tel qu'annoncé
dans le projet de loi.
Sur ce, je cède la parole à Dalia Mihai,
mon homologue uqamienne.
Mme Mihai (Dalia) : Donc,
merci. Tel qu'énoncé précédemment, je me nomme Dalia Mihai. Je suis la
présidente de l'association des étudiantes et des étudiants en droit de l'UQAM.
Le projet de loi répond, certes, à des
enjeux réels auxquels il était grand temps de s'attarder. Toutefois, nous
considérons, mes collègues et moi, que la portée du projet de loi, dans sa
forme actuelle, est plutôt limitative et ne permet pas <d'exploiter
pleinement...
Mme Mihai (Dalia) : ...présidente
de l'association des étudiantes et des étudiants en droit de l'UQAM.
Le
projet de loi répond, certes,
à des enjeux réels auxquels il était grand temps de s'attarder. Toutefois, nous
considérons, mes collègues et moi, que la portée du projet de loi, dans sa
forme actuelle, est plutôt limitative et ne permet pas >d'exploiter
pleinement le potentiel de la relève juridique québécoise, relève qui pourrait notamment
jouer un rôle majeur dans l'enjeu d'accessibilité à la justice au Québec. Un
élargissement de la portée de la loi est, quant à nous, nécessaire afin de bien
répondre à la réalité des programmes universitaires et des besoins des
justiciables.
En effet, de notre point de vue, les
étudiantes et les étudiants en droit devraient avoir la possibilité d'effectuer
des avis et des consultations juridiques dans un cadre beaucoup plus large que les
simples cliniques juridiques universitaires, concept qui reste, d'ailleurs,
encore à définir. Les étudiantes et les étudiants devraient aussi avoir la possibilité
d'émettre des avis et d'effectuer des consultations juridiques dans le cadre de
leurs implications pro bono ainsi que dans le cadre des cliniques juridiques
dites communautaires, sujet auquel mon collègue s'attardera davantage.
En effet, à notre avis, les projets
étudiants menés dans le cadre des activités des sections pro bono des
universités devraient impérativement être inclus dans le projet de loi. Il faut
comprendre que les sections pro bono desdites universités ont comme principal
mandat de jumeler des étudiantes et des étudiants en droit à, notamment, des
organismes communautaires ayant des besoins de nature juridique.
Il faut noter aussi que tous les projets
pro bono menés par les étudiants en droit sont obligatoirement supervisés par
un ou une professionnelle du droit, que des coordonnateurs étudiants sont
engagés dans chaque faculté afin de chapeauter les projets et que des
professeurs désignés participent au contrôle et au bon fonctionnement des
partenariats. Les projets pro bono ont une place de choix dans les universités,
et nous pensons sincèrement que cette place devrait se refléter dans le projet
de loi. En nous permettant d'effectuer des avis et des consultations juridiques
dans le cadre de ces implications, vous réaliserez une réelle différence en
matière d'accessibilité à la justice au Québec, différence qui, malheureusement,
ne pourrait pas s'effectuer par la simple inclusion des cliniques juridiques
universitaires.
• (12 h 20) •
En effet, les sections pro bono des
universités réalisent principalement des partenariats avec des organismes
communautaires qui sont bien ancrés dans leurs collectivités et qui
entretiennent de très bonnes et de très fortes relations avec la clientèle
qu'ils desservent. Nombreux sont les individus qui ont recours à ces organismes
et qui auraient besoin d'avis ou de consultations juridiques. Toutefois, ces
derniers ne font pas appel aux services des cliniques juridiques étudiantes, et
ce, soit par manque de temps, par manque de confiance ou par manque de
connaissance de tels services.
Ainsi, en donnant la possibilité aux
étudiants d'émettre des avis et des consultations d'ordre juridique dans le
cadre de leurs implications pro bono, vous leur permettrez de répondre aux
besoins des justiciables qui n'iraient pas chercher de l'aide en clinique. De
surcroît, vous permettrez à plus de justiciables d'obtenir de l'aide sur le
plan juridique, et ce, dans un milieu qui leur est familier et dans lequel ils
se sentent <confortables...
Mme Mihai (Dalia) : ...
des
consultations d'ordre juridique dans le cadre de leurs implications pro bono,
vous leur permettrez de répondre aux besoins des justiciables qui n'iraient pas
chercher de l'aide en clinique. De surcroît, vous permettrez à plus de
justiciables d'obtenir de l'aide sur le plan juridique, et ce, dans un milieu
qui leur est familier et dans lequel ils se sentent >confortables.
Par ailleurs, cet élargissement
consoliderait des partenariats plus solides entre les sections pro bono des
universités et les organismes communautaires, qui sont avides de tels services
juridiques. Mentionnons également que de nombreux étudiants s'impliquent dans les
projets pro bono au Québec et que de renoncer à leur permettre d'offrir des
services juridiques similaires à ceux qui pourraient s'effectuer en clinique
juridique reviendrait à négliger une aide considérable, voire nécessaire.
De plus, cette inclusion permettrait non
seulement d'offrir aux étudiants une meilleure formation pratique, mais
favoriserait aussi une meilleure formation citoyenne chez les étudiants, qui
seraient alors plongés dans l'univers de l'organisme promouvant des causes
sociales. Cette insertion au coeur des organismes communautaires serait
grandement bénéfique pour les étudiants, qui seraient alors exposés à la vie
réelle de justiciables qui proviennent parfois de milieux sociaux très éloignés
des leurs. C'est une chose de former des juristes de tête, c'en est une autre
de former des juristes de coeur.
Soulignons que nos homologues canadiens
ont la chance d'émettre des avis et de poser certains actes juridiques dans le
cadre de leurs implications pro bono. Donc, nous, on croit sincèrement que
l'infusion des sections pro bono des universités dans le projet de loi devrait
être prise en considération. Vous avez beaucoup à gagner à croire en votre
relève juridique. Vous avez une relève juridique brillante, déterminée et
remplie de ressources, qui n'attend qu'à pouvoir aider, et ce, sans, pour
autant, compromettre la protection du public.
Sur ce, je laisse la parole à mon collègue
Patrick Cajvan.
M. Cajvan (Patrick) : Merci
beaucoup. Et, tel qu'énoncé par mes collègues, mon nom est Patrick Cajvan et je
suis membre du collectif Étudiants en droit d'aider. Ce regroupement de la Faculté
de droit de l'Université de Montréal a été créé il y a environ trois ans pour
encourager le gouvernement à mettre sur la table un projet de loi comme
celui-ci. Vous pouvez comprendre qu'on était vraiment ravis quand ce projet de
loi a été déposé.
Maintenant, mon rôle, aujourd'hui, et
notre rôle, sera de vous convaincre que le projet de loi devrait être élargi
aux cliniques juridiques et organismes communautaires qui ne sont pas affiliés
aux universités. C'est une position qui a déjà été mise de l'avant, notamment
par Mme la députée de Joliette et M. le ministre de la Justice, hier. Ces
cliniques ou organismes juridiques font vraiment partie de la communauté qu'ils
desservent et servent une population vraiment en besoin et très vulnérable. Je
pense notamment à la Clinique juridique itinérante, qui se déplace de refuge en
refuge pour améliorer l'accès à la justice des itinérants à Montréal.
À chaque année, le gouvernement du Québec supporte
ce genre d'organismes, comme Juripop, Éducaloi, la Clinique juridique du Mile
End, le Y des femmes, et j'en passe. Mais ces organismes ont déjà des étudiants
et des étudiantes en droit qui se portent bénévoles chez eux, mais il faut
comprendre que leur rôle est sévèrement limité, comme l'ont mentionné mes collègues.
Un simple élargissement de ce projet de loi permettrait à ces cliniques
juridiques d'aider plus de personnes en ayant des <étudiants bénévoles...
M. Cajvan (Patrick) : ...des
femmes, et j'en passe. Mais ces organismes ont déjà des étudiants et des
étudiantes en droit qui se portent bénévoles chez eux, mais il faut comprendre
que leur rôle est sévèrement limité, comme l'ont mentionné mes
collègues.
Un simple élargissement de ce
projet de loi permettrait à ces cliniques
juridiques d'aider plus de personnes en ayant des >étudiants bénévoles
qui peuvent faire, par exemple, la première rencontre avec le client, faire la
recherche juridique et leur offrir une solution, solution, bien sûr, qui a été
approuvée par l'avocat ou le notaire. Ceci permettrait vraiment de désengorger
ces cliniques ou organismes juridiques et aider plus de justiciables qui n'ont
pas accès à la justice.
La réalité, c'est que les cliniques
juridiques universitaires, qui sont peu nombreuses au Québec, oui, elles améliorent
l'accès à la justice, mais ce n'est pas suffisant pour avoir un impact majeur
sur les Québécois et les Québécoises. Pour vous donner un exemple concret, une
personne qui habite à Montréal-Nord doit prendre l'autobus et le métro pour
1 h 30 pour se rendre à la Clinique juridique de l'UQAM, quand il y a
une clinique juridique juste à quelques pas, la Clinique juridique de
Montréal-Nord, mais cette clinique ne peut pas donner un réel pouvoir aux
étudiants en droit.
J'aimerais aussi prendre un moment pour
souligner que les facultés de droit au Québec se retrouvent seulement dans les
grands centres : Montréal, Québec, Sherbrooke, Gatineau. Notre problème
d'accès à la justice s'applique tout autant aux grands centres qu'aux régions
du Québec. Le projet de loi, dans sa forme actuelle, ne permettrait pas aux
étudiants d'offrir leurs services gratuits, par exemple, dans les centres de
justice de proximité, qui se trouvent vraiment partout au Québec. Bref, c'est
une question de proportionnalité, une question d'échelle. Si le gouvernement
veut vraiment avoir un impact concret, là, sur l'accès à la justice en entier,
nous croyons qu'il faut vraiment élargir ce projet de loi, comme c'est le cas
dans la plupart des provinces canadiennes.
Merci beaucoup, et, bien sûr, nous sommes
à votre disposition si vous avez des questions.
Le Président (M. Bachand) :
Merci à vous trois. <Je vous invite... >Alors, on va débuter la
période d'échange, mais je vous invite à intervenir comme bon vous semble.
Lorsque vous prenez la parole, la caméra va suivre. Alors, on a une équipe de
techniciens formidables ici, à Québec. Alors, M. le ministre, s'il vous plaît.
M. Jolin-Barrette : Oui, bonjour
à vous trois. Merci d'être présents, donc, les associations en droit de l'UQAM
ainsi que de l'Université de Montréal. Vos propos sont très pertinents.
Écoutez, j'aurais un peu envie de vous
poser les mêmes questions que j'ai posées à vos prédécesseurs de McGill et
d'Ottawa. Et je vois, chez vous, par vos allocutions, que vous souhaitez
vraiment qu'on aille vers les centres de justice de proximité ou vers le
communautaire plutôt que de se limiter uniquement aux cliniques juridiques
universitaires. Comment est-ce que vous recevez ce que les doyens de facultés
de droit civil nous ont dit hier relativement au fait où ceux-ci étaient prêts
à débuter avec les facultés de droit universitaires et que, peut-être, dans le
futur, ils seraient prêts, par la suite, à aller vers le communautaire? Comment
vous recevez cela?
M. Ammari (Issa) : Si je peux
me permettre, comme vous l'avez mentionné, M. le
ministre, le Québec est en retard par rapport aux autres provinces du Canada, et
le faire en deux temps ne fait que retarder tout le processus et l'enjeu de
l'accès à la justice. Le limiter aux cliniques juridiques universitaires n'est
pas assez pour avoir un impact majeur auprès des Québécois et Québécoises. On a
un réel besoin <au Québec...
M. Ammari (Issa) : ...comme
vous l'avez mentionné, M. le ministre, le Québec est en retard par rapport aux
autres provinces du Canada, et le faire en deux temps ne fait que retarder tout
le processus et l'enjeu de l'accès à la justice. Le limiter aux cliniques
juridiques universitaires n'est pas assez pour avoir un impact majeur auprès
des Québécois et Québécoises. On a un réel besoin >au Québec. Et les
doyennes et les doyens, leurs enjeux, c'est leurs facultés. Pro Bono, c'est un
autre centre qui a ses propres réalités.
Donc, en laissant à tout le monde la
discrétion de faire qu'est-ce qui est émis par le projet de loi ou les
modifications qui vont y être apportées, ils vont pouvoir avoir un réel impact
sur les Québécois. Puis je tiens aussi à dire qu'il faut avoir confiance dans
notre relève juridique. On est les futurs leaders, engagés, sensibles, et ces
étudiants se trouvent autant dans les cliniques juridiques que dans les
cliniques communautaires.
Je ne sais pas si les autres voudraient
ajouter quelque chose.
M. Cajvan (Patrick) : Non, ça
va.
Le Président (M. Bachand) :
Ça va?
Mme Mihai (Dalia) : Non, ça
résume bien.
Le Président (M. Bachand) :O.K., merci. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : ...et
j'ai pleinement confiance dans la relève juridique et j'y compte bien que vous
soyez les leaders de demain. Je compte sur vous, d'ailleurs, sur ce point-là.
Bon, vous avez probablement entendu les
associations d'avocats, hier, qui sont venues nous dire : Surtout,
surtout, enlevez ça de votre projet de loi, c'est dangereux, ce que vous êtes
en train de faire, le gouvernement du Québec, de permettre à des étudiants en
droit qui sont près d'avoir leurs diplômes... On parlait de plus de
45 crédits, peut-être, avant de pouvoir donner des conseils ou des avis
juridiques. Donc, j'aimerais vous entendre sur le nombre de crédits juridiques.
Est-ce que vous êtes en accord avec… À partir de quand on devrait permettre les
avis et les conseils juridiques?
Et, deuxièmement, est-ce que vous
considérez que ça constitue un danger pour le public s'il y a des balises qui
sont claires, si c'est encadré par un avocat en exercice ou un notaire en
exercice, versus, notamment, les autres provinces canadiennes où, même, il y a
certains étudiants en droit qui peuvent faire de la représentation devant les
tribunaux? Comment vous voyez ça par rapport aux arguments qui sont amenés par
les associations d'avocats?
Mme Mihai (Dalia) : Donc, si
je peux me lancer, moi, je suis persuadée que la relève juridique veut… Et le
but principal, c'est d'aider sans, pour autant, nuire au justiciable. Donc,
notre but, en tant qu'étudiants, c'est d'aider et de contribuer au problème
d'accès à la justice qui est présent au Québec, et ce, sans, pour autant,
compromettre la protection du public, qui constitue, veux veux pas, un enjeu
majeur.
• (12 h 30) •
Donc, moi personnellement, concernant le
nombre minimal de crédits, j'ai un certain malaise du fait que je comprends que
cela découle du fait de vouloir protéger le justiciable, mais je crois aussi
qu'il faut prendre en considération que c'est différent dans les différentes
cliniques. Je vais prendre l'exemple de la Clinique juridique de l'UQAM. Chaque
dossier est fait en <équipe de trois où des étudiants...
>
12 h 30 (version révisée)
< Mme Mihai (Dalia) :
...protéger le justiciable, mais je crois aussi qu'il faut prendre en
considération que c'est différent dans les différentes cliniques. Je vais
prendre l'exemple de la clinique juridique de l'UQAM. Chaque dossier est fait
en >équipes de trois, où des étudiants de première année sont jumelés
avec des étudiants de deuxième et de troisième année, et ce, afin que, dès leur
première année, les étudiants soient... aient une formation qui est plus
pratique et plus humaine, puis ces étudiants-là, dès leur première année, ils
peuvent devenir des personnes clés au sein des cliniques. Donc, dès leur
deuxième et leur troisième année, ils deviennent des personnes clés. Ils ont
déjà fait beaucoup de recherches. Ils savent mieux comment gérer aussi les
usagers qui viennent nous voir.
Donc, moi, je pense qu'il faut vraiment
faire confiance à sa relève juridique. Je pense que les personnes seraient
surprises de la qualité des rapports qui sont émis, du professionnalisme qu'on
retrouve dans les cliniques juridiques. Faites confiance à votre relève
juridique. Puis je crois aussi qu'il y a beaucoup d'étudiants de première année
qui ont des bagages importants, que ce soient d'autres bacs, des expériences
professionnelles qui sont pertinentes, des expériences aussi de représentation
syndicale. Donc, moi, mettre un nombre de crédits un peu arbitraire, qui
viendrait limiter l'accès à une formation pratique, moi, je trouve que ça
serait quand même très limitatif comme ajout.
M. Ammari (Issa) : Puis
j'aimerais ajouter à mon homologue uqamienne qu'en général, en fait, les
étudiants veulent être encadrés. Les étudiants ne veulent pas être laissés à
eux-mêmes. À l'Université de Montréal, on est prêts. La structure est établie.
La seule chose qui changerait, c'est l'information qui est donnée aux
étudiants. Dans les cliniques juridiques universitaires, notamment, les
dossiers qui sont reçus par les étudiants sont dits de basse intensité. Donc,
ce n'est pas des dossiers compliqués. C'est des dossiers qui sont très
facilement répondus auprès des étudiants.
Et l'enjeu, ici, avec le nombre de
crédits, c'est la protection du public. Et, tant et autant que c'est supervisé
par un notaire ou un avocat, l'enjeu de la protection du public est... ce n'est
pas un problème vu que c'est approuvé par un professionnel. Donc, nous, on
aimerait juste vous conscientiser de ne pas trop mettre des balises sur le
nombre de crédits pour ne pas limiter la portée de la loi. Et, encore une fois,
en ce qui concerne le danger pour le public, il n'y en aura pas, vu que c'est
supervisé, encore une fois, étroitement par des professionnels du domaine du
droit.
M. Cajvan (Patrick) : Oui, si
je peux finalement rajouter, M. le ministre, en faisant de la sensibilisation
pour ce projet de loi, c'est un argument qu'on a entendu souvent, les avocats
qui disent : Bien, c'est dangereux, on ne peut pas permettre les avocats
de... pardon, les étudiants en droit de faire ça. Mais ils se basent sur la
prémisse que, les étudiants en droit, ils prendraient des clients des avocats,
et c'est une fausse prémisse. Comme l'a mentionné mon collègue, M. Ammari,
80 % des Québécois et des Québécoises ne peuvent pas se payer un avocat,
et plusieurs d'entre <eux...
M. Cajvan (Patrick) : ...les
avocats de... pardon, les étudiants en droit de faire ça, mais ils se basent
sur la prémisse que les étudiants en droit, ils prendraient des clients des
avocats, et c'est une fausse prémisse. Comme l'a mentionné mon collègue,
M. Ammari, 80
% des Québécois et des Québécoises ne peuvent
pas se payer un avocat et plusieurs d'entre >eux ne tombent pas dans les
seuils de l'aide juridique. Donc, c'est vraiment des clients qui n'ont pas
accès à la justice qui vont voir les étudiants, et les étudiants, comme l'ont
mentionné mes collègues, sont toujours supervisés par un avocat et un
notaire... ou un notaire.
Si je peux me permettre une petite tranche
de vie personnelle, l'année dernière, j'étais bénévole dans une clinique
juridique à Toronto, en Ontario, une clinique juridique des aînés, et cette
clinique n'était pas affiliée à une université, et je pouvais proférer des avis
juridiques aux clients, mais, toujours, ces avis juridiques étaient approuvés
par un avocat, et il n'y a jamais eu de danger de ce côté-là. En Ontario, ça se
fait depuis plusieurs années et c'est vraiment très bien encadré.
M. Jolin-Barrette : Je suis d'accord
avec vous lorsque vous dites : Bien, l'étudiant en droit va toujours être
supervisé par un avocat ou un notaire en exercice. Ça, je pense, c'est
fondamental pour s'assurer de la protection du public. Où j'aimerais vous
entendre... Je donne un exemple concret. Quelqu'un qui rentre à la Faculté de
droit de l'Université de Montréal, à sa première session, pensez-vous qu'on
devrait lui offrir l'opportunité de suivre un cours crédité de clinique
juridique à sa première session, à sa première semaine? Parce que, là, peu
importe le profil passé de la personne, les notions juridiques n'ont pas du
tout été acquises. Est-ce que vous êtes d'accord que ça prend un certain nombre
de sessions ou de crédits accumulés avant de pouvoir donner des avis et des
conseils juridiques? Parce que, bien sûr, on est supervisés par l'avocat, par
le notaire, mais, aussi, il faut avoir un certain bagage aussi pour avoir ces
notions-là pour bien renseigner le justiciable qui se présenterait à la
clinique juridique universitaire.
Mme Mihai (Dalia) : Oui, je
comprends tout à fait votre point. Cependant, je pense qu'il faut aussi prendre
en considération qu'un certain filtre s'effectue quand on reçoit des cas dans
les cliniques juridiques. Donc, c'est sûr qu'on a des cas qui sont, si je pourrais
me permettre, plus faciles que d'autres. Donc, oui, il faudrait un bagage, mais
je pense que l'aspect de pouvoir donner des avis ou des consultations
juridiques pourrait se faire dès notre première semaine en droit. Je pense que
vous seriez étonnamment surpris des connaissances des personnes dès leur
première entrée au bac.
Je peux comprendre aussi qu'il y a tout
l'aspect de la protection du public, puis je la comprends vraiment beaucoup,
puis aussi l'aspect des connaissances. Mais je pense que, oui, dès une première
session, ça serait possible, pour un étudiant, de pouvoir se débrouiller,
effectuer des <recherches...
Mme Mihai (Dalia) : ...aussi
qu'il y a tout l'aspect de la protection du public, puis je la comprends
vraiment beaucoup, puis aussi l'aspect des connaissances, mais je pense que,
oui, dès une première session, ça serait possible pour un étudiant de pouvoir
se débrouiller, effectuer des >recherches, rencontrer les usagers, et
ce, sous la supervision de personnes qualifiées. Rien n'empêche l'étudiant de
demander à d'autres personnes. Dans les cabinets, il y a des politiques de
portes ouvertes. Donc, les avocats travaillent ensemble, en coopération, selon
les forces et les faiblesses.
Donc, je ne vois pas pourquoi un étudiant
de première année, dès sa première session, qui n'a pas nécessairement le même
bagage juridique qu'un étudiant de deuxième ou de troisième année, ne pourrait
pas aller voir ses collègues pour leur demander. Donc, je pense que c'est aussi
des aspects à prendre en considération quand vient le temps de regarder le
nombre de crédits universitaires.
M. Ammari (Issa) : Puis juste
ajouter… Encore une fois, si c'est une question de protection du public, ce n'est
pas un enjeu, parce que l'avis ou la consultation ne va pas être émis sans
l'approbation d'un notaire ou d'un avocat, que l'étudiant soit en première
session ou en sa dernière. Par la suite, je trouve que ça revient à une
question opérationnelle propre à chaque faculté, de voir qu'est-ce que qui est
propre à leur réalité. À l'Université de Montréal, encore une fois, nous sommes
prêts. Les étudiants, dès leur rentrée, ils ont un cours d'habilité de juriste
pour apprendre comment faire des recherches et écrire des avis juridiques puis
ils n'ont pas accès aux cliniques juridiques universitaires en leur première
année. Mais chaque université ont leur réalité. Je pense que ça devrait être à
leur discrétion.
M. Jolin-Barrette : ...votre
propos est très intéressant. Écoutez, je vous remercie de l'échange qu'on vient
d'avoir. C'est très enrichissant. Et je vais céder la parole à mes collègues
qui, eux aussi, ont des questions. Donc, merci beaucoup à l'Association des
étudiants en droit de l'UQAM ainsi que celle de l'Université de Montréal, un
grand merci.
Le Président (M. Bachand) :
Merci, M. le ministre. Mme la députée de Les Plaines, s'il vous plaît.
Mme Lecours (Les Plaines) : Merci
beaucoup, M. le Président. Merci à vous trois. Vous avez fait une présentation
très dynamique, passionnée, et c'est encourageant pour nous. Alors, oui, on a
foi en vous, les futurs avocats de chez nous. Moi, je veux juste attirer votre
attention sur le titre du projet de loi. On parle évidemment d'accessibilité et
d'efficacité de la justice, mais on rajoute : Notamment pour répondre aux conséquences
de la pandémie. J'aimerais, avec l'expérience que vous avez, depuis le mois de
mars dernier, avec les cliniques... Bon, on n'émet pas d'avis, mais on a quand
même de l'information juridique. Est-ce que les besoins des justiciables, c'est
un terme que je viens d'apprendre… des justiciables, est-ce qu'ils sont remplis
avec le projet de loi? Est-ce qu'il y a des choses qu'il faudrait ajouter? Puis
je vous parle aussi au niveau de la façon de travailler en clinique.
M. Cajvan (Patrick) : Oui,
donc, peut-être, je peux commencer. Donc, certainement, avec l'impact de la
pandémie, l'accès à la justice a été plus difficile. Les tribunaux qui ont été
fermés pendant plusieurs <mois...
M. Cajvan (Patrick) : …oui,
donc, peut-être, je peux commencer. Donc, certainement, avec l'impact de la
pandémie, l'accès à la justice a été plus difficile, les tribunaux qui ont été
fermés pendant plusieurs >mois… L'accès aux cliniques juridiques n'est
pas toujours facile pour les personnes. Mais, pour répondre à votre question,
il faut certainement ajouter... À notre avis, il faut élargir le projet de loi
pour y inclure les cliniques juridiques communautaires, les organismes
juridiques communautaires, qui ont des avocats à leur emploi, mais qui
bénéficieraient beaucoup au fait de donner aux étudiants en droit le pouvoir de
donner des avis juridiques tout en étant supervisés par un avocat.
• (12 h 40) •
Je vais vous donner un exemple. Un organisme
communautaire qui a un avocat à son emploi peut engager, par exemple,
10 étudiants en droit. Les 10 étudiants en droit vont aller
rencontrer les clients, d'habitude, des rencontres qui prennent plusieurs
minutes. L'étudiant en droit peut aller voir l'avocat avec sa recherche puis
dire : Maître, c'est ça, ce que je propose au client, qu'est-ce que vous
en pensez? L'avocat peut dire oui et, après ça, peut passer au prochain
étudiant, prochaine étudiante. L'étudiant va aller proférer cet avis juridique
aux personnes qui viennent demander avis à la clinique. Donc, ça permet à la
clinique, avec un avocat, de répondre aux besoins de plusieurs, plusieurs clients.
Donc, on pense sincèrement que l'élargissement, ça va améliorer l'accès à la
justice.
M. Ammari (Issa) : Puis, pour
être un peu plus pointu également, on a un besoin qui était réel et urgent
avant la pandémie. Comme le souligne le Pr Pierre Noreau à l'Université de
Montréal, plus de 80 % des Québécois et Québécoises estiment ne pas avoir
accès aux services d'un avocat, et ça, c'est avant la pandémie, et ce
pourcentage ne cesse d'augmenter. Que ça soit des congédiements injustifiés,
des problèmes avec des locateurs, des petites entreprises qui sont en train de
s'écrouler, les Québécois et les Québécoises ont besoin d'avis juridiques, et,
en le limitant… le projet de loi n° 75, on n'aura pas
un impact réel et majeur dans nos communautés. Donc, il faut... On vous
encourage d'élargir le projet de loi tout en gardant des balises et des
conditions de supervision pour pouvoir pallier au problème.
Mme Mihai (Dalia) : Et puis,
si je peux me permettre de faire du pouce de mon côté aussi, c'est ça, nous, on
conçoit que le système de justice était relativement malade même avant la
pandémie, mais c'est sûr qu'avec la pandémie je vous dirais qu'il y a eu une
éclosion de demandes auprès de nos cliniques juridiques. Avant, on recevait
environ 150 demandes par session. Cette session-ci, selon les statistiques
que j'ai reçues de mes coordonnateurs de la clinique, il y a eu environ 350 demandes,
qui est presque le double des demandes qu'on recevait auparavant. Donc, je
pense qu'il y a un réel besoin auquel on doit pallier, et ce, le plus
rapidement possible. Les usagers, les justiciables québécois ne savent plus où
s'orienter. Ils se retournent vers les cliniques. C'était rendu qu'on devait
les orienter vers d'autres organismes <pour...
Mme Mihai (Dalia) : ...qu'on
recevait auparavant. Donc, je pense qu'il y a un réel besoin auquel on
doit pallier, et ce, le plus rapidement possible. Les usagers, les justiciables
québécois ne savent plus où s'orienter, ils se retournent vers les cliniques.
C'était rendu qu'on devait les orienter vers d'autres organismes >pour
essayer de les aider, parce que la demande est là, puis il faut vraiment y
répondre.
Mme Lecours (Les Plaines) :
Merci beaucoup.
Le Président (M. Bachand) :
M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît.
M. Tanguay
: Merci
beaucoup, M. le Président. Alors, à mon tour de vous saluer, M. Ammari,
Mme Mihai et M. Cajvan. Merci beaucoup pour la discussion que vous
nous permettez d'avoir sur les dispositions 2, 3, 51, 52 et 56 du projet
de loi.
On a parlé… et j'aimerais vous entendre
peut-être davantage sur l'aspect régionalisation, accès à la justice, donc,
faire en sorte que ce modèle qui permet à des justiciables d'avoir accès à des
étudiants, étudiantes en droit, avoir des conseils juridiques, bien, ce ne soit
pas tributaire d'un lieu physique qui est une faculté de droit, quand on sait
qu'il y en a trois à Montréal, une à Québec, puis une à Ottawa, puis une à
Sherbrooke. Donc, qui dit région, on pourrait, à la limite, dire... Si on
exclut Québec, et Montréal, et Ottawa, on pourrait dire que c'est Sherbrooke
seulement.
Alors, j'aimerais vous entendre sur... Vous
avez dit : Bien, en permettant que les étudiants, étudiantes puissent
donner des conseils juridiques dans des organismes communautaires déjà prévus à
cet effet-là... J'aimerais que… vous entendre davantage, comment vous imaginez
que ça pourrait se décliner, ça. Comment ça pourrait se décliner? Concrètement,
l'étudiant, l'étudiante ferait ça à distance, pourrait, physiquement, de temps
en temps, se déplacer sur place? Comment vous l'imaginez?
M. Cajvan (Patrick) : Oui, merci
pour votre question. En fait, c'est une excellente question, parce que, d'après
nos recherches, il n'y a pas nécessairement de clinique juridique, au même sens
que celles à Montréal ou à Québec, qui se trouve vraiment en région, mais il y
a des centres de justice de proximité. Donc, ce qu'on conçoit ici, c'est que
les étudiants en droit puissent aller aider dans des cliniques juridiques qui
se retrouvent partout au Québec et pas seulement dans les grands centres,
Montréal, Québec, Sherbrooke, où on retrouve les facultés de droit.
Maintenant, pour que ça soit mis en place,
c'est sûr qu'un étudiant va pouvoir y aller pendant la session, mais aussi on
conçoit ça pendant l'été aussi. Si un étudiant, il veut avoir un emploi d'été
ou de manière bénévole, là, passer du temps dans une clinique juridique, on
aimerait que ça soit possible, parce qu'il y a beaucoup d'étudiants qui
reçoivent une éducation juridique, une éducation juridique qui n'est pas
accessible à tout le monde, mais qui voient vraiment le besoin d'aider de
manière... d'aller faire du pro bono, et ça, ce n'est pas nécessaire pour
obtenir un emploi, là. Les gens le font vraiment de la bonté de leur coeur.
Donc, on aimerait que ça soit possible de le faire hors du contexte
universitaire, que ça soit dans les grands centres ou autres.
Mme Mihai (Dalia) : Oui,
exactement…
M. Tanguay
: Oui, je
vous en prie, allez-y, je vous en prie.
Mme Mihai (Dalia) : Oui, je
m'excuse.
M. Tanguay
: Non, je
vous en prie.
Mme Mihai (Dalia) : Je pense
aussi qu'avec la pandémie <on a...
M. Cajvan (Patrick) : ...
vraiment
de la bonté de leur coeur. Donc, on aimerait que ça soit possible de le
faire hors du contexte universitaire, que ça soit dans les grands centres ou
autres.
Mme Mihai (Dalia) :
Oui,
exactement.
M. Tanguay
:
Évidemment... Oui, je vous en prie. Allez-y, je vous en prie.
Mme Mihai (Dalia) : Oui, je
m'excuse.
M. Tanguay
: Non, je
vous en prie.
Mme Mihai (Dalia) : Je
pense aussi qu'avec la pandémie >on a dû mettre sur pied des moyens
originaux afin de continuer de communiquer avec nos usagers. Donc, en parlant
avec les directeurs de nos cliniques juridiques, on m'a fait part que le fait
de faire ça avec des moyens technologiques, ça aidait notamment à rejoindre le
client, que ça avait aussi plusieurs... pas le client, l'usager, pardonnez-moi,
mais que ça avait aussi plusieurs aspects bénéfiques, notamment de mettre une
certaine barrière entre le futur juriste et le client du fait que, souvent, les
usagers qui viennent nous voir, il y a un certain aspect émotionnel associé à
la cause. Puis, en tant que futurs juristes, on n'est pas psychologues non plus.
Donc, on est là pour écouter, comprendre
l'usager et voir ses besoins, mais je pense qu'il y a aussi des aspects
bénéfiques, notamment une certaine... entre le client et l'usager qui peut
s'avérer bénéfique. Aussi, ça permet d'aller plus vite. Ça évite de faire
déplacer l'usager. Nous, parfois, on a des usagers en clinique juridique qui
partent de très loin de Montréal, qui font une heure. Parfois, ils prennent des
après-midis pour venir nous voir en clinique. Donc, le fait de pouvoir le faire
avec des moyens technologiques intéressants, ça évite aussi justement de faire
déplacer de… et que le justiciable prenne beaucoup de temps afin d'obtenir,
bien, présentement, de l'information juridique, mais, on l'espère aussi, des
avis, des consultations.
M. Tanguay
: Oui, M. Ammari?
M. Ammari (Issa) : Moi, ça va
pour moi.
M. Tanguay
: Parfait.
Et déjà… Pour relancer puis pour poursuivre la réflexion là-dessus, il y a déjà,
donc, comme vous l'avez souligné, un réseau qui est déjà en place, qui
s'appelle les Centres de justice de proximité, plus certaines cliniques
communautaires qui sont déjà en place. Alors, on n'a comme pas à réinventer la
roue, mais on peut imaginer, si on le déploie...
Et peut-être aussi… Qui sait, peut-être
que nous pourrions être victimes de notre succès dans les différentes facultés.
Ça ne veut pas dire que tous les étudiants, étudiantes vont donner six heures,
huit heures, 10 heures par semaine là-dessus. mais, si vous avez un bon
volume d'étudiants, étudiantes qui dit : Bien, moi, je suis prêt à donner
un deux heures par semaine, ce qui est tout à fait envisageable dans un horaire
déjà chargé… Bien, si on est victimes de notre succès, bien, peut-être qu'on
pourrait dire : O.K., les facultés, ils n'ont peut-être pas tous les
locaux, ils n'ont peut-être pas tout le support technique non plus si on veut
faire du… visioconférence. Alors, peut-être que, collectivement, on pourrait
peut-être se dire : Bien, si on est victimes de notre succès, puis on
pourra évaluer au fur et à mesure… mais donner accès à ces centres, à ces
services-là aux étudiants, étudiantes, pour qu'ils <puissent, eux aussi,
pouvoir...
M. Tanguay
: ...
peut-être
tous les locaux, ils n'ont peut-être pas tout le support technique non plus si
on veut faire du visioconférence. Alors, peut-être que collectivement on
pourrait peut-être se dire : Bien, si on est victimes de notre succès...
puis on pourra évaluer au fur et à mesure, mais donner accès à ces centres, à
ces services-là aux étudiants, étudiantes pour qu'ils >puissent, eux
aussi, pouvoir oeuvrer là-dedans puis faire oeuvre utile.
Et il y a l'aspect également, vous l'avez
abordé… l'aspect très complémentaire d'une formation juridique, et là on touche
à la pratique. J'aimerais vous entendre là-dessus. Moi, j'aurais aimé, peut-être,
lors de mon bac en droit, de toucher peut-être davantage à la pratique. Je le
sais, puis on le fait toujours, hein, durant les... mais là on se voit moins…
durant les fêtes, on va moins se voir à cause de la COVID, mais souvent on est
le conseiller juridique de nos parents, de nos proches, puis qu'est-ce que t'en
penses. Puis c'est ça, la pratique, dans le fond, qu'on a, puis ça nous fait
très plaisir. Ça nous fait très plaisir parce que c'est valorisant. Mais
j'aimerais vous entendre aussi sur l'aspect qu'on répondrait à un besoin
d'avoir accès à une pratique, pas juste de la théorie, durant nos trois ans de
bac, nos quatre ans si on fait common law.
Mme Mihai (Dalia) : Non, exactement.
Je pense que, présentement, on forme de bons théoriciens du droit, et que c'est
le moment de former de bons praticiens du droit. Sincèrement, moi, je constate
que c'est fou qu'en trois ans d'études au baccalauréat je n'ai jamais, peut-être,
essayé de rédiger que ce soit une mise en demeure… que certains, aussi, après
trois ans de bac, ne comprennent pas encore comment gérer une relation avec les
usagers qui viennent les voir, comment monter un dossier, comment obtenir
l'information, cerner quelle information est pertinente. Donc, moi, je vois ça
d'un très bon oeil d'apporter un aspect pratique au droit parce que, souvent,
on se le fait dire, la profession d'avocat, c'est quelque chose qui s'apprend
quand on l'exerce. C'est une chose de connaître le Code civil, c'est autre
chose de le pratiquer et de l'appliquer. Donc, je vois vraiment cette
avancée-là d'un très bon oeil.
M. Ammari (Issa) : Puis je
tiens à rajouter également que l'enjeu actuel, c'est un enjeu d'accès à la
justice. Nous, on est ici pour essayer de pallier à ce problème-là, et,
intrinsèquement, ça vient aussi avoir un avantage positif sur notre
apprentissage en tant qu'étudiants en droit. Donc, c'est intrinsèque, notre
apprentissage, mais l'enjeu ici, c'est l'accès à la justice, et il ne faut pas
l'oublier, mais, encore une fois, on essaie d'élargir le plus possible tout en
ayant un impact sur notre parcours étudiant.
• (12 h 50) •
M. Tanguay
: Bien, merci
beaucoup et merci à vous trois d'avoir participé à nos débats. M. le Président,
je vais vous donner l'occasion évidemment de saluer nos invités, mais, après
ça, si vous me le permettez, j'aimerais reprendre la parole pour quelques
secondes.
Le Président (M. Bachand) :
Oui, avec plaisir. Alors, merci beaucoup à vous trois. Effectivement,
vous avez transmis beaucoup de votre
enthousiasme à la commission. C'est
très, très, très apprécié. Alors, merci beaucoup et à très bientôt. M. le
député de LaFontaine.
Hommage à Marc-André Bédard, ancien ministre de
la Justice
M. Tanguay
: …et on
vient d'apprendre la nouvelle du décès de l'ancien ministre de la Justice du
Québec, M. Marc-André Bédard, puis je voulais juste prendre le temps, M.
le Président, là... Je voudrais juste prendre le <temps...
Le Président (M.
Bachand) : ...c'est très, très, très apprécié. Alors, merci
beaucoup, et à très bientôt. M. le député de LaFontaine.
M. Tanguay
: …et on
vient d'apprendre la nouvelle du décès de l'ancien ministre de la Justice du
Québec, M. Marc-André Bédard. Puis je voulais juste prendre le temps, M.
le Président, là... je voudrais juste prendre le >temps... parce qu'on
parle d'un projet de loi d'accès à la justice, et Marc-André Bédard aura été,
donc, élu à l'Assemblée nationale en 1973, ministre de la Justice de 1976 à
1984, a, entre autres, participé à des débats, fait avancer le Québec, notamment
sur l'interdiction, en modifiant la charte québécoise des droits et libertés,
de la discrimination basée sur l'orientation sexuelle. Ça, c'est un legs de
Marc-André Bédard.
Donc, il a été un ministre de la Justice
au coeur de l'histoire du Québec. Et, pour la petite histoire, M. le Président,
la fois où j'ai rencontré M. Bédard, très impressionnant, c'était lors
d'un débat lors de la dernière campagne électorale, et le collègue, l'actuel ministre
de la Justice, était là. Nous étions, tous les deux, candidats. C'était sur le
droit de la famille, et autre legs de Me Bédard lorsqu'il était ministre
de la Justice, c'est qu'il avait, en quelque sorte, mis le dernier grand pan
d'une réforme du droit de la famille en modifiant le Code civil du Québec.
Alors, pour ma part, puis j'imagine que le
ministre aura l'occasion également de souligner cela, merci de nous permettre
de saluer ce grand homme, ce grand juriste, et de nous permettre de communiquer
nos plus sincères condoléances à la famille et aux proches de Me Bédard.
Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup, M. le député de LaFontaine. M. le ministre de
la Justice, s'il vous plaît.
M. Jolin-Barrette : Oui, M.
le Président. Bien, je vais joindre ma voix à celle du député de LaFontaine,
qui, à juste titre, fait bien de souligner et d'offrir ses condoléances à la
famille de Me Bédard, à ses enfants, à ses proches, et particulièrement à
notre ex-collègue le député de Chicoutimi, avec qui nous avons eu l'occasion de
siéger, Stéphane Bédard.
Écoutez, il faut rendre hommage à Me Bédard.
C'est vrai, ce que le député de LaFontaine a dit relativement à la dernière
réforme du droit de la famille. Nous aurons l'occasion fort probablement de
poursuivre le travail qui avait été amorcé en 1980 par Me Bédard et de
souligner aussi ses années de service public que Me Bédard a données pour
le Québec : ministre de la Justice pendant près de huit ans, aussi vice-premier
ministre du gouvernement du Québec en 1984‑1985, si je ne me trompe. Alors, c'est
un grand serviteur de l'État, quelqu'un qui avait l'intérêt public à coeur, et
surtout un grand juriste, et quelqu'un qui voulait s'assurer de, notamment,
réformer et de faire avancer le droit au Québec, ce qu'il a réussi à faire au
cours des années 70 et 80.
Alors, nous le saluons et nos pensées sont
avec la famille et les proches. C'est une épreuve qui est difficile. Alors,
nous vous souhaitons beaucoup de courage là-dedans. Et je pense faire miennes
les pensées de tous les collègues parlementaires de la commission, mais aussi
je pense qu'on aura l'occasion de rendre un hommage à la hauteur de la dignité
de M. Bédard au salon bleu en bonne et due forme également. Alors, M. le
Président, nous transmettons nos sincères condoléances.
Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup pour vos interventions. Effectivement, Me Bédard
a marqué l'histoire politique du Québec de <façon...
M. Jolin-Barrette :
...les
collègues
parlementaires de la
commission, mais
aussi je pense qu'on aura l'occasion de rendre un hommage à la hauteur de la dignité
de M. Bédard au salon bleu en bonne et due forme
également. Alors,
M.
le Président, nous transmettons nos sincères condoléances.
Le Président (M.
Bachand) :
Merci beaucoup pour vos
interventions.
Effectivement, Me Bédard a marqué l'histoire
politique du
Québec
de >façon marquée et mémorable.
Sur ce, la commission suspend ses travaux
jusqu'à 15 heures. Merci.
(Suspension de la séance à 12 h 54)
15 h (version révisée)
(Reprise à 15 h 07)
Le Président (M. Bachand) :À l'ordre, s'il vous plaît! Bon après-midi. La Commission des
institutions reprend ses travaux.
La commission est réunie afin de
poursuivre les auditions publiques dans le cadre des consultations
particulières sur le projet de loi n° 75, Loi visant
à améliorer l'accessibilité et l'efficacité de la justice, notamment pour
répondre à des conséquences de la pandémie de la COVID-19.
On débute nos auditions cet après-midi
avec l'Association québécoise des avocats et avocates de la défense, avec Me Michel
Lebrun, que je salue. Alors, Me Lebrun, comme vous connaissez les règles,
10 minutes de présentation, et après nous aurons un échange avec les
membres de la commission. Merci beaucoup de participer à nos travaux, et la
parole est à vous. Merci.
Auditions (suite)
Association québécoise
des avocats et avocates de la défense (AQAAD)
(Visioconférence)
M. Lebrun (Michel) : Merci,
M. le Président. M. le ministre de la Justice, distingués membres de la
Commission des institutions, je me présente, Michel Lebrun. Je suis avocat de
la défense en matière criminelle et président de l'Association québécoise des
avocats et avocates de la défense.
Permettez-moi de vous remercier de
l'invitation qui nous est faite de présenter nos observations sur le projet de
loi n° 75, dont l'objectif déclaré concerne
l'amélioration de l'accessibilité et de l'efficacité de la justice. D'autre
part, nous déplorons, comme ça a été signalé dès le début des travaux de la
commission, la précipitation avec laquelle les changements importants qui sont
proposés à la culture juridique québécoise sont amenés.
L'accessibilité à la justice et l'efficacité
de celle-ci ont été, depuis plus d'un an, la principale, sinon la seule
préoccupation des activités de notre association, composée exclusivement
d'avocats bénévoles. Les problèmes criants d'accessibilité à la justice ont été
enquêtés, documentés et dénoncés par nos associations d'avocats de la défense,
l'AQAAD, et aussi les associations de Montréal, Québec et Gatineau, qui siègent
dans nos instances, et avec l'appui d'associations d'avocats pratiquant au
service des populations les plus vulnérables de la société, notamment en droit
carcéral, de la jeunesse, de l'immigration et du droit familial.
Ce qui fait consensus chez tous les partis
représentés ici, c'est le caractère absolument inadéquat du tarif d'aide
juridique toujours en vigueur au Québec. L'entente actuelle en vigueur quant
aux tarifs d'aide juridique est échue depuis 2017, et les négociations entre le
Barreau et le ministère de la Justice n'ont, à ce jour, pas permis d'apporter
des changements dont tous reconnaissent la nécessité si on a un tant soit peu à
coeur <l'accessibilité à la justice...
M. Lebrun (Michel) :
...Québec.
L'entente actuelle en vigueur quant aux tarifs d'aide
juridique est échue depuis 2017, et les négociations entre le Barreau et le
ministère de la Justice n'ont, à ce jour, pas permis d'apporter des changements
dont tous reconnaissent la nécessité si on a un tant soit peu à coeur >l'accessibilité
à la justice.
Le 11 juillet 2019, le Barreau du
Québec rappelait au public les problèmes structurels du tarif actuel.
Notamment, la tarification est la même pour un accusé qui plaide coupable que
pour celui pour lequel on tiendrait un procès. Les négociations et la
préparation adéquate des avocats ne sont pas reconnues, puisqu'ils ne sont pas
rémunérés. Sauf pour les mégaprocès, il n'y a pas de condition spéciale allouée
à l'avance, ce qui fait que les avocats doivent financer eux-mêmes des recours
longs et complexes sans savoir s'ils seront compensés convenablement.
• (15 h 10) •
Ces problèmes sont à la source du
désengagement grandissant des avocats envers l'aide juridique et à
l'augmentation importante de dossiers où des avocats doivent se... où des
accusés doivent se représenter seuls, faute de pouvoir trouver un avocat, particulièrement
dans des dossiers complexes. Cette situation compromet à chaque jour un peu
plus l'accessibilité et l'efficacité du système de justice.
Le 2 octobre dernier, le ministre de
la Justice et le bâtonnier du Québec étaient heureux d'annoncer la conclusion
d'une entente sur la bonification des tarifs d'aide juridique ainsi que sur la
création d'un groupe de travail indépendant qui devra formuler des
recommandations quant à la réforme de la structure tarifaire de l'aide juridique.
Dans un esprit de collaboration et de confiance, malgré notre opinion à l'effet
que les solutions étaient évidentes et largement documentées, c'est avec
enthousiasme que les criminalistes ont accepté, en substance, le tarif rejeté
en 2019 en raison de leur perception que leurs constats quant aux problèmes
structurels étaient maintenant reconnus par le gouvernement et que la demande
du ministère, qui estimait avoir besoin de l'avis de la commission
indépendante, qui, elle-même, demandait 18 mois pour pouvoir livrer ses
recommandations...
Présumant de la bonne foi de la démarche,
vu la compétence exceptionnelle des membres du groupe de travail, les avocats
ont non seulement accepté ce nouveau délai, mais aussi le fait que les
recommandations du groupe ne lieraient pas le gouvernement. Vous comprendrez
notre étonnement de voir arriver, le 3 novembre dernier, l'article 3
d'un projet de loi dont l'adoption est présentée comme une urgence nationale justifiant
son adoption à toute vapeur sans, cette fois-ci, que quelque étude que ce soit
de la question ne soit nécessaire, et ce, au nom de l'accessibilité à la
justice.
Jamais, à travers les multiples
interventions qui ont été faites au cours des dernières années, par exemple
ici, au Parlement, le 18 février dernier, les cliniques juridiques
d'étudiants n'ont été présentées comme des solutions au problème grave et
urgent que tous reconnaissent en matière d'accessibilité à la justice. Les
échanges entendus à l'occasion de cette présente commission démontrent, de
plus, la confusion que génère ce projet, dont la teneur réelle est interprétée
différemment qu'on soit des ordres professionnels, des universités ou des
députés ici présents.
Le mémoire produit par les doyens de
facultés de droit, c'est une étude du comité d'action de l'accès à la justice
en matière civile et familiale, présidé par l'honorable Thomas A. Cromwell. Ce
rapport rappelle l'importance d'une approche d'ensemble pour remédier au
problème sérieux d'accès à la <justice...
M. Lebrun (Michel) :
...par les doyens de la faculté de droit, c'est une étude du Comité d'action de
l'accès à la justice en matière civile et familiale présidé par l'honorable
Thomas A. Cromwell. Ce rapport rappelle l'importance d'une approche d'ensemble
pour remédier au problème sérieux d'accès à la >justice auquel le public
fait face dans notre système de justice, et ce, en matière civile et familiale.
Or, ce qui saute aux yeux malgré le flou
entourant ce projet, c'est l'absence de réflexion sur l'impact de ces
dispositions sur les ressources déjà offertes au public par des organismes
communautaires, par exemple Juripop, ou les Centres de justice de proximité,
qui viennent tout juste d'être établis par le ministère de la Justice dans les
régions, notamment chez moi, à Trois-Rivières, et qui emploient des avocats
dans leur objectif officiel de démystifier les institutions et les procédures
judiciaires et, plus encore, de faciliter leur accessibilité à tous et à toutes.
L'annonce de l'Université Laval, dont j'ai
pris connaissance dimanche dernier, de vouloir consacrer des ressources
importantes pour établir des cliniques juridiques étudiantes dans toutes les
régions du Québec, tout en cherchant à laisser aux étudiants une certaine marge
d'initiative, nous laisse perplexes. La démonstration de ce besoin pour
améliorer l'accessibilité à la justice reste à faire.
Toutes les interventions entendues à date
révèlent les véritables enjeux du présent projet, c'est-à-dire offrir une
expérience utile à la formation des étudiants et protéger le public grâce à une
supervision étroite par un membre du Barreau ou de la Chambre des notaires,
qu'il soit avocat, notaire ou conseiller en loi... n'a été apporté afin de
démontrer en quoi la législation actuelle limite l'atteinte de ces objectifs
louables.
Bien au contraire, la nécessité qu'une
opinion juridique soit donnée par une personne ayant rempli les exigences de
qualification minimale est une garantie que le travail des étudiants impliqués
atteigne ses objectifs. Le contraste entre la précipitation avec laquelle le
présent projet de loi est présenté et le report de la réforme urgente et
nécessaire de la Loi sur l'aide juridique sape, d'une certaine façon, la
confiance des praticiens du droit que nous sommes de voir une volonté réelle de
s'attaquer aux problèmes concrets.
Une perception semblable résulte de la
volonté, exprimée cette fois au nom de l'efficacité de la justice, de permettre
aux tribunaux d'imposer la tenue d'audiences par voie technologique à
l'article 38 du projet de loi, qui modifie l'article 2.2 du Code de
procédure pénale. Le 13 mars dernier, le gouvernement décrétait le
confinement de la population en raison de la pandémie dont nous sommes toujours
victimes. Les associations des avocats de défense criminelle, dont l'AQAAD,
évidemment, ont, dès le début, été confrontées à la révolution que constitue
l'implantation des moyens technologiques, notamment, et surtout, la
visioconférence, dans les instances vouées à trancher des litiges sérieux
impliquant la confrontation des points de vue et l'appréciation de la
crédibilité des parties.
Notre Cour suprême rappelait, en 2012,
ceci : «En règle générale, dans les cours de common law de juridiction
criminelle, les témoins sont tenus de déposer en audience publique et d'exposer
leur visage au regard des avocats, du juge et du jury. La confrontation de
l'accusé avec les témoins est la norme...»
Ces concepts, traditionnellement, étaient
nécessairement servis par la comparution en personne des <témoins...
M. Lebrun (Michel) :
...de
juridiction criminelle, les témoins sont tenus de déposer en
audience publique et d'exposer leurs visages au regard des avocats, du juge et
du jury. La confrontation de l'accusé avec les témoins est la norme...» Ces
concepts, traditionnellement, étaient nécessairement servis par la comparution
en personne des >témoins et des accusés. La pandémie nous a forcés à
réfléchir sur la façon de préserver ces valeurs fondamentales.
Plutôt que de se retrancher derrière ces
principes pour bloquer les activités judiciaires, les avocats de la défense et
leurs associations ont choisi de s'asseoir avec la magistrature, le DPCP, les
cours municipales et le ministère de la Justice pour participer avec
enthousiasme à l'implantation et à l'utilisation de la visioconférence dans la
mesure du possible. Notre position était et demeure qu'avec le consentement des
parties impliquées cette implantation se ferait harmonieusement et éviterait de
s'enliser dans des débats stériles qui accapareraient des ressources déjà
lourdement hypothéquées par l'urgence sanitaire. Cette approche a été couronnée
de succès, il faut le dire. Les tribunaux fonctionnent actuellement à un rythme
et dans des délais semblables à ceux d'avant la pandémie.
Dans ce contexte, c'est avec une certaine
déception que nous prenons acte de la volonté du gouvernement de modifier
l'article 2.2 du Code de procédure pénale, adopté en juin 2020, pour
ajouter les termes, j'ouvre les guillemets, «sans leur consentement» au pouvoir
déjà octroyé aux tribunaux d'imposer d'office l'utilisation de la technologie.
Les avocats de défense ne voient pas l'utilité d'ajouter ces termes, si ce
n'est que d'envoyer le message que le système a besoin d'une approche
autoritaire pour conférer aux tribunaux une discrétion absolue, exempte de
toute balise, afin d'imposer la tenue de procès par visioconférence.
Ce message perpétue, à notre avis, un
stéréotype voulant que les avocats de la défense soient le problème. Nous
soumettons que cette perception va à l'encontre de la réalité et que les défis
rencontrés ces dernières années, suite à l'arrêt Jordan, par exemple, et,
actuellement, dans le contexte de la pandémie, ont été à la hauteur de notre
vocation non seulement de défenseurs des libertés individuelles, mais également
d'officiers de justice.
La réalité de l'implantation urgente et
massive de la technologie dans les salles de cours, c'est que tous les
partenaires du système de justice ont été en mesure d'en apprécier les très
grands avantages, mais aussi les limites. La conversation en cours doit se
poursuivre. La recherche du consentement est la seule avenue pour qu'elle se
poursuive sereinement. Merci de votre attention.
Le Président (M. Bachand) :
Merci beaucoup, Me Lebrun. On débute la période d'échange. M. le ministre,
s'il vous plaît.
M. Jolin-Barrette : Oui, merci,
M. le Président. Me Lebrun, bonjour. Merci de participer aux travaux de la
commission parlementaire sur le projet de loi n° 75.
Dans un premier temps, je vous dirais, Me Lebrun,
il ne faudrait pas mélanger les dossiers. Présentement, on est sur le projet de
loi n° 75. Je comprends que, lors du début de votre
allocution, vous faisiez référence aux tarifs d'aide juridique qui... en fait,
qu'on a réglés. Après mon arrivée à la tête du ministère de la Justice, au mois
de juin, on a eu une entente, je crois, au mois de septembre, 35 millions
sur cinq ans, 14,7 % d'augmentation, un rattrapage, une rétro, et le <gouvernement...
M. Jolin-Barrette :
...en
fait, qu'on a réglés. Après mon arrivée à la tête du ministère de
la Justice, au mois de juin, on a eu une entente, je crois, au mois de
septembre : 35 millions sur cinq ans, 14,7 % d'augmentation, un
rattrapage, une rétro, et le >gouvernement a mis en place un groupe de
travail indépendant sur la réforme de la structure tarifaire.
Donc, écoutez, moi, je pense qu'on travaille
dans le bon sens. Je croyais que les avocats qui faisaient de l'aide juridique
en pratique privée, qui prenaient des mandats, avaient souligné cette
entente-là. C'est ce que je percevais dans le communiqué, d'ailleurs. Alors, je
croyais que c'était une bonne nouvelle. D'ailleurs, je le crois, moi personnellement,
que c'est une bonne nouvelle, parce qu'on avance. C'est une entente que… Ça
faisait trois ans que les tarifs n'avaient pas été actualisés, et, 14,7 %
d'augmentation, je crois que c'est une bonne augmentation. Est-ce qu'il y a des
améliorations à apporter par rapport à la structure des tarifs? Bien sûr, et c'est
pour ça qu'on va pouvoir discuter avec des gens qui sont indépendants, puis ils
vont nous recommander une structure.
Je ne pense pas qu'il faut opposer la
réforme des tarifs de l'aide juridique avec le fait que des étudiants en droit
pourraient donner des conseils et des avis juridiques. Alors, je me pose la
question. Est-ce que votre intervention, aujourd'hui, de la façon dont elle est
menée, est une position qui vise à défendre l'intérêt de vos membres en lien
avec, comment je pourrais dire, les clients, le marché ou les revenus associés
à vos membres? Est-ce que c'est ça, votre inquiétude? Parce que le but du
projet de loi n° 75 est de faire en sorte de permettre à des justiciables
d'avoir accès à de l'information, à des conseils et à des avis juridiques dans
les cliniques juridiques universitaires.
• (15 h 20) •
M. Lebrun (Michel) : Si c'était
notre intention, évidemment, on se contenterait de chiffres comme ceux que vous
mentionnez. 14 %, effectivement, c'est mieux que zéro. Si j'étais ici pour
parler des intérêts financiers des avocats, on pourrait se limiter à ça.
Il faut comprendre que notre mouvement et
nos revendications qu'on a amenés au Parlement l'année dernière ne visaient pas
à aller chercher un pourcentage. Je pense qu'il y a des négociations qui ont eu
lieu, de bonne foi, sur ce sujet-là entre le Barreau et le ministère de la
Justice. Des considérations de cet ordre-là étaient déjà sur la table en 2019
quand le bâtonnier du Québec a rejeté l'offre parce qu'elle ne comprenait pas
la modification de la structure, fondamentalement, de l'aide juridique.
Le problème... Notre première
considération, notre première préoccupation, c'est de modifier la structure du
tarif d'aide juridique pour éviter que les gens continuent de se représenter
seuls devant les tribunaux et que les avocats refusent, en fait… ou fassent des
choix de carrière différents ou refusent tout simplement des mandats, particulièrement
lors de dossiers complexes. C'est une préoccupation que nous soulevons,
historiquement, je vous dirais, depuis longtemps, les associations d'avocats et
le Barreau, et c'est ce qui achoppait en <2019, lorsque...
M. Lebrun (Michel) :
...les
tribunaux et que les avocats refusent... en fait, ou fassent des
choix de carrière différents ou refusent tout simplement des mandats,
particulièrement lors de dossiers complexes. C'est une préoccupation que nous
soulevons historiquement, je vous dirais, depuis longtemps, les associations
d'avocats et le Barreau. Et c'est ce qui achoppait en >2019, lorsque les
négociations avaient été, somme toute, rompues. Lorsqu'elles ont repris, pour
nous, clairement, l'engagement que le gouvernement a pris de modifier cette
structure-là… La reconnaissance du fait que cette structure-là était inadéquate
était la condition première de notre acceptation de l'entente et de notre
adhésion au processus de consultation qui est commencé à ce moment-là. Mais là
on parle d'accessibilité à la justice.
Donc, pour nous, le dossier est sur la
bonne voie, mais il n'est pas réglé. Il sera réglé lorsque ces revendications-là
qu'on fait au nom des citoyens, au nom des gens qui se représentent seuls, et
qui n'ont que pour but d'assurer l'accessibilité réelle à la justice devant les
cours de justice, et l'efficacité, également, parce que les coûts engendrés par
les accusés non représentés... Je pourrais vous donner plusieurs exemples de
dossiers qui se sont retrouvés devant la Cour d'appel, bon, et tout ça. Donc,
dans ce contexte-là, parler de... Oui?
M. Jolin-Barrette : Si vous
me parlez, Me Lebrun, là, du projet de loi n° 75,
là, parce que c'est un autre dossier, puis j'ai commencé comme ça...
M. Lebrun (Michel) : Bien
oui, bien, le projet de loi n° 75...
Le Président (M. Bachand) :Juste un à la fois, Me Lebrun. M. le ministre, s'il vous
plaît.
M. Jolin-Barrette : Parlons
du projet de loi n° 75. On comprend que vous avez
des... vos membres ont des intérêts financiers dans le cadre de la réforme des
structures d'aide juridique. Ça, c'est un autre dossier. Si on parle, là,
aujourd'hui, du projet de loi n° 75, vos commentaires
sur le 75…
M. Lebrun (Michel) : Le titre
de la loi, c'est l'accessibilité et l'efficacité de la justice. Donc, en quoi,
de permettre... Les structures actuelles qui existent, là, les services
communautaires, les cliniques juridiques dans les universités, qui
fonctionnent, comme les doyens vous l'ont dit, très bien, en quoi
l'accessibilité... que le public va être mieux servi par le changement qui est
proposé? Pour nous, il n'y a aucune démonstration qui est faite de ça. Il n'y a
aucun exemple qui est donné de… en termes de services juridiques, actuellement,
dans la mesure où il... que, si un étudiant… une opinion juridique, bien, il
devra être supervisé par un avocat.
Et c'est ce qu'on dit un peu dans... que
j'ai dit, d'emblée, dans ma présentation, c'est le... S'il y a un avocat de
présent qui cautionne l'opinion qui sera donnée au public, bien, on n'a pas
besoin de changer la loi. S'il n'y a pas d'avocat, bien là on a dilué la
qualité du service qui a été offert, mais en quoi on a augmenté l'accessibilité?
En quoi non plus les centres de proximité qui ont été créés par le ministère de
la Justice ne remplissent pas cette fonction-là? En quoi on a besoin de
multiplier les cliniques dans chaque ville, l'Université Laval qui nous
l'annonce dimanche dernier, pour dédoubler ce service-là avec celui qui est déjà
offert par les Centres de justice de proximité?
M. Jolin-Barrette : Bien, la
première des choses, Me Lebrun, c'est que, dans un centre de justice de
proximité, ils <donnent...
M. Lebrun (Michel) :
...
ministère de la Justice, ne remplissent pas cette fonction-là? En
quoi on a besoin de multiplier les cliniques dans chaque ville, l'Université
Laval qui nous l'annonce dimanche dernier, pour dédoubler ce service-là avec
celui qui est déjà offert par les centres de justice de proximité?
M. Jolin-Barrette :
Bien, la première des choses, Me Lebrun, c'est que, dans un centre de
justice de proximité, ils >donnent de l'information juridique comme dans
les cliniques juridiques universitaires. Au début de votre allocution, vous
avez dit : Écoutez, on n'a jamais entendu parler de ça, les cliniques
juridiques universitaires. Or, depuis le 11 mai 2017, il y avait un projet
de loi qui avait été déposé, le projet de loi n° 697.
Moi, j'essaie d'être constructif un peu. Je
comprends que, de votre association, les membres ne souhaitent pas avoir de
cliniques juridiques universitaires dans lesquelles les étudiants en droit vont
pouvoir donner des conseils et des avis juridiques sous la supervision d'un
avocat ou d'un notaire en exercice. Et c'est le Barreau qui va s'occuper de
venir encadrer les conditions au niveau de l'assurance responsabilité, au
niveau aussi du parcours requis par l'étudiant en droit pour le faire.
Donc, je dénote que vous vous opposez au
fait qu'on permette à des justiciables québécois d'aller chercher davantage
d'information, davantage de conseils et davantage d'avis par rapport à leur
situation juridique dans le cadre d'une clinique juridique universitaire qui
permettrait à des justiciables québécois d'être mieux renseignés sur leurs droits.
Ça, je comprends, vous souhaitez, là, que le gouvernement, là, n'aille pas dans
ce sens-là et qu'il retire cette partie-là du projet de loi n° 75.
C'est la position de votre association.
M. Lebrun (Michel) : Notre
position… Effectivement, on ne voit pas la nécessité de ce changement-là. On
considère que ça peut générer même de la confusion en termes de ressources
disponibles par rapport aux centres de proximité, par rapport aux organismes
communautaires. On ne voit pas le besoin et on se retrouve... et on ne voit pas
le besoin, nous, surtout de précipiter cette adoption-là, et surtout dans un
contexte où... Je vous parlais de la Loi sur l'aide juridique qui est le moteur
de l'accessibilité à la justice.
Dans la situation actuelle, on va se
retrouver devant la situation, qui m'apparaît un peu absurde, qu'un stagiaire
dans mon bureau, qui a passé ses examens du Barreau, qui a le droit de donner
des conseils au gouvernement du Québec, qui a le droit de donner des conseils à
la Banque Royale, si vous voulez, n'a pas le droit de faire une comparution
pour un dossier d'alcool au volant sur l'aide juridique et de donner un conseil
à un citoyen, alors qu'il a le droit d'en donner à tout... à des bénéficiaires
de l'aide juridique, mais qui a le droit d'en donner à tous les autres citoyens
qui ne sont pas bénéficiaires de l'aide juridique. En quoi les préoccupations
d'accessibilité à la justice sont rencontrées dans un contexte comme celui-là? Et
qu'on commence à donner... On va dire à la personne... Le stagiaire qui est
formé, qui a le droit de pratiquer, va dire à son client, bien, d'aller dans
une clinique pour aller rencontrer des étudiants s'il veut avoir une opinion
juridique.
M. Jolin-Barrette : Écoutez,
j'entends vos propos, mais je suis en profond désaccord avec ce que j'entends aujourd'hui.
Quand vous dites, là : Il n'y a pas de besoin, ça va semer la confusion,
honnêtement, dans ce que j'entends aujourd'hui, vous plaidez pour une
augmentation des tarifs d'aide juridique ou de la réforme de la structure
d'aide juridique. J'en suis. Ça vous appartient. Puis le gouvernement est en
train de <faire un...
M. Jolin-Barrette :
...quand vous dites, là : Il n'y a pas de besoin, ça va semer la
confusion, honnêtement, dans ce que j'entends aujourd'hui, vous plaidez pour
une augmentation des tarifs d'aide juridique ou de la réforme de la structure
d'aide juridique. J'en suis, ça vous appartient, puis le gouvernement est en
train de >faire un groupe de travail, et des questions comme celles-là
seront abordées.
L'exemple que vous avez donné avec votre
stagiaire, actuellement, c'est parce qu'il ne peut pas avoir de mandat d'aide
juridique. Alors, ce que vous voulez dire… Dans le fond, vous voudriez, dans le
fond, qu'un avocat puisse avoir 10 stagiaires et qu'il puisse facturer
l'aide juridique pour des services qui seraient donnés pour les stagiaires. C'est
un peu ça, la proposition, pour expliquer à la population.
Si on revient sur le 75, là, au contraire,
moi, je pense que, si on multiplie les offres pour les citoyens québécois
d'avoir accès à des avis, à des renseignements, à de l'information juridique, à
des conseils juridiques, au contraire, ça va améliorer le système de justice.
Ça va permettre à des gens, même, peut-être, d'aller voir vos membres. Peut-être
qu'ils vont aller à la clinique juridique universitaire, puis ils vont avoir
une première consultation, puis ils vont se dire : Ah bien! Peut-être que
je devrais me prendre un avocat, effectivement. Puis ils vont aller cogner à la
porte d'un membre de l'association des avocats de défense. Ça se peut, ça, que
ça arrive, parce qu'il va avoir été mieux renseigné, parce que l'avocat...
l'étudiant en droit ne pourra pas faire de représentation.
Mais moi, je vous dis... Lorsque je vous
entends, vous dites : Ça va semer de la confusion parce qu'il va y avoir
des cliniques juridiques universitaires. Pensez-vous que nos compatriotes
canadiens, dans les autres provinces canadiennes, où c'est permis de faire des
avis et des conseils juridiques dans des cliniques universitaires et même faire
de la représentation, pensez-vous que, les autres Canadiens, ils sont confus
par rapport à l'offre de services?
M. Lebrun (Michel) : Les
autres Canadiens bénéficient… Si les autres... Si on pouvait bénéficier de la
même qualité de loi d'aide juridique que les autres provinces canadiennes, on
serait déjà éminemment satisfaits, mais on serait satisfaits de l'accessibilité
globale à la justice. Ce que je vous dis, c'est qu'isoler... prendre... Cette
initiative-là ne s'inscrit pas dans un programme d'ensemble, une vision globale
de l'accessibilité à la justice. Et, pour nous, il n'y a pas d'urgence, versus
une situation qui nous apparaît beaucoup plus urgente, parce qu'il y a des
citoyens qui sont emprisonnés actuellement. Il y a des procès qui se tiennent
dans des conditions qui ne sont pas acceptables. Pourquoi... Et c'est ce que
l'étude qui est citée par les doyens dit, ça prend une approche globale en
termes d'accessibilité à la justice.
• (15 h 30) •
Les cliniques de... Je ne suis pas contre
les cliniques juridiques dans les universités. Au contraire, elles existent et
elles remplissent sûrement une fonction utile. Par contre, les cliniques... Là,
on va décaler... Les cliniques communautaires… Les cliniques gouvernementales,
qui sont celles de justice de proximité, auront un rôle, des pouvoirs
différents de ceux des cliniques universitaires, et ça a été... plusieurs
intervenants vous l'ont dit. C'est ça qui, à mon avis, génère une certaine
confusion dans le public. Et, lorsqu'on parle de gens qui ne sont pas
sophistiqués… Ce n'est pas les universités qui font affaire avec leurs
étudiants pour avoir des avis juridiques. Eux, ils ont des avocats à temps
plein, et qui sont... et ils obtiennent des <opinions dans un contexte,
je dirais, traditionnel…
>
15 h 30 (version révisée)
< M. Lebrun (Michel) :
...
à mon avis, génère une certaine confusion dans le public. Et,
lorsqu'on parle de gens qui ne sont pas sophistiqués, ce n'est pas les
universités
qui font affaire avec leurs étudiants pour avoir des avis juridiques. Eux, ils
ont des avocats à temps plein, et qui sont... et ils obtiennent des >opinions
dans un contexte, je dirais, traditionnel.
M. Jolin-Barrette : Pour plus
de cohérence, là, Me Lebrun, là, est-ce que vous m'invitez, dans le fond,
à élargir mon projet de loi aux Centres de justice de proximité ainsi qu'aux organismes
communautaires pour être certain que les étudiants en droit, dans toutes les
formes de cliniques juridiques au Québec, puissent donner des conseils et des
avis juridiques? Est-ce que, par là, pour diminuer la confusion que vous portez
à notre attention, ça serait préférable d'élargir le projet de loi, puis
d'aller dans les centres de justice de proximité puis dans les organismes
communautaires, puis de permettre aux étudiants en droit de donner des
conseils, des avis juridiques, là aussi?
M. Lebrun (Michel) : Moi, je
pense que les étudiants en droit... J'ai engagé des étudiants en droit, personnellement,
dans mon bureau. Ils ont tout à gagner d'une expérience pratique du travail, et,
de contribuer à l'élaboration d'une opinion juridique, je pense que c'est peut-être
un apprentissage qui est fort louable. Par contre, que cette opinion-là soit
donnée directement d'un étudiant au public, je pense que c'est le public qui y
perd un peu à ce moment-là. Si on parle d'une supervision étroite, que le
professionnel, l'avocat, le notaire ou le conseiller en loi donne finalement
l'opinion juridique à laquelle aura travaillé l'étudiant, bien, on n'a même pas
besoin de modifier la loi, et les services peuvent être donnés de façon très
efficace et de façon compréhensible pour le public.
M. Jolin-Barrette : Parfait.
Bien, écoutez, Me Lebrun, je vous remercie pour votre intervention à la commission.
Je vais céder la parole à mes collègues s'ils ont des interventions. Merci,
Me Lebrun.
Le Président (M. Bachand) :Est-ce qu'il y a d'autres interventions du côté ministériel?
S'il n'y a pas d'autre intervention, M. le député de LaFontaine, s'il vous
plaît.
M. Tanguay
: Combien de
temps…
Le Président (M. Bachand) :…
M. Tanguay
: Merci
beaucoup. Alors, à moi de vous saluer, Me Lebrun. Merci beaucoup de
prendre le temps de participer à nos débats cet après-midi.
J'aimerais, donc, revenir, parce que vous
en avez parlé avec le ministre, là, sur le comité qui a été constitué pour
revisiter... pour proposer une réforme tarifaire qui viserait, donc, à identifier
les besoins nouveaux et les réalités actuelles, qui doit remettre son rapport
au plus tard dans un an et demi, le 1er avril 2022. Donc, de ce que je
comprends, c'est que vous, vous auriez aimé, plutôt qu'un comité, que le ministre
et le Barreau s'entendent sur ce que devaient être ces besoins et ces réalités
actuelles et agissent dès maintenant. Vous auriez aimé mieux, donc, que ça se
fasse maintenant et ne pas attendre au 1er avril 2022, si je vous
comprends bien.
M. Lebrun (Michel) : Bien, écoutez,
M. Tanguay, on aurait voulu que ça se fasse hier, je dirais, parce que les
problèmes qu'on soulève génèrent à tous les jours des problèmes, à notre avis,
des injustices et taxent aussi le système judiciaire. J'aimerais... Si la
magistrature était ici, je ne sais pas quelle opinion elle pourrait vous donner
du nombre croissant d'accusés qui se représentent seuls devant eux, des défis
que ça représente et de… notamment, pour, simplement, l'utilisation des ressources
judiciaires, le temps de <cour qui...
M. Lebrun (Michel) :
...judiciaire. J'aimerais... Si la magistrature était ici, je ne sais pas
quelle opinion ils pourraient vous donner du nombre croissant d'accusés qui se
représentent seuls devant eux, des défis que ça représente et de…
notamment
pour...
simplement l'utilisation des
ressources judiciaires, le
temps de >cour qui...
Les avocats, il faut bien comprendre qu'on
n'est pas, contrairement à certaines idées qui semblent véhiculées, uniquement
là pour faire de l'argent et uniquement là pour compliquer les choses. Les
avocats font des admissions. On règle des dossiers. On évite à des témoins
d'être entendus parce qu'on s'entend sur des bases factuelles à tous les jours.
Donc, on est le premier outil de l'accessibilité et de l'efficacité de la justice.
C'est des mots que je reprends parce que c'est le titre de la loi.
Et donc on a fait des représentations. On
aurait aimé avoir un résultat. Maintenant, l'engagement... je ne veux pas
minimiser l'engagement du gouvernement à cet égard-là. Et la qualité des
membres du comité qui fera cette étude-là est extraordinaire. Et j'ose espérer
qu'un jour je serai ici, peut-être, à la commission ou ailleurs, à remercier le
gouvernement d'avoir finalement porté et réalisé, en fait, la réforme qui est
attendue depuis longtemps.
M. Tanguay
:
<Et
vous disiez… >Juste pour terminer là-dessus, vous disiez que, pourtant,
il y avait des solutions évidentes. Vous faites référence à quoi? À quelles
solutions évidentes faites-vous référence?
M. Lebrun (Michel) : Bien,
écoutez, pour nous, il y a des choses qui... Je ne veux pas… Encore une fois, il
y a des choses qui sont priorisées même au niveau de la commission. Il y a
des... Par exemple, j'ai parlé du fait que, dans les dossiers complexes, les
avocats devront... Un dossier complexe, là, par exemple, un dossier d'homicide
involontaire, c'est un des grands exemples qui ont été amenés sur la place
publique, <un dossier d'homicide involontaire >pour lequel le
tarif prévoit 550 $, O.K., ça, c'est le prix global auquel l'avocat a
droit pour faire tout le procès, il y a une disposition qui permet de demander
une considération spéciale vu la complexité du dossier. Cette demande-là, elle
doit être faite à la fin du dossier, lorsque le dossier est facturé, et il sera
facturé une fois, c'est-à-dire à la toute fin du dossier.
Pour nous... Et, je tiens à le souligner,
la Commission des services juridiques, une fois que ces demandes-là sont
faites, généralement, peut rendre des décisions qui sont... qui peuvent générer
des honoraires qui sont acceptables, dans le fond, et qui permettent une
représentation adéquate. Le problème, c'est qu'il y a un avocat qui devra,
pendant un an, deux ans, financer ce dossier-là sans savoir quelle sera la
réponse éventuelle de la Commission des services juridiques à sa demande qu'on
appelle de considération spéciale. Bien, cette situation-là fait en sorte que
plusieurs avocats vont refuser d'accepter des mandats pour des dossiers
complexes, et particulièrement des avocats plus expérimentés, plus vieux.
Et, en termes de qualité des
représentations qui peuvent être faites et d'accessibilité à la justice, ça,
c'est quelque chose qui ne coûte rien, en fait, de permettre à cette
négociation-là d'avoir lieu au début du dossier plutôt qu'à la fin. Ça, ça
serait quelque chose... ça aurait été <quelque chose qu'on...
M. Lebrun (Michel) :
...
plus vieux.
Et, en termes de qualité des
représentations qui peuvent être faites et d'accessibilité à la justice, ça,
c'est quelque chose qui ne coûte rien, en fait, de permettre à cette
négociation-là d'avoir lieu au début du dossier plutôt qu'à la fin. Ça, ça
serait quelque chose... ça aurait été >quelque chose qu'on aurait...
qu'on considère qui pourrait être fait rapidement, en fait, qui ne nécessite
pas une grande étude. Et je pense que c'est même reconnu que le projet de la commission
prévoit que cette disposition-là, cette possibilité-là va être étudiée en
priorité dans les premiers six mois. Donc, j'ose espérer qu'en début d'année je
pourrai vous dire, bien, mission accomplie là-dessus et remercier, en fait, le
gouvernement d'avoir été sensible à cette préoccupation-là.
M. Tanguay
: Excellent.
Puis effectivement je vous le confirme, donc, deux sujets prioritaires verront
un rapport dans les six premiers mois de l'annonce qui a peut-être un mois et
demi, deux mois, soit les irritants liés à la délivrance des mandats d'aide
juridique ainsi que ceux liés au paiement des considérations spéciales. Mais je
vous entends. Je vous comprends bien puis je pense que vous avez voix au
chapitre et droit au chapitre. Avec les 600 membres que vous représentez,
bien, les cas d'espèce, d'exemples que vous nous donnez, bien, vous l'avez vécu
puis vos membres l'ont vécu. Alors, c'est important pour vous de venir nous
l'exprimer.
J'aimerais maintenant passer au deuxième
point de trois que je veux aborder dans le temps qui m'est imparti avec vous, cliniques
juridiques. Vous disiez craindre des impacts, vous demandiez : Y a-tu eu
une étude, une analyse d'impact? Vous proposiez, j'imagine, entre autres, pour
endiguer certains impacts potentiels, là, que ce soit supervisé par des
avocats, donc, des praticiens, des praticiennes. Quelle forme ça prendrait, ça,
cette supervision-là, donc, des avocats qui offriraient leurs services tantôt
aux facultés de droit, tantôt… Si d'aventure le législateur va vers les Centres
de justice de proximité et/ou les cliniques communautaires, donc comment vous
imaginez ça, cette supervision-là par les avocats?
M. Lebrun (Michel) : Bien, je
pense qu'actuellement, lorsqu'il est question de donner de l'information
juridique, donc orienter quelqu'un vers les bonnes ressources ou des choses
comme ça, c'est ce que les cliniques d'information juridique font, et les
cliniques de proximité, là, les centres de proximité, et les organismes
communautaires. Donc, je pense que c'est acceptable, et le fait qu'il y ait des
avocats qui ont un rôle de supervision, de mentorat là-dedans, je pense que c'est
tout à fait acceptable.
Lorsqu'on part d'une situation où le
public a droit pour recevoir une opinion, là, on change de domaine, une opinion
sur ses droits à lui… Les notaires parlaient de préparer des demandes de
divorce conjointes, là. On parle de choses qui ont des conséquences sérieuses,
là, sur les droits des justiciables à ce moment-là. Actuellement,
le citoyen a droit à ce que ça lui provienne d'un avocat. Si on envisage de
faire participer... Et actuellement des bureaux engagent des étudiants. Des
étudiants travaillent avec des avocats dans divers contextes, peut-être même
dans ces <cliniques-là. Tant qu'un...
M. Lebrun (Michel) :
...les droits des justiciables à ce moment-là. Actuellement, le citoyen a droit
à ce que ça lui provienne d'un avocat. Si on envisage de faire participer... Et
actuellement des bureaux engagent des étudiants. Des étudiants travaillent avec
des avocats dans divers contextes, peut-être même dans ces >cliniques-là.
Tant qu'un étudiant participe à l'élaboration d'une opinion, mais que cette
opinion-là est ultimement donnée par un avocat… Je pense que ça a toujours été
considéré comme un minimum, et ça doit continuer de l'être. Et je ne vois pas
en quoi on devrait diluer la qualité de ce qui est offert au public. Et c'est
là-dessus que je prétends ou que j'affirme que les études... Le besoin criant,
à cet égard-là, n'a pas été démontré.
Et donc que la situation actuelle ou que
le… L'évolution de ces cliniques-là ne devrait pas se faire avec un changement législatif
qui aurait pour effet de permettre à des étudiants de donner directement des
opinions juridiques à des citoyens et que l'avocat qui supervise soit
simplement à distance ou intervienne en cas de problème. Ça, pour moi, est une question
de protection du public.
• (15 h 40) •
M. Tanguay
: Voilà.
Alors, vous avez raison, il faut se préoccuper de ça puis il faut faire en
sorte que la manière dont ce sera déployé, bien, que l'on ne vive pas ces
écueils-là puis que le public soit protégé. Donc, c'est une obligation de
résultats et de moyens que l'on prendra comme législateurs.
Point important, 2.2, Code de procédure
pénale. Sur le projet de loi n° 32, qui a été adopté
en juin dernier, on vient rejouer, dans le fond, dans le nouvel article 2.2 du Code
de procédure pénale. Je me suis donné, copié-collé, là, les deux articles, là,
la mouture actuelle de 2.2 et celle qui est proposée par le projet de loi. J'aimerais
vous entendre…
À l'article 38, là, donc, ce qui est actuellement
le cas... c'est-à-dire, ce que l'on ajoute, c'est : «…lorsque l'intérêt de
la justice le requiert — donc on ajoute ce critère-là — ordonner
qu'il le soit...» On parle de : «Dans l'application du présent code, il y
a lieu de privilégier l'utilisation de tout moyen technologique…» Alors : «…ordonner
qu'il le soit par les parties, même d'office [...], notamment pour la gestion de
l'instance…»
Là, il serait ajouté, puis j'aimerais vous
entendre là-dessus, sur les griefs que vous avez contre le fait que ça pourrait
se faire sans le consentement des parties… et, qui plus est, autre ajout :
«…pour la tenue de l'audience ou pour la transmission et [...] réception de
documents sur un [support autre que du] papier.» Et il est dit, par contre,
puis ça, ça ne vous rassure pas, point d'interrogation, j'aimerais vous
entendre là-dessus : «Le juge doit, avant d'ordonner [un] tel moyen [...],
donner l'occasion aux parties de [se] faire valoir…» J'aimerais vous entendre
là-dessus.
M. Lebrun (Michel) : Écoutez,
c'est un nouvel article. C'était déjà un nouvel article en juin dernier. Il n'a
pas été testé. En fait, l'interprétation... Je soupçonne qu'on partage un peu
les mêmes... Pour moi, ce n'est pas tout à fait clair qu'est-ce qu'on veut
ajouter par le nouvel article, mais le message, par contre, qui est envoyé, et,
moi, c'est là où j'en suis et c'est là où nous en sommes comme association, d'ajouter
les mots «sans leur consentement», ça envoie <un message...
M. Lebrun (Michel) :
...
mêmes... Pour moi, ce n'est pas tout à fait clair qu'est-ce qu'on
veut ajouter par le nouvel article, mais le message, par contre, qui est
envoyé, et, moi, c'est là où j'en suis et c'est là où nous en sommes comme
association, d'ajouter les mots «sans leur consentement», ça envoie >un
message. Ça envoie un message qu'on doit, et je l'ai dit dans mon introduction,
utiliser... agir, en ces matières-là, de façon autoritaire, et ça entraîne, à
mon avis... Ça envoie un mauvais message, parce que, sur ce point-là
spécifique, les efforts ont été tellement importants, dans notre communauté des
avocats de défense, mais également chez les avocats du DPCP que je côtoie, et la
magistrature également, et les opinions divergent à l'intérieur de chacun de
ces groupes-là. Notamment, certains juges, certains procureurs, certains
avocats de défense sont plus ou moins favorables à l'utilisation de la technologie.
Par contre, plus on l'utilise, plus on
réalise... et, en privilégiant l'approche consensuelle depuis le début de la
pandémie, bien, le volume de travail qui s'est fait par technologie, par
consentement, a permis d'enlever la pression du nombre de personnes présentes
dans les palais de justice et de gérer efficacement toute la question de la
pandémie. Et, à travers cette utilisation-là, chaque avocat s'est fait son
opinion, et chaque juge s'est fait son opinion, et continue de la construire,
son opinion, au moment où on se parle, parce qu'il y a eu des ratés. Il y a eu
des problèmes techniques au niveau de certaines audiences, mais il y a eu aussi
de nombreux gains, puis il y a beaucoup de gens qui sont surpris, et qui sont
même agréablement surpris, de l'utilisation de la technologie.
Donc, lorsqu'on... Je ne comprends pas, en
fait, l'importance de vouloir ajouter cet élément-là et insister sur l'élément
d'imposer, d'ajouter la notion de «sans consentement». Pour nous, ça envoie le
mauvais message.
M. Tanguay
:
Me Lebrun, il me reste une minute puis je veux, donc, mettre le point sur
ça. On a beau avoir «COVID» dans le titre du projet de loi n° 75, l'article 2.2,
si d'aventure on l'adoptait, il va être là bien après la COVID. Il va être là pour
ad vitam aeternam. Il n'y a pas de date de péremption, de un. Alors, vous
faites bien de dire : Point d'interrogation, drapeau jaune. Et là on parle,
en plus, pour les audiences, un procès… vous dites : Nouveaux moyens technologiques
ne font pas encore consensus. Vous faites référence à quoi? Il y a eu des
problèmes techniques?
M. Lebrun (Michel) : Bien
oui. Surtout, je vous dirais, là où les réticences se manifestent le plus, c'est
au niveau des procès contestés, et des procès contestés qui impliquent souvent
la crédibilité des témoins. Lorsqu'il y a des... pour une raison ou pour une
autre, on doit contre-interroger quelqu'un ou lorsqu'il y a des versions
contradictoires, à ce moment-là, bien...
M. Tanguay
: C'est sûr
que ce n'est pas la même affaire, là. Ce n'est pas la même affaire pour vous puis ce n'est pas la
même affaire pour le juge qui doit regarder dans les yeux puis dire :
Est-ce que la cour accorde une crédibilité quelconque à ce témoignage-là? Puis
il va l'écrire dans ce sens-là. Alors, c'est clair que ce n'est pas un plus, c'est
un défi.
M. Lebrun (Michel) : Oui,
puis ce qui se dégage tranquillement, c'est un consensus à ce sujet-là, et je
ne vois pas l'intérêt de donner des <outils comme ceux-là...
M. Tanguay
: ...ce
n'est
pas la même affaire pour vous puis ce n'est pas la même affaire pour le juge,
qui doit regarder dans les yeux puis dire : Est-ce que la cour accorde une
crédibilité quelconque à ce témoignage-là?, puis il va l'écrire dans ce
sens-là. Alors, c'est clair que ce n'est pas un plus, c'est un défi.
M. Lebrun (Michel) :
Oui, puis ce qui se dégage tranquillement, c'est un consensus à ce sujet-là, et
je ne vois pas l'intérêt de donner des >outils comme ceux-là.
M. Tanguay
: Merci.
Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup, M. le député de LaFontaine. Mme la députée de Joliette,
s'il vous plaît.
Mme
Hivon
: Merci
beaucoup, M. le Président. Je veux juste dire un petit mot compte tenu de ce
qu'on a appris ce matin, le décès de Marc-André Bédard, et qu'on est à la Commission
des institutions, où il a siégé de nombreuses et nombreuses heures, juste que je
veux souligner le travail incroyable de cet homme-là, plus grand que nature,
pour la justice au Québec. Donc, je trouvais ça important puis d'offrir nos
condoléances à toute sa famille et, bien sûr, à Stéphane, que nous connaissons
bien.
Donc, sur ce, bonjour. Merci beaucoup de
votre présentation. Je veux poursuivre sur la question de l'article 2.2 du
Code de procédure pénale introduit par l'article 38. Donc, on disait déjà
que le juge pouvait l'ordonner d'office, et là on vient mettre «d'office et
sans [...] consentement». Moi, je veux votre opinion, à savoir, quand on dit
«d'office», est-ce que, déjà, ça ne veut pas dire qu'il peut le faire de son
propre chef? Donc, je voudrais comprendre pourquoi, selon vous, on a jugé qu'il
fallait ajouter le «et sans leur consentement».
M. Lebrun (Michel) : Bien, c'est
un peu ce que je disais : Est-ce que c'est un pléonasme? Je suis un peu
comme vous, là. Je ne suis pas un expert et je ne suis surtout pas un juge de
la Cour suprême qui pourrait l'interpréter un jour. Mais on en a plus contre le
message que ça envoie et ce que ça dégage comme intention, comme, je dirais,
constat que les justiciables et leurs avocats doivent être mis au pas par le
système et d'inciter les tribunaux à le faire. En fait, c'est un peu ça qui… C'est
la seule explication que je peux avoir pour l'ajout de cette mention-là. Mais,
je tiens à le dire, ça arrive à un moment où on n'est pas là. Le système n'est
pas là. Le système a découvert, cette année, de façon renouvelée, les vertus de
la collaboration et du consensus, et ça a fonctionné, là.
Et, je tiens à le dire, la première
semaine après le confinement, les avocats de défense, bénévolement... Il y
avait un avocat de défense dans chaque salle d'audience au Québec en train de
faire les remises pour tout le monde et qui... On s'est mobilisés. Puis, devant
l'arrivée de la solution technologique qui s'en venait nécessairement, on
considère qu'on a relevé ce défi-là puis on a agi de façon positive. Donc, de
lire ça dans le projet de loi, joint aux autres remarques que je fais sur les
notions d'accessibilité à la justice, pour nous, c'est comme si on avait... il
y avait un rendez-vous manqué.
Mme
Hivon
: Je
vous ai bien entendu et lu sur la question de la crédibilité, là, donc, que ça
peut poser un défi, là, pour évaluer la crédibilité des témoins, mais vous
ajoutez aussi que vous craignez que ça pourrait enliser le système avec des
débats inutiles parce que les parties pourront se faire entendre avant que ça
puisse être imposé, donc, les moyens technologiques. Donc, c'est dire <que
vous...
Mme
Hivon
:
...sur la question de la crédibilité, là, donc que ça peut poser un défi, là,
pour évaluer la crédibilité des témoins, mais vous ajoutez aussi que vous
craignez que ça pourrait enliser le système avec des débats inutiles parce que
les parties pourront se faire entendre avant que ça puisse être imposé, donc,
les moyens technologiques. Donc, c'est dire >que vous pensez que beaucoup
d'avocats se prévaudraient de cette possibilité-là, et donc contesteraient le
fait que le juge ordonne, par exemple, de procéder avec des moyens
technologiques, parce que vous parlez d'un risque d'enliser le système.
M. Lebrun (Michel) : Bien, en
fait, ce n'est pas... Je ne dénonce pas le droit d'être entendu. Ça, je pense
que ça existait indépendamment de la nouvelle mention qu'il peut y avoir au
niveau de l'article. Ce que j'ai constaté depuis le début de la pandémie, c'est
qu'il n'y a pas eu de recours extraordinaire, par exemple, des brefs ou des
choses... des recours en vertu de la charte ou des allégations pour dire :
On nous impose des solutions technologiques. Ça s'est fait dans le respect et
ça s'est fait... Ce qui devait se faire a été fait. Moi-même, j'ai fait même des
procès contestés en visioconférence, mais, en retour, on s'attendait à ce que
notre préoccupation, lorsqu'on voulait avoir une audience en personne, puisse
être entendue, donc, et c'est cette harmonie-là qui risque d'être brisée par
l'appel à l'autorité, l'autoritarisme dans un... Et là ça peut générer toutes
sortes d'appels, toutes sortes de recours obliques, de recours extraordinaires
ou de requêtes qui risquent d'avoir un effet contraire à celui qui est dans le
titre de la loi, c'est-à-dire l'efficacité des tribunaux.
Mme
Hivon
:
Merci.
Le Président (M. Bachand) :
Sur ce, Me Lebrun, merci beaucoup de votre participation à la commission. Ça
a été très apprécié.
Et la commission suspend ses travaux
quelques instants. Merci beaucoup, Me Lebrun.
(Suspension de la séance à 15 h 50)
>
(Reprise à 15 h 51)
Le Président (M. Bachand) :À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux.
Alors, il nous fait plaisir d'accueillir Me Marie Christine Kirouack,
de l'association des avocates et avocats en droit familial du Québec. Me Kirouack,
merci beaucoup encore une fois d'être avec nous cet après-midi. Comme vous
connaissez les règles, 10 minutes de présentation. Après ça, nous aurons une
période d'échange avec les membres de la commission. Je vous cède la parole, et,
encore une fois, merci de votre participation.
Association des avocats et avocates en droit
familial du Québec
(Visioconférence)
Mme Kirouack (Marie Christine) :
De rien. Alors, écoutez, juste rapidement, pour ceux qui ne connaîtraient pas
l'AAADFQ, on regroupe près de 500 avocats dont la spécialité est faire du droit
de la famille. Donc, on est très, très, très spécifiques, là, au niveau de
notre pratique.
D'entrée de jeu, vraiment, là, on félicite
certaines des dispositions qui sont au niveau du projet de loi, notamment <l'article...
>la modification proposée à l'article 14 du Code de procédure
civile, qui permettra notamment de rattraper la technologie, les téléphones
intelligents qui ont fait effectivement leur apparition dans nos salles de
tribunaux, et éviter effectivement que les gens puissent enregistrer des images
ou les diffuser.
Probablement parce qu'on fait aussi du
droit de la famille et qu'on a finalement obtenu, il y a quelques années, après
de nombreuses représentations, la protection en matière des dossiers en matière
familiale, qu'ils soient à accès restreint, on félicite aussi le projet de loi pour
ce qui est des modifications proposées par les articles 5 et 6 aux articles 15
et 16, respectivement, et qui fera que, désormais, et le huis clos, article 15,
et l'accès restreint aux dossiers seraient élargis aux demandes d'autorisation
de soins, d'aliénation d'une partie du corps ou de garde en établissement. On
pense que ce sont des sujets tout aussi sensibles, effectivement, et
particuliers que les matières familiales et on se réjouit que cela pourrait
désormais faire partie du Code de procédure civile.
Autre modification, parce que je débute
d'abord ce que, je vous dirais, <ce qui >a l'aval avant d'aller à
la modification proposée à la Loi sur le Barreau, avec laquelle l'association a
de sérieuses, mais alors de très grandes réticences, la modification proposée
par l'article 14 à l'article 145 du Code de procédure, selon
laquelle, là, désormais, on retournerait, dans le fond, à l'ancienne règle,
c'est-à-dire que le demandeur devrait communiquer au défendeur, dans les plus
brefs délais, les pièces, effectivement, qu'il allègue, viendra codifier, je
vous dirais, la pratique qui s'est installée chez la majorité des praticiens. C'est-à-dire
<que nous...
Mme Kirouack (Marie Christine) :
...
145 du code de procédure, selon laquelle, là, désormais, on
retournerait, dans le fond, à l'ancienne règle, c'est-à-dire que le demandeur
devrait communiquer au défendeur dans les plus brefs délais les pièces,
effectivement, qu'il allègue, viendra codifier, je vous dirais, la pratique qui
s'est installée chez la majorité des praticiens, c'est-à-dire >que nous
notifions effectivement les pièces en même temps que les procédures, mais ça
facilitera le travail dans le cas où les avocats peuvent être pris avec des
confrères ou des parties qui se représentent seules, qui sont peut-être plus
récalcitrantes dans certains cas, je vous dirais, O.K.?
Autre modification à l'article 152,
qui permettra que les propositions de protocole puissent être entérinées, là,
sans nécessiter d'intervention judiciaire, ce qui permettra de sauver du temps
d'heures-juge et du temps de la part des avocats également…
Une des modifications qu'on trouve, qui,
effectivement, je dois vous dire, est particulièrement constructive, c'est
l'obligation, pour une partie qui révoque le mandat de son avocat, d'annoncer
et d'afficher immédiatement ses couleurs, à savoir si elle entend se
représenter seule dans le futur ou si elle entend retenir les services d'un
nouvel avocat. Ça va solutionner, je vous dirais, le problème des parties qui
utilisent sciemment et volontairement le principe de leur non-représentation
pour pouvoir remettre le dossier… l'audition d'un dossier à une, à deux ou de
multiples reprises. L'association, vraiment, là, félicite le législateur pour
cette proposition-là afin d'éviter qu'on puisse, je vous dirais, jouer de la
procédurite et du droit d'être représenté, alors qu'on n'a pas l'intention de l'être
de toute façon, mais que ça permet d'étirer les délais et les auditions.
Là où l'association a de sérieuses
réserves, et à de multiples chapitres, c'est la modification qui est proposée à
la Loi sur le Barreau pour permettre désormais aux étudiants de donner des avis
et conseils juridiques, notamment à l'article 128, <l'article... >la
proposition d'insertion de l'article 128.1 de la Loi sur le Barreau, et,
d'une part, parce que, pour nous, ça ne correspond absolument pas à une
question d'accès à la justice. Deuxièmement, il y a une grave et une importante
question de protection du public.
Et on est en faveur des cliniques
d'information juridique, là. Je vous dirais que plusieurs d'entre nous travaillons activement au niveau des cliniques
d'information juridique dans les milieux universitaires. J'enseigne moi-même à
McGill. C'est moi qui ai refait le guide d'information pour les étudiants qui
font de l'information juridique en matière familiale. Donc, je peux vous en
parler de première main.
Ceci étant, si je regarde <et si on
regarde...
Mme Kirouack (Marie Christine) :
...
travaillons activement au niveau des cliniques d'information
juridique dans les milieux universitaires. J'enseigne moi-même à McGill. C'est
moi qui ai refait le guide d'information pour les étudiants qui font de
l'information juridique en matière familiale.
Donc, je peux vous en
parler de première main.
Ceci étant, si je regarde >et si
on regarde notamment les obligations du code de déontologie pour ce qui est des
avocats, qui ont un devoir de compétence avant d'accepter de donner des
conseils ou d'agir dans un dossier, à l'article 29, on trouve
difficilement conciliable qu'un étudiant de première, de deuxième ou de
troisième année puisse donner des conseils de nature juridique. En outre, et on
vous le soulève comme différent problème, qu'en est-il du secret professionnel?
Le secret professionnel est un secret qui découle de la loi et qui ne va pas
être juste allégué par quelqu'un. Alors, qu'en serait-il, effectivement, de ce
type de rencontre là? Et je vous souligne qu'il y a aussi spécifiquement… puis
ça, ça découle du Code des professions, là, mais il y a spécifiquement, au
niveau de la loi sur le Code de déontologie des avocats… ait une obligation
d'assurer la confidentialité.
Et ça, c'est sans entrer… entre autres,
toute la question du Règlement sur la comptabilité et les normes d'exercice
professionnel des avocats, qui oblige à ce qu'il y ait une liste de dossiers
actifs et de dossiers fermés qui soit tenue pour sept ans, et qu'il en est de
même pour les dossiers fermés, où on a une prescription de sept ans qui
s'applique pour conserver les dossiers. Après, à compter de la date de leur fermeture,
on voit difficilement comment les étudiants, effectivement, pourraient faire
ça.
Et dernière question, peut-être : Est-ce
à dire que, si on suit la proposition du gouvernement présentement, les
universités vont devoir prendre des assurances responsabilité pour les conseils
ou les avis juridiques que leurs étudiants pourraient, effectivement, donner,
fussent-ils, je vous dirais, puis si je regarde le libellé, sous la supervision
étroite et la responsabilité d'un avocat en exercice, ou est-ce à dire que ça
sera, à ce moment-là, la responsabilité professionnelle de l'avocat qui sera
engagé, ce qui, je vous le soumets, si tel est le cas, pourrait peut-être faire
en sorte que beaucoup d'avocats seraient très réticents à participer,
effectivement, à ces cliniques-là et, peut-être, ne seraient plus là non plus
comme personnes-ressources, en termes d'information juridique, une espèce
d'effet domino de la modification qui est proposée à l'article 128.1?
• (16 heures) •
Nous avons, donc, d'importantes réserves.
Si, par ailleurs, l'objectif poursuivi par le législateur, c'est de faire en
sorte que les étudiants puissent pratiquer, je vous soumets que nos étudiants
le font dans nos classes, où ils sont soumis à des scénarios où ils font des
fausses consultations. Ils le font dans le cours de leurs examens également, et
personne… Aucun de mes étudiants n'obtient un A parfait quand il a à analyser
un scénario factuel. Donc, les conséquences, pour un justiciable, d'avoir des
conseils qui ne sont pas appropriés, des avis juridiques qui ne sont pas
appropriés ou qui sont erronés, et particulièrement dans mon domaine,
c'est-à-dire où la multiplicité des questions est extrêmement <importante,
où une première question...
>
16 h (version révisée)
< Mme Kirouack (Marie Christine) :
...quand il a analysé un scénario factuel. Donc, les conséquences pour un justiciable
d'avoir des conseils qui ne sont pas appropriés, des avis juridiques qui ne
sont pas appropriés ou qui sont erronés, et
particulièrement dans mon
domaine,
c'est-à-dire où la multiplicité des questions est
extrêmement
>importante, où une première question en amène une autre, me semblent un
terrain extrêmement glissant.
Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup, Me Kirouack. On va débuter la période
d'échange avec le ministre. M. le ministre, s'il vous plaît.
M. Jolin-Barrette : Bonjour,
Me Kirouack. Merci de participer aux travaux de la commission.
Écoutez, ce que je vous propose, c'est
qu'on discute, dans un premier temps, des cliniques juridiques et que, par la
suite, on parle de vos autres commentaires sur le projet de loi, parce que je
trouve ça très intéressant. Et je vous remercie aussi du travail qui a été
fait. Je pense que le mémoire que vous nous avez présenté, c'est un mémoire qui
est très sérieux, qui est fouillé, alors surtout les dispositions au Code de
procédure civile, que j'aimerais qu'on aborde par la suite.
Mais, d'entrée de jeu, on va débuter par
les cliniques juridiques. Je comprends que les membres de votre association
sont contre le fait d'avoir des cliniques juridiques universitaires où est-ce
qu'on peut donner des conseils et des avis. Cela étant, je vous dresserais le
parallèle avec les autres juridictions canadiennes. Pourquoi est-ce que, dans
les autres juridictions canadiennes, c'est quelque chose qui est possible? Et
pourquoi est-ce qu'au Québec, pour les justiciables québécois, on ne leur
permettrait pas d'avoir davantage accès à des conseils et des avis juridiques,
le tout bien balisé par le Barreau, par la Chambre des notaires? Il y a des
modalités qu'il va falloir travailler dans le cadre du règlement que le Barreau
et la Chambre des notaires vont adopter en collaboration avec les universités,
mais pourquoi, au Québec, est-ce qu'on ne serait pas capables de faire ça
versus les autres juridictions canadiennes?
Mme Kirouack (Marie Christine) :
Avec égard, M. le ministre, et à moins que je ne me sois trompée, là, la
Colombie-Britannique a ça, l'Alberta ne l'a pas. Quand on va lire
spécifiquement, quand on nous parle de «student», ce n'est pas un étudiant
universitaire, là, c'est un «articling student». Donc, je ne suis pas sûre
qu'il est totalement vrai de dire que toutes les juridictions l'ont. Par
ailleurs, ce n'est pas nécessairement, je vous dirais, l'argument qui me
convainc, quant à moi.
Et ce que je trouve toujours surprenant en
matière juridique, et c'est dit avec la plus grande politesse et le plus grand
égard, M. le ministre… Est-ce que le gouvernement irait dire que les étudiants
en électricité devraient pouvoir, demain matin, donner des conseils juridiques
à M. puis Mme Tout-le-monde, comment mettre, effectivement, un disjoncteur
dans leur boîte électrique, alors qu'ils n'ont pas leurs papiers puis ils ne
sont pas certifiés? J'en doute. Pourquoi est-ce que, quand on parle,
effectivement, de justice, de juridique… que, tout à coup, on dirait que les
normes de compétence deviennent beaucoup plus laxes? J'ai personnellement de la
difficulté avec ça, d'autant qu'écoutez, là, les conséquences sur la vie du
justiciable sont extrêmement importantes s'ils n'ont pas… s'ils ne reçoivent
pas des conseils, effectivement, qui sont justes, qui sont bien fondés,
juridiquement, puis appropriés.
M. Jolin-Barrette : Je suis
tout à fait d'accord avec vous sur le fait qu'il faut que ça soit bien encadré,
et ça le sera par un membre en exercice de la Chambre des notaires ou du
Barreau. Mais est-ce à dire <que...
Mme Kirouack (Marie Christine) :
...s'ils
ne reçoivent pas des conseils, effectivement, qui sont justes,
qui sont bien fondés juridiquement puis appropriés.
M. Jolin-Barrette :
Je suis tout à fait d'accord avec vous sur le fait qu'il faut que ça soit bien
encadré, et ça le sera par un membre en exercice de la Chambre des notaires ou
du Barreau, mais est-ce à dire >que tous les autres ordres
professionnels qui ont des cliniques universitaires, eux, ils mettent en péril
la protection du public dans tous les autres types de professions? Voyez-vous
où ça nous amène? Et je comprends votre point de vue, mais même le Barreau va
collaborer avec nous. Alors, je comprends que l'association souhaite aller plus
loin encore que l'ordre professionnel mandaté pour la protection du public.
Mme Kirouack (Marie Christine) :
Absolument, définitivement, et c'est probablement parce que, vous savez, nous,
on représente M. puis Mme Tout-le-monde. On représente 80 % des
dossiers. Donc, oui, c'est notre position.
M. Jolin-Barrette : Vous ne
pensez pas que les gens au Québec auraient intérêt à avoir accès davantage à
des conseils et à des avis juridiques et que ça ne peut pas constituer une
piste de solution d'avoir des cliniques juridiques universitaires bien
balisées, bien encadrées, comme dans d'autres juridictions canadiennes?
Mme Kirouack (Marie Christine) :
Je ne pense pas que la solution pour un plus grand accès à la justice passe par
des étudiants universitaires qui donnent des conseils, non.
M. Jolin-Barrette : Parfait,
c'est votre opinion. Je ne la partage pas. Bon, parlons maintenant des
modifications au Code de procédure civile relativement... Vous avez parlé tout
à l'heure des téléphones. Dans le fond, on vient mettre la possibilité pour le
tribunal d'empêcher la captation à l'intérieur de la salle de cour. Pourquoi
est-ce que c'est important?
Mme Kirouack (Marie Christine) :
Ah! écoutez, je veux dire, c'est... On va vous parler de ce qui se passe dans
les salles de tribunaux, là. À l'époque des téléphones intelligents,
effectivement, vous savez, puis même en matière familiale, là, parce que... où
on bénéficie du huis clos, les gens ont tendance à vouloir enregistrer dans le
corridor, à vouloir enregistrer... Puis là je vous parle… captation d'images,
captation sonore aussi, et particulièrement, effectivement, dans la salle, là.
Pour moi, la question, effectivement, puis
pour l'association, là, je pense que c'est extrêmement... c'est rattraper la
technologie. L'article 14, tel qu'il est libellé, là, vraiment, on
félicite le gouvernement de ça. C'est important que tout le monde et son voisin
puissent ne pas recouper ce qui s'est passé devant les tribunaux. Vous savez, c'est
facile présentement, là. Il y a plein de petites applications qui font en sorte :
Je vais pouvoir découper ce que quelqu'un dit, le remettre bout à bout, et,
tout à coup, on va donner l'impression que ce qui s'est passé n'est pas ce qui
s'est passé.
M. Jolin-Barrette : O.K. Et,
tout à l'heure, vous avez abordé aussi la question du huis clos. On élargit le
huis clos, et vous êtes favorable à cette mesure-là. Pourquoi?
Mme Kirouack (Marie Christine) :
Parce que, vous savez, c'est beaucoup plus facile pour les parties d'avoir à
témoigner, O.K., et de pouvoir, effectivement, je vous dirais, passer à travers
des parties qui ne sont pas faciles dans leur vie sans que, dans la salle, vous
ayez six, sept personnes du vaste public, et qui sont là, dans le fond, pour
pouvoir écouter. Il y a une partie de notre justice qui est publique, à
laquelle les gens peuvent effectivement assister, et je n'ai pas de problème
avec ça, mais je pense qu'il y a des matières sensibles où... Vous savez, une <matière...
Mme Kirouack (Marie Christine) :
...sans
que, dans la salle, vous ayez six, sept personnes du vaste
public et qui sont là, dans le fond, pour pouvoir écouter. Il y a une partie de
notre justice qui est publique à laquelle les gens peuvent effectivement
assister, et je n'ai pas de problème avec ça, mais je pense qu'il y a des
matières sensibles où... Vous savez, une >matière d'autorisation de
soins, pour la personne et par respect pour la personne, effectivement, qui est
visée par une demande d'autorisation de soins, on va avoir des gens qui vont
venir parler de sa santé mentale, de ses comportements, des médicaments qu'on
devrait lui donner, O.K., des mesures qu'on devrait lui appliquer. Ça me semble
effectivement des matières hautement personnelles, et je pense que notre rôle
par rapport à ça, c'est de protéger les parties.
M. Jolin-Barrette : O.K. Et
puis votre prédécesseur, tout à l'heure, nous a dit relativement aux audiences
virtuelles, le président de l'association des avocats de défense nous a dit :
Écoutez, il faut faire attention, il ne faut pas permettre au juge,
unilatéralement, de pouvoir tenir des audiences virtuelles, ça prendrait le
consentement des parties. Est-ce que vous êtes d'accord avec ses commentaires
ou l'article, tel qu'il est rédigé, ça convient de façon à ce que le juge
puisse ordonner que l'audience va se passer de façon virtuelle?
Mme Kirouack (Marie Christine) :
Écoutez, moi, si on regarde, là… puis on s'est penchés dessus au niveau de
l'association, si on regarde le libellé que vous avez proposé, là, au deuxième
alinéa de l'article 26, O.K., on parle, effectivement, là, de matière,
notamment, de gestion à ce type de chose là.
De toute façon, à compter du
5 janvier, en matière familiale, et, ne me citez pas, là, soit le
30 novembre, soit le 1er décembre en matière civile, bien, il y a une
directive de la Cour supérieure qui fait en sorte que, désormais, tout prend le
virage dans tous les dossiers où il n'y a pas témoignage, O.K.? Tout va se faire
virtuellement à cause de la COVID. Je vais vous dire qu'en matière de gestion
d'instance je fais même partie de ceux qui espèrent qu'après la COVID ça va
continuer comme ça. C'est beaucoup plus efficace, beaucoup plus efficace pour
les tribunaux, beaucoup plus efficace pour les parties et les avocats.
Là où on a plus de réticences… C'est
beaucoup plus difficile, vous comprendrez, de faire un procès où il y a des
témoins, et, à ce jour, je vous dirais qu'on est tous en train de boiter un
peu, là. Comment peut-on contre-interroger un témoin, O.K., alors qu'on procède
par vidéoconférence? C'est un peu plus compliqué. Il est difficile… parce qu'on
a le droit, entre autres, de contredire un témoin sur la base, n'est-ce pas, de
déclarations antérieures ou de documents qui n'ont pas nécessairement été mis
en preuve parce que, tout à coup, ça ressort. Ça, on n'est pas encore, je vous
dirais, très à l'aise par rapport à cette question-là. Mais il est sûr que,
pour tout ce qui relève de gestion d'ordonnance intérimaire, de preuve par
affidavit — bon, puis je fais mes cheveux blancs, là — de
déclaration assermentée, on est tout à fait en faveur.
M. Jolin-Barrette : Mais, sur
le libellé de l'article, sur le fait que le juge pourrait l'imposer, votre
prédécesseur nous disait : Bien, écoutez, ça devrait être sur le
consentement des parties. Est-ce que vous avez un malaise à ce qu'on laisse ce
pouvoir-là aux juges de l'imposer ou vous nous dites : Bien, il faudrait
que ce soit avec le consentement des parties?
Mme Kirouack (Marie Christine) :
C'est-à-dire que notre position... O.K., on a une position <différente...
M. Jolin-Barrette :
...l'imposer,
votre prédécesseur nous disait : Bien, écoutez, ça
devrait être sur le consentement des parties. Est-ce que vous avez un malaise à
ce qu'on laisse ce pouvoir-là aux juges de l'imposer ou vous nous dites :
Bien, il faudrait que ce soit avec le consentement des parties?
Mme Kirouack (Marie Christine) :
C'est-à-dire que notre position...
O.K., on a une position >différente
pour ce qui est du mérite et là où il va y avoir des témoins, O.K., qui rend la
chose beaucoup plus difficile et compliquée, y compris l'évaluation, je vous
dirais, de la crédibilité d'un témoin, qui se fait beaucoup plus en personne, mais,
pour ce qui est du reste, on n'a pas de problème. On a comme été les premiers
de dire : Prenons le virage, là.
• (16 h 10) •
M. Jolin-Barrette : O.K. Là,
lorsqu'une partie fait défaut de collaborer au protocole d'instance, là, on
apporte une modification à l'article 152. Est-ce que vous êtes d'accord
avec la proposition? Parce que, dans le fond, le Barreau nous dit : Vous
ne devez pas rallonger le délai. Là, nous, on rajoute un 15 jours
là-dessus, il me semble. Alors, est-ce que, ça, vous êtes à l'aise avec cette proposition-là
que nous faisons?
Mme Kirouack (Marie Christine) :
Bien, on est très... Non seulement on est à l'aise, mais, si vous regardez dans
notre mémoire, on se réjouit de cette modification-là, parce que, notamment, ça
va faire que, dans les cas de récalcitrants, bon, peut-être qu'il y a une question
de délai, là, mais, au bout du compte, on va rattraper beaucoup plus, et ça va
être beaucoup plus efficace, effectivement, que le protocole lui-même, enfin que
la proposition de protocole devienne cristallisée comme étant un protocole sans
qu'il soit nécessaire qu'on perde le temps des juges ou de tout le monde.
Alors, oui, on n'a pas de problème avec ça. On trouve ça constructif.
M. Jolin-Barrette : O.K., parce
qu'hier, quand le Barreau est venu, il nous a dit : Nous, on est en
désaccord avec ça, là. Il dit : Vous rallongez le tout. Donc, je comprends
que vos membres sont à l'aise avec ça.
Mme Kirouack (Marie Christine) :
Oui, parce qu'il y a une contrepartie.
M. Jolin-Barrette : O.K. Sur
la question, dans le fond, de la séance d'information en matière familiale
avant que le dossier soit instruit, on nous a dit : Écoutez, vous devriez
prévoir exceptionnellement que, même si une partie n'a pas suivi cette séance
d'information là… vous devriez quand même permettre que le dossier chemine
devant la cour. Est-ce que vous êtes à l'aise avec ça ou on continue comme dans
le Code de procédure actuellement puis on dit : Vous devez absolument
avoir suivi la séance d'information?
Mme Kirouack (Marie Christine) :
Je m'excuse, M. le ministre, mais est-ce qu'il y avait une proposition de
modification à cet article-là puis...
M. Jolin-Barrette : C'est un
commentaire que nous avons eu.
Mme Kirouack (Marie Christine) :
O.K., O.K., O.K., c'est beau. Avec... Si je me souviens bien, on peut fixer le
dossier même si la séance n'a pas été suivie. On ne peut pas être entendu, dit
l'article du code, et là j'y vais de mémoire, mais on peut fixer le dossier.
Ceci étant, je sais de première main qu'il y a des districts où ce n'est pas
l'interprétation, mais le libellé, c'est qu'on ne peut pas être entendu, pas
qu'on ne peut pas être fixé, ce qui n'est pas tout à fait la même chose.
M. Jolin-Barrette : Mais
est-ce que, selon votre expérience, ça arrive, dans certains districts, qu'il y
a des gens qui sont entendus quand même, même s'il n'y a pas eu la séance?
Mme Kirouack (Marie Christine) :
Oui, je pourrais vous envoyer de la jurisprudence, M. le ministre. J'ai écrit
un texte là-dessus il y a deux ou trois ans.
M. Jolin-Barrette : Je
comprends. Donc, le législateur est à rebours, là. Si on fait la modification,
c'est pour venir confirmer la <jurisprudence...
M. Jolin-Barrette :
...ça
arrive dans certains districts qu'il y a des gens qui sont entendus
quand même, même s'il n'y a pas eu la séance?
Mme Kirouack (Marie Christine) :
Oui, je pourrais vous envoyer de la jurisprudence, M. le ministre, j'ai écrit
un texte là-dessus il y a deux ou trois ans.
M. Jolin-Barrette :
Je comprends. Donc, le législateur est à rebours, là. Si on fait la
modification, c'est pour venir confirmer la >jurisprudence.
Mme Kirouack (Marie Christine) :
Bien, je vous dirais que, oui, effectivement, il y a des... Je vous dirais
que... Et sans citer de cause, là, mais il y a des dossiers qui ont été mis
hors délibéré parce que, tout à coup, le tribunal avait comme réalisé que la
séance d'information n'avait pas eu lieu. Ceci étant, on a toujours une
difficulté avec cette séance d'information sur la coparentalité quand on a,
entre autres, des dossiers transfrontaliers ou transprovinciaux, là. Il devrait
y avoir un pouvoir discrétionnaire de pouvoir permettre effectivement aux
parties d'être exemptées, là, quand ça devient comme difficile.
M. Jolin-Barrette : O.K.
Peut-être une dernière question pour ma part. Ensuite, je vais céder la parole
à mes collègues. Mais, sur les modifications qui vont permettre au tribunal de
rendre certaines décisions sur le vu du dossier uniquement, ça, vous êtes
d'accord avec ça?
Mme Kirouack (Marie Christine) :
Absolument, absolument. D'ailleurs, écoutez, puis c'était un des commentaires,
là… Je veux dire, ça se trouve à être le pendant de ce qui existe déjà, par
exemple, en matière de demande de rejet d'appel en Cour d'appel. Désormais, ce
pouvoir-là, effectivement, existerait en première instance. On n'a aucun
problème. On n'a aucun problème, là. On trouve que ça, là, ça permet
effectivement d'être plus efficace et, si, à sa base même, au vu du dossier, il
n'y a pas de base, bien, que ça soit rejeté et qu'effectivement on passe à
autre chose.
M. Jolin-Barrette : O.K., parce
qu'il y a des groupes qui nous ont invité à retirer la disposition en disant :
Bien, il faut avoir la possibilité, là, d'aller plaider sa requête.
Mme Kirouack (Marie Christine) :
Pas toujours, si vous voulez l'opinion de l'association, pas toujours. Et,
quant à nous, on trouve que, si on regarde les dispositions en matière de Cour
d'appel, c'est déjà là. Ça existe déjà et le bât ne blesse pas, là. La Cour
d'appel ne rejettera pas, à sa face même, comprenez-vous, une demande de rejet
d'appel s'il n'y a pas de sérieux, mais, si… Effectivement, si, à sa face même,
elle est irrecevable, soit parce qu'elle n'est pas fondée en droit soit parce
qu'il n'y aucun motif sérieux, effectivement, ça nous semble être dans
l'économie du droit, là.
M. Jolin-Barrette : Parfait.
Mme Kirouack (Marie Christine) :
C'est les articles 8 et suivants du Code de procédure civile, là, de la
réforme de la 2016.
M. Jolin-Barrette : Je vous
remercie, Me Kirouack.
Mme Kirouack (Marie Christine) :
D'accord.
Le Président (M. Bachand) :
Merci beaucoup. M. le député de Chapleau, s'il vous plaît.
M. Lévesque (Chapleau) : Merci
beaucoup, M. le Président. Bonjour, Me Kirouack. J'aimerais peut-être
faire appel à votre expertise. Bonjour. Donc, vous avez, bon, tout évalué
l'ensemble des modifications au Code de procédure civile. J'aimerais, d'entrée
de jeu, peut-être vous demander : Est-ce qu'il y aurait des ajouts ou des
bonifications que vous apporteriez à cela, là, que vous n'avez pas eu
l'occasion de nous entretenir, mais là, vu qu'on est là, on pourrait le faire?
Mme Kirouack (Marie Christine) :
Je vous remercie de me tendre la perche, parce qu'effectivement j'avais oublié,
et ça, c'est ma faute. Écoutez, effectivement, l'association... Si on est pour
prendre le virage de faire des modifications au Code de procédure civile,
l'association est d'opinion que l'article 133 devrait être modifié. Et,
dans un principe, effectivement, de l'accès à la justice, l'article 133 du
Code de procédure civile, présentement, prévoit que la notification peut se
faire à avocat par une partie représentée, mais, dans le cas où la notification
est par un moyen <technologique...
Mme Kirouack (Marie Christine) :
...l'
association
est d'opinion que l'article 133 devrait
être modifié. Et, dans un principe, effectivement, de l'accès à la justice,
l'article 133 du Code de procédure civile présentement prévoit que la
notification peut se faire à avocat par une partie représentée, mais, dans le
cas où la notification par un moyen >technologique, n'est-ce pas, la
partie n'est pas représentée, on ne peut pas le faire, sauf si on obtient la
permission du tribunal.
C'est comme deux poids deux mesures, fait
en sorte que, dans certains cas, ou il faut aller passer quelques heures à la
cour pour obtenir la permission ou, effectivement, on est pris pour payer un
huissier, alors que la partie adverse qui choisit, certaines fois, de façon
totalement stratégique… nous inonde de notifications par voie technologique. L'association
est d'opinion que la règle devrait être la même, effectivement, pour tout le
monde. À partir du moment où la notification technologique est permise, et ce n'est
pas un phénomène nouveau, là, je vous le souligne, la notification par voie
technologique, bien, à ce moment-là, ça devrait être dans tous les cas et que
les parties soient représentées ou qu'elles ne le soient pas.
M. Lévesque (Chapleau) :
O.K. Est-ce qu'il y aurait d'autres éléments ou d'autres points que vous
aimeriez ajouter?
Mme Kirouack (Marie Christine) :
Non, je vous dirais que c'était comme la principale, là, qui...
M. Lévesque (Chapleau) :
La principale.
Mme Kirouack (Marie Christine) :
Ça fait quelques années qu'on veut profiter...
M. Lévesque (Chapleau) :
Que ça traîne?
Mme Kirouack (Marie Christine) :
…oui, qu'on veut pouvoir présenter cette proposition-là.
M. Lévesque (Chapleau) :
D'accord, parfait. Bien, merci de nous l'avoir présentée. Maintenant,
j'aimerais peut-être revenir sur les cliniques juridiques. C'est un sujet plus
délicat, là. Vous avez parlé... Vous dites, bon, que ça n'aide pas l'accès à la
justice. J'aimerais ça que vous éclairiez davantage sur ce point-là, parce
qu'il me semble que, s'il y a plus de personnes qui peuvent accueillir des
citoyens puis, voyons, les appuyer de façon, évidemment, supervisée par avocats
et notaires… il me semble… à mon sens, il y a davantage d'accès à la justice, peut-être
certains justiciables qui n'auraient pas soit les moyens, ou l'occasion, ou
l'opportunité, puis cette voie-là pourrait être offerte à eux. J'essaie juste
de voir, là, ce qui serait possible.
Mme Kirouack (Marie Christine) :
Présentement, là, moi, ce que vois autour de moi, c'est d'abord… Là, il y a
plein d'avocats qui donnent des premières entrevues pour donner des conseils
juridiques pour la chic somme de 25 $. Il y a plein d'avocats,
effectivement, qui font des cliniques où ils donnent des conseils juridiques. Et
nous sommes formés, hein? Nous sommes membres du Barreau. Nous sommes tenus au
secret professionnel. Le principe qu'un accès à la justice va permettre à
quelqu'un qui n'est pas compétent, avec égard, ils sont en train d'apprendre,
et c'est normal, qui donne de mauvais conseils et qui soit pris...
Puis, on se comprend, là, on est jeune, on
est à l'université. Je le vois chez mes étudiants, ils sont pleins, pleins,
pleins d'enthousiasme, ce qui est une très bonne chose. Le danger, c'est que,
quand on est plein d'enthousiasme comme ça, bien, des fois, on risque de dire
des choses qui ne sont pas basées tout à fait ou être pris de court et ne pas
avoir le sentiment qu'on peut dire à quelqu'un : Juste, juste, juste… il
va falloir que j'aille revoir… ou est-ce à dire que la seule façon dont pourrait
s'articuler la proposition, c'est que l'avocat soit assis au moment de la consultation,
et auquel cas qu'est-ce que c'est, ça, si ce n'est pas : Bien, on va aider
les étudiants à pratiquer avant qu'ils rentrent à l'École du Barreau?
Le Président
(M. Bachand) : Merci beaucoup, M. le député. M. le député
de LaFontaine, s'il vous plaît.
M. Tanguay
: Merci
beaucoup, M. le Président. Bien, merci <beaucoup d'être...
Mme Kirouack (Marie Christine) :
...seule façon dont pourrait s'articuler la
proposition, c'est que
l'avocat soit assis au moment de la
consultation? Et, auquel cas,
qu'est-ce que c'est, ça, si ce n'est pas : Bien, on va aider les étudiants
à pratiquer avant qu'ils rentrent à l'école du Barreau?
Le Président
(M. Bachand) :
Merci beaucoup, M. le député. M. le
député de
LaFontaine,
s'il vous plaît.
M. Tanguay
:
Merci
beaucoup,
M. le Président. Bien,
merci >beaucoup d'être
avec nous, Me Kirouack. Merci de répondre à nos questions.
J'aimerais me permettre l'outrecuidance… Si
vous avez, et libre à vous, mais je vous invite à le faire, écrit un article relativement
à l'article 417 du Code de procédure civile, n'hésitez pas, le cas
échéant, peut-être, de mettre en annexe, si le coeur vous en dit, des
précédents de la jurisprudence, mais je faisais référence davantage à l'article
que vous dites avoir écrit sur 417, les séances d'information sur la
parentalité, préalables à une audition. Je vous invite, si le coeur vous en
dit, à le communiquer au secrétariat de la commission, et nous aurons
l'occasion de le lire et d'être peut-être plus efficaces comme législateurs à
la lumière de ce que vous aurez soulevé dans cet article-là.
Mme Kirouack (Marie Christine) :
Et ce que je ferai, c'est que je ferai un extrait, parce que c'était dans le
cadre d'un article beaucoup plus fouillé, O.K., mais je pourrai vous faire, effectivement,
un extrait, parce qu'il y avait une partie qui portait spécifiquement là-dessus.
Je l'enverrai.
M. Tanguay
: Oui, bien,
merci à l'avance. J'aimerais revenir à l'article 26 du Code de procédure
civile, où il y aurait un ajout : «Le tribunal peut utiliser un tel
moyen — on parle de moyen technologique — ou [...] ordonner
qu'il le soit par les parties, même d'office, notamment — et là on
ajouterait — pour la gestion des instances, pour la tenue des
audiences [...] pour la transmission et [...] réception de documents sur [...] autre
support que le papier;».
J'aimerais vous entendre, vous,
praticienne, tenue d'audience… Ce n'est pas théorique, là. Vous êtes sur le
terrain. Avez-vous déjà pratiqué ou avez-vous déjà été avocate dans une
audience où il y avait des témoins… C'était fait... Probablement, ça, c'était
fait, à ce moment-là, par consentement, mais avez-vous expérimenté ou entendu
des praticiens, praticiennes qui ont expérimenté des problèmes tangibles par
rapport à ça, là? Autrement dit, je vous donne l'occasion de peut-être nous
lever le drapeau jaune par rapport à une libéralisation qui pourrait prendre
une tangente préoccupante.
• (16 h 20) •
Mme Kirouack (Marie Christine) :
Écoutez, oui. D'abord, écoutez, comme tout le monde, là, nous avons vécu la
COVID et nous avons encore les deux pieds dedans, mais effectivement, là, si je
vous parle d'avril, mai, juin, là, où, tout à coup, il a fallu prendre, tout le
monde, à peu près, le virage très, très, très rapidement... O.K., là, ça fait
quand même plusieurs mois. On est… Je vous dirais qu'on a commencé à s'adapter.
Et, outre la question, je vous dirais, des restrictions technologiques, là, parce
qu'il y a eu des ratés au début, O.K., je veux dire, la plateforme
s'effondrait, tout à coup, on disparaissait, comme procureurs. On essayait de rerentrer.
Il y a eu des procès qui se sont terminés au téléphone. Il y a eu des choses
intéressantes de cette nature-là, je vous dirais, qui étaient des ratés
technologiques, O.K.?
Par ailleurs, je veux dire, <j'ai
plaidé... >les premières semaines, j'ai plaidé par téléphone dans des
salles alors que le juge mettait sur <mains libres...
Mme Kirouack (Marie Christine) :
...terminés
au téléphone. Il y a eu des choses intéressantes de cette
nature-là où... je vous dirais, qui étaient des ratés technologiques, O.K.
Par ailleurs, je veux dire, j'ai
plaidé... les premières semaines, j'ai plaidé par téléphone dans des salles
alors que le juge mettait sur >mains-libres pour qu'on puisse, effectivement,
en matière d'ordonnance intérimaire, où il n'y a pas de témoin et il n'y a pas
de témoignage, parce que ça se fait sur déclaration assermentée… J'ai été
partie aussi à des procès en personne, mais où on avait des témoins par vidéo.
Ce n'est pas l'idéal. Le témoin par vidéo, je vous dirais, ce n'est pas
l'idéal. On a des difficultés pour ce qui est d'interroger. On a des
difficultés pour contre-interroger. Et il est certain...
Et là je ne veux pas qu'on me taxe d'être
antitechnologique ou pas pour le progrès, O.K., mais, vous savez, en matière
d'évaluer non seulement la crédibilité, mais l'honnêteté d'un témoin, ne nous
leurrons pas, là. On peut être devant la caméra de son ordinateur et avoir quelqu'un
qui, sur un tableau blanc, derrière mon écran, est en train d'écrire les
réponses que je devrais donner. Il y a une limite, effectivement, à assurer la
probité d'un témoignage qui se fait par vidéo, et c'est la nature même de la
bête, là, et c'est là, je vous dirais, qu'on a comme plus de réticences.
Mais, par ailleurs, si je regarde le
libellé actuel de l'article, du deuxième alinéa de l'article 26, l'article
tel que libellé actuellement permettait déjà, je vous dirais, au tribunal de
rendre toute une série d'ordonnances de même nature, là, parce que le mot
«notamment» est au deuxième alinéa de l'article 26. Je pense que la
modification proposée vient rajouter au libellé, parce que, tout à coup, on a
une énumération, mais, de facto, je ne suis pas certaine, là, que ça amène une
si grande modification, si ce n'est que, tout à coup, on a une énumération qui
peut servir de suggestion pour ce qui est de trouver d'autres scénarios au
niveau du terme «notamment», là, en droit.
M. Tanguay
: Quoique,
là, en le disant, ça veut dire… Là, c'est bar ouvert, là, puis je ne dis pas ça
de façon condescendante ou irrespectueuse. En le disant, ce sera d'autant plus
clair, parce que vous savez mieux que moi qu'il y a certaines dispositions du
Code de procédure civile, dans le temps où je pratiquais en litige commercial,
où on parlait des fameuses défenses orales. Je veux dire, c'était permis, mais
je n'ai jamais fait de défense orale. Les avocats, ils aiment ça écrire puis
ils font des défenses écrites. Je n'ai jamais vu une défense orale, là, tu te
lèves debout puis : Ce matin, M. le juge, je suis prêt à plaider ma
défense, alors je vais essentiellement avoir cinq arguments, premier
argument... Non, non, on veut que la juge ou le juge prenne notre plaidoirie,
notre défense, la lise, et, après ça, on va plaider.
Mais là, en le disant, là, on passe à la
prochaine étape très, très, très clairement. Je trouve ça intéressant. Voyez-vous,
vous donnez un exemple quant à la capacité, pour certaines personnes,
justement, d'orienter leur témoignage. Ça, c'est du <vécu. Ça, c'est
du...
M. Tanguay
: ...mais
là, en le disant, là, on passe à la prochaine étape très, très, très
clairement. Je trouve ça intéressant, voyez-vous, vous donnez un exemple quant
à la capacité pour certaines personnes, justement, d'orienter leur témoignage.
Ça, c'est du >vécu. Ça, c'est du tangible. Je sais que vous ne parlez
pas... On ne parle pas au nom de la magistrature, mais j'imagine aussi que les
juges, eux aussi, ils aiment ça voir la personne qui est devant... qu'ils ont à
déterminer… parce qu'avant que... On lit dans des jugements, parfois, que la
cour n'accorde aucune crédibilité au témoignage de monsieur ou de madame. Bien,
le ou la juge devra pouvoir aussi avoir la même préoccupation de juger puis de
regarder, comme on dit, dans le blanc des yeux aussi, j'imagine.
Mme Kirouack (Marie Christine) :
Il est certain que je vous dirais que, par rapport à ça, le témoignage par
vidéo est beaucoup plus problématique, là, en termes d'évaluation. Il y a
tout... Il n'y a pas juste ce que le témoin dit, là, il y a le comportement
physique, effectivement, du témoin, il y a le regard du témoin. Quand on évalue,
effectivement, la crédibilité d'un témoin, là, ce n'est pas juste, effectivement,
ce que le témoin va venir dire. Donc, c'est une difficulté qui est liée… y
compris, bien, est-ce que la personne est en train de se faire souffler les
réponses aux questions qui lui sont posées?
M. Tanguay
: Et, dans l'article 38,
on a eu une discussion avec la personne qui vous a précédée par rapport au Code
de procédure pénale avec l'article 38. «Lorsque l'intérêt de la justice le
requiert», c'était un élément que l'on retrouverait à l'article 38 du projet
de loi, qui viendrait modifier, dans le Code de procédure pénale, 2.2. On
ajoute le critère : «…lorsque l'intérêt de la justice le requiert». Peut-être
que le ministre pourra me détromper si j'ai tort, mais je ne retrouvais pas ce
critère-là dans 26, Code de procédure civile.
Alors, il y aurait peut-être lieu, si on
décide d'aller dans ce cas-là, bien, d'ajouter des balises, des critères pour
aider justement la cour à statuer, selon des critères objectifs, sur :
O.K., est-ce que, même si d'office je peux l'ordonner, <est-ce que
>j'ai tenu compte de ça, ça, ça, et notamment de la complexité d'un
dossier, du nombre de témoins et aussi peut-être du fait que les témoins
peuvent être éparpillés, là? Ça peut être un avantage si les témoins sont
éparpillés partout au Québec, par exemple. Alors, d'ajouter des critères, ça
pourrait au moins baliser ça. Je pense que vous serez d'accord avec cette...
Mme Kirouack (Marie Christine) :
Écoutez, l'autre difficulté, parce que, oui, j'ai tendance à être d'accord avec
vous… mais l'autre difficulté aussi, c'est que cet article-là... Mettons que,
demain, on prenait le virage, là, et que tout se faisait par vidéo, un, ça
tient pour acquis que tous les justiciables ont accès à Internet, tous les
justiciables ont accès à un ordinateur relativement confidentiel, et on semble
oublier qu'on a un taux d'analphabétisme important au Québec. Alors, il faut
faire attention de penser que tout le monde est capable, effectivement, de lire
d'une façon constructive et d'utiliser des moyens technologiques ou de les
avoir à sa ressource, que ça soit financièrement ou autrement, là. Et là on ne
parle pas des régions qui ont des connexions Internet où là… alors là,
particulièrement difficiles, là, en région éloignée.
M. Tanguay
: Et là,
voyez-vous, en vous écoutant, Me Kirouack, vous venez d'allumer une <lumière...
Mme Kirouack (Marie Christine) :
...moyens technologiques ou de les avoir à sa ressource, que ça soit
financièrement ou autrement, là. Et là on ne parle pas des régions qui ont des
connexions Internet où là, alors là, particulièrement difficiles, là, en région
éloignée.
M. Tanguay
: Et là,
voyez-vous, en vous écoutant, Me Kirouack, vous venez d'allumer une >lumière.
Serait-ce possible dans les cas où le procès est à huis clos? Est-ce qu'on
devrait l'exclure? Parce que je n'ai pas de garantie technologique, moi, que le
huis clos va être respecté.
Mme Kirouack (Marie Christine) :
C'est-à-dire que de ce que je comprends des échanges que j'ai eus, notamment
dans le cadre, c'est quoi, du comité de liaison avec la Cour d'appel, dont je
suis la présidente, il y a possibilité, effectivement, de tenir par vidéo des
auditions qui seraient à huis clos. Donc, ce n'est pas que tout le monde ne
peut pas accéder. On se comprend? Ça demande, sans aucun doute, une sécurité
accrue. Je sais qu'en Ontario, entre autres, pour avoir... le juge a la
possibilité d'éjecter quelqu'un, bon, il doit y avoir un terme plus élégant,
là, mais, tout à coup, faire : O.K., vous venez de sortir, vous vous en
allez dans une salle d'attente, là, je vous éjecte.
M. Tanguay
: Bien, je
suis content, parce que notre président cherchait ce moyen-là hier, justement,
lors des auditions, en ce qui me concerne, je vous rassure, mais aujourd'hui ça
va bien.
Alors, Me Kirouack, dernier point
avec le peu de temps qu'il me reste, cliniques juridiques, je vous entends
bien. Si d'aventure, cliniques juridiques, la confidentialité des dossiers, on
pouvait la garantir, l'assurance responsabilité des universités pour protéger
le public si, des fois, il y avait des fautes qui auraient été commises et, je
vous dirais, une formation de base sur les principes déontologiques d'un avocat
ou d'une avocate en devenir, si on était capables, là, d'avoir des garanties
très raisonnables de cela, je vous entends qu'on pourrait élargir puis
libéraliser un peu, non?
Mme Kirouack (Marie Christine) :
Non.
M. Tanguay
: Non?
Mme Kirouack (Marie-Christine) :
Par définition, quelqu'un qui n'a pas fini son baccalauréat, il n'a pas fini
son baccalauréat.
M. Tanguay
: Aïe! ça,
c'est mauvais dans un procès, hein?
Mme Kirouack (Marie Christine) :
Non, par définition, quelqu'un qui n'a pas fini son baccalauréat, il n'a pas
fini son baccalauréat. C'est une exigence minimale pour pouvoir se présenter,
n'est-ce pas, que ça soit à la Chambre des notaires, que ça soit, effectivement,
au Barreau.
J'avoue que je suis toujours un peu
sidérée qu'on me dise... Avez-vous une idée il y a combien de lois qui
s'appliquent dans un dossier en matière familiale? 40 quelque, facilement. Et
là on va dire à des étudiants de deuxième année : Bien oui, vas-y, vas-y.
Ça fait que tu vas te faire poser la question, par exemple : O.K.,
écoutez, là, est-ce qu'on peut partager les régimes de retraite, ça serait-u
une bonne idée que je laisse aller, parce que, tous les deux, on a fait le même
salaire toute notre vie? Oui, bien, attendez, là, c'est parce qu'il faudrait
voir la Loi sur les régimes complémentaires de retraite. Il faudrait voir si
c'est un régime à prestations déterminées, à contribution déterminée. C'est
comme une hydre à 39 têtes. Et là ce qu'on dit : Bien, l'étudiant,
n'est-ce pas, à l'université pourra aller répondre à cette hydre à
39 têtes. Je suis désolée, là, mais ça prend des qualifications minimales
pour donner des conseils juridiques. C'est la vie des gens qu'on affecte
directement. Notre position n'est pas corporatiste, là.
M. Tanguay
: Non, non,
je comprends.
• (16 h 30) •
Mme Kirouack (Marie Christine) :
Notre <position est vraiment...
>
16 h 30 (version révisée)
< Mme Kirouack (Marie Christine) :
...à l'université, pourra aller répondre à cette hydre à 39 têtes. Je suis
désolée, là, mais ça prend des qualifications minimales pour donner des conseils
juridiques. C'est la vie des gens qu'on affecte directement. Notre position n'est
pas corporatiste, là.
M. Tanguay
: Non,
non, je comprends.
Mme Kirouack (Marie Christine) :
Notre >position est vraiment, strictement en termes de protection.
M. Tanguay
: Je vous
comprends. Et certains sont venus dire : Donc, sur cette lancée-là, vous
ajoutez deux volets, certains types de dossiers, peut-être, ne s'y prêtent pas.
Certains sont venus dire : Bien, peut-être qu'on ne devrait pas permettre
ça pour tous les dossiers, dont, entre autres, ceux à haut risque en matière
pénale. Et ça amène aussi le volet de s'assurer qu'il y ait des avocats et
avocates d'expérience qui chapeautent, qui supervisent, qui aident. Ça, c'est
deux autres volets, deux autres défis qui sont devant nous.
Mais, Me Kirouack, je m'attendais à ce que
votre réponse ne soit pas tout simplement non. Ça a dû vous arriver... Ça m'a
fait penser… Vous savez, quand on est dans un procès, puis que vous pensez que
le témoin va vous dire oui puis ça va aider votre théorie de la cause, mais qu'il
vous dit non, là, il y a comme... vous êtes comme... Vous m'avez comme tiré le
tapis sous les pieds, mais je vous entends très, très bien, puis vous avez tout
à fait raison. On est en faveur, mais, si d'aventure le législateur va vers ça,
il va falloir un encadrement minimum sous ces cinq chapitres-là, là, entre
autres, là. Je vous remercie, Me Kirouack.
Le Président (M. Bachand) :
Merci beaucoup, M. le député de LaFontaine. Mme la députée de Joliette,
s'il vous plaît.
Mme
Hivon
: Oui,
bonjour, Me Kirouack. Merci beaucoup. J'ai un gros trois minutes, donc je vais
aller à l'essentiel.
D'abord, pour revenir à l'article 26
et l'utilisation des moyens technologiques, moi, je pense que le législateur ne
parle pas pour ne rien dire. Donc, s'il énumère davantage le type d'instance,
en parlant maintenant de gestion des instances et aussi de tenue des audiences,
j'imagine que c'est parce qu'il veut élargir la possibilité pour le juge
d'ordonner d'office la possibilité que ça se fasse de manière technologique.
Donc, je veux vraiment vous entendre concrètement. Est-ce que vous estimez que,
si c'est bien ça, l'intention du législateur, on devrait exclure les procès,
donc, les instances où il y a témoignage de cette possibilité-là de l'ordonner,
pas de le faire, bien sûr, mais que le juge puisse l'ordonner d'office?
Mme Kirouack (Marie Christine) :
C'est là où on met la frontière à cause de toutes sortes de... parce qu'à partir
du moment où il n'y a pas de témoin, là, prenons-le, le virage, O.K., et je pense
qu'on va tous être plus efficaces. À partir du moment où il y a des témoins,
les enjeux liés à l'évaluation, effectivement, des témoignages est très, très,
très problématique. Et, oui, on a des difficultés à ce que ça puisse être, je
vous dirais, ordonné de façon, là, contradictoire versus… Si, par exemple, on
sait qu'il va y avoir une preuve de 15 minutes très, très, très simple et
qu'il risque de ne pas avoir de contre-interrogatoire, c'est peut-être une
autre question, O.K., puis auquel cas, de toute façon, tout le monde va dire :
Ça va, c'est beau, on va le faire de cette façon-là.
Pour moi, c'est très différent,
effectivement, s'il est pour avoir des interrogatoires formels, des
contre-interrogatoires formels, y compris... Puis je ne veux pas me répéter,
là, mais je vois difficilement comment je <peux, tout à coup...
Mme Kirouack (Marie Christine) :
...question,
O.K., puis auquel cas,
de toute façon,
tout
le monde va dire : Ça va, c'est beau, on va le faire de cette façon-là.
Pour moi, c'est très différent,
effectivement,
s'il y est pour avoir des interrogatoires formels, des contre-interrogatoires
formels, y compris... Puis je ne veux pas me répéter, là, mais je vois
difficilement comment je >peux, tout à coup, tu sais, là, dire à un
témoin : Bien, minute, là, c'est parce qu'il y a un document ici, là, O.K.,
qui n'a pas été versé au dossier de la cour, parce que je n'ai pas à le verser
au dossier de la cour, parce que, tout à coup, ça sort des déclarations de la
partie, et je ne sais pas comment on fait ça par moyen technologique, là.
Mme
Hivon
: O.K.,
je vous entends bien. C'est très intéressant d'avoir le concret de votre
position. Je veux revenir aussi sur les cliniques juridiques. Puis vous avez
l'air quelqu'un de très affirmé. Donc, je vais vous poser la question. Si vous
être mal à l'aise, répondez-y pas, mais elle est en deux volets. Comment
expliquez-vous que le Barreau du Québec, qui est là, d'abord et avant tout,
pour la protection du public, se montre favorable, mais que les associations
d'avocats, la majorité soit défavorable? J'essaie de réconcilier ça. Vous
n'être pas obligée de répondre. Vous pouvez passer votre tour. Mais, si vous
avez un début d'explication, ça m'intéresserait. Puis, l'autre élément, vous
dites, vous, que ce n'est pas une mesure d'accessibilité à la justice. Je vous
entends bien. Est-ce que vous avez une proposition qui aiderait à
l'accessibilité à la justice?
Mme Kirouack (Marie Christine) :
Ah oui! Je pense que, oui, spontanément, là, on pourrait faire une réforme
encore plus en profondeur du Code de procédure civile. Et je ne parlerai pas
des autres domaines. Je vais juste parler en matière du droit de la famille,
là. Pourquoi est-ce qu'on a à faire trois, quatre, cinq, six formulaires de
fixation pour pouvoir, alors que… pour pouvoir fixer… alors qu'on sait qu'on va
être entendu six mois plus tard, puis qu'il n'est plus bon? Pourquoi est-ce
qu'on fait encore des attestations relatives aux naissances, parce que c'est
prévu, puis, de ce qu'on comprend, ce n'est plus envoyé au Directeur de l'état
civil? Pourquoi est-ce qu'il y a un 365 jours en matière familiale, alors
que, de toute façon, on sait que, si on n'est pas dans nos délais de 365 jours,
on va aller au tribunal et on va obtenir, de toute façon, une remise? On a une
obligation à ce que les parties tentent de se réconcilier quand on voit que c'est
là… Pourquoi il faut aller devant le tribunal pour faire suspendre?
Il y a eu de bonnes choses dans les deux
dernières réformes du Code de procédure civile, parce qu'à cause de mes cheveux
blancs… c'est la troisième, O.K., mais il y a eu des choses aussi... Écoutez,
le protocole d'instance, si c'est le contrat, effectivement, des parties, bien,
qu'on laisse les parties le gérer, y compris dans ces délais. Oui, il y a plein
de choses, effectivement... Si on arrêtait de faire en double, en triple et en quadruple
des procédures qui ne sont pas utiles, qui n'avancent pas le dossier, oui, ce
serait un gros virage d'accès à la justice.
Mme
Hivon
:
J'imagine que le ministre a pris des notes.
Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup.
Mme
Hivon
: Puis
vous êtes sauvée par la cloche pour l'autre question. Ça fait que merci
beaucoup.
Le Président (M. Bachand) :
Oui. Me Kirouack, on a parlé beaucoup de technologie. Je tiens à vous dire
qu'on est très contents que la technologie ait bien fonctionné cet après-midi,
parce qu'on vous a eue avec nous. Ça a été plus qu'intéressant. Alors, Me
Kirouack, encore une fois, merci beaucoup de votre participation aux travaux de
la commission.
Je suspends les travaux quelques instants.
Merci infiniment encore.
(Suspension de la séance à 16 h 36)
>
(Reprise à 16 h 38)
Le Président (M. Bachand) :À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux.
Alors, il nous fait plaisir d'accueillir
le représentant de l'association des étudiants et étudiantes en droit de
l'Université Laval… également que la représentante de l'association générale
étudiante du droit de l'Université de Sherbrooke. Alors, bienvenue avec nous.
Je ne sais pas si c'est Mme Tévis-Beauchamp ou M. Vachon qui va aller débuter,
mais on a une période… Vous avez une période de 10 minutes, après ça, une
période d'échange avec les membres de la commission. Alors, bienvenue, et je
vous cède la parole.
Association des étudiantes et étudiants en droit de
l'Université Laval (AED – Université Laval) et Association générale étudiante
de droit de l'Université de Sherbrooke (AGED)
(Visioconférence)
Mme Tévis-Beauchamp (Arianne) :
Parfait. Bien, M. le Président, M. le ministre, Mmes et MM. les députés, je
vous salue. Je me présente, Arianne Tévis-Beauchamp, présidente de
l'Association générale étudiante de droit de l'Université de Sherbrooke,
l'AGED.
Donc, durant ces <derniers...
Le Président (M.
Bachand) : ...une période d'échange avec les membres de la
commission.
Alors, bienvenue, et je vous cède la parole.
Mme Tévis-Beauchamp
(Arianne) : Parfait. Bien,
M. le Président,
M. le
ministre, Mmes et MM. les
députés, je vous salue. Je me présente,
Arianne Tévis-Beauchamp, présidente de l'Association générale étudiante de
droit de l'Université de Sherbrooke, l'AGED.
Donc, durant ces >derniers
jours, plus de 14 000 personnes
étudiantes provenant de nos 11 facultés ont appuyé le projet de loi
n° 75. De cet appui de l'AGED ainsi que de la Fédération étudiante de l'Université
de Sherbrooke, la FEUS, émerge la conviction commune qu'il est grand temps que
des mesures telles que mentionnées aux articles 2, 3, 51, 52 et 56 du
projet de loi n° 75 prennent place dans notre système de justice. La
communauté étudiante en droit est prête à apporter l'aide nécessaire pour
favoriser le désengorgement du système judiciaire en procurant des conseils
juridiques à des justiciables ayant un besoin de représentation.
• (16 h 40) •
M. le Président, pourquoi nous fermer les
yeux sur cette ressource inestimable et inexploitée? Les préoccupations d'accès
à la justice sont bien réelles. Les délais... d'un jugement sont excessifs, ce
temps d'attente ayant des conséquences graves, entraînant notamment des pertes
financières, des tensions conflictuelles, de l'anxiété et voire même des enjeux
procéduraux tels que la perte de preuves. Il est clair pour nous qu'un citoyen
mal informé ne peut se représenter de façon adéquate. Les éléments qu'il
récolte sans avis juridiques ont bien des chances de ne pas lui apporter
l'information pertinente afin qu'il prenne conscience de ses recours et de ses
droits.
Cette réalité s'applique au service d'aide
juridique, qui comporte ses propres lacunes. M. le Président, quel choix
s'offre à un justiciable qui ne coche pas tous les critères de l'admissibilité
de la loi et qui n'a pas les ressources monétaires suffisantes pour recevoir
les services d'une avocate ou d'un avocat? Notre communauté étudiante est
compétente et prête à combler ce vide.
Pourquoi des conseils ou des avis
juridiques peuvent être donnés sans problème dans des cliniques universitaires
par des personnes étudiantes dans d'autres provinces? Pourquoi le Québec, en
comparaison, notamment, avec la Colombie-Britannique, le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse
et l'Ontario, est la seule province à encore restreindre sa communauté
étudiante à divulguer de l'information juridique pure et dure? Nos étudiantes
et étudiants ont les compétences pour suivre cette mentalité pancanadienne.
Il faut… M. le Président, qu'à
l'Université de Sherbrooke nos programmes sont particulièrement axés sur la
pratique. Pour diverses raisons, et tous domaines confondus, nous avons choisi
notre université dans l'objectif de recevoir une formation professionnalisante.
Concrètement, au sein de la Faculté de
droit, ce sont 60,4 % des répondants, à leur dernier sondage, qui ont
mentionné l'approche d'enseignement basée sur la pratique comme étant sa
principale force. Également, il est clair autant pour les étudiantes et
étudiants que pour la faculté que nous devons continuer de miser sur une
approche d'enseignement mixte, avec une prédominance pour la pratique, afin de
conserver notre excellence.
M. le Président, vous comprendrez qu'il
est illogique pour nous qu'un étudiant se trouve dans l'obligation de refuser
des mandats au sein d'une activité clinique touchant de trop près le conseil
juridique même si chacun de ses actes sont supervisés par une personne
d'expérience. Pourquoi est-ce illogique, vous me direz? Parce qu'alors que cet
étudiant <se voit...
Mme Tévis-Beauchamp (Arianne) :
…de conserver notre excellence.
M. le Président, vous comprendrez qu'il
est logique pour nous qu'un étudiant se trouve dans
l'obligation de
refuser des mandats, au sein d'une activité clinique touchant de trop près le
conseil juridique,
même si chacun de ses actes sont supervisés par une
personne d'expérience. Pourquoi est-il logique, vous me direz? Parce qu'alors
que cet étudiant >se voit restreint dans sa pratique, son confrère
étudiant en comptabilité peut jouer avec des états de compte de plusieurs
millions de dollars et, de l'autre côté, son amie étudiante en médecine commence
déjà à sauver des vies. Vous m'excuserez de me répéter, mais pourquoi nous fermer
les yeux sur cette ressource inestimable et inexploitée que représentent les
personnes étudiantes en droit?
Donc, dans l'objectif incommensurable de
répondre à toutes ces interrogations et préoccupations de la part de nos
membres, l'AGED, appuyée par la FEUS, recommande fortement l'adoption des
articles 2, 3, 51, 52 et 56 du projet de loi n° 75, modifiant ainsi la Loi
sur le Barreau puis la Loi sur le notariat.
Je vous remercie pour votre écoute puis je
cède la parole à mon collègue.
Le Président (M. Bachand) :
Merci. M. Vachon.
M. Vachon (Philippe) :
Bonjour, M. le Président, M. le ministre, Mmes et MM. députés de l'Assemblée
nationale. Je me présente, Philippe Vachon, président de l'association des
étudiants et étudiantes en droit de l'Université Laval.
Ma collègue a très bien fait la lumière
sur les différents enjeux soulevés par l'état actuel du droit relativement à
l'accès à la justice. Les associations étudiantes de la province en droit civil
s'entendent sur l'apport du projet de loi aux problèmes d'accès à la justice au
Québec. Je profiterai donc de mon temps de tribune pour traiter brièvement de
l'apport du projet de loi n° 75 à la formation
universitaire des étudiants au baccalauréat en droit et pour répondre aux
différentes inquiétudes soulevées lors des consultations d'aujourd'hui et
d'hier.
D'une part, le fait de donner des conseils
juridiques permettra aux étudiants d'apprivoiser le contact client. Le contact
client, ce n'est pas quelque chose qui s'apprend sur les bancs d'école, bien
que ce soit un aspect central du travail de l'avocat ou du notaire.
D'autre part, en se limitant à ne donner
que de l'information juridique, les étudiants en droit passent à côté d'un
élément qui devrait pourtant être essentiel à leur parcours universitaire, soit
d'appliquer le droit directement aux faits, selon les circonstances du cas.
Finalement, il a été soulevé lors des
audiences antérieures que le fait, pour un étudiant, de fournir des
informations ou des conseils juridiques peut comporter certains risques. À
cette inquiétude, nous répondons que l'ouverture du droit de prodiguer des
conseils juridiques aux étudiants serait étroitement surveillée par les avocats
et les notaires, qui sont soumis à leurs obligations déontologiques, ainsi que
par la faculté de droit.
La formation pratique est très populaire
pour les étudiants en droit. Lors des années précédentes, à l'Université Laval,
environ 140 étudiants ont participé à l'une ou l'autre des différentes opportunités
de stage ou de formation pratique offertes par la faculté. À ce nombre
s'ajoutent plus de 80 bénévoles au Bureau d'information juridique de l'Université
Laval et près de 50 participants à des projets du Réseau national
d'étudiants pro bono, section Université Laval. Les 80 étudiants bénévoles
du Bureau d'information juridique traitent en partie des cas non seulement de
la région de Québec, mais aussi de l'Abitibi-Témiscamingue, de la Gaspésie, de
la Côte-Nord et plusieurs autres.
Pour toutes <ces raisons...
M. Vachon (Philippe) : …
projet
du Réseau national d'étudiants pro bono, section
Université Laval. Les
80 étudiants bénévoles du bureau de la convention juridique… traitent en
partie de cas non seulement de la région de
Québec, mais aussi de l'
Abitibi-Témiscamingue,
de la Gaspésie, de la
Côte-Nord, et plusieurs autres.
Pour toutes >ces raisons, nous
sommes en faveur de l'adoption du projet de loi n° 75, plus
particulièrement les articles 2, 3, 51, 52 et 56. Merci beaucoup, M. le
Président.
Le Président (M. Bachand) :
Merci à vous deux. Nous allons débuter la période d'échange avec le ministre, s'il
vous plaît. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Oui. Bonjour.
Merci beaucoup pour votre présentation aujourd'hui de la part des associations…
de l'association en droit des étudiants de Sherbrooke, l'AGED, ainsi que de l'Université
Laval.
Je comprends que vous nous invitez à
poursuivre avec les dispositions qu'on a dans le projet de loi. Je ne sais pas
si vous avez entendu les gens, cet après-midi, qui sont intervenus en lien avec
le projet de loi, beaucoup des associations d'avocats, qui nous disent :
C'est vraiment dangereux de confier à des étudiants en droit le fait de donner
des conseils et des avis juridiques sous la supervision d'un membre, là, en
règle du Barreau ou d'un membre en règle de la Chambre des notaires. Qu'est-ce
que vous répondez aux arguments que vous avez entendus cet après-midi?
M. Vachon (Philippe) : Je vais
prendre la parole, Arianne, en premier.
Donc, à ce niveau-là, personnellement,
j'ai écouté attentivement hier. Malheureusement, je n'ai pas pu écouter les
dernières consultations. J'ai seulement entendu les autres représentants des
associations étudiantes. Au niveau du danger, bien, il y a déjà des expériences
pratiques, comme je le disais, qui se donnent à l'Université Laval, par exemple
la clinique internationale de droit pénal et humanitaire. C'est sûr que c'est toujours
supervisé par des avocats, et, ça, ils le savent. Puis il y a quand même une
certaine formation, là, en déontologie puis il y a toujours une surveillance
étroite. Je pense que, personnellement… Je pense que... Nous pensons qu'il n'y
a pas de risque à ce niveau-là. C'est-à-dire qu'il y en a, mais la supervision
va s'assurer de limiter ce risque-là. Puis, oui, essentiellement, c'est ça, il
y a déjà du travail qui est fait par la faculté sur ce dossier-là.
Le Président (M. Bachand) :
Mme Tévis-Beauchamp.
Mme Tévis-Beauchamp (Arianne) :
Oui, je pourrais renchérir. Pour ma part, je vais y aller en deux temps pour
cette réponse.
D'une part, je crois que nos étudiants
sont compétents pour donner ce genre de service là aux justiciables. Ils ne
sont vraiment pas projetés dans le vide. Comme je l'ai écrit, là, à la
page 6 du mémoire de l'AGED, j'ai mentionné le fait que ces étudiants,
justement, dès la première année, vont avoir deux cours de recherche
documentaire et un cours de communication juridique, qui revient, en fait, à la
rédaction d'un avis juridique, donc, en plus des cours de droit, bon, qui leur
permettent d'acquérir plusieurs connaissances pratiques, ce qui fait en sorte
que, nos étudiants, ils sont prêts à aider la communauté et ils sont prêts à
rédiger des avis juridiques.
Puis, dans un deuxième temps, ce que
j'allais dire aussi, c'est que, les étudiants, non seulement ils sont compétents,
mais ils sont supervisés. En ce moment, on a la clinique juridique La Clé de
vos droits qui, bon, divulgue seulement de l'information juridique, mais,
malgré ça, c'est quand même supervisé par des professionnels du droit, et des
gens reconnus par le Barreau, et soumis aux mêmes <exigences…
Mme Tévis-Beauchamp (Arianne) :
...puis, dans un deuxième temps, ce que j'allais dire aussi, c'est que, les
étudiants, non seulement, ils sont compétents, mais ils sont supervisés. En ce
moment, on a la clinique juridique La Clé de vos droits qui, bon, divulgue
seulement de l'information juridique. Mais, malgré ça, c'est quand même
supervisé par des professionnels du droit et des gens reconnus par le Barreau
et soumis aux mêmes >exigences déontologiques, là.
Donc, je ne vois pas de problème de ce
côté-là. Puis, déjà, nos étudiants, étudiantes sont soumis à des obligations de
confidentialité dans les dossiers qu'ils traitent. Donc, de ce côté-là, j'ai
bien entendu les commentaires hier et aujourd'hui, mais je ne vois pas en quoi
les étudiants, étudiantes peuvent jouer un risque dans la protection du public,
là. Je crois que ça reste la priorité dans tous les cas.
M. Jolin-Barrette : La
Chambre des notaires nous invite à modifier un peu le libellé du projet de loi
pour dire que ça ne devrait pas être uniquement une clinique juridique universitaire
au sein de l'établissement, mais qu'on devrait dire : Sous la responsabilité
de l'université, de la clinique juridique universitaire. Donc, ça, ça ouvre la
porte un peu à offrir des cliniques dans le milieu communautaire ou sous la
responsabilité de l'université, mais qui ne sont pas nécessairement
intra-muros. Donc, qu'est-ce que vous pensez de cette proposition-là de la
Chambre des notaires?
M. Vachon (Philippe) :
Évidemment, on est en faveur. Toutes les associations, on s'est consultées à ce
sujet-là. Naturellement, le plus qu'on peut étendre le projet de loi, le plus
que ça va permettre un accès efficace à la justice pour l'ensemble des
justiciables, pas seulement, dans le fond, pour ceux qui sont dans les régions
où se trouvent les universités. J'ajouterais à ça aussi qu'une des façons de
pouvoir assurer ça aussi, ce serait de permettre, finalement, le plus de jeu
possible, ouvrir la loi pour permettre, finalement, un encadrement, plus de
flexibilité pour les facultés de droit pour pouvoir mettre sur place des
cliniques qui seront adaptées, finalement, à leur milieu et à leur réalité.
• (16 h 50) •
Mme Tévis-Beauchamp (Arianne) :
Oui, pour ma part, j'ajouterais que… Je crois que… Le fait qu'on soit en faveur
d'un élargissement par rapport à ce libellé-là… Il ne faut pas oublier... Moi,
je les vois comme trois principes fondamentaux, soit qu'il faut vraiment qu'il
y ait de l'encadrement, de la supervision puis du contrôle dans la mise en
place de ces cliniques juridiques universitaires là.
Donc, je crois que c'est le conseil des
doyens et des doyennes qui avait mentionné de peut-être se lancer, dans un
premier temps, avec un projet de loi qui s'étendrait seulement aux cliniques
juridiques universitaires puis qu'ensuite, si on voit que ça fonctionne bien,
ça pourrait s'étendre aux cliniques communautaires et autres, mais je suis dans
la même lignée de ce côté-là. Je crois qu'on aurait peut-être un premier pas à
faire, voir comment ça se passe dans nos universités, mais c'est certain qu'à
un moment, si on voit que, bon, les justiciables sont réceptifs à ce nouveau
projet là, bien, d'élargir ça non seulement aux cliniques communautaires, mais aussi,
pour notre part, peut-être aux activités cliniques qui sont offertes à nos
étudiants et étudiantes, et voire même aux projets pro bono qui permettent déjà
aux étudiants et étudiantes de conférer de l'information juridique aux
justiciables. Donc, peut-être qu'on pourrait aller un petit plus loin, là, en
ce sens-là.
M. Jolin-Barrette : O.K.
Donc, je comprends de votre message que vous seriez à l'aise <avec la...
Mme Tévis-Beauchamp (Arianne) :
...mais aussi, pour notre part,
peut-être aux activités cliniques qui sont
offertes à nos étudiants et étudiantes, et voire même aux projets pro bono qui
permettent déjà aux étudiants et étudiantes de conférer de l'
information
juridique... Donc,
peut-être qu'on pourrait aller un petit plus loin,
là, en ce sens-là.
M. Jolin-Barrette :
O.K. Donc, je comprends de votre message que vous seriez à l'aise >avec
la position des doyens des facultés de droit civil du Québec de dire :
Bien, écoutez, la première étape, c'est le libellé actuel, et donc on va
s'organiser dans nos cliniques juridiques universitaires, et, par la suite, on
pourrait réouvrir la loi par la suite pour, éventuellement, peut-être aller
vers le communautaire.
Mme Tévis-Beauchamp (Arianne) :
Oui, c'est exact, là, je crois... Je suis d'avis qu'on pourrait justement y
aller, dans un premier temps, avec cette façon de faire là puis ensuite voir à
l'élargissement en fonction de ce qu'on remarque dans les cliniques juridiques
universitaires.
M. Jolin-Barrette : O.K.
Relativement, là, au nombre de crédits nécessaires avant de pouvoir donner des
conseils ou des avis juridiques, il y a certaines associations étudiantes qui
nous ont dit : Bien, écoutez... Des étudiants de première année, je pense,
la présidente de l'association de l'UQAM, nous disait : Dès la première
session, dès la première année, on devrait pouvoir participer à ce genre de
clinique. D'autres nous disaient : Bien, écoutez... Comme la Chambre des
notaires nous disait : Peut-être 45 crédits, donc, après une année et
demie. Exemple, à Sherbrooke, en droit coopératif, avant de faire son stage, je
crois que ça prend trois sessions. C'est à la quatrième session, le stage coop.
Donc, comment vous entrevoyez ça?
M. Vachon (Philippe) : À l'Université
Laval, ça n'a jamais été une question vraiment soulevée par les étudiants, le
nombre de crédits nécessaires pour participer au stage. Donc, il faut savoir
que, comme je vous ai dit, il y a plusieurs programmes de stages qui existent
déjà, certains même à la magistrature. Dans des organismes communautaires, dans
les organismes gouvernementaux, c'est toujours 45 crédits qui est demandé,
et, 45 crédits, ça permet de pratiquement finir le tronc commun à l'Université
Laval, donc, de toucher à peu près à la base des grandes familles de droit.
Donc, après trois sessions, 45 crédits, on a une formation, somme toute, on
a entamé son apprentissage dans environ tous les domaines du droit. Puis, à
partir de là, je pense que c'est vraiment un moment qui, pour nous, en tout cas,
à l'AED, à l'Université Laval… de permettre, à partir de 45 crédits… On
voit ça d'un bon oeil, puis c'est ça. Merci beaucoup.
Mme Tévis-Beauchamp (Arianne) :
De notre côté, à Sherbrooke, je ne serais pas prête à mettre un permis fixe sur
le 45 crédits pour la simple et bonne raison que, comme je l'ai mentionné
un peu plus tôt, nos étudiants, étudiantes commencent déjà à acquérir des
compétences pratiques dès la première année, soit par l'entremise de cours de
recherche documentaire ou de communication juridique. Je n'irais pas jusqu'à
dire que, dès la première semaine de la première session, les étudiants ont le
minimum de bagage nécessaire pour pouvoir participer à des cliniques juridiques
universitaires où on pourrait conférer des avis juridiques, mais je crois que,
dès la deuxième année, nos étudiants, étudiantes pourraient apporter vraiment
des belles connaissances puis de la belle pratique, là, dans ces cliniques
juridiques universitaires là sans nécessairement mettre de balise de crédits.
M. Jolin-Barrette : Je vous
remercie pour votre présentation d'aujourd'hui. Je crois que j'ai des collègues
qui veulent vous <poser des questions, mais un...
Mme Tévis-Beauchamp (Arianne) :
…mais je crois que, dès la deuxième année, nos étudiants, étudiantes pourraient
apporter vraiment des belles connaissances puis de la belle pratique, là, dans
ces cliniques juridiques universitaires là sans nécessairement mettre de balise
de crédits.
M. Jolin-Barrette :
Je vous remercie pour votre présentation d'aujourd'hui. Je crois que j'ai des
collègues qui veulent vous >poser des questions, mais un grand merci
pour la qualité de vos interventions.
M.
Bachand
:
Merci, M. le ministre. Mme la députée de Les Plaines, s'il vous
plaît.
Mme Lecours (Les Plaines) :
Merci beaucoup, M. le Président. Mme Tévis-Beauchamp, M. Vachon,
bienvenue à la commission. Vous êtes vraiment dynamiques. On voit votre
engagement éventuel, actuel et éventuel également, et votre sérieux.
Écoutez, je veux juste... Je vais poser la
même question que j'ai posée à vos collègues des universités précédemment. Je
vais attirer votre attention sur le titre du projet de loi, je le relis : Loi
visant à améliorer l'accessibilité et l'efficacité de la justice, notamment
pour répondre à des conséquences de la pandémie. Ma question est bien simple.
Bon, actuellement, dans les cliniques universitaires, ce sont de l'information
qui… c'est de l'information qui se donne. Depuis, justement, le début de la
pandémie, qu'est-ce que vous avez constaté? Est-ce que les justiciables ont des
besoins plus grands, plus importants? Est-ce que le côté… tout le côté
technologique qui est prévu dans le projet de loi, parce que c'est deux choses,
là, est-ce que ça va effectivement aider? Et, par rapport aux besoins, est-ce
que ce projet de loi là répond justement aux attentes?
Mme Tévis-Beauchamp (Arianne) :
Je peux peut-être me lancer. De notre côté, c'est certain que ce que ça permet avec
la pandémie, bien, avec la formule à distance, ça permet d'aller rejoindre une
plus grande communauté puis aller rejoindre plus de justiciables, ça, c'est
certain, surtout qu'on est à Sherbrooke. Puis on l'a mentionné un peu plus tôt
dans les autres auditions avant nous, que, bon, les universités, les facultés
de droit sont placées dans des... On en a un petit peu plus en région, à
Sherbrooke, mais, par exemple, on en a trois à Montréal, on en a une à Québec,
et tout ça. Donc, ça ne va pas rejoindre nécessairement l'ensemble de la
population. Je crois que la pandémie, ce que ça apporte, c'est justement de se
soucier davantage de la technologie puis d'aller chercher des justiciables qui,
peut-être, n'auraient pas bénéficié de ces cliniques juridiques universitaires
là, mais qu'ils le peuvent maintenant à distance, au moyen de la technologie.
Mme Lecours (Les Plaines) :
Merci beaucoup. Je vais laisser la parole à mon collègue.
Le Président (M. Bachand) :Merci. M. le député de Chapleau, s'il vous plaît.
M. Lévesque (Chapleau) : Oui,
merci beaucoup, M. le Président. Bonjour, Mme Tévis-Beauchamp,
M. Vachon. Merci de votre présentation. Peut-être, d'entrée de jeu, j'aimerais
vous entendre, là, sur le fait que les étudiants puissent fournir des conseils
juridiques, en quoi ça pourrait améliorer la qualité de la formation des
étudiants en droit au Québec, si c'est le cas.
M. Vachon (Philippe) : Je vais
me permettre de répondre à cette question-là. La formation pratique, il faut
savoir que c'est quelque chose qui est nécessaire puis qui est vraiment
populaire, qui est très demandé aussi. Du moins, à l'Université Laval, c'est un
sujet qui est constamment sur la table, et on travaille étroitement avec la
faculté là-dessus. On essaie d'élargir, finalement, les options offertes pour
les étudiants. Comme je vous <disais plus…
M. Vachon (Philippe) :
...je vais me permettre de répondre à cette
question-là. La
formation
pratique,
il faut savoir que c'est
quelque chose qui est
nécessaire
puis qui est
vraiment populaire, qui est très demandée aussi, du moins,
à
l'Université Laval, c'est un sujet qui est constamment sur la table.
On travaille étroitement avec la faculté
là-dessus. On essaie d'élargir,
finalement, les options offertes pour les étudiants. Comme je vous >disais
plus tôt, il y a présentement une équipe de 80 bénévoles au Bureau d'information
juridique puis une cinquantaine à Pro bono. Quand on s'implique, on n'a aucun
gain, là, avec cette implication-là, mis à part l'expérience, finalement. Donc,
on n'a pas de crédits lors de ces expériences-là.
Présentement, le projet qui est proposé, bien,
ça a été aussi proposé par le Barreau, qui en a discuté plus largement, c'est que
cette formation-là puisse être créditée. Nous, on ne veut pas… On n'exige pas
que cette formation-là soit créditée. C'est sûr qu'on le voit d'un bon œil. Mais
il faut savoir que le besoin, finalement, le désir de ces étudiants-là est
clair. Chacun a ses raisons personnelles. Tous veulent avoir, finalement...
acquérir de la confiance avant d'entrer sur le marché du travail.
M. Lévesque (Chapleau) :
Parfait. Mme Tévis-Beauchamp?
Mme Tévis-Beauchamp (Arianne) :
Oui. En fait, de notre côté aussi, j'évaluerais à peut-être un ou deux... bien,
deux… un ou deux bénéfices, là, en ce sens-là.
Premièrement, le fait de pouvoir avoir
cette expérience-là, bien, c'est clair que ça permet une meilleure transition
des études vers le Barreau pour nos étudiants, étudiantes. C'est clair que
d'avoir eu la chance de mettre en pratique ces connaissances, ça fait en sorte
que, même dans un examen qui serait plus théorique, on est plus capables
d'aller chercher l'information juridique, surtout que, si je ne me trompe pas,
au Barreau, bon, on va plus se pencher sur des situations, des mises en situation
et des cas pratiques, ce qui nous permet vraiment d'associer la pratique qu'on
a faite pendant nos cliniques juridiques universitaires… à passer notre
Barreau. Donc, j'irais avec ce premier point là.
Puis, ensuite, je crois qu'en général le
fait d'avoir cette participation-là puis de pouvoir conférer des avis
juridiques et des conseils juridiques, ça permet d'avoir une formation en droit
qui est une formation professionnalisante complète, non seulement du niveau
pratique, du niveau académique. Je crois que ça permet d'enrichir cette
formation-là, mais aussi ça permet d'enrichir le bac sur la formation
citoyenne. Je m'explique, là. En fait, ça permet d'apporter une formation
citoyenne parce que nos... En fait, nos futurs juristes vont être des citoyens
plus responsables et empathiques envers leur communauté en ayant eu la chance de,
justement, avoir des contacts clients avec des personnes qui avaient besoin de
représentation pendant leur bac. Peut-être que c'est la seule fois qu'ils vont
avoir cette chance-là.
Donc, je crois que ça a plusieurs
avantages, là.
M. Lévesque (Chapleau) :
Excellent. Justement, sur l'expérience citoyenne, là, si on prenait la question
un peu de l'autre côté de la médaille, quels bénéfices il pourrait y avoir pour
la population? Vous avez dit tout à l'heure, là, que c'est une ressource qui peut
être inutilisée ou inexploitée, les étudiants. Peut-être, vous aimeriez
élaborer sur cela?
• (17 heures) •
Mme Tévis-Beauchamp (Arianne) :
Oui, sans problème. Je crois que ça peut bénéficier directement à la
population, parce que, comme... Je crois que ça a été un peu mentionné avant,
dans les autres auditions, mais on a une grande portion de population qui est
un peu prise, puis, comme je l'ai mentionné dans mon discours, qu'on a un peu
un vide à combler, dans le sens où est-ce que certaines personnes n'auront pas
la <possibilité d'avoir recours à l'aide juridique…
>
17 h (version révisée)
< Mme Tévis-Beauchamp (Arianne) :
...
crois que ça a été un peu mentionné avant, dans les autres auditions,
mais on a une grande portion de population qui est un peu prise puis qui...
comme je l'ai mentionné dans mon discours, qu'on a un peu un vide à combler
dans le sens où est-ce que certaines personnes n'auront pas la >possibilité
d'avoir recours à l'aide juridique, mais non plus le soutien financier pour
pouvoir avoir une consultation avec un avocat, une avocate, un notaire.
Donc, je crois que ça vient combler ce
vide-là parce que ça permet à quelqu'un qui a simplement besoin d'autant d'un
petit conseil avant d'aller en cour, autant quelqu'un qui a besoin d'un suivi
sur un dossier, d'avoir cette opportunité-là d'avoir des conseils juridiques
d'un étudiant, étudiante qui est encadré par un professionnel à faible... bien,
en fait, à faible coût, là.
M. Lévesque (Chapleau) :
M. Vachon.
M. Vachon (Philippe) : Oui,
bien, on parle... Moi personnellement, à l'Université Laval, on n'est pas la
plus grosse faculté, là, de droit, je représente 1 038 étudiants au
baccalauréat. Donc, vous comprenez que, quand vous me demandez quel est
l'apport, finalement, pour les justiciables, bien, si toutes les facultés de
droit, par exemple, ont un bureau ou une clinique juridique qui ouvre, qui
permet de donner des conseils juridiques, bien, c'est une armée, finalement,
d'étudiants qui vont avoir la possibilité de pouvoir donner des conseils
juridiques. Puis, naturellement, ça, par le nombre, c'est un apport clair, là,
d'une ressource pour les justiciables.
M. Lévesque (Chapleau) :
Excellent. Vous n'êtes pas sans savoir qu'il y a eu certaines réticences qui
ont été émises autant par le Barreau que des associations d'avocats en lien
avec la protection du public. Peut-être vous pourriez me parler rapidement, il
ne reste pas beaucoup de temps, là… mais des mesures mises en place, de la
supervision, des procédures actuelles dans vos cliniques juridiques respectives
et si vous avez des recommandations pour ce que ça devrait être pour la suite.
Merci.
M. Vachon (Philippe) : Bien,
tout d'abord, présentement, à l'Université Laval, je ne peux pas parler au nom
de tout le monde, mais, pour tous les programmes de stages, il y a déjà une
supervision stricte, sévère, minutieuse, finalement, du travail qui est fait
par les étudiants. Donc, c'est déjà le cas. Ça continuera d'être le cas avec le
programme de cliniques juridiques. Le Bureau d'information juridique est déjà
prêt à pouvoir se lancer à la recherche d'avocats comme ça. À l'Université
Laval, on parlait d'une ouverture prochaine, là, le plus tôt possible, d'une
clinique si le projet de loi était adopté.
Donc, ces risques-là, je comprends les
points de l'association... des différentes associations qui ont passé.
Naturellement, c'est quelque chose qui va falloir surveiller, mais je pense que
tous les acteurs, finalement, du milieu sont au courant puis vont mettre...
vont continuer, finalement, à appliquer les mêmes mesures strictes de
surveillance qui sont déjà présentes dans le cadre des autres opportunités de
stages.
Le Président (M. Bachand) :
Merci beaucoup. Je cède maintenant la parole au député de LaFontaine, s'il vous
plaît.
M. Tanguay
: Merci
beaucoup, M. le Président. Bien, à mon tour de vous saluer,
Mme Tévis-Beauchamp et M. Vachon. Merci beaucoup de prendre le temps
de venir parler du projet de loi sous l'aspect cliniques juridiques. J'ai pris,
donc, très bonne note des interventions que vous avez faites précédemment.
J'aimerais revenir sur la supervision.
Est-ce que... parce que, je pense, c'est vous, M. Vachon, qui avez dit… permettre
le contact client. Vous avez utilisé cette notion-là qui parle beaucoup. Puis c'est
vrai <que...
M. Tanguay
: ...des
interventions
que vous avez faites précédemment.
J'aimerais revenir sur la supervision.
Est-ce que... Parce que je pense, c'est vous, M. Vachon, qui avez dit :
Permettre le contact client. Vous avez utilisé cette notion-là qui parle
beaucoup. Puis c'est vrai >que, durant le bac en droit, c'est
exclusivement théorique. On n'a pas de pratique, sauf si, par ailleurs, on veut
aller donner de l'information dans des cliniques qui existent déjà, mais qui n'est
pas de l'ordre des conseils juridiques.
J'aimerais savoir… Au niveau de la
supervision, pouvez-vous étayer, vous, M. Vachon et
Mme Tévis-Beauchamp, sur les options qui pourraient être acceptables pour
vous quant à la supervision par professeurs qui ne seraient pas praticiens,
praticiennes? Est-ce que vous y voyez un avantage, inconvénient par,
exclusivement, donc, professeurs qui ne sont pas praticiens, praticiennes, par,
exclusivement, des praticiens avocats, avocates qui exercent le droit sur le
terrain ou autres? J'aimerais que vous étayiez un peu, là, votre vision par
rapport à ça.
Mme Tévis-Beauchamp (Arianne) :
Je peux me lancer. En fait, je crois que, déjà, actuellement, là, dans notre
clinique juridique, qui est La Clé de vos droits, on a déjà des professionnels
qui sont là, en fait, des praticiens qui sont là pour aider nos étudiants,
étudiantes, puis je crois que ça devrait continuer en ce sens-là aussi. En fait,
je crois que la façon la plus simple que ça peut se faire, c'est que, justement,
il ait une consultation, l'étudiant, avec le justiciable, mais, tout de suite
après la consultation, bien, que le praticien soit informé du dossier puis
puisse justement émettre ses avis puis superviser, encadrer l'étudiant,
l'étudiante dans sa recherche et dans son avis qu'il va devoir constituer.
Donc, je pense que ça se fait déjà très bien, là, dans nos cliniques juridiques,
au niveau de l'information juridique. Donc, je ne verrais pas pourquoi, là, ça
changerait vraiment beaucoup de choses si on y allait avec un avis juridique
qui est plus un conseil juridique.
M. Vachon (Philippe) :
Parfait. Pour ma part, je ne suis très pas sûr d'avoir compris la question,
parce qu'au début on parlait de contact client, puis, ensuite de ça, vous
parliez des avocats, puis des notaires praticiens, puis des professeurs. Dans
le fond, dans la clinique juridique, dans le projet qui serait proposé, c'est
sûr qu'il y aurait probablement les deux. Il y a beaucoup de professeurs à
l'Université Laval. Donc, ça pourrait répondre à une partie de la demande.
Mais, quand je parlais de contact client,
plus précisément, ce que je voulais dire, c'est qu'il y a une partie de
l'apprentissage, comme par exemple les professeurs, ou comme les docteurs, ou
comme les infirmiers... une partie de cet apprentissage-là se fait au contact
avec le client. On ne peut pas tout dire. On ne peut pas tout dire dans toutes
les circonstances. Puis je pense que le contact qui se ferait avec le
justiciable, finalement, qui serait permis par ce projet de loi là, bien, ça
permettrait à chacun des étudiants en droit de pouvoir faire une partie de son
chemin puis de faire son apprentissage à ce niveau-là.
M. Tanguay
:
Croyez-vous qu'il serait à ce moment-là aussi pertinent et important d'ouvrir
une discussion ou une formation minimale en termes de déontologie, le code de déontologie
des avocats et avocates? Parce que, là, on est en contact directement, justement,
contact client. J'aimerais vous entendre là-dessus, sur l'à-propos, même la
nécessité, d'avoir une formation préalable sur, bien, écoutez, si c'est au-delà
de vos capacités, vous devez le <déclarer...
M. Tanguay
: ...le
code
de déontologie des avocats et avocates? Parce que là on est en contact
directement, justement, contact client. J'aimerais vous entendre là-dessus, sur
l'à-propos, même la nécessité d'avoir une formation préalable sur : Bien,
écoutez, si c'est au-delà de vos capacités, vous devez le >déclarer et
conserver la confidentialité, on a en parlé avec d'autres personnes avant vous,
et ainsi de suite. Donc, déonto, préalablement à cela, ce serait une bonne
idée?
M. Vachon (Philippe) : Bien, les…
avec les cliniques juridiques, finalement, ça va être un gros chantier. Nous,
on parle de création d'un nouvel organisme, pas seulement... peut-être pas
seulement l'adaptation du Bureau d'information juridique. Comme je l'ai dit
plus tôt, il y a certaines cliniques juridiques qui existent déjà, qu'il y a
une formation à ce niveau-là. Présentement, il n'y en a pas dans le parcours
obligatoire à l'université. Il y a un cours... Il y a une possibilité de
pouvoir prendre ce cours-là à l'Université Laval, mais, en déontologie, ça se
fait plutôt au Barreau.
Ceci dit, si on met sur pied ce projet-là,
puis là, présentement, je m'avance, mais, naturellement, ce sera un projet mis
sur pied par la faculté, oui, il pourrait y avoir une formation, finalement,
offerte aux étudiants avant qu'ils puissent commencer à prodiguer des opinions
juridiques. Puis je pense aussi que les étudiants... Moi personnellement, en
tant qu'étudiant, ce serait vraiment rassurant de pouvoir avoir cette
formation-là. Je ne la trouverais pas de trop. Je l'accueillerais volontiers.
Mme Tévis-Beauchamp (Arianne) :
J'ajouterais aussi que, nous, dans notre clinique juridique, en ce moment, déjà,
les étudiants, étudiantes, ils peuvent mentionner s'ils ne sentent pas qu'ils
ont les capacités nécessaires pour remplir un dossier. Donc, déjà, il y a un
tri qui est fait, de ce côté-là, selon les compétences, selon les connaissances
de l'étudiant, l'étudiante qui prend en charge un dossier.
Puis, pour renchérir sur ce que mon
collègue dit, je crois qu'il y a vraiment plein de possibilités qui s'offrent à
nous, là, que ce soit de la création d'un cours à un crédit, qui pourrait être Initiation
à la déontologie. Ça pourrait être une petite formation que la clinique
juridique universitaire elle-même propose aux étudiants, étudiantes qui vont
participer à ces projets. Je crois que ça demande de la créativité, mais je
crois que ça serait très bien accueilli, là, par nos membres.
M. Tanguay
: Et,
justement, parlons de l'accueil de vos membres. J'allais précisément là-dessus.
Vous représentez, donc, les étudiants, étudiantes de l'Université de Sherbrooke
et de l'Université Laval. Quel serait le niveau d'engouement? Et, au-delà du
fait que... Je ne vais pas sur l'aspect obligatoire ou optionnel pour obtenir
des crédits, mais sur le principe de dire : Aïe! On va être en contact
avec du vrai monde, comme on dit. Puis on va pouvoir se mettre aussi ce
défi-là, parce que c'est un défi, d'aller s'asseoir dans un local face à un
justiciable. Il y a un stress qui est lié à ça. Comment pouvez-vous traduire,
témoigner de l'intérêt, sur le terrain, des étudiants, étudiantes à dire :
Oui, moi, j'aimerais ça, là? Est-ce que ce serait un engouement très largement
partagé?
M. Vachon (Philippe) : Oui,
bien, comme je le mentionnais plus tôt, il y a présentement 80 étudiants
au Bureau d'information juridique puis cinq pour les projets pro bono, sans
compter les autres projets un peu de la même nature. Il y a déjà un intérêt,
puis, à cet intérêt-là, même pas encore de cours crédité. Donc, vous comprenez
que, si cette formation-là qui... en plus des cinq cours de droit, pour la
plupart, qu'ils ont, qui est une lourde charge de travail, vous le savez
probablement, ils décident de s'investir dans un tel projet, si, en plus, il y
avait des <crédits, finalement...
M. Vachon (Philippe) : ...puis,
à cet intérêt-là... même pas encore de cours crédité. Donc, vous comprenez que,
si cette formation-là qui... en plus des cinq cours de droit, pour la plupart,
qu'ils ont, qui est une lourde charge de travail, vous le savez probablement,
ils décident de s'investir dans un tel projet, si en plus il y avait des >crédits,
finalement, je pense qu'il y aurait encore plus de demande de la part des
étudiants. Ceci dit, je ne veux pas qu'on interprète mes paroles actuellement
comme étant en faveur qu'une participation à ces cliniques juridiques là se
fasse... dans le fond, qu'il y ait comme conséquence trois crédits, là. Notre
but, c'est ça, c'est que ce soit le plus ouvert possible. Ceci dit, s'il y
avait possibilité de créditer cette participation-là, je pense que la
participation serait vraiment élevée.
• (17 h 10) •
Mme Tévis-Beauchamp (Arianne) :
Pour nous aussi, là, je crois que l'engouement serait vraiment partagé chez nos
membres, parce que, déjà, on le voit, là, on est réputés aussi pour notre
baccalauréat avec des stages coops à l'Université de Sherbrooke. C'est quelque
chose qui vient rejoindre beaucoup, beaucoup d'étudiants, étudiantes. Déjà,
aussi, pour le baccalauréat, qui est le cheminement général qu'on l'appelle, on
a aussi plusieurs activités cliniques qui viennent s'intégrer dans le parcours
universitaire. Puis on en demande toujours plus à chaque année parce que les
étudiants, étudiantes aiment participer à des activités pratiques qui leur
permettent vraiment d'être formés pour le Barreau puis pour leur pratique
future. Je crois vraiment qu'une grande portion de notre population étudiante
embarquerait dans le projet puis, vraiment, voudrait avoir ce contact-là
directement avec le justiciable pour pouvoir... Ça a un impact direct sur leur
pratique future, en fait.
M. Tanguay
: Tout à
fait. Puis, je veux dire, c'est valorisant aussi, hein? Je veux dire, c'est
valorisant. C'est pour ça qu'on étudie le droit, puis on veut donner la
meilleure réponse possible, puis on ne compte pas nos heures, puis c'est très,
très valorisant. Il faut être passionné du droit, hein? Je veux dire, il faut
travailler très, très fort pour y arriver et s'y maintenir.
Dernier élément, et puis je pense aussi
que cet enthousiasme-là pourrait être, le cas échéant, partagé sur un horaire
qui serait au-delà du calendrier scolaire, pourrait peut-être même permettre
des cliniques l'été et pourrait permettre également une couverture, je dirais,
un peu plus régionale, si d'aventure on pouvait avoir des moyens technologiques
pour recevoir des cas et donner des opinions juridiques à distance. Donc,
j'imagine, sous ces deux vocables-là, aussi, il y aurait une ouverture. Je
ferais copier-coller de votre enthousiasme à cette ouverture-là, n'est-ce pas?
Mme Tévis-Beauchamp (Arianne) :
Oui, exactement.
M. Tanguay
: D'accord.
Bien, merci beaucoup à vous deux, Mme Tévis-Beauchamp et M. Vachon. Merci.
Le Président (M. Bachand) :
Merci beaucoup, M. le député. Mme la députée de Joliette, s'il vous plaît.
Mme
Hivon
:
Bonjour. Merci beaucoup à vous deux pour votre présentation.
Je voulais bien comprendre votre
raisonnement quand vous dites qu'on devrait commencer en limitant les
consultations, donc, les avis juridiques, cette nouvelle ouverture aux
cliniques universitaires, et pas tout de suite aux cliniques communautaires.
Vous avez des collègues de d'autres universités qui avaient un point de vue
différent. Je veux juste, évidemment, porter à votre attention qu'on ne change
pas la loi à toutes les années. Donc, moi, je suis plutôt d'avis qu'on devrait
ouvrir parce que je ne pense pas que, même si on se rend compte que c'est très
concluant, <que >le ministre, dans six mois, va dire : Ah! on
redépose un projet de loi, avec tout ce que ça implique <quand...
Mme
Hivon
: ...je
veux juste, évidemment, porter à votre attention qu'on ne change pas la loi à
toutes les années. Donc, moi, je suis plutôt d'avis qu'on devrait ouvrir, parce
que je ne pense pas que, même si on se rend compte que c'est très concluant,
que le ministre, dans six mois, va dire : Ah! on redépose un projet de
loi, avec tout ce que ça implique >quand on veut faire cheminer un
projet de loi. Donc, je voulais juste comprendre vos réticences Pourquoi vous n'êtes
pas favorables, contrairement à d'autres de vos collègues?
Mme Tévis-Beauchamp (Arianne) :
En fait, pour ma part, ce n'est pas nécessairement une réticence, c'est tout
simplement que j'y allais d'un point de vue où est-ce qu'on disait que
peut-être que, justement, il allait y avoir un suivi qui allait être fait,
peut-être, dans un court laps de temps, comme l'an prochain, qui pourrait
permettre d'élargir encore plus le projet de loi. Si on nous dit que c'est
vraiment quelque chose qui va... qui est pour durer, c'est clair que je penche…
de votre avis qu'il faut qu'à un certain point ce soit élargi aux cliniques
communautaires, aux activités cliniques, comme je l'avais dit, ou peut-être
même pro bono, parce que c'est bien beau de le faire de façon universitaire,
mais je crois que, si, vraiment, on veut régler le problème d'accès à la
justice qui se développe en ce moment, il faut y aller à plus grande échelle,
là, puis ce ne sera pas seulement avec les cliniques juridiques universitaires
qu'on va régler le problème. J'y allais plus dans l'optique où est-ce que je me
disais que, si, vraiment, on veut y aller puis mettre quelque chose qui
fonctionne bien, avoir des bonnes bases, construites solides, bien, qu'ensuite
on pourrait ajouter par-dessus ça.
Mme
Hivon
: Je
comprends bien puis j'étais curieuse de savoir... parce qu'hier il y a l'avocat
des avocats de province… nous a dit : Bien, attention, vous savez, des
cliniques juridiques universitaires, évidemment, il n'y en a pas partout. Donc,
j'étais curieuse de savoir... Tantôt, vous y avez fait référence, ou votre
collègue, à savoir que vous avez des demandes qui proviennent d'autres régions.
J'étais curieuse de savoir si vous pouviez nous donner à peu près un aperçu de
la part des consultations que vous faites qui proviendraient d'autres régions.
Ça n'a pas besoin d'être scientifique, là, mais une espèce d'aperçu. C'est-tu
15 %, 10 %, 20 %?
M. Vachon (Philippe) : J'aurais
aimé pouvoir vous répondre, Mme la députée.
Mme
Hivon
: Ah!
répondez-moi sur l'autre point, O.K.
M. Vachon (Philippe) : Sur l'autre
point, bien, c'était sur le...
Mme
Hivon
: Ah
non! C'est correct, allez-y.
M. Vachon (Philippe) : O.K., parfait.
Bon, bien, je n'ai pas de données scientifiques, comme vous avez dit. Je sais
que c'est quelque chose de nouveau à l'Université Laval, que le Bureau d'information
juridique, avec son nouveau directeur, Jordan Mayer, qui a mis de l'avant... Il
a voulu profiter, finalement, de la situation pandémique pour étendre l'aire,
finalement, où est-ce qu'on peut offrir des services d'information juridique.
Donc, je suis désolé, je sais que c'est nouveau puis je n'ai pas l'information
précisément, mais sachez que ça a été mis sur pied pas de façon temporaire, là,
c'est... Évidemment, on vise de pouvoir étendre à l'avenir encore plus, au
niveau territorial, l'offre de services juridiques.
Mme
Hivon
: O.K.,
parfait.
Mme Tévis-Beauchamp (Arianne) :
...à ce que mon collègue vient de dire. Puis, pour notre part, il n'y a pas de
restriction, là. Quand on regarde sur le site de la clinique juridique, il n'y
a pas de restriction quant à quelles personnes sont admissibles ou non à nos
services juridiques. Donc, je crois qu'on est capables d'aller chercher
plusieurs personnes de différentes régions grâce à ça, mais je ne peux pas vous
sortir un chiffre exact.
Mme
Hivon
:
Merci beaucoup.
Le Président (M. Bachand) :
Alors, à mon tour de vous remercier <d'avoir...
Mme Tévis-Beauchamp (Arianne) :
...de la clinique juridique, il n'y a pas de restriction quant à quelles
personnes sont admissibles ou non à nos services juridiques. Donc, je crois qu'on
est capables d'aller chercher plusieurs personnes de différentes régions grâce
à ça, mais je ne peux pas vous sortir un chiffre exact.
Mme
Hivon
:
Merci beaucoup.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. Alors, à mon tour de vous remercier >d'avoir
participé aux travaux de la commission. C'est très, très, très apprécié. Et
puis je vous souhaite un super après-midi puis à très bientôt.
Mémoires déposés
Sur ce, je dépose les mémoires d'organismes
qui n'ont pas été entendus, soit l'association d'intervention en défense des
droits en santé mentale du Québec, les Cliniques juridiques communautaires et
le Jeune Barreau de Montréal.
La commission, ayant accompli son mandat,
ajourne ses travaux sine die. Merci beaucoup. Merci.
(Fin de la séance à 17 h 15)