(Huit heures une minute)
Mme Massé : Oui, bonjour, tout
le monde. Alors, on apprenait hier que le gouvernement de la CAQ a adopté un
nouvel arrêté ministériel qui met au pas les agences de placement. Bon, bien
sûr, ça fait depuis janvier que mon collègue Gabriel souffle à l'oreille de la
CAQ que ce serait essentiel de poser ce geste-là. Le gouvernement n'est pas
allé jusqu'au bout. Nous, on proposait que ce soient des contrats d'au minimum
un mois. Là, on se retrouve avec 14 jours.
Ça fait que c'est un pas dans la bonne
direction. Mais, ceci étant dit, que de temps perdu, que de temps perdu où le personnel
a continué à se déplacer d'un endroit à l'autre, a continué à supplanter les
femmes qui, elles, sont au front dans le réseau. Et elles se tapent encore aujourd'hui
le temps supplémentaire obligatoire.
Alors, c'est triste que ça ait pris du
temps, mais c'est comme une histoire qui se répète, hein? Le N95, on l'a dit
pendant des mois, ça aura pris la cour pour venir permettre aux femmes sur le
terrain de pouvoir se protéger. On l'a vu au niveau des aérosols. Ça fait que
ça semble être quelque chose qui revient souvent au niveau de la CAQ, c'est
prendre à moitié les idées des oppositions puis les amener très, très, très
tard dans le processus, qui fait en sorte que c'est malheureux.
Ceci étant dit, comment faire? Bien, on le
sait, comment faire. On le sait, comment faire pour s'assurer que les
travailleuses ne fuient pas les services publics, et ça s'appelle des
conventions collectives à la hauteur de la reconnaissance que nous avons par
rapport aux travailleuses et aux travailleurs de ces secteurs-là.
D'ailleurs, aujourd'hui, au Québec,
l'ensemble des syndicats ont appelé leurs membres à venir se faire entendre ici
même, devant le parlement, mais un peu partout, dans différents endroits au
Québec. Et, je pense, hier soir, on le sait, la ministre responsable du Conseil
du trésor rencontrait les grands syndicats.
Alors, on sait qu'on est à un moment
charnière. Mais aujourd'hui, là, moi, je rappelle au gouvernement et je
rappelle, disons, à l'ensemble de la population du Québec qu'ici on ne parle
pas des conditions de travail juste pour parler de conditions de travail, c'est
que ces femmes-là, parce que, dans les services publics, c'est très
majoritairement des femmes, sont au service de la population. C'est elles qui
nous rendent service. C'est elles qui sont là lorsque nos enfants vont à
l'école, au centre à la petite enfance. C'est elles qui sont là lorsqu'elles
ont besoin… nos enfants ont besoin d'accompagnement en orthophonie, peu
importe, en travail social, etc. C'est elles qui sont là dans nos hôpitaux, nos
CHSLD, la DPJ. Ce sont les femmes qui tiennent à bout de bras ce que nous, la
population, avons besoin pour mieux vivre, c'est-à-dire des bons services
publics.
Et c'est dans ce sens-là que j'espère, que
j'espère, que le gouvernement de la CAQ va faire un pas important dans le
rattrapage des conditions de travail de ces femmes-là. C'est à travers les
conventions collectives que ça se passe, c'est en négociation que ça se passe,
et j'espère que le gouvernement va le faire. Pourquoi? Bien, parce que, si la
CAQ n'avait pas encore compris que les services publics, ce n'est pas rien
qu'une dépense, c'est un investissement pour le bien commun, bien, je pense
que… j'espère, s'il n'a pas compris ça pendant le temps de la pandémie, je ne
sais pas qu'est-ce que ça va prendre de plus pour qu'il le comprenne.
M. Marissal : Bonjour. Merci
d'être là. Saga Fitzgibbon, épisode… J'ai perdu le compte, là, ça continue.
Encore une fois, ce matin, dans les médias de Québecor, on voit que M.
Fitzgibbon fait profiter à son entourage sa proximité avec le premier ministre.
Ce qu'on voit, en fait, ce matin, dans les
journaux de Québecor, dans les médias de Québecor, c'est précisément la raison
pour laquelle il y a un code d'éthique et c'est précisément la raison pour
laquelle la Commissaire à l'éthique demande à M. Fitzgibbon de s'y conformer.
Vous avez des actions dans une entreprise, c'est un de vos amis qui est à la
tête de l'entreprise, vous êtes en visite à Paris avec votre patron, qui est le
premier ministre, et vous faites… vous profitez de votre situation privilégiée
de membre du Conseil des ministres pour présenter vos chums de business au premier
ministre, tout en disant que : Non, non, non, il n'y a aucun conflit
d'intérêts, cette entreprise-là ne fait pas affaire avec le gouvernement. Or,
cette entreprise avait engagé un lobbyiste, et M. Fitzgibbon lui-même a
fait rencontrer le patron de White Star avec le premier ministre.
Alors, je ne sais pas qu'est-ce qu'on peut
avoir de définition plus claire d'apparence de conflit d'intérêts. Alors, ce
qu'on demande, là, pour la énième fois, et là je vais le demander au premier
ministre, parce que, de toute évidence, M. Fitzgibbon, ça lui passe
six pieds par-dessus la tête, je demande au premier ministre, là, de
retirer les fonctions de ministre à M. Fitzgibbon le temps qu'il se
conforme aux directives très claires de la commissaire à la déontologie et du code
de déontologie des membres de l'Assemblée nationale, parce que, de toute
évidence, il y a des allers-retours qui contreviennent parfaitement à ce code
de déontologie, et M. Fitzgibbon, plutôt que de se conformer, s'en prend
personnellement à l'institution qui est représentée par la Commissaire
à l'éthique.
Alors, je comprends que la meilleure
défense, c'est l'attaque, mais ça ne changera pas le fait qu'il est en
contravention et que, cette fois-ci, clairement, il a induit la commissaire en
erreur, parce que cette entreprise cherchait à faire des affaires avec le
premier ministre… avec le gouvernement, c'est-à-dire, et M. Fitzgibbon
était bien placé pour le savoir parce que c'est lui qui a organisé les
rencontres avec le bureau du premier ministre.
Alors, encore une fois, là, je pense que
je viens de vous dire la définition de ce qu'est une apparence de conflit
d'intérêts. Merci.
La Modératrice
: On va
prendre vos questions, une question, une sous-question, s'il vous plaît.
M. Laforest (Alain) : Pour
vous, est-ce que Pierre Fitzgibbon, actuellement, doit quitter la
politique? Il n'est pas capable de tout larguer puis de se conformer.
M. Marissal : Il doit quitter
ses fonctions de ministre le temps de mettre ses affaires en ordre, le temps de
recevoir une carte blanche, parce que, là, ça fait combien de cartons rouges
qu'il reçoit? Encore une autre enquête en cours. Visiblement, il n'a pas
compris qu'il est passé de l'autre côté, c'est-à-dire du côté de la politique,
et qu'il y a des règles en politique. Il nous avait dit : Vous savez, j'ai
beaucoup d'amis, là, habituez-vous, là, vous allez voir mes amis. Là,
M. Fitzgibbon prend ses amis par la main puis il les amène au bureau du
premier ministre. Ça ne va pas, là. On ne peut pas faire ça.
Je vous signale en plus que cette
entreprise, White Star, comme tant d'autres, fricote dans les paradis fiscaux.
Ça, ça ne dérange pas du tout M. Fitzgibbon. Il nous l'a dit assez
souvent. Mais cette île de Guernesey, ce n'est pas un pays, là, ce n'est pas
une province, c'est un coffre-fort. C'est un coffre-fort pour des entreprises
qui cachent du fric, puis ça, ça ne semble pas du tout déranger le ministre qui
est le responsable des relations du gouvernement avec les entreprises.
M. Laforest (Alain) : Pour
compléter, là, qu'est-ce qui a changé dans la façon de penser de François Legault
entre 2012 et 2021?
M. Marissal : Mais je ne
suis pas psychiatre. Je ne sais pas. Est-ce que c'est le pouvoir qui fait que, maintenant,
M. Legault pense que la fin justifie les moyens et que l'entreprise avant
tout le reste… C'est un gouvernement qui a un très, très gros préjugé favorable
envers la grande entreprise. Ça, on l'a vu à maintes reprises, ça, c'est très,
très clair. M. Legault est prêt, semble-t-il, à passer l'éponge sur tous
les manquements à l'éthique de son ministre. En tout cas, ça dénote une
arrogance de plus en plus évidente de ce gouvernement-là. Chez M. Fitzgibbon,
on l'avait vu, on l'avait compris, M. Fitzgibbon, à chaque fois qu'on lui
pose des questions, la seule chose qu'il nous répond, c'est qu'on ne comprend
rien. Moi, ce que je comprends, c'est qu'il est en parfaite contradiction, en
contravention avec le code de déontologie.
M. Bergeron (Patrice) :
Est-ce que ce n'est pas M. le premier ministre qui est, justement, ultimement
responsable? C'est lui qui l'a choisi pour le mettre là. C'est lui qui est allé
le chercher en politique. C'est son jugement qui est en cause.
M. Marissal : C'est non
seulement lui qui l'a choisi, c'est lui qui le protège en ce moment, alors ce
pour quoi je demande, nous demandons au premier ministre : Prenez M.
Fitzgibbon, sortez-le du Conseil des ministres, demandez-lui de mettre ses
affaires en ordre. M. Fitzgibbon l'a dit lui-même, et je le cite :
«Si jamais je deviens un embarras pour mon gouvernement puis pour le premier
ministre Legault, j'en prendrai acte et je quitterai.» Bien, clairement, c'est
devenu un embarras, alors qu'il en prenne acte. Les électeurs qui l'ont mis là
décideront, là. Il a été élu, là, il est député, mais il ne peut pas être
ministre. Il ne peut pas continuer d'être ministre responsable d'un énorme
budget à Investissement Québec, notamment avec les accointances qu'il a et
qu'on voit, là, étalées à la une des journaux.
M. Larin (Vincent) :
M. Marissal, dans ce cas-ci, c'est carrément M.Legault qui est impliqué.
Là, il y a une photo où est-ce qu'on le voit en compagnie du P.D.G. de White Star.
Est-ce que vous considérez que les conflits d'intérêts de M. Fitzgibbon
éclaboussent le premier ministre dans ce cas-ci, que l'éthique même de
François Legault peut être questionnée?
M. Marissal : L'éthique
personnelle de M. Legault, je n'ai aucune raison de croire qu'il a quoi
que ce soit à se reprocher. Là, M. Legault, ça fait quoi, ça fait
25 ans qu'il fait de la politique.
M. Larin (Vincent) : Là,
il prétend qu'il ne le savait pas. Vous croyez ça?
M. Marissal : Oui. Cela
dit, s'il ne le savait pas à l'époque, il le sait maintenant, et il le savait
avant les photos de ce matin. Alors, il aurait pu prendre la décision qui
s'impose et respecter l'autorité de la Commissaire à l'éthique.
M. Legault a fait son lit, là, il a décidé de protéger son ministre. Tirez-en la conclusion que vous voulez. Il ne semble pas
penser que c'est grave d'être en apparence de conflit d'intérêts quand on est
un ministre plénipotentiaire comme peut l'être M. Fitzgibbon.
M. Larin (Vincent) : Puis,
dans ce cas-ci, ça pose encore une fois la question de qu'est-ce que le premier
ministre sait ou ne sait pas lorsqu'il recrute un candidat, parce que,
visiblement, dans ce cas-ci, François Legault n'était pas au courant du fait
que M. Fitzgibbon était investisseur, là, dans le fonds White Star quand
il l'a présenté, le P.D.G. Bref, ça, ça pose encore la question, êtes-vous
d'accord?
M. Marissal : C'est clair que
M. Legault ne peut pas savoir tout de tous ses candidats avant les
élections. Mais, une fois qu'ils sont élus, qu'ils ont prêté serment, ils
doivent se plier au code d'éthique. M. Legault nous dit : Non, c'est
le code d'éthique qui n'est pas correct. Jusqu'où il va aller pour tordre ce
code d'éthique qui est très, très clair et qui s'applique à tout le monde? Alors,
ce que je sais, c'est que, là, lui, il sait que M. Fitzgibbon a ce genre
de lien professionnel, et personnel, et financier avec certaines entreprises.
Ça a été écrit noir sur blanc dans un rapport de la Commissaire à l'éthique. Ça
se lit comme un roman, d'ailleurs, c'est très, très clair.
M. Laforest (Alain) : ...
M. Marissal : Excusez-moi, je
ne vous entends pas.
M. Laforest (Alain) : Est-ce
qu'il n'a pas appliqué le principe de précaution en 2019?
M. Marissal : Il n'applique
pas en ce moment le code de déontologie. Ça ne peut pas être plus clair que ça.
Il y a un code de déontologie. Nous sommes devant un cas patent d'apparence de
conflit d'intérêts. Vous savez, on n'engage pas un lobbyiste pour la beauté de
la chose, là. On engage un lobbyiste pour faire des affaires avec le
gouvernement. À moins de vouloir payer un séjour dans le Vieux-Québec à un
lobbyiste, là, on engage un lobbyiste pour qu'il fasse son travail de lobby
auprès du gouvernement. Cette entreprise avait des visées sur des contrats avec
le gouvernement. On ne peut pas être plus clairs dans... Puis je suis poli, là,
je dis «apparence de conflit d'intérêts», mais il y a apparence de conflit
d'intérêts, ici, très claire.
M. Larin (Vincent) : Juste une
dernière précision. Mais, si M. Fitzgibbon se conforme au code d'éthique,
vous n'avez pas de problème à ce qu'il siège à titre de ministère de
l'Économie?
M. Marissal : Bien, la
question pour le moment est purement théorique parce qu'il refuse
systématiquement de s'y conformer. Et non seulement il ne s'y conforme pas,
mais il attaque personnellement la Commissaire à l'éthique.
C'est un multirécidiviste du manquement au code de déontologie,
M. Fitzgibbon. Alors, moi, je lui dis, là, une chose à la fois :
Dehors du Conseil des ministres, là, va régler tes affaires, puis après ça on
verra… puis ce n'est pas moi qui le verrai, c'est la Commissaire
à l'éthique qui verra s'il se conforme ou non. En ce moment, j'en suis
plus à la précaution de sortir M. Fitzgibbon de ses fonctions que de le
réintégrer éventuellement.
Mme Massé : J'aimerais
compléter là-dessus. En fait, là, il faut commencer à mettre le focus du côté
de M. Legault. C'est M. Legault qui est le boss de Pierre Fitzgibbon.
C'est M. Legault qui le couve sous son aile depuis des semaines, depuis
des mois. C'est là qu'il faut regarder. C'est à lui qu'il faut poser les questions.
Et c'est pourquoi qu'on dit : Bien, écoutez, le strict minimum, c'est de
tasser cet homme-là du Conseil des ministres. Il a, actuellement, là, une
grosse apparence de conflit d'intérêts, s'il te plaît, fais ça comme geste
minimum.
Puis, après ça, M. Legault, regardez
vos électeurs, là, puis dites-leur pourquoi, pendant des mois, vous avez laissé
ce gars-là là, qu'il semble y avoir un deux poids, deux mesures face à d'autres
députés, d'autres ministres, face au secteur public, face... C'est comme si
c'est correct quand c'est le monde des grandes entreprises, le monde des
grandes affaires, le monde des affaires de l'économie privée, mais, quand c'est
l'économie publique, par exemple, ça, c'est des gros lobbys de syndicats
méchants. Deux poids, deux mesures. Ça fait que, je pense, c'est vers M. Legault
qu'il faut tourner la caméra.
M. Laforest (Alain) : Vous
étiez là, vous, en 2012, assise pas très loin, là. C'est quoi qui a changé?
Mme Massé : Bien, écoutez,
sinon qu'il était dans l'opposition et maintenant il est rendu de l'autre bord,
mais, à mon sens, il n'y a pas grand-chose qui a changé. Sa vision de l'économie
demeure la même.
M. Laforest (Alain) : Oui,
mais il déchirait sa chemise pour l'éthique, là…
Mme Massé : Vous lui poserez
la question. Je ne sais pas qu'est-ce qui s'est passé entre les deux.
M. Laforest (Alain) : Non,
mais vous, là, vous l'avez vu, là, et aujourd'hui vous le voyez, est-ce que
c'est la même personne?
Mme Massé : Oui, c'est la même
personne, mais qui n'est pas assise dans le même siège. Et le code d'éthique,
ce n'est pas quelque chose qu'on transforme, qu'on bonifie, qu'on change en
fonction de qui est assis dans les sièges du gouvernement. Le code d'éthique,
c'est un outil fondamental notamment pour redonner la confiance à la
population. Ça fait que c'est pour ça que c'est encore plus dérangeant, ce qui
se passe présentement, et que c'est vers le premier ministre qu'il faut mettre
la pression.
La Modératrice
: Une
dernière question en français.
M. Bergeron (Patrice) :
Est-ce que l'opinion publique est toujours prête à passer l'éponge? Parce que
le gouvernement et le premier ministre demeurent avec une bonne cote de
popularité. Est-ce que, donc, les affaires de Thouin, de M. Fitzgibbon,
les gens sont capables d'accepter ça parce qu'il y a un lien avec le
gouvernement, il y a une proximité, ils sentent le contact avec le premier
ministre? Je ne sais pas, là, expliquez ça.
Mme Massé : Moi, il y a une
chose qui est claire, là, c'est que la population, lorsqu'elle a voté pour François
Legault puis son équipe, là, je suis certaine qu'ils n'ont pas voté pour un gouvernement
qui répète exactement les façons de faire des gouvernements précédents. Je suis
certaine qu'ils n'ont pas fait ça, c'est clair.
Alors, qu'en est-il aujourd'hui? Qu'en
sera-t-il en 2022? On le verra. Aujourd'hui, ce qui est essentiel, c'est que M.
Fitzgibbon, avec ce qu'il, une fois de plus, nous a appris dans l'espace public,
bien, pas lui, parce que je pense qu'il aurait aimé ça qu'on ne le sache pas
trop… bien, je pense qu'il faut que le Québec sache, oui, que le premier
ministre, jusqu'à aujourd'hui, protège encore cet homme-là, et
qu'officiellement Québec solidaire lui dit, là : Tassez-le de son siège,
ça urge.
La Modératrice
: Une
dernière question en français? Est-ce qu'il y a des questions en anglais? Merci
beaucoup. Bon matin.
(Fin à 8 h 19)