(Huit heures trente-neuf minutes)
Mme Massé : Bonjour, tout le
monde. La deuxième vague, dans cette pandémie, a quelque chose de particulier.
Le gouvernement fait des choix, et il fait
des choix de déconfinement, et il fait des choix de confinement. C'est sûr
qu'on a mis en place… Le gouvernement du Québec a mis en place, je dirais, un
vaste déconfinement de l'économie, alors qu'il a gardé à la maison ce qu'on
pourrait parler de confinement social. C'est sûr que le vaste confinement de
l'économie nous fait voir aujourd'hui des choses terribles, et je pense
notamment à ce qui se passe à Olymel, où 80 personnes sont infectées dans
l'usine où les travailleurs avaient lancé des signaux, où un homme est décédé. Alors,
ça, c'est comme des choix qui ont été faits dans le cadre de la deuxième vague.
Ceci étant dit, derrière les portes closes
de nos maisons, de nos résidences, il y a aussi un drame qui se trame. Un
adulte sur cinq a des symptômes d'anxiété et de dépression. Un adulte sur cinq.
46 % des jeunes 18-29 montréalais ont les mêmes symptômes. Ça aussi, c'est
un drame. Ça aussi, c'est important. La santé mentale du peuple québécois ne va
pas bien du tout.
Alors, c'est sûr qu'aujourd'hui moi, je me
demande : Bien, coudon, la Santé publique, là, le gouvernement du Québec,
là, ils ont-u tenu compte de ces données-là dans la balance de leurs décisions?
Est-ce qu'ils ont tenu compte du fait que le confinement social allait avoir
des impacts importants, majeurs? Maintenant qu'ils le savent, est-ce qu'ils ont
prévu des actions pour nous assurer que nos jeunes, mais, de façon générale, la
population, puissent retrouver un équilibre au niveau de leur santé mentale?
Il me semble que... pas il me semble,
j'aimerais entendre le premier ministre, qu'il nous dise : Oui, on est
conscients de ça, on est en train de chercher des solutions, on est en train...
Et je veux que les Québécois et Québécoises savent que je veux l'entendre, son
plan. Je veux l'entendre, son plan parce qu'entre vous et moi, actuellement,
là, au Québec, on est vraiment en train de se magasiner un burn-out collectif
important, puis ça, bien, ça a des coûts, peut-être pas à court terme si vous
n'êtes pas une de ces personnes-là, mais à moyen terme et à long terme, pour
l'ensemble du peuple québécois, oui.
Puis je vous rappelle une dernière chose, c'est
que, quand tu es en dépression, quand tu vis de façon anxieuse, vous en
connaissez tous et toutes, des gens qui ont ces impacts, bien, c'est que ce
n'est pas juste toi que ça touche, ton conjoint, tes enfants, autour de toi, ta
famille. Et donc c'est des impacts collatéraux importants. Et moi, je m'attends
à ce que le gouvernement, la Santé publique nous arrivent avec des pistes de
solution parce que je trouve ça effarant, les chiffres que je lis.
M. Bergeron (Patrice) : Mme
Massé, si vous posez la question : Est-ce que la Santé publique a tenu en
compte les enjeux de santé mentale, c'est que vous doutez que ça soit entré
dans l'équation des décisions qui sont prises actuellement, que, carrément, la
direction nationale de la santé publique n'a pas tenu compte de la santé
mentale des gens avant de reconfiner ou, en tout cas, de prendre des mesures de
resserrement, là?
Mme Massé : Écoutez, vous le
savez, là, on n'a pas accès à ces données-là. J'aimerais vraiment pouvoir vous
répondre. On n'a pas accès à ça. Mais là ce à quoi on a accès, c'est des
chiffres qui nous disent qu'un adulte sur cinq vit des problèmes, graves
problèmes, d'anxiété et de dépression, et 46 %, des jeunes.
M. Bergeron (Patrice) : Mais la
question, c'est que vous en doutez?
Mme Massé : Bien, je pose la question
parce qu'on est rendus à cette étape où le gouvernement a choisi de laisser les
gens au travail. Le gouvernement a choisi de laisser les enfants à l'école au
nom de leur santé mentale, d'ailleurs.
Une voix
: ...
Mme Massé : Attendez un petit
peu, monsieur. Ce déconfinement-là, les choix qui ont été faits, le
déconfinement économique dans lequel on vit des expériences comme à Olymel, ils
ont mis des choses dans la balance… Alors, est-ce que la santé mentale, les
impacts sur le fait que tu ne peux plus aller dans… Comme jeune adulte, bien,
tu ne peux plus aller à l'école, université, cégep. Derrière ton écran… Si tu
n'es pas à l'école, tu ne peux plus... tu as perdu ta job parce que tu
travaillais en restauration, ou dans un musée, ou dans un cinéma, etc. Oui, je
pose la question. Je n'ai pas ce data.
M. Laforest (Alain) : Est-ce
que ça passe par la réouverture des restaurants, comme ils le réclament ce
matin? Est-ce que ça, ça pourrait aider?
Mme Massé : Bien, ce qu'on
voit, là, c'est que les lieux où les jeunes 18-29 travaillent, se retrouvent généralement
pour socialiser, ces lieux-là sont restés fermés longtemps au printemps et ils
sont encore confinés pour le moment. Alors, moi, je pense que ce qu'il faut, c'est
qu'il faut inventer des façons… Puis, à ma connaissance, les restaurants ne
sont pas des lieux où les éclosions sont venues en force. Alors, on est
capables d'ouvrir ces lieux-là de façon sécuritaire.
Mais moi, je souligne la question des
choix qui sont faits derrière ça. On a un impact chez la santé mentale de notre
population. Elle est documentée présentement. Il faut chercher, il faut
innover. Ces jeunes-là, là, ils sortent de l'école. Ils ne peuvent pas se
trouver une job. On est en pandémie. Ils avaient une job, bien, ils la perdent
parce que souvent c'est des job de tiers secteurs, et c'est le milieu qui a été
confiné. Alors, soyons créatifs. Moi, je pense qu'on est capables. Soyons
créatifs parce qu'il faut s'occuper de ça.
Mme Lévesque (Fanny) : Mais
ouvrir les restaurants, donc, ça veut dire encourager la socialisation,
reprendre la socialisation. C'est ce que le gouvernement ne veut pas qu'on ait en
ce moment parce qu'on est en rouge foncé, là.
Mme Massé : Écoutez, c'est
pour ça que je vous parle de choix, là. Le choix de faire en sorte que des
lieux de socialisation sont fermés amène des problèmes de santé mentale
majeurs. Alors, pourquoi choisir de garder Olymel ouvert, alors qu'on sait, par
exemple, ce matin, que proximité, contagion... On le sait, là, c'est quoi, près
de la moitié des situations de transmission de COVID, c'est les lieux de
travail. Alors donc, ces choix-là, ils sont faits quand même, et ils les ont
faits. Nous devons considérer aussi la santé mentale des jeunes dans cette
équation-là.
Mme Gamache (Valérie) : Mme
Massé, avez-vous regardé ce matin la situation dans les CHSLD, notamment les
équipes SWAT qui ont été envoyées? Est-ce que vous en arrivez à la conclusion
qu'on n'était pas prêts de faire face à cette deuxième vague là, finalement?
Mme Massé : Moi, je vous avoue
que ce matin, là, le sentiment qui m'habite, c'est la peur. J'ai peur parce que
ce que je vois depuis quelques jours, particulièrement ce matin, j'ai
l'impression de rejouer dans le film du printemps.
Alors, on a amené une multitude de
solutions. Il y en a une, une qu'on ne parle pas assez souvent, pourtant le premier
ministre s'était engagé, là… c'est la question des conditions de travail de ce
monde-là. Il manque de monde. Bien oui, bien oui, il manque de monde. Pourquoi?
C'est des professions qui n'ont pas été valorisées, depuis plusieurs années,
sous les libéraux, sous les caquistes. Et là, tout d'un coup, ils s'attendent à
ce que ces gens-là fassent des miracles, fassent comme dans le temps du
missionnariat et soient des missionnaires de la santé. Je vous rappelle, c'est beaucoup
des femmes, là, hein? Le travail gratuit, on connaît ça, nous autres. Alors,
moi, ça me fait peur. C'est ça, le sentiment qui m'habite quand je regarde ce
qui se passe dans nos CHSLD.
M. Larin (Vincent) :
Mme Massé, en tant que nouvelle porte-parole de la région de Québec, quels
sont vos impressions par rapport… On apprenait ce matin que l'étude, là,
commandée par le MTQ, concernant le retrait du trambus du projet du tramway,
tarde à arriver. Quelles sont vos inquiétudes par rapport à ça, possible
dépassement de coût?
Mme Massé : Bien, ce que
je peux vous dire, c'est que, quand je regarde ce qui se passe par rapport au
projet structurant à Québec, le tramway, d'une main, je vois un gouvernement
qui semble extrêmement frileux, depuis le début, d'ailleurs. Le sentiment, c'est
qu'il travaille à retarder ce projet-là. Il l'a même dit, il est prêt à le
retarder pour l'arrimer avec le troisième lien, qui est un projet purement
fictif, ce même gouvernement, qui dit, d'une autre main : On va mettre sur
pied un projet de loi n° 66 pour accélérer des infrastructures.
Pour moi, il y a une incohérence là. M. Legault, M. Bonnardel doivent
absolument permettre au projet de tramway de commencer parce qu'il y a des
étapes qu'ils peuvent faire avant la construction. Vous le savez comme moi, c'est
long, là. Et donc de commencer pour les appels de propositions, ça urge. Ça
aurait pu être fait depuis le mois de septembre, de mémoire. On est encore en
retardement. Je ne comprends pas. C'est une incohérence complète.
M. Carabin (François) :
Les universités et les cégeps, Mme Massé, est-ce que c'est la priorité numéro un dans les réouvertures? Vous avez parlé de lieux de
socialisation pour les jeunes. L'université, le cégep, ça peut en être un?
Mme Massé : Je pense que…
Bien, ce n'est pas la majorité des jeunes qui sont à l'université ou au cégep.
O.K., mais je pense que c'est des lieux importants. Je pense que, pour les gens
qui étudient, surtout les gens qui arrivent au cégep, cet isolement devant
l'écran n'est pas sain. À preuve, les chiffres sont là. Mais je pense qu'il
faut être plus créatif que ça. Il faut pousser plus loin.
Par exemple, bien sûr, il n'y a personne
qui veut réouvrir en disant : Il n'y a pas de mesures de distanciation. Il
faut maintenir toutes les mesures que la Santé publique nous enseigne,
avec le port du masque, la distanciation et le lavage des mains. Mais, par
exemple, est-ce que, conscients de la réalité dont on est conscients maintenant,
que les jeunes souffrent énormément au niveau de la santé mentale, on peut
imaginer… L'hiver s'en vient, là. On peut-u imaginer, je ne sais pas, moi,
l'ouverture des terrasses chauffées? Ça se vit, ça, ailleurs, dans d'autres
pays nordiques. Est-ce qu'on peut — je lance des idées, là — réquisitionner,
mettons, des grands centres pour permettre des rencontres de façon sécuritaire?
Je ne sais pas, moi, sous-sols d'églises,
centres communautaires, «name it», soyons créatifs. Il faut s'occuper de la
santé mentale de nos jeunes, et ça passe par briser l'isolement. Je pense, c'est
ça, les messages qu'on envoie aujourd'hui.
Mme Gamache (Valérie) :
Mme Massé, il y a un collectif de Québec solidaire antiraciste qui se
dissocie de votre position dans l'histoire de cette professeure de l'université
d'Ottawa… vous demande, donc, de changer d'opinion. Qu'est-ce que vous allez
faire avec ça? Est-ce que vous allez tenter de rassembler les troupes ou il va
y avoir vraiment une dissension au sein du parti sur la question?
Mme Massé : Bien, écoutez, pas
plus tard qu'hier soir j'étais en discussion avec un autre comité de nos
membres. Le collectif antiraciste, c'est un certain nombre de nos membres, et
il y a en d'autres, aussi, personnes racisées auprès de Québec solidaire. Vous
savez comme moi que ces débats-là font... C'est des débats de société qui
traversent l'ensemble de la société. Ils traversent donc notre parti. Et ma
discussion hier avec un comité antiraciste de Québec solidaire était à l'effet
que... réitérer profondément que ce... Il faut se rappeler, là, ces mots-là
sont une façon d'insulter, de mépriser les personnes racisées, et ça, c'est
inacceptable. Et, ce matin, je voyais que le recteur de l'université tentait de
calmer le jeu. Bien, je pense qu'il était temps qu'il se mette à calmer le jeu
parce que ce n'est pas la façon de faire ce genre de débat là.
Et donc, par conséquent, moi, il n'est absolument
pas question de changer de position puisqu'à l'heure où on se parle plusieurs
membres de Québec solidaire sont complètement d'avis que, tout en étant
inacceptable, la liberté d'enseignement est aussi importante, et qu'il faut
prendre ces mots-là avec douceur, et il faut reconnaître ce que vivent les
personnes racisées. Et je pense que même ces gens-là qui ne sont pas tout à
fait d'accord avec la position sont d'accord de... La chose à faire, c'est de
reconnaître la charge sur ces mots-là.
La Modératrice
: On va
passer en anglais.
Mme Senay
(Cathy) : Good morning.
Mme Massé :
Good morning. Can you... Yes, thank you.
Mme Senay (Cathy) : How do you react, to learn that there are now SWAT teams in CHSLDs
to make sure that health care workers are wearing the protective equipment or
making sure that everything is now in order? What's your first reaction when we
need that help again in CHSLDs?
Mme Massé :
It makes me very worried. You know, it seems, for me, that we play in the same
film that we had played in in the spring. And let's talk about the equipment.
You know, yesterday, my «collègue» Gabriel Nadeau-Dubois proposed that the Government have a table... I don't have the right way to say it
in...
Mme Senay
(Cathy) : …a committee.
Mme Massé : Yes, exactly.
Mme Senay
(Cathy) : Yes, with health care workers'
unions on the field.
Mme Massé : …at the same table of the ones who take the decision, and this
is... You know, if we had... If
the «gouvernement» has this
kind of table, this kind of situation won't happen again.
Mme Fletcher (Raquel) : Can I ask you about what's been going on in question period last week? The Premier
was... Do you hear me?
Mme Massé : Yes, please.
Mme
Fletcher (Raquel) : Sorry. About what's been going on
in question period, last week,
the premier got very, we'll say, excited about some of your questions. You know,
yesterday, they... Well, I won't qualify, I'll let you qualify the tone of...
How would you classify the tone of the responses that you're getting to your
questions? And do you feel like you're getting good responses?
Mme Massé :
It's funny that, when we talk about the responsibility of the Government in the
first wave, when we talk about the conditions of the women who work at the
bottom of the health care system, I don't know why the Premier used this kind
of tone because I was talking about very serious things. Maybe, in my life,
what I learned, it's: when you put your finger on the right spot, it makes
people not very funny.
Mme Fletcher
(Raquel) : Merci.
La Modératrice
:
Bonne journée.
(Fin à 8 h 56)