(Douze heures seize minutes)
M. Marissal : Merci.
Bonjour. Bien, d'abord, je suis ici pour vous parler du rapport de la Vérificatrice
générale, évidemment, qui nous a appris, encore une fois, ce matin quelques
horreurs qui ont toujours cours dans l'appareil de l'État, des choses dont on
parle pourtant depuis très longtemps.
Mais avant, je ne peux pas m'empêcher de
dire un mot sur la rémunération indécente des grands dirigeants de la Caisse de
dépôt. Encore une fois, on a appris ça hier dans le rapport annuel de la Caisse
de dépôt et placement du Québec. C'est quelque chose qui a cours depuis trop longtemps,
puis on se rend compte qu'au lieu de fléchir cette courbe à la hausse, au
contraire, le nouveau P.D.G., M. Émond, ne se prive pas de gratifications
salariales, même en temps de crise. Je vous dirais qu'il paraît que la COVID-19
peut affecter l'odorat, mais, de toute évidence, ça n'affecte pas l'appétit
gargantuesque de certains dirigeants d'entreprise qui sont payés, rappelons-le,
avec des fonds publics.
Alors, il n'est pas trop tard pour bien
faire. On est dans une relance pour probablement quelque temps, mois, années. Alors,
j'en appelle à M. Émond, qui ne m'a toujours pas répondu, d'ailleurs, à ma
lettre ouverte d'il y a quelques jours. J'en appelle à son sens de l'éthique et
du bien commun pour revoir le modèle et la hauteur de la rémunération à la Caisse
de dépôt.
Alors, parlons de la Vérificatrice générale.
Il y a beaucoup à dire, évidemment, sur le rapport de la Vérificatrice générale.
Comme d'habitude, je vais me concentrer sur trois points, rapidement.
D'abord, le manque d'expertise criant et
chronique au ministère des Transports du Québec. Je dis «chronique», parce que
la Vérificatrice générale nous a rappelé que déjà, en 2011, donc ça fait
neuf ans, il y avait un premier rapport qui était sorti et qui faisait
état de la dégradation de l'expertise interne au ministère des Transports. On
se rend compte aujourd'hui que c'est encore pire qu'avant. Beaucoup trop de
contrats représentant des centaines de milliers de dollars... des centaines de
millions de dollars, pardon, sont soit sous-évalués, soit surévalués. Non, on
ne peut pas faire la moyenne des deux pour arriver à un meilleur chiffre, c'est
ce que la Vérificatrice générale a rappelé aux gens du ministère des Transports.
C'est très inquiétant. C'est très inquiétant, surtout qu'on sait qu'on se
dirige vers une accélération des grands chantiers publics et des grands travaux
d'infrastructures. Alors, si on n'a pas l'expertise à l'interne, il y a
évidemment un nouveau risque de dérapage et qu'on retombe, évidemment, dans les
travers qui ont malheureusement marqué le Québec au fer rouge.
Un autre chapitre, ma foi, troublant sur
le laxisme de certaines organisations gouvernementales et non les moindres, je
parle, par exemple, de la RAMQ ou de Retraite Québec, quant à la protection des
données personnelles, ça aussi, c'est très inquiétant. Si vous avez frémi en
lisant les histoires de Desjardins, vous ne vous sentirez pas beaucoup mieux en
lisant les histoires sur la RAMQ. Il semblerait que, notamment à la RAMQ, on ne
juge pas nécessaire de bloquer l'accès aux fichiers informatiques aux employés
qui quittent ou qui sont remerciés. Alors, dans 44 % des cas, ça prend
plus de 10 jours. Ça, c'est un peu comme si vous mettiez un post sur
Facebook en donnant votre adresse, en disant que la clé est cachée telle place,
puis quant à elle, vous pourriez aussi laisser votre code de système d'alarme.
C'est à peu près ça qu'on fait à la RAMQ.
Inutile de dire qu'il s'agit de données hypersensibles, qui ont une valeur sur
le marché, pensez notamment au marché des assurances, si vous êtes capables de
mettre la main sur le dossier de santé des individus. Alors, la Vérificatrice
générale a frappé fort là-dessus en demandant qu'on s'amende et qu'on se gouverne
selon les bonnes pratiques et rapidement.
Et rapidement, pour terminer, un chapitre
qui est très peu réjouissant, aussi, sur la dégradation, la détérioration et le
peu d'intérêt du gouvernement pour le patrimoine, patrimoine bâti, mais les
sites aussi, mais surtout le patrimoine bâti. Bien, on apprend essentiellement,
dans ce chapitre de la Vérificatrice générale, que le gouvernement n'a pas
vraiment d'idée du parc de son patrimoine bâti, que certains monuments
historiques, comme la basilique Notre-Dame à Montréal, ne sont toujours pas
classés, que d'autres le sont, mais ils sont bafoués.
La Vérificatrice générale, et je termine
là-dessus, nous dit notamment qu'il y a certains ministères qui font des
travaux sur leurs édifices en sachant ou en ne sachant pas qu'ils sont classés
patrimoniaux et sans d'abord vérifier et obtenir les autorisations nécessaires
auprès du ministère de la Culture et des Communications. Alors, là aussi, il y
a un important coup de barre à donner. Le règne des pics et démolisseurs n'est
pas près de finir, malheureusement, au Québec. Il serait temps, vraiment temps
qu'on se souvienne du patrimoine bâti au Québec. Merci.
Mme Crête (Mylène) :
Qu'est-ce que vous pensez de la performance de la ministre Nathalie Roy dans le
dossier du patrimoine, là, à la lumière de ce qu'on apprend aujourd'hui?
M. Marissal : Bien, la
dernière fois qu'on l'a entendue parler de ça, c'était un autre geste timide de
la part de la ministre Roy qui, essentiellement, disait aux MRC : On va
vous donner un petit budget, si vous voulez engager une personne ou deux pour
faire l'inventaire de votre patrimoine bâti. C'est largement insuffisant, ça va
de soi. Les MRC n'ont pas d'expertise là-dedans, peut-être pas non plus assez d'intérêt,
et puis l'exemple vient de haut puisque le gouvernement lui-même n'en a pas d'intérêt.
Le patrimoine bâti, c'est une
responsabilité nationale. C'est notre patrimoine national. Alors, il serait
plus que temps, je le répète, de un, qu'on soit capable d'avoir un inventaire
parce que, pour le moment, on a un inventaire incomplet, on ne le sait pas trop
ce qui est patrimonial, ce qui ne l'est pas; et qu'on fasse respecter les
règlements aussi, notamment avant de faire des rénovations sur un gouvernement
qui est occupé par le gouvernement ou qui appartient au gouvernement. Est-ce qu'on
pourrait minimalement faire une petite recherche, s'assurer que les rénovations
soient faites en respect du patrimoine?
Alors, je sais qu'il y a beaucoup de
marrons au feu en ce moment, là, à cause de la pandémie puis de la relance,
mais ce n'est pas une raison pour continuer de regarder notre patrimoine bâti
s'écrouler sous les pics. Il y a urgence, là. Sans mauvais jeu de mots, il y a
péril en la demeure ici.
Mme Crête (Mylène) :
Je sais que c'est un avant-midi chargé, je ne sais pas si vous avez eu le temps
de consulter le projet de loi du ministre Christian Dubé. J'aurais aimé avoir
vos premiers commentaires là-dessus.
M. Marissal : Oui. Bien,
évidemment, sans grande surprise, je ne l'ai pas épluché dans le menu détail.
On a quand même fait une analyse préliminaire. Nous aurons un briefing ce soir
à 17 heures. C'est important parce que c'est un projet de loi...
À première vue, là, ce que je peux dire, c'est
qu'il ratisse large, très large. On a offert notre collaboration. Évidemment,
elle tient toujours. Nous allons proposer des groupes et des individus, parce
que ça ratisse très, très large. Je prends, par exemple... on parle d'état
d'urgence, de normes environnementales et de contrôles environnementaux, de
contrats publics, d'expropriation, de droits de contestation et j'en passe. C'est
quand même un très, très gros morceau qui se présente sous l'urgence de
relancer l'économie. Nous en sommes, sauf qu'à chaque fois qu'un gouvernement
va de l'avant avec des projets de loi d'exception, c'est le gouvernement qui a
le fardeau de la preuve, de démontrer que nous devions, nous devrions, nous
devons aller de l'avant.
Alors, on offre notre collaboration, mais
on a évidemment beaucoup de questions. Est-ce qu'on n'ouvre pas trop large? Est-ce
qu'on ne met pas trop de choses dans ce projet-là? Je crois bien que, de ce que
j'ai entendu ce matin, le gouvernement est ouvert aussi à collaborer avec nous.
Mme Crête (Mylène) :
Est-ce que ça vous apparaît possible d'adopter un projet de loi aussi
volumineux en une semaine et demie?
M. Marissal : Vous savez, ici,
hein, ce qu'on dit à l'Assemblée nationale, qu'avec le consentement on peut
tout faire. C'est vrai que c'est un gros morceau à avaler en peu de temps, mais
avec la bonne collaboration de tout le monde, il reste du temps, on est
capable. On l'a démontré, là, on est capable de travailler même en mode
virtuel. On veut entendre certaines personnes. La liste sera soumise. Je pense
que c'est possible de le faire avec beaucoup de bonne volonté de la part de
tout le monde. Nous avons offert de collaborer en bonne volonté.
Mme Crête (Mylène) :
Merci.
M. Marissal : De rien.
M. Pouliot
(Samuel) : Can you just summarize your
statement in English about, well, first, the Caisse de
dépôt, Charles Émond, and then about the Auditor
General's report.
M. Marissal : OK, sure. First of all, about la Caisse de
dépôt, I was somehow not surprised, but still horrified
to see the salary and the bonuses for the new CEO of the Caisse de dépôt, Charles Émond, and high
ranking officers of the Caisse de dépôt. It seems that it's always more of the same. And no matter what, no
matter the pandemic, no matter the rough times for everybody, some people at
the highest level of our organizations, governmental organizations, are still
not getting the fact that they should discipline themselves and give themselves
the right salary but stop this explosion of salary. This is true for the Caisse de dépôt, and I'm calling on
Mr. Émond to do the right thing and to correct the scale of his
remuneration.
About the Auditor
General, three points, briefly. Ministère des
Transports du Québec, Transportation Québec, again and again we are seeing, and this is the first conclusion of
the Auditor General, that we are still lacking expertise at
Transportation Québec, and
this is an old problem that is going on. The first report on this is almost
10 years-old. So the Auditor General is calling on the MTQ to correct the situation, and it's really important and urgent, I should say, because we're entering a phase of new big
public contracts in Québec.
Second of all, the second
thing, personal data. This is really, really troubling also to learn in this
report that some of the biggest public organizations and departments in Québec, namely the RAMQ, for example, or
Retraite Québec are not paying
attention and are not serious enough about the control of the information on personal data. Specifically,
one case that is in the report is that apparently, at the RAMQ, people who are
fired, who are quitting still can have access to personal data, so to the main
computers of the RAMQ and, in many cases, they still can access for the next
10 days and more after they are gone. This is totally inacceptable, and
the Auditor General rightly so
is asking for a big change in this kind of... procedure, sorry.
And the last but not
least, we're not paying attention, in Québec, about our «patrimoine bâti», our patrimonial constructions. This
is something that has been going on for too long as well, and the Auditor General is asking the Government to correct that situation as well. Thank
you.
M. Pouliot
(Samuel) : And, after seeing the data breach
at Desjardins, do you think the Government is vulnerable for that kind of incident too?
M. Marissal : Yes. Well, it's a basic step in every organization,
if you fire someone or if someone is quitting your organization, to take back
his access to your computers. I mean, that's just common sense. So yes, of
course, the Government and, in this case, the RAMQ and Retraite Québec are
putting our personal data at risk. This is totally
inacceptable. The day, the hour after someone is leaving your organization, you should cut any access for this person to your
personal data system.
La Modératrice
:
Merci.
(Fin à 12 h 30)