(Huit heures quatre minutes)
Mme Melançon : Merci beaucoup.
Alors, bonjour, tout le monde. Heureuse de vous retrouver ce matin. Alors,
comme vous le savez, la COVID-19 a chamboulé nos vies dans les derniers mois.
Depuis la mi-mars, le Québec est sur pause, et on a perdu des êtres chers, on
soigne nos malades actuellement, et les gens sont en confinement, toujours, en
tout cas, à Montréal, bien qu'on commence à ouvrir tranquillement. Je dois vous
dire qu'à Verdun c'est extrêmement difficile, je veux vous le dire, on est
encore en zone rouge, on perd beaucoup de gens.
Et, pendant le confinement, j'ai fait de
nombreux appels, et j'ai constaté à quel point les gens, durant le confinement,
ont consommé beaucoup de culture. La culture a fait partie de la vie des
Québécois et des Québécoises lors des derniers mois. Tout le monde a écouté une
série, un film, un livre, hein, on a lu plus que jamais, dans certains cas. On
a aussi regardé... virtuellement, là, on a visité des musées. Bref, la culture
a fait partie de nos vies, et c'est tant mieux. Mais, malheureusement, la
culture aujourd'hui est encore le grand oublié du gouvernement du Québec. Et
pour preuve, il y a une lettre, avec 250 artistes, qui a été publiée,
c'est Pour les arts vivants. Cette lettre-là a été signée par 250 personnes,
dont des personnes que vous connaissez très bien, par exemple, Guylaine
Tremblay, par exemple, Julie Le Breton, on pense à M. Lepage. Bref, vous
irez trouver la liste de ces personnes qui ont signé cette lettre. Et il y a
14 000 signataires en date d'aujourd'hui. Ça a été mis hier, là, sur
le site... sur Facebook. Il y a 14 000 signataires actuellement qui
ont signé la pétition.
Vous savez, les artistes qui ont signé ça,
ils ne demandent pas de l'argent au gouvernement, ils demandent d'être entendus
par la ministre de la Culture, ils veulent être écoutés. Moi, ce qui me trouble
dans tout ça, c'est que les artistes ont été les premiers à avoir cessé leurs activités
et ils vont sûrement être les derniers à reprendre le boulot. Et comme vous le
savez, c'est difficile actuellement, il y a la PCU qui va terminer en juillet
pour eux. Il n'y a pas de plan.
Les artistes ont été fâchés du point de
presse qui a eu lieu vendredi le 22 mai. Un vendredi après-midi, sans la
présence du premier ministre, la ministre a assisté, participé à un point de
presse avec la santé publique. Puis dans le fond, là, la santé publique, ils
ont déconfiné les cinéparcs, cinq cinéparcs. Et je n'ai rien contre les
cinéparcs, là, j'ai des enfants, je vais au cinéparc. Ils ont aussi déconfiné
les musées puis les studios d'enregistrement. Ça, ce n'est pas une annonce, ce
n'est pas un plan pour la culture. Donc, les artistes sont fâchés parce que la
ministre avait elle-même créé en disant qu'elle avait de grandes annonces pour
le milieu culturel, puis finalement, bien, on a vu ce qu'on a vu vendredi le
22.
Je veux aussi que les diffuseurs, RIDEAU,
le ROSEQ pour l'Est-du-Québec sont aussi fâchés actuellement. C'est difficile
de faire une programmation. Vous savez que ça prend plus qu'un an faire une
programmation dans les théâtres. Bien, là, actuellement, ils ne savent pas à
quoi s'en tenir. Ils ont énormément de pression. Puis pour préparer un
spectacle, là, pour les mois à venir, bien, ça prend aussi des mois de
préparation.
Donc, aujourd'hui, ce que je souhaite, c'est
que la ministre enfin puisse entendre le milieu, veuille rencontrer les
signataires de cette lettre-là pour pouvoir faire un vrai plan parce qu'elle
doit prendre la main tendue. Moi, j'ai tendu la main à plusieurs reprises dans...
les derniers mois, pardonnez-moi, j'ai tendu la main. Ils tendent la main, et
honnêtement, aujourd'hui, je pense qu'elle doit prendre l'aide. Elle a besoin
d'aide, la ministre, et c'est qu'ils proposent. Alors, j'espère qu'elle va
accepter de rencontrer les gens du milieu.
M. Laforest (Alain) :
Mme Melançon, comment on fait pour rentrer 60 personnes dans une
salle de 80 en situation de COVID actuellement pour faire des spectacles? Parce
que c'est beau de dire, oui, ils sont oubliés, mais le problème, c'est la
proximité. Est-ce qu'on peut faire des spectacles à deux mètres dans une petite
salle?
Mme Melançon : Bien, c'est
encore en rencontrant les gens qu'on va avoir ces réponses-là. Une chose est
sûre, M. Laforest, c'est que, dans une proposition que RIDEAU a faite, ils
ne demandent pas nécessairement de dire : On veut ouvrir aujourd'hui les
théâtres et les salles de diffusion, ce n'est pas ce qu'ils demandent, c'est de
dire : Est-ce qu'on peut justement avoir, comme on l'a fait pour les festivals.
Les festivals savent que, jusqu'au 31 août, il n'y a pas de festivals.
Alors là, ça donne du temps justement d'arrêter les productions, de pouvoir
voir venir. Vous savez, si on a envie d'aller voir Mariana Mazza au théâtre de
Saint-Jérôme, bien, souvent on va acheter nos billets un an à l'avance parce
que les programmations, c'est comme ça que ça fonctionne. Là, actuellement, non
seulement ils perdent de l'argent chaque jour, mais en plus, ils ne sont pas
capables de prévoir, de prédire. Au moins, s'ils avaient des dates, en disant :
On arrête jusqu'au 31 août, puis, par la suite, là, on va commencer à voir
venir. Déjà, ce serait une annonce pour eux.
M. Pilon-Larose (Hugo) : Mais
ça semble, excusez-moi, ça semble déjà assez clair, là, que jusqu'au
31 août, il ne se passera rien, là. S'il n'y a pas de festival, il n'y
aura pas de spectacle. En fait, vous dites que la ministre a besoin d'aide,
mais franchement, qu'est-ce qu'elle peut faire? Je veux dire, personne ici,
dans cette salle, on ne sait ce qui va se passer avec la pandémie au cours des
prochaines semaines, des prochains mois. Donc réellement, là, qu'est-ce que c'est
qu'elle peut faire?
Mme Melançon : Bien, actuellement,
là, les diffuseurs disent l'inverse de ce que vous me dites. Parce que tant et
aussi longtemps qu'ils n'auront pas un moment d'arrêt, ils ont des contrats
liant des artistes actuellement. Alors, ce n'est pas aussi simple que vous le
prétendez. Elle a besoin d'aide, oui, parce que les gens veulent dire à la
ministre : Voici ce que nous, là, on peut proposer actuellement. La
ministre ne cesse de dire qu'elle rencontre les artisans, les artistes, qu'il y
a des tables. Moi, hier, là, on m'a raconté que chaque rencontre, il y a 35 ou
45 personnes autour d'une table par visioconférence ou par téléphone, là,
puis que les gens ont deux minutes et demie pour parler. Pensez-vous vraiment
qu'on peut entendre les problématiques du milieu en deux minutes et demie? La
réponse est non.
Mme Crête (Mylène) :
Bien, ça prendrait quoi, comme plan, à ce moment-là? Vous dites qu'ils ne
demandent pas d'argent, mais ça va en revenir à ça éventuellement.
Mme Melançon : Bien,
probablement qu'il va y avoir, bien sûr, une demande financière à un moment
donné, mais ils n'en sont pas là. Ils veulent être entendus, ils veulent être
écoutés, et ça, c'est urgent. Et là, honnêtement, après neuf semaines, que la
ministre n'ait pas eu le temps de rencontrer ces gens-là, je suis un peu
surprise. Le premier ministre a enlevé la langue française à la
ministre Roy pour qu'elle ait plus de temps. Là, elle pourrait rencontrer
les gens du milieu. Ça fait neuf semaines, là, puis on n'est même pas obligés
de se déplacer, là, on peut le faire par téléphone ou par visioconférence.
M. Bellerose (Patrick) :
J'aimerais vous entendre sur l'aide accordée par Québec au Cirque du Soleil.
Qu'est-ce que vous pensez du fait qu'on aide, justement, des fonds
milliardaires et que cette aide-là aussi va aider des entreprises qui sont
placées dans les îles Caïmans?
Mme Melançon : Bien, j'ai
beaucoup de difficulté à vous répondre ce matin parce qu'il y a beaucoup...
c'est nébuleux. Il n'y a pas beaucoup de transparence dans l'annonce qui a été
faite hier par le ministre Fitzgibbon. Je veux vous dire une chose,
200 millions $ US, là, ça représente 276 millions $ CAN.
Bien, j'espère que le gouvernement a aussi pensé qu'il y a des super beaux
joyaux en cirque qui sont aussi Québécois et qui vont avoir besoin d'aide. Je
pense aux 7 Doigts, je pense à Éloize, je pense ici, à Québec, à
Flip Fabrique. Ce sont des joyaux québécois puis, vous savez, 92 % de
leurs revenus autonomes, c'est les tournées internationales. Actuellement, là,
on s'entend, il n'y en aura pas de tournées internationales dans les prochains
mois. Alors, j'espère que ce qui sera bon pour pitou sera aussi bon pour minou,
et tant et aussi longtemps qu'on n'aura pas de réponse... Est-ce que l'argent
va servir à payer les artistes du Cirque du Soleil qui n'ont pas été payés? On
n'a pas de réponse actuellement.
M. Bellerose (Patrick) : Mais
est-ce que c'est acceptable d'aider des entreprises qui font affaire à travers
des paradis fiscaux?
Mme Melançon : Bien, ce qui
est encore une fois troublant, c'est qu'on n'a pas beaucoup de réponses quant à
où va aller l'argent. C'est pour ça que je vous dis, moi, c'est de savoir où va
aller l'argent. Est-ce que ça va aller directement aux îles Caïmans? Si
c'est le cas, on doit se poser de sérieuses questions.
M. Laforest (Alain) : Est-ce
qu'on aurait dû aider ou se concentrer davantage sur les repreneurs québécois?
Mme Melançon : Bien, comme je
vous dis, au moment où on se parle... puis là, on a appris dimanche que
Guy Laliberté veut reprendre, on sait que Québecor aussi faisait partie
des gens qui étaient intéressés par le Cirque du Soleil. Moi, je ne fais pas
partie des rencontres actuellement. Une chose est sûre, qu'on veuille sauver,
qu'on veuille aider... Puis, vous savez, le nationalisme, là, il est à
géométrie variable dans ce gouvernement-là, hein, parfois on veut aider,
parfois on ne veut pas aider. Je vais vous donner l'exemple du
45 millions $, là, pour la publicité qui a été octroyé, le contrat
qui a été octroyé, là, bien, c'est à une firme qui est américaine. Le
gouvernement veut sauver, mais de l'autre côté, il donne à des Américains pour,
par exemple, de la publicité, 45 millions de contrats en publicité pour
Cossette, qui appartient aux Américains. Donc, c'est pour ça que je parle de
géométrie variable à ce moment-ci.
Le Modérateur
: Une dernière
question.
M. Lacroix (Louis) : Vous
venez de dire : Est-ce que l'argent du Cirque du Soleil va aller
directement aux îles Caïmans? Vous avez dit ça, il y a 30 secondes.
Qu'est-ce qui vous permet de penser ça?
Mme Melançon : Non, j'ai posé
la question. J'ai...
M. Lacroix (Louis) : Quand on
pose une question comme ça, c'est qu'on sous-entend que ça pourrait arriver,
là. On ne dit pas ça dans l'air comme ça, là. Qu'est-ce qui...
Mme Melançon : Non, non, mais
c'est votre collègue. Si vous aviez écouté la question de votre collègue, il
m'a demandé si ça va aller aux îles Caïmans ou pas. Moi, je dis, c'est une
excellente question, il faut vraiment voir, moi, j'espère que l'argent va aller
d'abord à payer ceux et celles qui sont les...
M. Lacroix (Louis) :
Avez-vous des indications comme quoi ces gens-là cachent de l'argent dans les
paradis fiscaux?
Mme Melançon : Non, bien,
j'ai... non, je n'ai rien à annoncer en ce sens-là ce matin.
Le Modérateur
: Merci,
c'est tout le temps qu'on a. Merci à vous.
Mme Melançon : Merci beaucoup,
tout le monde. Je vous souhaite une belle journée.
(Fin à 8 h 15)