(Huit heures cinquante minutes)
La Modératrice
:
Bonjour. Bienvenue à ce point de presse. Prendront la parole, tout d'abord, Mme Ghazal,
suivie de Marie-Ève Caron, Julie-Christine Denoncourt, Félix Giroux,
Marie Montpetit. Merci beaucoup.
Mme Ghazal : Merci.
Alors, bonjour, tout le monde. Écoutez, je suis très, très heureuse d'être ici.
Je suis fébrile depuis le temps qu'on en parle, d'avoir des jeunes qui ont
participé à la COP25 à Madrid. Je veux les remercier d'être ici, à l'Assemblée
nationale. Je veux aussi remercier Marie d'être avec nous.
Donc, la semaine passée, l'Assemblée
nationale, à l'unanimité, a adopté une motion qui reconnaît la déclaration sur
les enfants, la jeunesse et l'action climatique, qui avait été lancée à Madrid,
donc, dans le cadre de la COP. Et donc moi, quand j'ai rencontré les jeunes qui
sont ici à la COP, qui vont vous adresser la parole, bien, j'ai eu un coup de
foudre, un vrai coup de foudre. Et on a parlé de cette déclaration-là qui est
quand même importante, où est-ce que les jeunes ont quand même une voix
importante, qu'il faut la connaître, la reconnaître. Et non seulement ils sont
les plus vulnérables par rapport aux changements climatiques, mais aussi ils
sont des acteurs.
Et donc je vais me taire tout de suite
parce que mon objectif, c'est de leur donner la parole, de faire une demande
très, très, très précise au gouvernement de la CAQ, au ministre
Benoit Charette. Donc, je vais vous laisser la parole.
Mme Caron (Marie-Ève) :
Bonjour. Marie-Ève Caron, déléguée de l'AQOCI-YMCA pour la COP25.
Je suis arrivée à la COP25 remplie d'espoir,
l'espoir de pouvoir être témoin d'un véritable changement, mais aussi de l'opportunité
que constitue la transition juste, une transition qui passe par l'adaptation de
nos modes de vie et de notre mode de gouvernance vers un modèle durable. Plein
de belles promesses et d'engagements qui ne font que refléter une façade de
responsabilité sociale derrière laquelle se cachent des intérêts strictement
économiques. Désillusion politique totale.
Je conserve cependant un espoir pour la
justice climatique de par la présence des organisations de la société civile
mondiale, les groupes de jeunes, les organisations de coopération internationale,
et les communautés autochtones, et j'en passe. Cette diversité d'organisations
porte l'essence de ce changement, et c'est pourquoi il est important de leur
donner une voix. C'est en écoutant les revendications des jeunes, comme le
réflexe climat et générations futures, qui représente le présent et le futur,
en finançant les organisations de promotion des droits humains et en
revalorisant des savoirs autochtones comme l'instrument d'articulation de
gestion de l'environnement que le Québec peut devenir un leader.
J'ai rencontré tellement de gens à la
COP25 qui sont déjà victimes des changements climatiques, mais surtout sur
lesquels reposent les solutions. Faites une place plus importante aux
populations vulnérables et à la société civile. Ce sera un signe clair de la
part du gouvernement que nous avons à gagner en travaillant ensemble vers une
justice climatique et pour un Québec dont les Québécois seront fiers. Sur ce,
on se retrouve à la COP26.
Mme Denoncourt (Julie-Christine) :
Je m'appelle Julie-Christine Denoncourt. Puis moi, je faisais partie de la
délégation de l'Université de Sherbrooke, à laquelle participaient aussi sept
autres étudiants et étudiantes de deuxième cycle.
On le sait, nous, les jeunes, on subit
déjà de plein fouet les impacts des changements climatiques, puis on va les
subir encore plus directement dans les années à venir, de même que les
prochaines générations. Pourtant, on n'est pas dépourvus de solutions puis on
veut non seulement que nos voix soient entendues, mais aussi prises en
considération.
La semaine dernière, le gouvernement a
pris l'engagement de respecter le principe d'équité intergénérationnelle et de
se joindre aux autres États signataires à la déclaration sur les enfants, la
jeunesse et l'action climatique. C'est donc pour toutes ces raisons qu'on
demande aujourd'hui au gouvernement du Québec d'intégrer un réflexe climat et
générations futures au projet de loi n° 44 sur la
gouvernance climatique, qui fait actuellement l'objet d'une étude détaillée à
l'Assemblée nationale. On veut qu'il soit imposé à tous les ministères la
production d'une analyse d'impact sur le climat et les générations futures pour
chaque politique, stratégie et règlement, comme c'est déjà le cas pour les entreprises
depuis 2014 avec le mécanisme d'impact réglementaire. On demande aussi que
cette analyse soit rendue publique et qu'un ministère qui déciderait de ne pas
en prendre compte se justifie publiquement.
Dans le contexte de la crise climatique
actuelle, qui est devenue une crise sociale et humaine, on ne peut pas se
permettre d'approuver des projets ou de prendre des décisions qui mettent en
péril le droit à un environnement sain des prochaines générations du Québec.
M. Giroux (Félix) : Bonjour.
Je m'appelle Félix Giroux. Je fais partie de la délégation d'ENvironnement
JEUnesse qui était à Madrid avec Marie-Clarisse Berger, de Rivière-du-Loup,
Rodrigue Turgeon, d'Amos, Sandrine Giérula, de Laval, Léa Ilardo, de Montréal.
Et donc on était tous ensemble à la COP25. Je souhaite présenter deux mythes
qu'il faut déconstruire, que le gouvernement nous répète ad nauseam.
Le premier est l'idée que le gouvernement
est un leader en matière d'environnement. Le Québec n'est pas un leader. Notre
gouvernement se base surtout sur des initiatives du passé comme
l'hydroélectricité et le marché du carbone. Il manque d'ambition, et ce, à deux
niveaux en particulier. Les actions, les projets et les politiques ne
contribuent pas à garder le réchauffement à l'intérieur de 1,5 °C. Et, deux,
dans son ton, dans sa rhétorique, notre gouvernement... n'est pas celui d'un
leader. Un vrai leader n'attend pas qu'un autre agisse pour ensuite lui
emboîter le pas. Un vrai leader initie le changement. Il ne s'assoit pas sur
ses lauriers.
Le deuxième mythe est celui que le Québec
n'a pas les moyens de s'engager dans une transition qui est immédiate et
transformatrice. Après avoir rencontré des délégués de partout sur la planète à
la COP25, je veux dire au gouvernement qu'on a tout ce qu'il faut pour agir au
Québec. Je suis gêné quand j'entends le gouvernement d'une des nations les plus
riches et développées du monde nous dire qu'on n'a pas les moyens. Il faut se
donner les moyens de nos ambitions. On a accès à une éducation qui est hors
pair, à des expertises incroyables, à la technologie qu'il faut. Et surtout on
a un consensus de la population sur la crise climatique et sur la nécessité de
s'engager encore plus. Ce n'est pas vrai qu'on n'est pas assez riches. Avec un
tel discours, le gouvernement nous met des bâtons dans les roues pour une
meilleure société.
Le Québec n'est pas un leader, mais il a
tout pour l'être. Et je crois que nous avons les moyens de se doter d'un plan
qui est transformationnel pour le Québec et pas juste des mesures à la pièce.
Merci.
Mme Montpetit : Merci, Félix.
Bien, un grand plaisir d'être ici avec des jeunes. Merci, Ruba, pour
l'invitation. J'ai eu l'occasion d'en rencontrer plusieurs quand on était à la
COP. Ça a été un beau coup de coeur. Petite confidence, mes deux parents sont
professeurs et m'ont toujours dit : Si tu veux vieillir intelligemment, et
rester moderne dans tes idées, puis rester connectée sur ce qui se passe, puis,
c'est ça, vieillir intelligemment et avec ton temps, bien, entoure-toi de
jeunes et comme ça tu t'assures d'être très bien connectée sur les réalités du
moment. Puis c'est ce qu'on fait aujourd'hui.
Vous l'avez vu, on a commencé l'étude du projet
de loi n° 44 hier. C'est une grosse semaine, là, pour
l'environnement. J'en reviendrais au message qu'ils font. Puis on est vraiment
là pour les supporter parce que c'est un message qui est extrêmement important,
justement, de mettre en place un test climat ou un réflexe climat pour tout
l'appareil gouvernemental. Et on se retrouve dans une situation où on a un ministre,
le ministre Charette, le ministre de l'Environnement, jour un où il est arrivé
en poste, a dit tout de suite : Moi, je baisse les bras, les cibles 2020,
on ne les atteindra pas, alors qu'il y avait encore de nombreux experts qui
disaient : Si on redouble d'efforts, si on continue, on est capables de
les atteindre. Cette semaine, il a écrit une lettre ouverte dans les journaux
où ce qu'on comprend, c'est qu'il est en train de mettre la table pour dire :
Gérez vos attentes, on n'atteindra pas non plus celles de 2030, ce qui est absolument
déplorable.
Le projet de loi n° 44
abolit Transition énergétique Québec, abolit le Conseil de gestion du Fonds
vert, qui sont deux organisations extrêmement importantes. Transition
énergétique Québec, c'est l'outil le plus efficace au Québec pour la lutte aux changements
climatiques, pour la diminution des GES. Ça nous a permis de diminuer de
60 % nos GES avec seulement 18 % du Fonds vert depuis 2016. Et donc
ça, déjà, ça nous indique qu'on ne va absolument pas dans la bonne direction.
Le ministre nous l'a dit : Ce n'est pas une loi climat, il n'y a pas de
cibles, les cibles ne sont pas intégrées. Donc, ça donne une idée du sérieux
qui est fait.
Moi, je garde bon espoir de la suite des
choses, sur comment on pourra bonifier, comment on pourra améliorer le travail,
mais il faut que ce soit un travail sérieux. Il faut que ce soit un travail
rigoureux qui soit à la hauteur de la crise climatique. On a déclaré l'urgence
climatique dans cette Assemblée nationale. Il faut qu'on soit conséquents de ce
qui a été déclaré par les 125 parlementaires et qu'on mette des lois en place
qui nous permettent de répondre à cette urgence. Mais je suis très, très
contente de vous avoir avec nous aujourd'hui. Puis on supporte évidemment leur
demande. Merci.
M. Gaudreault : O.K. Bon, écoutez,
premier message à l'endroit des jeunes qui sont ici : Merci, félicitations
de venir ici pour venir nous bousculer, venir bousculer le gouvernement, venir
faire des revendications. J'ai moi aussi eu l'occasion de rencontrer ces
groupes à l'occasion de la COP25 à Madrid et je suis extrêmement fier. Et je
veux dire à eux qui sont ici, eux et celles qui sont ici, mais aussi à toute la
jeunesse québécoise : Ça marche, de s'impliquer, ça marche, de s'engager politiquement,
ça marche, de participer à des conférences internationales et de faire retomber
les revendications à l'échelle nationale. Il ne faut pas lâcher, ça marche.
Sur le fond des choses, quant à ce qui
concerne le réflexe climat, et le Parti québécois est entièrement d'accord avec
ça, nous avons inclus un mécanisme semblable dans le projet de loi que nous
avons déposé sur le respect des obligations climatiques il y a un an. Mais je
ne suis pas ici pour faire de la partisanerie. Moi, je suis ici pour avoir des
résultats. Nous sommes présentement à l'étude du projet de loi sur, soi-disant,
la gouvernance efficace des changements climatiques, mais le projet de loi
qu'on a devant nous est tout sauf efficace. Mais il faut qu'on avance avec ce
que nous avons.
La demande qui est faite par les groupes
ici, d'avoir un réflexe climat et de générations futures, peut s'articuler de
différentes manières via des amendements dans le projet de loi n° 44.
On peut penser, par exemple, à un budget climat qui intégrerait des éléments
qui sont demandés par les jeunes. On peut demander un genre de grille d'analyse
dont l'ensemble du Conseil des ministres et les comités ministériels
tiendraient compte avant d'autoriser un projet.
Alors, soyez assurés qu'en ce qui me
concerne, puis je comprends que c'est la même chose pour mes collègues des
autres partis, on va faire tout le travail pour que ces revendications-là
soient entendues. La pression, la pression, elle est sur le gouvernement, elle
est sur le ministre Charette, qui ont dit et qui répètent publiquement que 2020
sera l'année de l'environnement. Alors, on ne peut pas dire une chose d'un côté
de la bouche puis faire le contraire ou dire le contraire de l'autre côté. Donc,
vous êtes entendus. On va continuer de se faire le porte-voix de ces jeunes. Et
vous pouvez revenir pour maintenir cette pression. Merci.
Mme Ghazal : Donc, à la COP,
quand j'ai rencontré les jeunes, j'ai été témoin des discussions qui ont eu
lieu entre le ministre Benoit Charette et les groupes de jeunes que vous voyez
ici. Et ce que j'ai constaté puis ce que je déplore, c'est le ton un peu de...
Je qualifierais de mononcle le ton paternaliste qu'il emploie avec les jeunes,
où il dit : Bravo, continuez, c'est bien «cute», ce que vous faites. Nous,
on s'en va vers là, mais continuez à nous pousser puis on va vous regarder de
temps en temps puis vous applaudir. Même, il y a eu des jeunes qui sont venus
en consultations particulières pour le projet de loi n° 44,
et ça a été le même ton paternaliste et qui est extrêmement dérangeant.
Ce que vous avez entendu aujourd'hui, ce
que les jeunes ici viennent présenter, c'est une proposition pragmatique, une
proposition qui ne tombe pas du ciel comme ça et fleur bleue. Ce qu'ils disent,
c'est qu'en ce moment il existe déjà une pratique qui existe au gouvernement
depuis 2014, qu'on appelle l'analyse d'impact réglementaire. Ça, ça veut dire
que, comme ils vous l'ont expliqué, n'importe quel règlement, n'importe quel
projet, comme par exemple GNL, le troisième lien, n'importe quelle stratégie
gouvernementale, bien, est analysée pour s'assurer que ça n'a pas beaucoup d'impact
sur les entreprises. On appelle ça l'allègement réglementaire. Bien, je pense
que le climat mérite la même chose, le même traitement qu'on donne aux
entreprises.
Moi, je m'engage à cette demande réflexe
climat et générations futures, où il y ait une analyse systématique sur
l'impact sur le climat de toute politique, règlement, etc. Bien, je m'engage à
proposer, dans le cadre du projet de loi n° 44, un amendement pour
proposer cela. Le ministre Charette, le gouvernement ne nous écoute pas parce
qu'ils disent que les oppositions s'opposent. Bien, j'espère maintenant, au
moins, qu'il va écouter les jeunes qui sont ici puis qui ont fait ce travail et
cet effort. Merci.
La Modératrice
: Merci
beaucoup. On va prendre les questions seulement sur le sujet. Donc, si vous
avez des questions, je vous inviterais à vous approcher du micro. Est-ce qu'il
y a des questions en anglais? Merci beaucoup.
Mme Ghazal : Merci.
(Fin à 9 h 4)