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Point de presse de M. Harold LeBel, porte-parole du troisième groupe d’opposition en matière d’emploi, de solidarité sociale et de lutte contre la pauvreté, Mme Monique Sauvé, porte-parole de l’opposition officielle en matière d’emploi et de solidarité sociale, et M. Alexandre Leduc, porte-parole du deuxième groupe d’opposition en matière de solidarité sociale

Version finale

Thursday, February 13, 2020, 9 h

Hall principal de l'hôtel du Parlement, hôtel du Parlement

(Neuf heures une minute)

Le Modérateur : Donc, bonjour. Bienvenue à ce point de presse sur le droit à l'amour. Donc, vont s'adresser à vous aujourd'hui Mme Emmanuelle Chaloux, du front commun pour les personnes assistées sociales du Québec, M. Simon Pouliot et M. Robert Dupuis, qui vous feront des témoignages, ensuite Mme Véronique Laflamme, du FRAPRU, M. Serge Petitclerc, du Collectif pour un Québec sans pauvreté, M. Alexandre Leduc, député de Québec solidaire pour Hochelaga-Maisonneuve, Mme Monique Sauvé, pour Fabre, du Parti libéral, et M. Harold LeBel, de Rimouski, pour le Parti québécois.

Donc, M. LeBel va commencer.

M. LeBel : Bonjour, tout le monde. Une conférence de presse sur le droit à l'amour, un peu particulier. Et ici je ne parle pas de l'amour entre le gouvernement et les municipalités aujourd'hui. On parle du droit à l'amour des gens qui vivent la pauvreté, qui sont à l'aide sociale, souvent, et qui sont obligés de déclarer leur condition de vie maritale et faire en sorte qu'ils sont coupés. Souvent, des dettes s'accumulent. Vous allez avoir des témoignages qui vont vous le dire tantôt.

On va distribuer aussi à tous les députés aujourd'hui un carton à la veille de la Saint-Valentin qui dit : Imaginez ne pas avoir le droit de vivre avec la personne qui fait battre votre coeur. On espère pouvoir convaincre tout le monde d'une façon transpartisane. J'ai des gens ici du Parti libéral et de Québec solidaire. On pense que les gens de la CAQ vont être sensibles à ça aussi. Moi, je pense qu'on est rendus là. On serait capables de faire un grand pas pour aider les gens à se sortir de la pauvreté puis leur permettre de vivre dans la dignité, vivre leur vie de couple dans la dignité.

Ça fait que je laisse les gens vous parler des situations qu'ils vivent.

Le Modérateur : Mme Chaloux.

Mme Chaloux (Emmanuelle) : Bonjour. Je me nomme Emmanuelle Chaloux et je suis représentante du Front commun des personnes assistées sociales du Québec. Demain, 14 février 2020, des milliers de Québécoises et Québécois célébreront la Saint-Valentin. Au front commun, depuis des années, cette fête de l'amour est plutôt symbole de l'injustice que vivent les personnes assistées sociales lorsqu'elles sont en couple. Au Québec, la notion de vie maritale a été une grande avancée pour le mouvement des femmes et le mouvement LGBTQ+, une lutte que ces personnes ont gagnée après de dures batailles.

Malheureusement, à l'aide sociale, l'application de la notion de vie maritale est plutôt synonyme de contrôle abusif et d'atteinte à l'autonomie des personnes. Pour que le ministère déclare qu'il y a vie maritale, il faut remplir trois critères : la cohabitation de 12 mois consécutifs, le secours mutuel et la commune renommée. À première vue, on pourrait dire que l'application de la notion ressemble à ce qu'on pourrait retrouver à l'impôt. Toutefois, il y a plusieurs différences majeures qui méritent d'être soulignées.

La première différence se situe au niveau de l'autonomie financière. Les personnes déclarées en vie maritale à l'aide sociale sont considérées comme un ménage. Dans le cas de deux personnes assistées sociales, leurs prestations sont sévèrement amputées. Deux personnes recevant chacune 690 $ seules reçoivent 1 049 $ pour les deux, une perte de 24 % par rapport au montant auquel elles auraient droit normalement. De plus, la prestation est versée à une seule personne dans le ménage, ce qui peut causer des situations litigieuses entre conjoints et conjointes et ouvre la porte à la violence économique. La situation est encore plus problématique si l'une ou l'autre des personnes conjointes travaille. La personne assistée sociale n'a plus droit à une prestation dès que son ou sa conjointe gagne un peu plus de 1 443 $ par mois et devient alors complètement dépendante financièrement.

L'autre différence se situe au niveau des mesures de contrôle entourant l'application de la notion de vie maritale à l'aide sociale. Le fait est que les personnes assistées sociales se font marier malgré elles lorsqu'elles tentent de s'entraider. Par exemple, être colocataire peut mener à une accusation de vie maritale, ou, encore, même si deux personnes vivent dans des logements séparés, elles peuvent se faire enquêter pour déterminer si elles passent plus de temps chez l'une ou chez l'autre. Si le ministère décide d'enquêter et demande à n'importe qui dans l'entourage des personnes si elles vivent en couple, cela peut être suffisant pour décréter qu'il y a vie maritale. Le ministère peut aussi appliquer rétroactivement la mesure et réclamer des sommes complètement ridicules qui endetteront les personnes concernées pour des années, voire des décennies à venir.

Contrairement aux autres citoyennes et citoyens, les personnes assistées sociales sont coupables jusqu'à preuve du contraire. Le fardeau de la preuve leur incombe si elles décident d'aller en appel, ce qui ne fait aucun sens. Il n'est donc pas surprenant que tant de personnes assistées sociales s'isolent. En effet, selon le recensement de 2016, 56 % de la population québécoise serait en couple, mais cette proportion diminue à 15 % chez les personnes assistées sociales. Pourtant, elles bénéficieraient grandement de l'entraide que vivre à deux peut apporter, comme de se partager les coûts de logement et de la nourriture, pour ne nommer que ceux-ci.

Pour mettre fin à cette injustice, le Front commun des personnes assistées sociales du Québec revendique depuis plusieurs années la chose suivante : une personne, un chèque. Dans le Plan d'action gouvernemental pour l'inclusion économique et la participation sociale 2017‑2023, le gouvernement reconnaît d'ailleurs ce droit pour une partie des personnes assistées sociales. Dans son plan d'implantation d'un revenu de base, le gouvernement prévoit qu'en 2023 les personnes ayant accès à ce revenu de base auront chacune un chèque sans pénalité. Alors, pourquoi ne pas reconnaître ce droit pour l'ensemble des personnes assistées sociales? Il s'agirait d'un geste simple pour enfin permettre l'autonomie économique des personnes et mettre fin aux mesures de contrôle abusives liées à l'application actuelle de la notion de vie maritale.

En terminant, rappelons que l'aide sociale est un droit que nous nous sommes donné comme société afin de pouvoir vivre dignement, peu importe notre statut d'emploi. Avec les années, ce droit s'est grandement effrité, et il plus que temps que le gouvernement fasse des gestes concrets pour le rétablir, comme l'élargissement du revenu de base à l'ensemble des personnes assistées sociales. Bonne Saint-Valentin!

Le Modérateur : Merci beaucoup. M. Simon Pouliot va venir nous lire un témoignage.

M. Pouliot (Simon) : Bonjour. La personne qui devait vous parler aujourd'hui a croulé sous la pression que l'aide sociale fait vivre. C'est une personne courageuse qui vit plusieurs difficultés, et, demain, elle est convoquée au Tribunal administratif du Québec par rapport à sa dette. La pression combinée de s'exposer devant les médias et de devoir se défendre devant l'appareil judiciaire l'a paralysée. Je lirai donc son témoignage. Le voici.

J'aurais aimé mieux ne pas avoir cet entretien avec vous, mais je pense à tous ceux et celles, dont moi-même, qui ont été lésés et opprimés. Je suis ici pour parler de ce que j'ai vécu. Sous de fausses accusations, on a arrêté mes prestations d'aide de dernier recours au mois d'août 2019, me réclamant, par le fait même, 96 000 $ solidairement avec mon colocataire.

Mon histoire de dette commence en 2018. J'avais déclaré à l'aide sociale que je ne pouvais vivre seul. À partir de là, l'aide sociale m'a fait la vie dure. Elle m'a alors demandé de faire remplir un formulaire d'attestation par mon médecin qui attesterait mon incapacité à rester seul. S'en est suivi que mon médecin n'a pas voulu remplir cedit formulaire. Pourtant, on me reconnaît la contrainte sévère à l'emploi, mais, tout d'un coup, on me demande de prouver que j'ai une contrainte. Trouvez l'erreur. Et c'était la première démarche parmi plusieurs pour venir me coincer.

En 2019, on m'accuse de vivre en vie maritale. Ils ont dit qu'ils avaient des témoins. Je trouve qu'il y a ici présomption de culpabilité. Puis le ministère envoie une missive comme quoi je ne recevrai plus aucune prestation à partir d'août 2019. Comme vous pouvez vous en douter, cela m'a perturbé profondément. Et, comme ce n'était pas déjà assez, on me réclame 96 000 $ en dettes. Selon le ministère, je suis considéré vivre maritalement depuis 2005. Depuis 2005, ils me réclament toutes les sommes versées.

Mon lien avec mon colocataire en est un de colocation. J'ai décidé de vivre ainsi en raison du coût élevé de la vie et parce que j'ai à coeur l'entraide entre les personnes. Je n'ai jamais caché que j'habitais en colocation. On me dit que j'ai enfreint la loi avec 15 années de retard. J'aurais aimé le savoir avant. J'aurais agi autrement. Étant une personne vulnérable, je ne compte plus les journées complètes à vivre de l'anxiété paralysante. Ce qui m'a aidé à passer au travers, c'est ma foi dans le système car j'ai toujours cru à un règlement avec l'aide sociale.

Ma présence ici aujourd'hui suggère que j'ai très hâte de tourner la page et de reprendre une vie normale. Je pensais naïvement que les gouvernements voulaient enrayer la pauvreté. C'est pour cette raison que je fais appel à vous pour me soutenir dans ma démarche. Je suis présentement à bout de souffle et de ressources. À l'aide! Je ne devrais pas avoir à quémander mes prestations d'aide sociale.

Le Modérateur : Merci beaucoup. M. Dupuis va venir vous faire un court témoignage.

M. Dupuis (Robert) : Bonjour. Témoignage d'horreur de Robert Dupuis. En 2016, j'ai reçu une lettre du ministère comme quoi j'aurais fraudé l'aide sociale. D'un seul coup, toutes mes prestations ont été coupées. Je suis désormais perçu comme un criminel. Et voilà que je dois plus de 70 000 $ au ministère. Pourquoi? Parce que j'habite avec un coloc et que le ministère a déterminé que nous étions en vie maritale.

Pourtant, il avait été clairement nommé à l'aide sociale que j'habitais avec un coloc, notamment pour des raisons évidentes de nécessité financière. Les prestations de l'aide sociale ne permettent pas à une personne seule de vivre dans un logement convenable. J'avais affirmé que je payais un montant de 500 $ par mois qui était partagé avec mon coloc. Les agents étaient au courant de ma situation, convenue et tolérée depuis des années. Ils voyaient mes rapports d'impôt, les lettres diverses, institutions et choses... Les choses étaient claires. Cela n'a pas empêché le ministère d'affirmer que je vivais en couple avec mon coloc, et ce, depuis 14 ans. Le ministère s'est basé sur la parole des voisins, avec qui nous sommes en conflit pour des raisons de perturbation et de mauvais voisinage, pour affirmer que j'avais maintenant un conjoint, et me réclamant 14 années d'arrérages d'aide sociale.

Actuellement, je dois vivre des revenus de la personne avec qui je vis puisque le ministère m'a enlevé tous mes revenus. La seule entrée d'argent est que je reçois de la TPS, et le crédit d'impôt de solidarité est de 35 $. Vous comprendrez que ma situation empêche d'avoir un logement ou de subvenir à tout autre besoin. Je dois donc vivre aux crochets de mon colocataire qui fait environ 1 400 $ par mois, une situation qui le met lui aussi dans des situations de précarité. Pour m'en sortir, je dois vivre de surplus alimentaires et d'autres... plus concrètement, fouiller dans les poubelles, les conteneurs. Quand ça ne suffit pas, les banques alimentaires sont là pour m'aider et à subvenir à mon besoin essentiel, me nourrir.

La dette initiale établie en 2017 au montant de 77 000 $... Depuis, malgré toutes les sommes versées au ministère, soit 115 $ aux 15 jours, la dette et les intérêts étaient de 86 000 $. À l'heure actuelle, on s'en va vers 100 000 $ de dettes. La figure de l'épée de Damoclès est insuffisante pour évoquer tout ce qu'on peut ressentir comme pression dans cette situation intenable, injuste et sans recours. Quelle motivation peut-on avoir à retourner au marché du travail, à faire quoi que ce soit pour améliorer la situation quand on sait que tout qu'est-ce qu'on va gagner va servir à payer une dette fabriquée de toutes pièces par le ministère, qui se fout de notre bien-être? Je vais probablement mourir avec cette dette, et elle aura traîné mon coloc et moi dans la pauvreté extrême de notre vie.

Nous sommes malheureusement nombreux à nous faire avoir par les techniques inhumaines du ministère. Face à l'énormité de la situation, la pression colossale, je viens, un jour, de parler d'idées suicidaires à mon avocate d'aide sociale. L'avocate m'a royalement ignoré. Ensuite, je lui ai demandé si le Protecteur du citoyen pourrait faire quelque chose dans ce type de... et l'avocate a pouffé de dire comme si elle savait que ça n'allait rien donner. J'ai appelé un cabinet d'avocats privé, même chose. J'ai fait appel sans succès. Je répète, je n'ai pas de revenu depuis plus de trois ans. J'ai l'impression que, pour le ministère, on est juste une gang de bisons qu'on s'arrange pour pitcher en bas d'un précipice afin de récolter le peu de chair qu'il nous reste sur l'os. Merci beaucoup.

Le Modérateur : Merci beaucoup. Donc, Mme Véronique Laflamme va venir nous parler pour le FRAPRU.

Mme Laflamme (Véronique) : Bonjour. Le témoignage de Robert dit tout, dit tout sur le désespoir des gens dont le revenu d'aide sociale ne permet pas de payer le loyer. Le loyer, actuellement, le loyer moyen au Québec pour une chambre à coucher, c'est 716 $. Le montant du chèque d'aide sociale est de 690 $. Alors, faisons le calcul, c'est impossible d'arriver avec un tel montant. Même avec contrainte à l'emploi, le chèque de 828 $ nous laisse au bout du compte 28 $ par semaine si notre loyer est bien le coût du loyer moyen, parce que la Société canadienne d'hypothèques et de logement fait bien remarquer que les rares logements disponibles sont au moins 25 $ plus chers que ces montants.

Donc, ça urge de mettre fin à cette coupure pour vie maritale pour donner un peu d'air aux gens qui, finalement, tous les mois, doivent se mettre en situation de survie, compromettre leur santé physique et mentale, compromettre même leur sécurité. Donc, aujourd'hui, on lance un message clair en unissant notre voix à celles du Front commun des personnes assistées sociales, du Collectif pour un Québec sans pauvreté et des trois partis d'opposition. Mettons fin à cette coupure injuste.

Le Modérateur : Merci beaucoup. M. Serge Petitclerc, pour le Collectif pour un Québec sans pauvreté.

M. Petitclerc (Serge) : Merci. Bonjour. Merci d'être présents. En décembre dernier, tous les partis présents à l'Assemblée nationale ont adopté une résolution, une motion disant que c'est important, le droit à l'aide sociale. Ça fait 50 ans que la loi existe. Il serait temps qu'on la dépoussière parce que cette loi-là, son objectif de base est de faire en sorte que les gens puissent subvenir à leurs besoins de base, ce qui n'est pas le cas actuellement. On a même des gens qui ne sont pas capables d'avoir tout simplement une prestation à cause des questions de vie maritale. Puis ça serait temps que le gouvernement, avec les partis d'opposition, fasse en sorte de transformer cette loi-là, de la dépoussiérer pour faire en sorte que les personnes puissent avoir une vie minimalement décente. Merci beaucoup.

Le Modérateur : Merci beaucoup. M. Leduc, Québec solidaire.

M. Leduc : Être prestataire d'aide sociale au Québec, ce n'est pas la belle vie, ce n'est pas la vie facile. Quand tu reçois 100 $ par mois en dons de tes proches, bien, il y a des bonnes chances que ces montants-là vont être déduits de ton chèque. Quand tu as plus de 1 500 $ dans ton compte bancaire, bien, tu pourrais perdre une partie de ces prestations-là. Ce n'est un secret pour personne, les prestations offertes sont loin d'être suffisantes pour joindre les deux bouts. On en a fait cas précédemment. Dans Hochelaga-Maisonneuve, la circonscription que je représente, c'est un enjeu majeur.

Hier, on avait une motion du mercredi sur le logement. J'ai cité quelques cas d'annonces qu'on pouvait trouver sur Kijiji. Bonne chance pour trouver quelque chose dans ces prix-là avec les prestations de base de 690 $ dont on évoquait tantôt. Alors, imaginez si, par-dessus tout ça, le gouvernement vous coupe vos parties de vos prestations parce que vous habitez avec un coloc ou un conjoint. Imaginez si, par même une directive du médecin qui spécifie que vous ne pouvez pas vivre seul, bien, vous êtes quand même obligé de le faire évidemment, mais au risque de perdre des prestations. Alors, vous vous imaginez que vous direz, comme nous ici aujourd'hui, que ça n'a pas de bon sens et qu'il faut faire quelque chose avec ça. Bien, c'est ce que vivent plusieurs prestataires de l'aide sociale.

Ce n'est pas normal que le gouvernement soit au courant de cette absurdité du système et que rien ne soit fait pour la corriger. Ce que les groupes demandent, ce n'est que le gros bon sens, c'est d'appliquer le principe d'une personne, un chèque, et, bon, peut-être de gérer des cas d'exception, s'il y en a, au lieu d'imposer à des milliers de prestataires une règle qui pénalise la majorité. C'est une question d'indépendance financière.

C'est une question d'accès au logement aussi. Évidemment, dans un contexte de pénurie de logements, avec des taux d'inoccupation extrêmement bas, on peut imaginer que, si on permet à des gens de vivre ensemble, ça va pouvoir libérer un peu de logements et peut-être rendre la chose plus facile pour trouver un logement pour les personnes qui en ont besoin.

Finalement, l'État devrait être là pour accompagner ses citoyens les plus vulnérables, pas pour leur mettre des bâtons dans les roues. Et les personnes assistées sociales ont droit aussi à l'amour. C'est le message qu'on envoie aujourd'hui. Et ça va me faire plaisir de donner les petites cartes de Saint-Valentin à mes neuf collègues du caucus solidaire. Merci.

Le Modérateur : Merci beaucoup. Mme Sauvé.

Mme Sauvé : Bonjour à vous tous. Je suis très heureuse d'être ici ce matin et de pouvoir être avec mes chers collègues dans un élan transpartisan. Je veux remercier le collègue de Rimouski qui a eu cette initiative. Je suis également avec le collègue d'Hochelaga-Maisonneuve. C'est important d'être ici et c'est important de porter la voix des personnes vulnérables. Je veux souligner le courage des deux personnes qui ont témoigné — M. Dupuis, entre autres, merci pour votre courage — et les groupes qui se sont exprimés, qui portent leur voix. Avec ces petits cartons, non seulement il faut distribuer cette réalité que les gens vivent, mais il faut être sensible, faire front commun et pouvoir défendre ces réalités difficiles.

Alors, oui, j'ajoute ma voix à tous ceux qui sont avec moi et les milliers de personnes au Québec qui se retrouvent dans des situations dramatiques telles que celles qui ont déjà été exprimées. Je veux souligner le travail aussi des organismes communautaires qui travaillent à l'accompagnement de ces personnes et faire en sorte qu'encore une fois leur voix puisse être portée.

Vous savez, j'ai travaillé pendant près de 20 ans dans l'action communautaire, dans les milieux communautaires, et j'ai été témoin de cette détresse, des impacts réels, concrets que peut représenter la diminution de prestations en raison d'une cohabitation. Alors, je suis sensible, je suis dans une grande écoute par rapport à ce que j'entends, qui, clairement, clairement, est une situation tellement dramatique pour ces personnes.

Alors, aujourd'hui, prenons le temps — oui, le droit à l'amour — d'être ici... rapporter l'importance des mesures concrètes pour améliorer le sort de ces milliers de Québécois et de Québécoises. Et, si on a eu, le gouvernement précédent, ce grand déploiement du Plan d'action gouvernemental pour l'inclusion économique et la participation sociale, avec le revenu de base qui était un élément historique, il faut poursuivre l'élan. Il faut être à l'écoute de ces gens. Il faut être dans la nuance et la souplesse pour assurer une justice sociale.

Alors, oui, merci pour cette initiative, mais c'est le début d'un dialogue. C'est le début d'un dialogue transpartisan, à faire en sorte qu'on puisse changer les choses. Merci beaucoup.

Le Modérateur : Merci beaucoup. M. Lebel.

M. LeBel : Oui. Rapidement, en terminant, merci, Alexandre, merci, Monique. Merci aux groupes qui sont là. Merci aux gens qui ont témoigné. Ce n'est pas facile, témoigner comme ça. Je pense à Mélanie Dumais, qu'on a aidée il y a quelques mois à pouvoir vivre en couple avec son ami. Je pense à d'autres qui attendent. Je pense à Karine Fortin, dans ma circonscription. Je pense à Marc-Alexandre Gaudreau qui attend depuis longtemps, qui est découragé, que je sais qu'il nous écoute. Je pense à tous ceux-là qui nous écrivent via les médias sociaux, qui vivent cette situation-là.

Je vous dis, il y a des fois qu'on peut croire que ça va se régler, puis je pense qu'on est là, aujourd'hui, les partis politiques de l'opposition. Je pense que les gens, aussi, du gouvernement sont sensibles à ça. J'espère, j'ose espérer qu'aujourd'hui on fait un pas en avant vers une solution à ce dossier-là, vers un changement pour permettre aux gens de vivre leur vie de couple comme il faut, en toute dignité, puis permettre à des gens de vivre en colocation parce qu'ils ont besoin de le faire, puis sans avoir peur d'être dénoncés et sans avoir peur d'accumuler des dettes comme vous accumulez. C'est complètement sans bon sens.

Ça fait que tantôt je vais sûrement poser des questions à la période des questions s'il n'y a pas de changement. Je l'annonce d'avance. C'est rare qu'on fait ça. Mais je le fais en pensant que tous les partis ensemble, on va comprendre le gros bon sens puis on va réussir à régler ça. Merci.

Le Modérateur : Merci beaucoup. On va passer aux questions sur le sujet. M. Bergeron, La Presse canadienne.

M. Bergeron (Patrice) : Bonjour à vous tous. Là, il s'est dit beaucoup de choses, mais je veux juste bien comprendre, là. Essentiellement, ce que vous demandez, c'est qu'il y ait une personne, un chèque, donc une prestation par personne, peu importe le nombre de personnes qui habitent ensemble, qu'ils soient colocs, qu'ils soient mariés ou, bon, qu'ils habitent ensemble, de toute façon. C'est bien ça, là, si je comprends bien?

Mme Chaloux (Emmanuelle) : Oui.

M. Bergeron (Patrice) : O.K. Très bien. Ça touche combien de personnes, ça, au Québec? C'est des milliers, des centaines? Est-ce qu'on a une idée statistique, là?

Mme Chaloux (Emmanuelle) : Les données ne sont pas sorties encore, ne sont pas très récentes à ce niveau-là. Ce que je peux vous dire, par exemple, c'est que les dettes des personnes assistées sociales s'élèvent à 800 millions de dollars puis que c'est la grande majorité qui est reliée aux questions de vie maritale.

M. Bergeron (Patrice) : Est-ce qu'on sait combien ça coûterait pour le trésor public de mettre cette mesure-là en place, là, une personne, un chèque, par rapport au budget actuellement, là, qu'on verse en aide sociale au Québec?

M. LeBel : On voit qu'il y a beaucoup de personnes qui sont touchées par ça, par le montant des dettes. Et c'est là que j'ai un appel au gouvernement. Le gouvernement a toutes ces statistiques-là. Le gouvernement peut faire ces études-là. Et ce qu'on aimerait, c'est de la transparence avec eux, travailler avec eux pour bien identifier qui ça peut toucher et combien ça peut coûter. On est vraiment... On n'est pas là pour prendre le gouvernement à contrepied. On est là pour essayer de voir avec eux autres comment on pourrait s'asseoir ensemble, puis y travailler, puis analyser concrètement la situation.

M. Bergeron (Patrice) : Et, par exemple, on pourrait être quatre colocs, je donne un cas d'espèce, et puis tout le monde touche le chèque de 690 $ par mois sans avoir de coupures, donc pour un total de 2 800 $ par mois, puis se payer un logement décent à quatre chambres ou trois chambres. C'est ça, si je comprends bien, là?

Mme Chaloux (Emmanuelle) : Bien oui.

M. Bergeron (Patrice) : O.K., O.K. Je voudrais savoir est-ce que c'est... Bien, il y a beaucoup de règles qui ont été mises en place depuis... On sent des décennies d'une loi qui devrait être dépoussiérée, selon ce que vous dites. Il y a toujours eu... Est-ce que des mesures de contrôle ne sont pas nécessaires, par contre, là, ce qui pourrait être la justification normale du gouvernement, des mesures de contrôle parce qu'il y a eu des cas de fraude avec les années?

Mme Chaloux (Emmanuelle) : Bien, écoutez, je vais vous dire bien franchement que nous, ce qu'on voit sur le terrain, c'est du harcèlement des personnes les plus vulnérables dans notre société. Je veux dire, en bout de ligne, combien ça coûte, cette mesure-là? Combien d'argent est-ce qu'on économise en termes de procédures judiciaires, de certificats médicaux? Le poids sur le système de santé est incroyable. Puis, je veux dire, à un moment donné, si on veut se demander combien cette mesure-là, elle coûte, je pense qu'il faut aussi se demander quelles économies on va pouvoir faire.

M. LeBel : Sur les contrôles, je ne voudrais pas qu'on laisse entrevoir... Puis souvent c'est ça, le préjugé par rapport aux groupes de pression, c'est dire qu'ils veulent tout avoir sans qu'il y ait de contrôle. Je n'ai jamais entendu ça, moi, quand je rencontre les groupes de pression. Ce n'est pas ça. Il faut revoir la loi. Il faut revoir avec eux autres comment ça peut être fait, et revoir le cadre de cette loi-là de dernier recours, et s'asseoir ensemble avec le gouvernement, et refaire le cadre, revoir les choses. Est-ce qu'il y a des choses qu'il faudrait... comme mettre certaines règles? Probablement, mais il faudrait juste le travailler ensemble.

Là, actuellement, il ne faut pas perdre le focus sur ce qu'on vous dit, c'est qu'il y a des situations... 100 000 $ de dettes, là, ça n'a pas de maudit bon sens, là, parce qu'il a été dénoncé par un voisin. Et ça, là, ce n'est pas que lui. On en a dans toutes nos circonscriptions. Ça fait que prenons ça, prenons cette situation-là qui est injuste, après ça essayons de faire comprendre ça au gouvernement. Puis je pense qu'ils sont capables de comprendre. Je pense qu'ils vont vers ça. Essayons de redéfinir le cadre. C'est sûr qu'il y aura des questions à se poser, mais travaillons ensemble.

M. Bergeron (Patrice) : J'ai vu tout à l'heure que le ministre, Jean Boulet, était passé, là. Il avait semblé porter l'oreille à vos témoignages. Est-ce que vous avez déjà fait des approches auprès de lui ou est-ce que vous allez le rencontrer dans les prochains jours ou semaines, peu importe qui dans le groupe, là, ici?

M. LeBel : Bien, c'est comme mes collègues Alexandre et Monique disaient, là, on essaie de... ce qu'on veut faire, c'est trouver une façon transpartisane de travailler ce dossier-là. J'ai parlé à M. Boulet hier. Je lui ai dit ce qu'on faisait. Je l'ai même averti que j'allais lui poser une question. Vous voyez, plus transpartisan ou transparent, c'est dur à faire. On croit que... Je pense qu'il y a une ouverture. Il y a une ouverture de lui. Il est sincère. Maintenant, comment on peut travailler ça? Qu'est-ce qu'on se donne comme échéance? Puis les groupes ici sont tous de bonne foi. Tout le monde veut y arriver.

Et Alexandre, ce qu'il ramène, c'est sur la crise du logement qui s'en vient. Il y a des choses qui s'entrecoupent, là. Il y a du monde qui va se retrouver à la rue, là, à Montréal. J'ai vu Sherbrooke... Il y a des femmes, là, chez nous, qui n'ont pas de logement, qui... ami, ami, ami, de logement en logement. Ça fait qu'il y a une situation qui est particulière qu'il faut voir puis qu'il faut essayer... Il faut trouver des solutions. Il ne faut pas essayer, il faut les trouver.

M. Bergeron (Patrice) : Merci.

Le Modérateur : Merci beaucoup. M. Bossé, Le Soleil.

M. Bossé (Olivier) : Juste un détail. Cet aspect-là de vie maritale, ça existe depuis quand dans la loi à peu près?

M. Petitclerc (Serge) : Toujours.

Mme Chaloux (Emmanuelle) : Depuis toujours.

M. Bossé (Olivier) : O.K.

M. Petitclerc (Serge) : Bien, depuis l'adoption de la loi, en fait, puis c'est dans d'autres lois aussi, en fait. C'est la même chose quand on parle du supplément de revenu garanti ou de la pension de vieillesse au fédéral. C'est comme une logique constante de... À partir du moment où deux adultes sont considérés comme un couple, ce qui est déjà discutable, bien, on considère que ces gens-là ont besoin juste de l'équivalent d'un adulte et demi comme prestations.

Et, dans le cas de l'aide sociale, il y a une question de droit qui est en arrière de ça aussi. Je veux dire, le Québec adhère à des traités internationaux qui reconnaissent le droit à un niveau de vie suffisant. On met des personnes dans des situations épouvantables avec des prestations aussi basses, et, à partir du moment où les gens arrivent à se mettre ensemble pour essayer de partager des frais, il y a toutes sortes de pénalités. Il y a la vie maritale, mais on pourrait parler de d'autres mesures aussi. Si un enfant habite avec ses parents, il peut se voir couper sa prestation de 100 $. À partir du moment où un individu a des chambreurs, à partir d'un certain nombre de chambreurs, il peut se faire couper sa prestation. Dans le fond, tout est mis en place pour diminuer des prestations qui sont déjà insuffisantes.

M. Bossé (Olivier) : Merci.

Le Modérateur : Merci beaucoup.

(Fin à 9 h 27)