(Dix heures trente et une minutes)
Mme Ghazal : Alors, bonjour, tout
le monde. Aujourd'hui, le premier ministre a annoncé l'élargissement de la
consigne, donc une réforme pour la consigne où est-ce que ça va être aussi les
contenants de verre et de plastique qui le seront, et même, ce qu'on a appris,
même les contenants de carton un peu plus tard.
Et le premier ministre tenait à se
féliciter en disant : Bien, nous avons tenu tête aux lobbyistes. Bien, à
mon tour, moi, j'ai envie de leur dire bravo, bravo au premier ministre, bravo
aussi au ministre de l'Environnement, Benoit Charette, d'avoir résisté aux
lobbyistes qui se sont battus longtemps comme le diable dans l'eau bénite pour
que cette consigne-là ne voie pas le jour au Québec. Et j'ai envie aussi de
dire : Enfin! Enfin, tous les groupes qui se sont battus depuis de
nombreuses années, qui ont appelé de tous leurs voeux cette consigne qui était
tout simplement le gros bon sens pour régler une bonne partie de la crise de
recyclage...
Et aussi, Québec solidaire, ça fait de
nombreuses années qu'on a vu un ministre libéral, un ministre péquiste après
l'autre, un après l'autre, échouer à mettre cette réforme importante en place. Et,
plus récemment, à Québec solidaire, j'avais demandé un mandat d'initiative pour
étudier pas derrière les portes closes, mais en commission parlementaire,
devant les caméras, pour entendre tout le monde puis étudier cette question-là
qu'on est en train de régler, maintenant, avec cette annonce. Donc, il ne faut
pas se décourager. Les choses n'avancent pas vite, mais, au moins, ça arrive.
Il y aurait des éléments et des
questionnements, des choses à surveiller dans cette réforme. Je n'ai pas envie
de gâcher le plaisir maintenant, on va avoir le temps d'y revenir. Aujourd'hui,
il faut vraiment savourer cette victoire. Puis la consigne, c'est aussi une
bonne base sur laquelle commencer à travailler.
Ça arrive, cette nouvelle-là, quand même à
un drôle de moment, presque quelques jours après que des centres de tri aient
menacé de fermer. Et ce n'est pas la première fois que ça arrive. Personne n'a
été surpris. On est déçus, on est choqués, mais on n'est pas surpris. Ça fait
10 ans que le système de recyclage est en crise. Ça a été exacerbé, depuis
deux ans, avec la fermeture des marchés de la Chine et de l'Inde, et la question
qu'il faut se demander, c'est : Qui est responsable, qui est imputable,
qui est redevable de cette question-là, toute cette crise du recyclage?
C'est sûr que le ministre de l'Environnement
a un rôle extrêmement important à jouer. Mais il y a aussi RECYC-QUÉBEC. On se
rappelle que RECYC-QUÉBEC a été créé, mis sur pied il y a 30 ans pour
s'occuper du recyclage pour que les matières que les citoyens font l'effort,
chez eux, de mettre dans leurs bacs de recyclage, qu'ils font le tri, bien, que
ça soit réellement recyclé. Donc, aujourd'hui, c'est extrêmement décourageant
pour tout le monde de voir que ces efforts-là, bien, ne portent pas fruit.
Moi, si j'avais été nommée ministre de
l'Environnement à la place de Benoit Charette, il y a un an, la première chose
que j'aurais faite, c'est d'aller voir RECYC-QUÉBEC et de poser des questions.
J'aurais demandé : Comment ça se fait que vous avez autant de misère à
nous donner des chiffres, à nous donner les vrais chiffres du taux de
recyclage? Vous savez, quand il y a une crise, la première chose qu'on dit :
Bien, on va se resserrer, on va aller fouiller un peu plus, voir qu'est-ce qui
se passe. Eh bien, tout ce qu'on voit avec RECYC-QUÉBEC, c'est un relâchement. Puis
il y a deux raisons : soit c'est un manque de rigueur, soit c'est un
manque de transparence, puis on ne va pas nous donner les chiffres. Et, dans
les deux cas, c'est extrêmement problématique.
Donc, la question qu'il faut se demander,
c'est : Où est le problème? Est-ce que c'est un manque de ressources à
RECYC-QUÉBEC? Est-ce que RECYC-QUÉBEC a les mains liées, ne peut pas bouger?
Est-ce qu'il lui manque des pouvoirs? Est-ce qu'il y a des problèmes internes
dans l'organisation? Qu'est-ce qui se passe?
C'est pour ça qu'aujourd'hui Québec
solidaire demande que les élus parlementaires aient l'occasion de questionner
RECYC-QUÉBEC, de questionner sa P.D.G., Sonia Gagné, qu'elle vienne ici à
l'Assemblée nationale, qu'on puisse lui poser toutes ces questions-là que,
peut-être, le ministre n'a pas posées.
Vous savez, pour la consigne, on est allés
en profondeur, et là on est en train de la régler. Bien, il faut faire la même
chose aussi pour la crise du recyclage. Ce qui est important, c'est de se poser
les bonnes questions pour ne pas répéter les mêmes erreurs, savoir c'est quoi,
la cause, l'origine. Et c'est la raison pour laquelle je demande aujourd'hui au
ministre d'appeler, de demander à Mme Sonia Gagné de venir ici pour qu'on
puisse lui poser toutes les questions puis qu'on puisse après ça régler cette crise
qui dure depuis trop longtemps. Merci.
M. Larin (Vincent) : Bonjour,
Mme Ghazal. Est-ce qu'il y a d'autres acteurs comme ça que vous aimeriez
entendre, peut-être, pour aider à résoudre la crise du recyclage, outre la P.D.G.
de RECYC-QUÉBEC?
Mme Ghazal : Bien, moi, la
demande aujourd'hui que je fais, c'est vraiment RECYC-QUÉBEC parce que c'est
lui qui doit avoir le leadership, qui a manqué visiblement, qui doit avoir le
leadership par rapport à cette question-là, qu'est-ce qui fait qu'aujourd'hui
on est devant cet échec. C'est lui qui a ce rôle-là, et le ministre a le rôle
et la responsabilité de demander à RECYC-QUÉBEC. Donc, je ne fais pas ma
demande pour tout le monde. On l'a fait pour la consigne, avec le mandat
d'initiative, où tous les acteurs sont venus en commission parlementaire. Cette
fois-ci, on le demande uniquement pour RECYC-QUÉBEC pour quelques heures, qu'on
pose des questions, toutes les questions puis qu'on voie c'est quoi, le
problème.
M. Larin (Vincent) : On
entendait aussi Greenpeace, par exemple, dire que c'est un bon premier pas,
l'élargissement de la consigne aujourd'hui. Peut-être qu'éventuellement ça
pourrait mener à l'interdiction des contenants en plastique à usage unique.
Pensez-vous que c'est la prochaine étape? C'est un bon premier pas, ce qu'on
voit?
Mme Ghazal : Écoutez, vous
savez, les... Oui, absolument. Moi, je viens de le dire, là, je ne veux pas
bouder mon plaisir, et on dit que, bien, bravo d'avoir mis ça en place. C'était
attendu depuis longtemps. Puis c'est sûr que ce n'est pas fini. Après ça, on ne
s'assoit pas sur nos lauriers, la crise du recyclage ne va pas être terminée
avec cette consigne-là. Ce qui va être important, c'est de tout revoir.
Puis on les connaît, là, les solutions, ça
fait de nombreuses années. Par exemple, ce que les producteurs mettent comme
produits sur le marché, leurs produits suremballés, bien, il faudrait peut-être
interdire ceux qui sont difficilement recyclables parce qu'en ce moment c'est
la société au complet qui paie pour ça puis qui se retrouve avec ce
problème-là, alors que c'est à eux de le faire.
Il faudrait aussi... On peut créer un
marché, hein? On parle de l'économie circulaire, donc, il... Pourquoi est-ce
qu'on les exporte, ces matières-là? Si on imposait aux producteurs que, leurs
emballages, il y ait un certain taux de recyclage, par exemple, pour les
contenants de verre, les contenants de plastique, bien, peut-être, là, ça va
créer un marché, ça va créer une demande, ça va faire en sorte qu'on va prendre
les matières recyclées ici au lieu de les exporter.
Donc, il y a beaucoup de solutions qui
circulent, qui se discutent. Mais la première chose à faire, c'est... Comment
ça se fait qu'on connaît tout ça, qu'on en parle tout le temps puis que c'est
un échec aujourd'hui? Comment ça se fait qu'on n'est pas capables d'avoir les
chiffres? Et ces questions-là, bien, il faut le demander à RECYC-QUÉBEC, et
c'est à eux de nous répondre. C'est ça qu'il faut faire en premier puis revoir
tout le système après ça.
On injecte des millions, des millions dans
les centres de tri. Bien, il ne faut pas rester juste dans les centres de tri.
Il faut aller partout, du bac pêle-mêle aux produits qu'on met sur le marché, tout
doit être remis en question. Mais, pour le moment, c'est : Questionnons
RECYC-QUÉBEC.
M. Dutrisac (Robert) : C'est
ça. Là, on s'assure de récupérer davantage de bouteilles en verre et de
bouteilles en plastique. Qu'est-ce qui nous assure que... Et ces bouteilles-là
ne seront pas réutilisées, elles vont être recyclées. Mais qu'est-ce qui nous
assure qu'elles ne seront pas... qu'elles seront justement recyclées? Est-ce
qu'on a vraiment l'infrastructure pour recycler à la fois le plastique
additionnel qui va être récupéré et le verre également?
Mme Ghazal : En fait, là, on
est très, très bons au Québec pas pour recycler, mais pour récupérer.
Récupérer, ça, on n'a aucun problème. Donc, ça, pour les récupérer, on en
récupère beaucoup. Là, maintenant, on récupère, et toute la matière est de très
mauvaise qualité, qui sort des centres de tri. Donc, le problème, ce n'est pas
qu'on n'est pas capables d'en avoir, c'est qu'ils sortent de mauvaise qualité.
Là, maintenant, en sortant ces
contenants-là du bac bleu, les contenants maintenant qui vont être consignés,
là, on s'assure qu'on va avoir des matières de bonne qualité. Le verre qui est
consigné, il ne contient pas d'autre chose que du verre.
Puis la récupération, les Québécois sont
prêts à ça, là. J'entendais les vox pop, et tout ça, puis on est dans le
dossier depuis très, très longtemps, les gens, ils veulent faire des efforts.
Eux autres, ils ne sont pas contents, en disant : Ah! ça va être plus
facile de tout mettre pêle-mêle. Puis, s'ils savent qu'après ça ça ne donne
rien puis que ça va être dans les poubelles, bien, ça ne les intéresse pas. Ils
sont prêts à faire cet effort-là. Donc, c'est ça que ça vient faire.
Après ça, pour le recyclage, parce que
c'est de bonne qualité, bien, il y a des gens, des entreprises qui attendent
d'avoir ces matières-là. Donc, il va y avoir un marché.
M. Dutrisac (Robert) : Il y a
déjà un marché.
Mme Ghazal : Bien, là, le
marché va se développer encore plus, par exemple, pour le plastique. Pour le
verre, il existe. Par exemple, il existe une fonderie, et tout ça. Mais il va y
en avoir de plus en plus. Plus il y a de l'offre, plus la demande, aussi, va
arriver. Parce que ces entreprises-là qui n'en ont pas du Québec, là, qui ne
sont pas capables d'avoir la matière du Québec, bien, ils vont la chercher
ailleurs. Et, en ayant des matières de bonne qualité, bien, ça va inciter les
compagnies puis les entreprises à dire : Bien, on va pouvoir avoir des
matières recyclées ici plus facilement. Puis c'est tout un écosystème. Puis la
consigne n'assurera pas ça toute seule, là. Il faut vraiment qu'il y ait, par
exemple, une loi-cadre sur l'économie circulaire. Comment est-ce qu'on va
favoriser ce système-là d'éclore? La consigne est une bonne, excellente étape.
M. Dutrisac (Robert) : Donc,
l'idée de l'obligation d'avoir des éléments de matière recyclable dans les
nouveaux emballages, ça serait un pas dans la bonne direction?
Mme Ghazal : Absolument. Oui?
M. Bossé (Olivier) : Bien,
première chose, bravo de saluer un geste du gouvernement.
Une voix
: Surtout en environnement,
hein?
Mme Ghazal : Il ne faut pas
être cynique.
M. Bossé (Olivier) : Non,
non, c'est ça. Tu sais, c'est tout à votre honneur.
Mme Ghazal : Merci.
M. Bossé (Olivier) : C'est
quand même dans deux ans, ou dans... C'est quoi, dans cette année et demie là,
qu'il est important de faire, de suivre pour que ça soit bien mis en place?
C'est quoi, l'étape la plus importante?
Mme Ghazal : Bien, en fait, ce
n'est même pas dans un an et demi, c'est dans... Automne 2022, c'est presque
trois ans, il me semble, je ne sais pas... ou deux ans. Automne 2022. Là,
on est en 2020. Oui, c'est ça, exactement, deux ans et demi, disons, si on
arrondit. Oui.
Journaliste
: ...un peu
plus.
Mme Ghazal : Oui. Donc, nous,
ça c'est une des choses qu'on dit : Ah! ça aurait pu être plus tôt, mais,
bon... Bien, en fait, c'est sûr qu'il va falloir voir... un des
questionnements, c'est ce qu'on dit, c'est que c'est RECYC-QUÉBEC qui va
chapeauter ça, puis ça va être un organisme reconnu par RECYC-QUÉBEC qui va
vraiment le faire. Ça va être les gens de l'industrie qui vont le faire.
Puis, la question que je demande : Ça
va être qui? Est-ce que ça va être Éco Entreprises Québec, qui gère maintenant
le bac bleu, par exemple? Éco Entreprises Québec, on sait, s'est battue très,
très, très fortement, est venue en commission dire : Nous sommes contre la
consigne, on ne veut pas qu'elle voie le jour. Est-ce que ça va être eux? Ce
n'est pas écrit, ça, ce n'est pas encore communiqué. Est-ce que ça va être un
autre organisme?
Ça fait qu'il va falloir voir qui va le
chapeauter, ce système-là, ou si les détaillants ne sont pas obligés de les
avoir. Ce n'est pas obligé. La SAQ, ce n'est pas obligé, il va falloir qu'ils
présentent un plan, d'ici un an, puis disent comment ils vont le faire. Donc,
ça va être important que ce soit simple, aussi, pour le citoyen. Ils disent :
Peut-être certaines SAQ Dépôt vont l'avoir, d'autres non. Donc, il va falloir
voir le déploiement des 400 dépôts. 400 dépôts, c'est quand même un bon
chiffre, là, pour le Québec. Maintenant, est-ce que ça va vraiment être
déployé? Est-ce qu'on va arriver, dans deux ans et demi, il va y en avoir juste
la moitié, etc.? Donc, ça, ça va être des questions, aussi, qu'on demande.
Autre chose extrêmement importante qui
avait fait l'unanimité, là, de tous les élus qui étaient autour de la
commission, ils disaient que ça n'a pas de bon sens qu'on utilise le verre
parce qu'il est tellement de mauvaise qualité. Donc, on va l'enfouir puis on va
le mettre comme couche de recouvrement sur les sites d'enfouissement. Cette
pratique-là existe toujours. Elle a été mise en place comme solution temporaire
il y a 10 ans. Et donc, là, la question... Moi, je suis étonnée de ne pas
avoir vu ça : Interdiction de cette pratique d'enfouir le verre. Ça fait
que ça, ça va être important. C'est une question que je demande.
Moi, si je l'interdisais, je serais fière
de dire : Bien, c'est interdit, cette pratique-là. Ce ne l'est pas
annoncé. Ça ne veut pas dire que ce n'est pas fait. Je ne le sais pas. On
laisse la chance au coureur. Ça fait partie des questionnements qu'on a puis qu'on
va suivre. Parce que, si cette pratique-là existe pendant qu'on fait le
déploiement puis le projet pilote, ça n'incite pas trop au changement. Le
changement va être extrêmement lent. C'est quand même lent, là. Nous, on aurait
aimé ça que ce soit plus vite. On a le temps quand même, mais, bon... Merci.
Merci beaucoup.
(Fin à 10 h 43)