(Neuf heures quatre minutes)
M. Marissal : Alors, bonjour.
Bonne année, puisque je n'ai pas eu l'occasion de vous le souhaiter. On
commence à être tard, mais je n'avais pas eu l'occasion de vous voir pour la
plupart d'entre vous.
La première des choses que je voudrais
dire, c'est qu'il y a péril en la demeure, vous le savez, pour les retraités du
Groupe Capitales Médias. Ils ont fait une cause en appel. On attend cette
décision incessamment. Ça pourrait venir aujourd'hui, ça pourrait venir demain.
Peu importe la décision de la Cour d'appel, qui entendra ou non la suite des
choses, les retraités de Groupe Capitales Médias perdront, si rien n'est fait,
entre 15 % et 30 % de leur modeste rente de retraite.
Je relance le débat, je rallume le feu
sous la soupe parce que le gouvernement, avant de partir pour la période des
fêtes, s'est dit peiné. J'ai eu des conversations privées et publiques avec
certains ministres qui disent que c'est catastrophique pour ces gens-là, c'est
bien de valeur, ils sont peinés de ça. Sauf que la peine des ministres, ça ne
paiera pas la perte des retraités du Groupe Capitales Médias.
Et il existe des solutions. La plus
simple, ce serait que Power Corporation du Canada prenne ses responsabilités de
bon citoyen corporatif et renfloue la caisse, à tout le moins, pas complètement,
mais à tout le moins pour permettre aux retraités actuels de ne pas perdre les
30 %.
Et je rappelle ici qu'on ne parle pas de
centaines de millions de dollars. C'est modeste. La plupart de ces retraités-là
ont des rentes très modestes. Quelques-uns, par exemple, avaient une retraite
de 15 000 $ par année, tomberont à 12 000 $ par année.
C'est des gens de 80 ans et plus dans ces cas-là.
Alors, vous comprendrez qu'on ne parle pas
ici de centaines de millions de dollars pour Power, on parle simplement d'un
geste décent d'une entreprise qui a fait de l'argent pendant des années avec
ces gens-là, qui a fait un stratagème avec Martin Cauchon pour se dégager de
ses responsabilités dans Le Groupe Capitales Médias, qui a laissé couler le
navire et ensuite qui s'en lave les mains en disant : Bien, tant pis.
Alors, ce que je dis à Power, c'est :
Vous avez la responsabilité morale d'envoyer une bouée de sauvetage à ces
gens-là que vous êtes en train de laisser couler.
Si d'aventure ça ne se fait pas, le gouvernement
a quand même des options. Et je demande ici, aujourd'hui, formellement au gouvernement,
de un, de faire un état des lieux et, de deux, de lancer une étude pour analyse,
ce printemps, de la création d'un régime d'assurance retraite au Québec, comme
ça se fait en Ontario depuis 25 ans. Ça fonctionne en Ontario, ça a
résisté à des gouvernements hyper de droite, notamment Mike Harris, Ernie Eves,
et ça résiste en ce moment à Doug Ford.
Alors, inutile de dire que ce n'est pas
considéré comme une mesure communiste, c'est une mesure de bon citoyen
corporatif envers les employés. C'est une mesure qui permet simplement aux
retraités, en cas de coup dur pour leur entreprise et en cas de faillite, de
juste garder la tête en dehors de l'eau.
Et c'est ce qu'on demande au gouvernement.
On demande au gouvernement d'étudier rapidement la mise en place d'un tel
régime. Le Québec est horriblement en retard là-dessus. Le premier ministre
aime beaucoup se comparer à l'Ontario. Dans ce cas-ci, ça s'applique. L'Ontario
l'a fait. Et la beauté de l'affaire, en Ontario, c'est que l'expérience
démontre, après 25 ans, qu'un fonds comme celui-là s'autofinance. En Ontario,
le fonds a un surplus de 750 millions de dollars.
Alors, je pense que le gouvernement a la responsabilité
politique de prendre le leadership là-dedans et de mettre sur pied rapidement
un tel régime qui, à terme, ne coûtera strictement rien aux contribuables. C'est
les contributions d'entreprises et d'employés, et le fonds s'autofinance, un
peu comme la SAAQ, ici, ou d'autres organismes d'assurances mutualisées.
Alors là, le gouvernement doit prendre ses
responsabilités, cesser les larmes de crocodile, dire que c'est bien plate pour
les retraités du Soleil, et puis mettre sur pied un programme qui
pourra, à tout le moins, aider dans le cas de prochains coups durs. Je vous
écoute.
Mme Plante (Caroline) :
Bonjour, M. Marissal.
M. Marissal : Bonjour.
Mme Plante (Caroline) : Vous
dites que vous vous êtes entretenu avec des ministres. Qu'est-ce qu'ils vous
ont répondu? Vous avez lancé cette idée; qu'est-ce qu'ils vous ont répondu?
M. Marissal : L'idée circule.
Je n'en prendrai pas la paternité exclusive, mais c'est vrai que j'ai beaucoup
travaillé là-dessus. Ça existe ailleurs. Des ministres m'ont dit qu'ils sont extrêmement
peinés de ce qui arrive aux retraités du Soleil. Soit, je les crois,
puis la bonne foi se présume, puis je suis persuadé que des gens comme Pierre
Fitzgibbon ou Eric Girard sont effectivement très peinés. Même le premier
ministre l'a dit publiquement. Sauf que la peine des ministres, ça ne sauvera
pas la retraite de ces gens-là.
Là, il y a des retraités du Soleil
et de d'autres journaux du Groupe Capitales Médias, de l'ex Groupe Capitales
Médias, qui se retrouvent dans des situations extrêmement périlleuses,
pénibles, pitoyables, de devoir même changer de maison de retraite, alors que
vous pouvez imaginer qu'avec 15 000 $ de rente par année ils
n'étaient pas dans des penthouses, des plus belles résidences au Québec, là.
Ils doivent néanmoins, à 82 ans, changer de résidence.
Alors, il s'agit de cas humains, de cas
graves de gens qui ont travaillé toute leur vie et qui ont été complètement
largués par Power Corp, qui s'est lavé les mains, qui a fait un stratagème avec
Martin Cauchon sur quelques années. Martin Cauchon qui, finalement, a été le
grand fossoyeur de cette entreprise-là. Puis en plus, excusez-moi, là, mais on
a appris, là, avant Noël, que Martin Cauchon se versait un salaire des 500 000 $
par année. J'ai mal au coeur, mal au coeur.
Alors, que Power... De un, là, si Power
prend ses responsabilités puis dit : O.K., très bien, on a une
responsabilité. D'ailleurs, on l'a fait pour LaPresse, j'en
sais quelque chose. Si on l'a fait pour LaPresse, on peut
le faire pour les autres. Prenons nos responsabilités, ça règle le problème
pour ces retraités-là. Après ça, le gouvernement prend ses propres
responsabilités et établit un régime d'assurance retraite.
Mme Plante (Caroline) :
Mais, pour répondre à ma question, est-ce que les ministres ont démontré un
quelconque intérêt à aller dans cette direction-là? Parce qu'on se rappelle que
M. Legault avait dit : Moi, je ne peux pas rien faire; je peux
peut-être faire quelque chose pour l'avenir, mais pas pour le passé en tout cas.
M. Marissal : Regardez, je
ne lis pas dans les feuilles de thé, là, mais ce que j'ai compris des
conversations privées que j'ai eues avec certains ministres, c'est qu'ils ne
sont pas fermés. Puis, de toute façon, pourquoi se fermer? C'est une bonne idée,
ça fonctionne, la preuve est faite. «The proof is in the
pudding», comme on dit en anglais, là. Ça fonctionne en Ontario et ça
marche bien en Ontario. Bon, des fois, les Ontariens, on peut aussi s'en
inspirer. Dans ce cas-là, ça fonctionne bien. Alors, je vais m'accrocher aux
lueurs d'espoir que j'ai perçues dans les discussions avec les ministres à qui
j'ai parlé, les déclarations publiques du premier ministre, qu'ils doivent
faire quelque chose.
Mais il y a autre chose que ces
ministres-là peuvent faire. Ils ont le pouvoir de prendre le téléphone puis de
profiter des prochains cocktails, à Montréal et ailleurs, pour faire des
pressions sur Power Corp puis leur dire : Franchement, là, pas fort, ce n'est
pas fort, votre affaire; puis, si vous réglez ça comme ça, on règle un gros
problème.
Mme Plante (Caroline) :
Si on crée un régime d'assurance retraite, au Québec, ça ne va pas
nécessairement aider les retraités de l'ex-Groupe Capitales Médias.
M. Marissal : Ce pour
quoi je dis que ça serait bien plus simple puis ça aurait été la décence
élémentaire, de la part de Power, de s'occuper de son monde. Parce que, vous
savez, il y a une époque où l'argent, là... on disait que les Desmarais
n'imprimaient pas juste du papier, ils imprimaient de l'argent. Puis c'est vrai
parce qu'à une certaine époque, là, puis je l'ai connue, l'époque glorieuse des
journaux, je suis assez vieux pour ça, ils faisaient de l'argent comme de
l'eau, là. Rappelez-vous, là, les éditions du samedi, là, additionnez toutes
les petites annonces, là, à 5 $, là, aie! ça faisait de l'argent comme de
l'eau, là. Effectivement, on imprimait de l'argent. Alors, si, de façon
décente, en bon citoyen corporatif, Power avait pris cette décision de venir en
aide à ces gens-là, on n'en serait pas là.
Après, est-ce qu'il existe des façons
rétroactives d'aider ces gens-là? On est en train d'étudier ça. Ça va me faire
un immense plaisir de revenir devant vous avant longtemps. Pour le moment, je
n'avancerai pas de chiffre, mais il existe des solutions. Et je sais, j'ai
entendu entre les lignes aussi qu'il y a des discussions entre les ministres
fédéraux et les ministres provinciaux. S'il y a une quelconque aide fiscale que
l'on peut aller chercher, bien, bon sens! allons-y chercher.
On parle de gens, ici, là, de gens qui ont
travaillé toute leur vie, qu'on a pillés, dont on a pillé, carrément, la caisse
de retraite, je le répète, par un stratagème douteux qui a permis finalement à
Martin Cauchon d'enterrer Groupe Capitales Médias.
Puis rappelez-vous pourtant que, quand
Martin Cauchon venait ici réclamer de l'argent pour sauver son affaire, le
gouvernement était toujours prêt à faire un chèque. On a englouti combien
d'argent public là-dedans? 20 millions, au moins, au dernier décompte?
Puis effectivement c'était peut-être la chose à faire, mais ça aurait dû venir
avec des garanties. Là, maintenant qu'on a des retraités qui sont largués, là,
qu'on a laissé tomber en bas de l'autobus, là, on ne fait plus rien, à part des
larmes de crocodile pour dire : C'est bien de valeur.
Mme Plante (Caroline) : Vous
dites que le régime s'autofinancerait à long terme, mais à court terme comment
ça coûterait, d'après vous, le créer?
M. Marissal : C'est là où je
ne veux pas m'avancer dans les chiffres. Parce que là, après ça, vous allez
dire : Marissal réclame tant de millions. Mais je pense qu'avec une
mise...
Mme Plante (Caroline) : Vous
étudiez la question. En Ontario, c'est combien? Ça a coûté combien?
M. Marissal : Oui... Je ne le
sais pas parce que le régime en Ontario date de 25 ans, alors je dois
retourner... c'est les travaux que je suis en train de faire. Mais moi, je peux
imaginer assez bien qu'avec une mise de fonds assez modeste, juste pour partir
le fonds, pour partir le régime d'assurance publique, hein, un peu comme la
SAAQ, on a fait dans le temps, là, avec Lise Payette, en 1977, je pense qu'avec
une mise de fonds assez modeste on serait capable de lancer ce fonds-là,
inciter les entreprises à embarquer là-dedans.
Puis je plaide même que non seulement le
fonds s'autofinancerait en quelques années à peine... Parce que des faillites
retentissantes à la Groupe Capitales Médias, heureusement, on n'en a pas si
souvent que ça. Et c'est pour ça qu'il faut venir en aide à ces gens-là. Mais
je plaide même que, pour les entreprises, en période de raréfaction de la
main-d'oeuvre, c'est un plus. Vous offrez une assurance à vos employés avec un
fonds de pension. Moi, je pense que ça fait partie du panier qu'on offre à des
candidats et des candidates, en disant : Viens travailler chez nous. Puis
on le sait, en ce moment, que les employeurs s'arrachent les bons candidats.
Mme Plante (Caroline) : J'ai
une dernière question.
Une voix
: Oui.
Mme Plante (Caroline) : Tu en
as aussi? Ma dernière question, c'est : Bien, on attend une décision en
appel, on ne sait pas trop ce qui va se passer avec ça, mais voyez-vous d'un
bon oeil un éventuel recours collectif dans cette cause-là?
M. Marissal : Là, je vais me
réserver... je vais réserver mes commentaires pour le moment, d'autant que
c'est devant la Cour d'appel. On attend la décision incessamment. Là-dessus,
moi, je peux faire de la pression politique, prendre le leadership ici pour
dire au gouvernement : On se réveille, là, on fait quelque chose pour ces
gens-là. Ça, c'est mon rôle d'élu. Pour le reste, je vais vraiment laisser ça
entre les mains des retraités du Soleil. Puis vous le savez comme moi
qu'ils sont déchirés, là, ils sont déchirés, dans cette affaire-là, parce
qu'ils veulent que la coop marche, tout le monde veut que la coop marche, mais
ils ne veulent pas non plus se retrouver dans l'indigence. Et puis ils ont un immense
sentiment d'injustice, que je partage. C'est là-dessus où je peux intervenir ce
matin. Et je continuerai d'intervenir d'ailleurs.
Mme Plante (Caroline) :
Est-ce que vous êtes d'accord avec les arguments qui ont été soulevés comme
quoi cette affaire-là met en péril le plan de relance, les demandes des
retraités, que ça mettrait en péril le plan?
M. Marissal : Tout ce que je
vais dire là-dessus, pour le moment, c'est que tout le monde veut que la
relance fonctionne et que le modèle coopératif, qui est une sacrée bonne idée,
d'ailleurs, fonctionne. Puis, au risque de me répéter, il y avait une façon
bien, bien simple d'éviter tout ce merdier-là, c'est si Power avait pris ses responsabilités
puis s'était comporté comme un bon citoyen corporatif.
La Modératrice
: Merci.
Louis Lacroix.
M. Lacroix (Louis) : Bonjour.
Juste une petite précision, là, mais est-ce que vous demandez, dans la création
de ce fonds-là, de fonds de retraite public, qu'il y ait une rétroaction pour
les gens de Groupe Capitales Médias? Je veux que ce soit clair : Il
faudrait-u qu'il y ait une rétroaction?
M. Marissal : Oui. Dans le
meilleur des mondes, oui, mais pas seulement pour les gens de Groupe Capitales
Médias. C'est là où je vous dis qu'il y a des travaux à faire. Moi, je peux les
faire...
M. Lacroix (Louis) : Parce
que ça va arrêter où, là? Parce que les gens de chez Résolu, il y a une couple
d'années, eux autres aussi, ils ont perdu de l'argent.
M. Marissal : Vous avez
raison. Bien, c'est là où j'en suis. Alors, moi, je peux dire ça, je peux faire
les recherches, on les fait, je vais les faire, je vais continuer, mais je n'ai
évidemment pas les moyens dont dispose le ministre des Finances, ça, c'est
clair.
Alors, il y a une chose qui est sûre, c'est
que le régime d'assurance retraite, ça fonctionne. Ça fonctionne. Ça fonctionne
en Ontario, ça fonctionnerait ici, il n'y a pas de raison que ça ne fonctionne
pas ici. Est-ce qu'on peut trouver une façon de mettre une mise de fonds, qui
serait autofinancée par les prochaines années du roulement du fameux régime
d'assurance, qui permettrait de couvrir rétroactivement certains retraités?
Puis, là encore, il n'y en a pas des centaines de milliers, hein, il y en a
quelques-uns, là, les cas sont connus.
Moi, je demande, dans un premier cas, là,
de prendre des mesures pour le moyen et le long terme, c'est-à-dire un régime
d'assurance emploi. Si c'est possible... Je comprends qu'on ne joue pas avec de
l'argent de Monopoly, là, mais on va avoir 5 milliards de surplus, ici, 5 milliards
au bas mot. S'il n'en coûtait que quelques millions pour une mise de fonds,
dans un régime d'assurance emploi, pour sauver du monde de l'indigence la plus
sordide...
M. Lacroix (Louis) : Là, je
vais en appeler à votre rôle de député, là, votre morale de député. Avant-hier,
on a appris qu'en fait on n'allait pas porter en appel le jugement
Gladu-Truchon sur l'aide médicale à mourir, et ça ouvre la porte à ce que des
personnes qui souffrent d'une maladie mentale puissent avoir recours à l'aide
médicale à mourir. On a même décidé... en fait, on a confié, là, au Collège des
médecins la tâche d'établir le cahier de charges, si on veut, la façon dont...
Est-ce que vous êtes d'accord avec ça, vous? Est-ce que vous êtes d'accord avec
le fait que des personnes qui ne sont pas en fin de vie, qui n'ont pas de
souffrance physique aient... et qui sont, par surcroît... qui ont une maladie
mentale, donc, qui altère possiblement une partie de leur jugement, aient accès
à l'aide médicale à mourir?
M. Marissal : Moi, je ne suis vraiment
pas le spécialiste des grandes, grandes maladies et des pathologies...
M. Lacroix (Louis) : Je
comprends, M. Marissal, mais éventuellement, là?
M. Marissal : Non, mais c'est
parce que je...
M. Lacroix (Louis) : C'est
une question de morale, là.
M. Marissal : Je contesterais,
en tout respect, l'idée que des gens qui souffrent de maladies mentales n'ont
pas de séquelles physiques et de répercussions physiques. Vous savez, les gens,
là, qui souffrent de graves, graves dépressions pendant des années, des années,
des années, qui ne sont plus capables de se lever le matin, là, c'est vachement
physique, mais je ne suis pas en train de dire que ces gens-là devraient avoir
droit à l'aide médicale à mourir.
Là-dessus, vraiment, je pense qu'on a
besoin d'une grande, grande consultation publique, ce qui a été demandé,
notamment, par Véronique Hivon, mais par nous aussi. Et je pense que c'est là
qu'on doit aller. On doit se faire un immense : Il faut qu'on se parle, y
compris de maladies mentales. Moi, je ne suis pas capable aujourd'hui,
M. Lacroix, en toute franchise, là, de vous dire oui ou non là-dessus.
Oui, il y a des questions morales, il y a
des questions éthiques, il y a des questions légales là-dedans. Je n'ai
certainement pas la prétention d'avoir les connaissances, les compétences et
même de m'être fait une tête complète là-dessus. Ça évolue, ça bouge. Mais,
chose certaine, c'est que le gouvernement doit revenir à cette bonne pratique,
qui avait cours dans ce dossier-là, d'élargir la discussion le plus possible.
Il n'y a pas le feu nulle part, on n'est pas obligé de dire tout de suite oui
ou non là-dessus. Ça a pris des années à arriver avec la première mouture de la
première loi, et c'est correct de le faire comme ça.
Et par ailleurs, moi, j'ai lu des articles
déchirants de gens qui disent : Si on avait des soins, je ne serais pas en
train de demander... je ne serais pas en train de penser demander de l'aide à
mourir. Alors, oui, mourir dans la dignité, là, mais vivre et guérir ou être
soigné dans la dignité, ça devrait être la priorité aussi.
M. Lacroix (Louis) : Et donc
la date du 12 mars. On comprend que la date du 12 mars, là, c'est lié
à la période qu'avait donnée la Cour supérieure pour que le Québec adapte sa
loi le cas échéant. Est-ce que vous voyez une urgence à permettre ça à compter
du 12 mars? Parce que le Collège des médecins lui-même dit : Écoutez,
nous autres, pas sûr qu'on va être capables de statuer d'ici là, là.
M. Marissal : De toute
évidence. Et j'apprécie la lucidité du Collège des médecins là-dessus. Ça ne
serait pas la première fois qu'un gouvernement demande un report. Et je pense
que généralement les tribunaux ont une espèce de sagesse, comprendraient très
bien que ce n'est pas un yogourt, il n'y a pas une date de péremption
là-dessus, là. On peut prendre notre temps de bien faire les choses. Puis je
pense qu'il n'y a pas un seul juge au Québec qui dirait que ça n'a pas de bon
sens. Ce qui n'a pas de bon sens, là, c'est de se borner à dire : Il y a
une date, il y a une date, donc il faut absolument qu'on arrive avec quelque
chose avec lequel, après, on va vivre ou mourir, là, c'est selon.
Alors, il n'y a pas d'urgence, pour
répondre à votre question, il n'y a pas d'urgence. Ça ne veut pas dire de
prendre huit ans, là, ça veut dire : On fait ça correctement.
M. Lacroix (Louis) :
Prendre le temps que ça prend, finalement, là.
M. Marissal : Oui.
M. Lacroix (Louis) : Mais le
fait que le gouvernement soit arrivé sans... qu'il n'ait même pas eu l'idée de
demander une consultation là-dessus? Ils sont arrivés en disant :
Regardez, c'est fait; nous autres, on ne va pas en appel puis on a confié ça au
Collège des médecins. C'est un peu comme s'ils s'en lavaient les mains d'une
certaine façon, alors que toute cette loi-là avait été élaborée en consensus et
en discussion avec l'ensemble des groupes intéressés et des partis politiques.
Qu'est-ce que ça vous dit sur...
M. Marissal : Oui, et
avec des députés de la CAQ qui étaient là à l'époque. Bien, c'est pas mal à
l'avenant de ce gouvernement-là en général sur pas mal toutes les décisions.
Sauf que là, dans ce cas-ci, on parle, et vous l'avez bien nommé, d'un cas très
moral, là, d'une question éthique, morale, politique, législative et juridique.
Alors, il n'est pas trop tard pour bien faire. On peut encore rappeler le monde
à la table et discuter.
La Modératrice
:
Valérie Gamache.
Mme Gamache (Valérie) :
Je vais vous ramener à Power Corp. Au-delà d'aller dans les cocktails et de
faire de la pression, qu'est-ce que, concrètement, le gouvernement peut faire
pour forcer une entreprise privée, réellement, à peut-être s'impliquer dans le
remboursement? Est-ce qu'il y a des actions, à votre avis, qui devraient être
prises, que ce soient des actions légales ou quoi que ce soit?
M. Marissal : La voie
légale me semble un peu biscornue. Par contre, le leadership politique, ça
existe.
Mme Gamache (Valérie) :
Et vous avez parlé des ministres fédéraux tout à l'heure. Qu'est-ce que le
fédéral peut?
M. Marissal : J'ai dit
que j'ai eu vent de discussions. Vous savez, le grand livre de la fiscalité est
assez épais. Il y a possiblement des avenues.
Moi, ce qui me choque particulièrement
là-dedans, Mme Gamache, c'est que, quand les Bombardier de ce monde ont
besoin d'argent, là... Puis, encore là, là, ils dorment sur le seuil de la
porte de M. Legault pour redemander de l'argent, quand il va revenir de
Davos, là. Puis on connaît à peu près tous ce qui va se passer, on a vu ce
film-là, là, on joue dedans depuis des années, là. Alors, quand les Bombardier
de ce monde viennent demander de l'argent, ici, ou même Martin Cauchon, quand
il venait demander de l'argent ici, il y a toujours un ministre qui a un chèque
présigné, il reste juste à mettre le montant. Mais là on parle de quelques
dizaines de retraités qui se retrouvent vraiment dans la dèche, et, pour ces
gens-là, on n'a rien, on fait... Alors, ça manque terriblement de leadership
politique, ça manque d'audace et ça manque aussi de décence.
Tous les jours, les ministres d'un
gouvernement se font lobbyer par des gens, notamment, de Power ou d'ailleurs.
Il y a des liens, ils sont capables de se parler. Si ce gouvernement-là met la
pression, y compris publiquement, en disant : On ne laisse pas tomber
notre monde de même, je pense que ça aurait un impact.
Mme Gamache (Valérie) :
Et puis, quand vous parlez du... Je veux juste comprendre le régime d'assurance
retraite. Je connais le système de l'Ontario, mais ici, au Québec, est-ce que
ça devrait être, par exemple, sous la gouverne d'un organisme comme la CNESST
ou ça devrait être davantage sous la gouverne d'un organisme ou d'une société
d'État économique?
M. Marissal : Je crois que ça
nécessiterait la création d'un régime indépendant.
Mme Gamache (Valérie) : Tout à
fait indépendant de...
M. Marissal : Tout à fait
indépendant. Parce qu'on ne parle pas du tout de la même chose. Mais, de fait,
c'est un système qui a fait ses preuves. C'est un système qui s'autofinance,
maintenant, qui a un immense surplus en Ontario. Puis c'est un système, je
pense, qui n'a jamais été, malheureusement, sérieusement envisagé au Québec. Je
m'explique assez mal pourquoi.
Mais il est toujours temps de bien faire
et de revenir à la table à dessin pour instaurer un système comme ça. Il y a eu
de l'ouverture de la part du gouvernement. Le gouvernement peut le faire
rapidement. Le gouvernement a des moyens de mettre ça rapidement. Je suis
persuadé qu'au ministère des Finances il y a déjà des études qui ont été faites
là-dessus. Alors, allons-y.
Des voix
: Merci.
M. Marissal : Merci.
(Fin à 9 h 25)