(Huit heures cinq minutes)
M. Nadeau-Dubois : Bonjour,
tout le monde. On est très contents d'être ici devant vous, ce matin, pour
faire ce premier bilan de session. Et la fin, donc, de cette première session
parlementaire, c'est l'occasion pour nous de faire, d'abord, un bilan du
gouvernement caquiste de François Legault. Il y a deux constats qui s'imposent,
selon Québec solidaire. On va bien sûr vous parler de la crise climatique, mais
je veux d'abord vous parler un peu d'économie, je veux commencer par faire, ce
matin, le triste bilan économique du gouvernement François Legault.
En campagne, le premier ministre n'a pas
arrêté de promettre des jobs payantes, et, d'une certaine façon, il a tenu
parole, il a fait pleuvoir les millions sur une poignée de hauts dirigeants de
la haute fonction publique. En campagne, François Legault s'est présenté comme
le champion de la classe moyenne, et, sur ce plan, le retournement est
spectaculaire. Depuis Maurice Duplessis, on n'a jamais vu un premier ministre
être aussi peu gêné de prendre le camp des multinationales contre la classe
moyenne québécoise.
Il a déroulé le tapis rouge à Uber en tuant
le gagne-pain de milliers de chauffeurs de taxi. Il a applaudi la
délocalisation de villes en Inde. Il a applaudi la perte de 200 emplois au
Québec et il est allé jusqu'à New York, ce n'est pas rien, pour dénigrer les
1 000 lockoutés d'ABI. Sur la planète de François Legault, la classe
moyenne québécoise gagne trop d'argent, mais le P.D.G. américain d'Alcoa, lui,
mérite son 13 millions de dollars US par année, et le P.D.G.
d'Investissement Québec mérite, lui, son million par année.
Heureusement, à chaque occasion, Québec
solidaire a été là pour le ramener sur terre. Vincent Marissal a exposé la
rémunération scandaleuse de certains hauts dirigeants. Alexandre Leduc a
dénoncé à plusieurs reprises l'appui scandaleux de François Legault à la
multinationale Alcoa. Manon a obtenu des excuses en Chambre, de la part du
premier ministre, suite à ses déclarations sur les pertes d'emploi à Velan.
Bref, main dans la main avec les P.D.G.,
avec ses amis les P.D.G., François Legault est entré en guerre contre la classe
moyenne. Et ce que nous avons démontré aux Québécois et aux Québécoises, c'est
qu'à l'Assemblée nationale leur première ligne de défense, c'est Québec
solidaire.
Mme Massé : L'autre front des
solidaires, c'est, bien sûr, la crise climatique. On vous l'avait dit dès le
départ, ça va être notre priorité numéro un, et ça l'a été. Je pense que
François Legault a senti la pression.
Il n'avait jamais parlé de changements
climatiques avant et il n'a pas eu le choix d'en parler. Je l'ai questionné
quasiment à tous les jours sur la nécessité d'agir. Ce qu'on a découvert, c'est
que le premier ministre n'écoute pas beaucoup, beaucoup la science. Il est
téléguidé par les lobbyistes de la vieille économie.
Les cibles de réduction de GES des
libéraux n'étaient pas assez ambitieuses, mais par contre GNL Québec, lui, a sa
place, puis il faut le faire. Le premier ministre est incapable de prouver que
GNL va réduire les émissions ailleurs dans le monde, mais il faut le faire
quand même.
Dans son budget, il creuse encore plus
l'écart entre le financement des autoroutes et le financement du transport
collectif. Alors qu'on le sait la congestion, les émissions de GES, ça craque
de partout, il s'entête à investir 325 millions pour le troisième lien,
même si la CAQ est incapable de prouver que ça va réduire la congestion.
Le gouvernement n'a même pas retiré les
claims d'exploitation pétrolière et gazière dans la péninsule gaspésienne,
alors qu'il avait l'opportunité — il l'a encore — de le
faire sans débourser une cent, ne pas répéter Anticosti.
François Legault a échoué sur tous les
tests. Avec lui, le Québec fonce dans le mur encore plus vite qu'avec les
libéraux. La climatopassivité de la CAQ met notre avenir en danger, surtout
celui des jeunes qui sont dans la rue chaque vendredi. Et ça, ce n'est pas
acceptable.
Nous, à Québec solidaire, on va mener la
bataille jusqu'au bout. On a lancé un ultimatum au gouvernement Legault, on lui
a rappelé qu'il devait déposer un plan de réduction de GES qui nous permette
d'atteindre les cibles du GIEC, que ce plan-là soit validé par un expert
externe et qu'il mette dès maintenant fin à l'exploitation gazière et
pétrolière en sol québécois.
Si le premier ministre n'arrive pas à
rassembler les conditions de base d'une vraie transition verte et juste d'ici
le 1er octobre 2020, bien, c'est sûr qu'il va payer un prix politique
important. Nous sommes prêts à bouleverser son travail à l'Assemblée nationale
et, dans la rue, à assurer que l'appui de la population aux exigences de la
crise climatique se fasse de plus en plus entendre. La population est mobilisée
plus que jamais, et elle veut surtout que ça bouge maintenant.
La Modératrice
: Merci
beaucoup. On va prendre les questions. Une question, une sous-question, s'il
vous plaît.
Mme Crête (Mylène) :
Bonjour. J'aimerais savoir; vous avez énuméré, là, ce que vous avez fait durant
les travaux parlementaires, en quoi ces premiers mois de travaux vous ont-ils
été le plus utiles, selon vous?
Mme Massé : Bien, je pense,
premièrement, ça nous a permis de vous faire connaître nos députés. Je ne sais
pas si vous les avez vus à l'oeuvre, là, Gabriel en a nommé trois, mais on
pourrait les nommer tous et toutes, ils sont des parlementaires très actifs et,
sincèrement, très pertinents dans la politique québécoise actuellement. Je
pense que nos premiers mois, on pourrait le définir comme ça.
Mme Crête (Mylène) :
Vous avez parlé que le gouvernement paierait un prix politique pour, bon, la
façon dont il agit ou n'agit pas sur l'environnement. Est-ce qu'il aura à payer
un prix politique pour imposer deux bâillons au cours des prochains jours?
Mme Massé : C'est assez
fascinant que d'imposer un bâillon sur une loi qui va retirer des droits. C'est
quelque chose. Mais je pense que le bâillon, on risque d'en parler pas mal en fin
de semaine, ça fait que... Je ne sais pas si tu as d'autres choses que tu
voudrais dire?
M. Nadeau-Dubois : Il y aura
un prix à payer pour ce bâillon-là, ne serait-ce que parce que ce sera un
triste jalon dans l'histoire de l'Assemblée nationale du Québec. Adopter sous
bâillon une loi qui suspend la Charte des droits et libertés, là, du Québec — du
Québec — c'est un triste exploit que va réussir le gouvernement de François
Legault à sa première session parlementaire, ici, à l'Assemblée nationale.
C'est un triste exploit.
Mme Crête (Mylène) :
Merci.
M. Cormier (François) :
Bonjour. François Cormier, TVA. Vous dites que le gouvernement est entré
en guerre contre la classe moyenne, que, sur la planète de François Legault, la
classe moyenne gagne trop d'argent. Visiblement, dans votre point de vue, la
classe moyenne est attaquée. Où est-elle, la classe moyenne, dans les rues pour
manifester? Et n'est-elle pas plutôt satisfaite du gouvernement Legault à
l'heure actuelle?
Mme Massé : Bien, moi, j'ai
rencontré les travailleurs, travailleuses d'ABI, on a été en lien constamment
avec les chauffeurs de taxi, je peux vous dire que les gens se sentent
abandonnés, carrément abandonnés.
M. Cormier (François) : Vous
parliez du bâillon, est-ce que ça va mettre fin, selon vous, à l'enjeu qu'est
la laïcité de l'État au Québec?
M. Nadeau-Dubois : Penser que
cette loi-là et son adoption sous bâillon va mettre fin au débat sur la laïcité,
c'est se tromper sur toute la ligne. D'abord, parce que ce projet de loi là, il
va être très, très, très dur à appliquer. Ensuite, parce que c'est un projet de
loi qui va générer, c'est certain, une multitude de contestations judiciaires.
Et finalement parce que les gens qui sont venus en commission parlementaire
appuyer le projet de loi de François Legault, là, il y en a plusieurs qui ont
dit tous la même chose : C'est un bon premier pas, on fait un pas dans la
bonne direction, mais nous, on va continuer de militer pour interdire toujours
davantage les ports de signes religieux au Québec.
Alors, loin de mettre le couvercle sur la
marmite, ça ouvre la porte à ce que, dans les prochaines années, des groupes et
des individus continuent à se faire entendre pour interdire toujours plus.
Quand on se met à retirer des droits et libertés, on ouvre la porte à quelque
chose de très dangereux, et penser que ce projet de loi difficilement
applicable va refermer cette porte-là, c'est être très naïf.
M. Cormier (François) :
Merci.
M. Croteau (Martin) :
Bonjour, tout le monde. Martin Croteau de La Presse. J'aimerais savoir
ce que vous pensez des explications fournies par André Lamontagne, hier, en
lien avec la réintégration de M. Louis Robert, et son refus de s'excuser, et
son refus de démissionner.
Mme Massé : Bien, écoutez,
c'est un autre exemple que M. Lamontagne a peu de sensibilité par rapport
aux fonctionnaires. C'est assez impressionnant de ne pas vouloir même s'excuser,
alors que la Vérificatrice générale est venue clairement exprimer le
cafouillage. Alors...
M. Nadeau-Dubois : La
Protectrice du citoyen.
Mme Massé : Pardon?
M. Nadeau-Dubois : La
protectrice.
Mme Massé : La
Protectrice du citoyen! La protectrice, pardon. Alors donc, c'est extrêmement
décevant. Et moi, là, je m'attends à ce que M. Legault mette son pied à
terre, là. Je pense que la démonstration a été faite que M. Robert, il
devrait le porter en haute estime et non pas le sous-estimer comme le fait le
ministre.
M. Croteau (Martin) :
Est-ce que M. Lamontagne devrait démissionner?
Mme Massé : Bien,
écoutez, vous le savez, M. Legault n'a pas une multitude de personnes
expérimentées dans son cabinet présentement. Puis, pour nous, M. Legault
est celui qui doit répondre à cette question-là. Mais minimalement, quand vous
faites perdre la job à quelqu'un, quand vous amenez sur la place publique
quelqu'un, comme l'a fait le ministre avec M. Robert, c'est la moindre des
choses de s'excuser publiquement.
M. Nadeau-Dubois : J'aimerais
juste rajouter un élément là-dessus. Moi, je trouve les libéraux très effrontés
de demander la démission d'André Lamontagne, aujourd'hui, parce que la grande
majorité de ce scandale-là, il s'est produit sous le règne libéral, et la loi
qui a permis ce cafouillage-là, c'est une loi libérale. Alors, moi, je veux
bien, là, que M. Lamontagne ait très, très, très mal géré ce scandale-là.
C'est un fait, dans toute cette affaire-là, il a manqué de leadership de
manière incroyable. Mais il y a quand même des limites à assigner des blâmes à
la personne qui ne fait au fond que réparer les pots cassés par les libéraux.
Il les répare très maladroitement, mais, je veux dire, toute cette situation-là
provient d'une loi broche à foin bourrée de trous. Puis cette loi-là, c'est une
loi libérale. Alors, les libéraux sont un peu effrontés aujourd'hui de déchirer
leurs chemises et de demander des démissions, alors que ce sont eux, les
responsables de cette situation-là, et c'est leur faute si les lanceurs
d'alerte au Québec sont mal protégés.
La Modératrice
: On va
passer au micro d'Alain? Non...
M. Croteau (Martin) : Si
vous permettez... Je vous amène sur un sujet complètement différent, si vous le
permettez. Les Raptors ont gagné hier le championnat de la NBA. Est-ce que ce
succès milite en faveur d'une équipe de basketball professionnelle à Montréal?
M. Nadeau-Dubois : Bien,
d'abord, sur les Raptors, je suis sûr que Manon va me laisser commenter sans
problème.
Mme Massé : Vous ne voyez
pas les étoiles dans ses yeux.
M. Nadeau-Dubois : Bien, je
confesse, ça a été très difficile pour moi d'accepter le fait d'encourager une
équipe torontoise. J'y suis arrivé quand j'ai compris qu'il y avait notamment
plusieurs francophones dans l'équipe, notamment un Montréalais qui vient de
Montréal-Nord. Donc, on a réussi quand même à prendre parti pour eux... enfin, personnellement,
je ne peux pas parler pour mon caucus là-dessus.
Mais, plus sérieusement, sur votre question,
nous, le sport professionnel, on pense que c'est un élément important de la
culture populaire. C'est vrai pour le hockey, c'est vrai pour le baseball, c'est
vrai de plus en plus pour le basket, dans beaucoup de communautés au Québec.
Donc, le sport professionnel, on n'a aucun préjugé défavorable à ça, à Québec
solidaire, bien au contraire.
Ceci étant dit, pour nous, la question
centrale, c'est la question du financement public. Donc, oui à toujours davantage
de sport au Québec, mais les fonds publics devraient servir à donner des infrastructures
sportives de qualité à nos jeunes dans toutes les régions et dans tous les
quartiers, plutôt qu'à financer des ligues où les gens sont tous des
millionnaires.
M. Laforest (Alain) : Bonjour
à tous. Petite précision, M. Marissal est absent ce matin?
M. Nadeau-Dubois : Il avait
des obligations familiales à Montréal, c'est la graduation de sa fille. On a
jugé que c'était une motivation suffisante.
M. Laforest (Alain) : C'est
une bonne raison. C'est l'heure des bilans. Votre mauvais coup de la session?
Mme Massé : Mauvais coup de la
session? Je vous dirais, en fait, vous savez, quand on est des gens qui veulent
changer le monde, comme nous, à Québec solidaire, de ne pas avoir réussi à
imposer un commissaire civil au niveau de la direction de l'UPAC, bien, on est
bien déçus de ça. Puis, encore hier et aujourd'hui, on voit que ça pourrait
jouer un rôle majeur. Ça fait qu'il y a une déception ici.
M. Laforest (Alain) : Le fait
d'avoir tourné le dos au compromis Bouchard-Taylor, est-ce que ça a été une
bonne chose?
Mme Massé : Bien, écoutez,
quand on est les seuls qui portons une vision depuis 10 ans pour essayer
d'exprimer le compromis qui avait été trouvé par M. Bouchard et M. Taylor lors
de la commission, puis qu'à un moment donné tu te rends compte que tu es tout
seul, qu'il n'y a pas personne d'autre qui le veut, qui le porte, moi, je pense
que ce que Québec solidaire a fait, c'est tout simplement de dire : Ce
compromis-là ne tient pas, tout le monde nous le démontre, bien, on va arrêter
de le porter, là.
La Modératrice
: Mme
Lajoie.
Mme Lajoie (Geneviève) :
Bonjour. Peut-être sur le même sujet. M. Nadeau-Dubois, vous avez dit tout à
l'heure : Quand on commence à enlever des droits aux gens, on ouvre la
porte à quelque chose de très dangereux. On ouvre la porte à quoi?
M. Nadeau-Dubois : On ouvre la
porte à continuer d'enlever des droits toujours davantage. C'est ce qu'on a vu
dans plusieurs pays européens, notamment, où, quand on adopte des législations
pour restreindre certaines libertés, on peut penser que ça va mettre fin au
débat. Souvent, ce que ça fait, c'est banaliser la chose et alimenter la
dynamique, et on se retrouve à avoir, quelques années plus tard, un autre
projet de loi qui va un petit peu plus loin, et puis, quelques années plus
tard, un autre projet de loi qui va un petit plus loin, et comme ça, de proche
en proche, on se retrouve avec des interdictions de plus en plus
restreignantes.
Et donc, à la question : Est-ce que
ce projet de loi va mettre fin au débat?, la réponse est non. Et la meilleure
démonstration de ça, c'est les gens qui sont venus en commission parlementaire
appuyer le projet de loi de François Legault. Une grande majorité d'entre eux
ont dit : Oui, on est pour parce que c'est un premier pas, parce qu'il
faudrait aller plus loin, parce qu'il faudrait interdire d'autres signes
religieux, il faudrait les interdire dans plus d'institutions, il faudrait même
les interdire dans l'espace civique. C'est des propos qui ont été tenus en commission
parlementaire, je ne les invente pas. Et donc, de penser que ce projet de loi
là va mettre fin à la question, c'est très naïf.
Et là je passe à côté de toutes les
complications juridiques qui vont avoir lieu, de tous les problèmes
d'application qui vont surgir, où, ça aussi, ça va continuer d'alimenter le
débat. Alors, prenez-moi au mot, et, lorsqu'on fera notre bilan de session
parlementaire, à la fin de la législature, avant les élections, on verra si les
questions sur la laïcité ont cessé. J'en doute beaucoup.
Mme Lajoie (Geneviève) :
Donc, si je vous comprends bien, en adoptant ce projet de loi là, c'est peut-être
un pas vers quelque chose de plus restrictif encore? Vous pensez que peut-être
le gouvernement va être appelé à être plus restrictif encore pour les droits
et...
M. Nadeau-Dubois : Le gouvernement
n'a pas annoncé d'intention de déposer un autre projet de loi à l'intérieur de
la présente législature. Mais, au niveau du débat dans la société québécoise,
penser que ce projet de loi là va y mettre fin, c'est naïf. C'est un débat qui
va continuer à avoir lieu. Et la rhétorique qui dit : Une fois qu'on trace
une ligne, une fois, le débat est terminé pour toujours, c'est une analyse très
naïve, c'est un argument très faible de la part du gouvernement.
La Modératrice
: On va
passer à...
Mme Massé : Puis je
compléterais aussi en disant que ce qu'il ne faut surtout pas oublier, c'est
que ce projet de loi là va être adopté sous bâillon, donc le retrait de droits
inscrits à la charte québécoise... vont nous être retirés sous bâillon. Ça
aussi c'est inquiétant.
La Modératrice
: On va
passer à Monsieur... Oh!
Mme Lajoie (Geneviève) : Peut-être
juste une petite précision sur l'environnement. Mme Massé, tout à l'heure,
vous avez dit que M. Legault va... vous parlez d'une condition de base,
d'une vraie transition verte, d'ici le 1er octobre 2020, il va payer un
prix politique important s'il ne le fait pas, donc, QS est prêt à bouleverser
son travail à l'Assemblée nationale et dans la rue. Qu'est-ce que vous voulez
dire? Qu'est-ce que vous avez l'intention de faire s'il n'arrive pas à ce que
vous souhaitez?
Mme Massé : Bien, écoutez, je
pense que ce printemps, lorsqu'on a lancé notre ultimatum au gouvernement, on a
été clair pour dire : Si, le 1er octobre 2020, vous n'avez pas
répondu à ces trois conditions-là, nous, on va faire un barrage politique ici,
en dedans, et on le sait que la société civile va être, elle, dans la rue pour
exprimer ce barrage populaire. Vous savez pourquoi? Bien, parce que les gens,
là, la crise climatique, là, ils ne prennent pas ça à la légère. C'est important,
c'est fondamental.
Alors nous, d'ici ce temps-là, ce qu'on va
faire, et c'est ce qu'on a fait depuis le mois d'octobre, là, on est en mode proposition.
J'ai fait, on a fait plus d'une quinzaine de propositions à M. Legault, au gouvernement
caquiste, depuis le mois d'octobre, tant au niveau de l'aménagement après les inondations,
avec notre Pacte rivières, on a proposé aussi de retirer, par exemple, les
claims. Actuellement, on est dans une situation extraordinaire où il y a une
pétrolière qui va abandonner ses claims; nous, on dit : Aïe! gouvernement,
remets-les pas aux enchères, retire-les, et comme ça on ne sera pas obligés de
faire ce qu'on a fait à Anticosti, c'est encore débourser de l'argent public
pour répondre à l'appétit vorace des gazières et pétrolières.
Alors nous, entre maintenant et le 1er octobre,
on est en mode collaboration. Mais je vous le dis, et le gouvernement de M.
Legault le sait, si, le 1er octobre 2020, il n'y a pas un plan crédible
qui nous permette d'atteindre nos objectifs du GIEC et s'il n'a pas interdit le
gazier et le pétrolier sur notre territoire, bien, sincèrement, on va barrer
les travaux ici, à l'intérieur.
M. Schué (Romain) : Bonjour,
mesdames, messieurs. Je ne sais pas si vous avez vu ce matin, sur Radio-Canada,
mais on a appris qu'il y avait des restrictions sur les pesticides tueurs
d'abeilles qui ont été mises en place et une dérogation qui vient d'être
octroyée par Québec et le ministère de l'Agriculture. On évoque le temps
pluvieux notamment. Est-ce que vous avez une réaction là-dessus?
Mme Massé : Bien écoutez,
c'est vraiment... je dirais, à prime abord, là, on va étudier le dossier en
profondeur, mais c'est vraiment décevant de voir qu'un règlement qu'on s'est
battus... Et, Québec solidaire, on s'est battus pour que ce règlement-là soit
défini parce que les néonics qui sont utilisés, les engrais, donc, systémiques
qui sont utilisés ont un impact direct, c'est scientifiquement prouvé, sur les
abeilles, mais plus largement sur les nappes phréatiques, bon, etc. Alors, que
dès... le règlement était adopté ou à tout le moins validé...
Une voix
: ...
Mme Massé : ...c'est ça, hein,
j'allais dire dès ce printemps, dès le moment où il est adopté, la première
occasion qui se présente, c'est encore la solution historique. Écoutez, je
pense que ce n'est pas de même qu'on va sauver les abeilles. Puis il faut se
rappeler, là, ce n'est pas rien que des abeilles parce que c'est «cute» puis
tout ça, là. C'est que les abeilles, c'est ce qui nous permet de manger à tous
les jours.
M. Nadeau-Dubois : Je précise
qu'on va déposer ce matin, en Chambre, une motion sur le sujet. Notre porte-parole
en matière d'agriculture, Émilise Lessard-Therrien, va déposer une motion qui
va demander deux choses : d'abord, qu'on fasse respecter le règlement,
qu'on cesse ce type de dérogation, et, deuxièmement, et c'est tout aussi important,
que, du côté du MAPAQ, on documente et on rende accessibles pour les
agriculteurs du Québec des alternatives. Parce que c'est bien beau interdire,
mais ça ne suffit pas, il faut accompagner nos agriculteurs dans cette
transition vers une forme d'agriculture digne du XXIe siècle.
M. Schué (Romain) : J'aimerais
vous entendre aussi sur... Vous, directement, votre caucus, vous aviez eu
l'habitude, ces dernières sessions, d'être un, deux, trois députés. Maintenant,
vous êtes beaucoup plus nombreux. Il y a aussi parfois des tensions dans le
caucus, il y a des avis divergents, on l'a vu lors du dernier congrès sur la
laïcité. Il y a parfois des députés qui font aussi des déclarations que vous
devez gérer. C'est la première fois que vous gérez, aussi, autant de députés.
Comment ça s'est passé en interne, sur cette première session, pour vous?
Est-ce que parfois c'est un petit peu plus difficile?
Mme Massé : Non. Plus
difficile, non. Mais, c'est sûr, c'est de la démocratie. C'est intéressant, avant,
on était trois, tu sais, autour d'un café. À trois, ça va vite. Mais, autour
d'une table, à 10, c'est des bonnes discussions, des bons débats. Quoique des
fois, avec Amir, ça pouvait aussi durer très longtemps, mais...
M. Nadeau-Dubois :
C'est ça que j'allais dire. Même à trois, des fois...
Mme Massé : Même à trois, des
fois... Mais, ceci étant dit, non, au contraire, je pense qu'on a, ce
printemps, là, particulièrement, parce qu'au mois de novembre on n'a pas siégé
très longtemps, mais je pense qu'on a pris une belle vitesse de croisière. On a
appris à se connaître tout le monde. Oui, il y a des opinions différentes. Mais
la démocratie, là, savez-vous quoi?, ça ne veut pas dire que tout le monde
pense pareil. C'est que tout le monde pense aux mêmes objectifs. Et ça, notre
caucus est très enligné.
M. Nadeau-Dubois : Puis je me
permets d'ajouter, sur la question des signes religieux, beaucoup de gens
avaient prédit... on pourrait même ressortir certaines chroniques — je
ne le ferai pas, mais on pourrait — beaucoup de gens avaient prédit,
même, des confrontations au sein du caucus de Québec solidaire. Il y a même des
gens qui ont écrit qu'il y aurait peut-être des défections. Et moi, ce que je
constate aujourd'hui, c'est qu'on a été capables de mener ce débat-là de
manière mature, sereine, posée. Et aujourd'hui on est un caucus aussi, voire
plus soudé que lors de notre élection le 1er octobre dernier. Moi, je suis
profondément fier de ça. Je suis sûr aussi que c'est le cas de Manon.
Mme Prince (Véronique) :
Bonjour. Je vais poursuivre là-dessus. Effectivement, c'est la première session
parlementaire, on ne comptera pas l'automne comme en étant une, là, puis, sans
faire de reproche à vos députés, ils n'ont tous pas d'expérience parlementaire
ou d'expérience, même, avec les médias parlementaires. Est-ce que, dans la
dernière session, vous avez senti... Le message de Québec solidaire est clair,
mais est-ce que vous avez senti que parfois vos députés se sont écartés du
message et que vous avez dû gérer des petites crises communicationnelles?
Mme Massé : De mémoire de
femme? Non.
Mme Prince (Véronique) : Pas
du tout? Il n'y a aucune clip, rien qui vous a embarrassés dans des
déclarations que vos députés... qui ont pu faire que vous avez peut-être dû
corriger par la suite?
Mme Massé : Bien, moi, écoutez,
c'est parce que, quand on emploie le mot «crise», là, pour moi, il y a une
réelle crise puis elle est climatique. Ça fait que comprenez-vous qu'on n'est pas
à la même place, mais qu'on a...
Mme Prince (Véronique) : Une
petite crise communicationnelle.
Mme Massé : ...qu'on a appris ensemble
ça voulait dire quoi, avancer tout le monde du même pas vers le même objectif. C'est
évident. Vous l'avez dit d'entrée de jeu, c'est tous et toutes des nouveaux et
des nouvelles parlementaires. Ça s'apprend, ce métier-là. Et je vous dirais
que, dans les faits, rappeler des gens à l'ordre, moi, là, comme chef parlementaire,
je n'ai pas eu à faire ça pantoute, pantoute.
Mme Prince (Véronique) :
J'aurais une autre question. Juste pour revenir à ce que vous avez dit un petit
peu plus tôt, dans votre bilan, vous avez dit : Si, le 1er octobre
2020, on n'a pas eu, dans le fond, les certitudes qu'on souhaite avoir obtenir,
on va barrer les travaux ici. Qu'est-ce que ça veut dire exactement, «barrer»?
Est-ce que c'est faire de l'obstruction? Pouvez-vous nous donner plus de détails?
M. Nadeau-Dubois : Bien, c'est
exactement ce qu'on a annoncé lorsqu'on a lancé notre campagne Ultimatum 2020,
hein? Donc, on l'a répété aujourd'hui, mais c'est ce qu'on vous avait annoncé
ce printemps. Ce que ça veut dire concrètement, ça veut dire utiliser tous les
moyens... Pardon. Ce que ça veut dire concrètement, c'est utiliser tous les
moyens parlementaires à notre disposition, ici, pour compliquer le travail du gouvernement,
c'est s'assurer que les ministres comprennent qu'ils ne peuvent plus gouverner
comme si de rien n'était, qu'ils ne peuvent plus faire «business as usual».
Il y a en ce moment une crise climatique. Nous,
on croit que cette crise climatique, les ministres de la CAQ doivent la
ressentir. Et ce qu'on va faire, c'est donc, oui, utiliser une série de mesures
pour ralentir, compliquer les travaux parlementaires à l'Assemblée nationale.
Et, si le gouvernement de François Legault pense que Québec solidaire a fait de
l'obstruction, cette session-ci, c'est bien mal nous connaître. Mais par contre
c'est ce qu'on va faire, à partir du 1er octobre 2020, s'il ne remplit pas
nos conditions, c'est ce qu'on a annoncé lorsqu'on a lancé notre campagne. Et
ce travail de dérangement parlementaire ici, à l'Assemblée nationale, il sera
accompagné par des mobilisations populaires dans les rues du Québec.
Mme Prince (Véronique) :
Merci.
Mme Cloutier (Patricia) :
Bonjour. Je me souviens, quand la CAQ est entrée en poste, ils avaient dit
qu'ils voulaient gouverner autrement, notamment sur le ton, mais aussi sur
appeler des projets de loi de l'opposition, essayer, tu sais, de gouverner en
alliance. Je remarque que ça n'a pas été fait, là, dans cette session-ci. Pourtant,
vous avez déposé des projets de loi qui essayaient de se rapprocher de ce que
la CAQ avait déjà dit dans le passé, dont le délai de prescription sur les abus
sexuels. Est-ce que vous avez encore espoir que ce gouvernement-là va peut-être
appeler des projets de loi de Québec solidaire et gouverner autrement ou, avec
le style qu'ils ont, vous avez perdu espoir?
Mme Massé : Bien, je
dirais... puis, après ça, je pense que le leader en a long à dire là-dessus,
mais je dirais simplement qu'il va falloir voir, à un moment donné, que la CAQ,
puis ça on vous l'avait dit durant la campagne électorale, là, ce n'est pas du
changement, ce n'est pas le changement. C'est un parti qui a débuté, puis je
pense que, là, la première et deuxième session nous le démontrent, sur les
mêmes rails de chemin de fer que tous les partis avant lui. Alors moi, je n'ai
pas beaucoup d'espoir pour la suite des choses.
M. Nadeau-Dubois : Le
vernis de changement craque puis pas juste un peu. La preuve de ça, on va
l'avoir en fin de semaine, où, dans le cadre de sa première session parlementaire
complète, il va y avoir deux bâillons. Ça, ce n'est pas exactement gouverner de
manière ouverte, là. Ça, au contraire, c'est un entêtement et une attitude
bulldozer, je veux dire, qui est non seulement semblable à ce qu'on a vu dans
les dernières années, mais, honnêtement, c'est même bien pire. Donc, non, on n'a
pas senti un gouvernement qui changeait la manière de gouverner au Québec, bien
au contraire.
Mme Senay
(Cathy) : Good morning.
Mme Massé :
Good morning.
Mme Senay (Cathy) : It's been sometimes quite entertaining with Québec solidaire. We
had this fashion code, do you remember, the fashion code that you put out. How
did you perceive it as a challenge to be taken seriously? Because sometimes you
were thinking outside of the box, and it could have been misinterpreted. So,
how was the challenge for you, as Québec solidaire, to be taken seriously?
M. Nadeau-Dubois :
Yes. You know, we cannot choose what the questions are about when we do our job
here. We're cannot choose what will interest the media. But what we can do is
focus our energies and our priorities on what we think is important. And, when
you look at what we talked about, when you look at the work we did inside the
National Assembly, we had too very clear priorities at the beginning of the
session, and those two priorities are the ones that guided us all through it.
And today that's the same two priorities that we once again underline :
the fact that, for us, the climate crisis is the challenge of the century, the fact
that this Government is pretending to defend the middle
class, when in fact he's doing all the opposite, he is effectively abandoning
the middle class. That was our two main priorities when we came inside the
Assembly a few months ago. Those are the two things that we talked again today.
So, I think our message was clear and I think our priorities were clear too.
Mme Senay (Cathy) : But, sometimes, there were some kind of... like some reactions from
your own MNAs that created a shift to all your own priorities. We've been
talking about clothing, at the National Assembly, for a couple of days, you know? How did you see the challenge to
get back things in order?
M. Nadeau-Dubois : Yes. I think we can be clear here. I think you are obviously referring
to, for example, the fact that Catherine Dorion has, you know, got a lot of attention from the media. Maybe the
set-up should be reversed, because it's one of the questions maybe we would have for the journalists : Why is it that important and that interesting?
But, what I think has to
be underlined is the fact that Catherine, to talk for her, has an unbelievable
job on a lot of issues. For example, her fight to get the tramway of Québec here funded by the two Governments, or her work to confront the Minister of Culture to make sure that she answers this real crisis in the
journalistic world, the work that she did, you know, using her speeches to give
the voice to elder people in Québec. Those were very pertinent interventions, and I think they were widely
appreciated. But, obviously, we do not control what gets the attention.
M. Authier (Philip)
: Sometime, late Saturday night or late Sunday night, the Government will invoke the closure and
adopt Bill 21. How is that going to make Québec look, to you, to use closure and to adopt such a bill? You seem to
be suggesting it's a slippery slope once you start down this path.
M. Nadeau-Dubois : You know, our preoccupation is not about the external reputation of
Québec. It's not very important for us, how Québec looks for the rest of the world. What
is important is how the Government of Québec looks for its citizens. What is important is the reputation of Québecsociety within its
own ranks, within its own members. And, when you take away rights from people
and when you use an exceptional procedure to do so, the harm that you do is not
on the international level, it's on the internal level, it's the cohesion of
Québec society that is hurt by those gestures.
Go around Québec and ask
to young people what they thought about the Charter of Values by the Parti québécois. Ask young Quebeckers coming from immigration how that made them feel a few
years ago. You will see that the biggest problem is not outside Québec, it is inside Québec.
M. Authier (Philip)
: Is the danger that... I think you said it French anyway, but once
you start doing this, where does it stop?
M. Nadeau-Dubois : Well, when you take away rights and when you do it in the way that
the Government will do it, it's
very naïve to think that it will put an end to the debate. I think it's quite
the opposite, it's opening a door. And the proof of that was given by the
people that came here to support the bill of the Coalition
avenir Québec. And those groups said it very clearly,
the quotes are explicit, those groups said : It's a good bill and it's a
good first step, it's a step in the right direction, but it's only a first
step, we will continue to fight for more... «interdiction», it's a very easy
word, I don't know why...
Mme Senay (Cathy) : Banning?
M. Nadeau-Dubois : ...for more banning. And that's what the groups that came to
support the bill said. I think it's very naïve to think that this bill will end
that debate. It will create a lot of problems of the application of the bill. It
will create a judicial controversy. It will open the door to the groups that
want to go further. It won't stop anything, it's very, very naïve to think
that.
La Modératrice
:Merci beaucoup...
Mme Senay (Cathy) : I just have one clarification, if I may say. The difference now is
that you're getting closer to the closures. You've been knowing for months that
it will happen.
M. Nadeau-Dubois : Yes, you're right about that.
Mme Senay (Cathy) : What's the change, this morning, since you're like a few hours
away? What does that change for you personally?
M. Nadeau-Dubois : That ending was written in the sky. That ending was written in the
sky. You know, the study of the bill in commission started on June 4th. No serious or credible person that knows how this Assembly works could think that, in a few
days, this bill would be adopted, you know, using the regular procedure. It was
written in the sky that it would end like this, and I think the Government knew
it, and I think they just don't care about it.
La Modératrice
:
Merci beaucoup...
Mme Senay (Cathy) : And one last clarification. The shift of Mr. Legault...
La Modératrice
:
No, Cathy...
Mme Senneville
(Caroline) : ... — just this one — the
middle class, was it always that way? You're just discovering Premier Legault,
that he is against the middle class?
M. Nadeau-Dubois : I think Mr. Legault did a very good marketing job before being in
power and I think, now, marketing has ended and the real François Legault is
showing his face.
La Modératrice
:
Merci beaucoup.
(Fin à 8 h 42)