(Quatorze heures deux minutes)
M. Marissal : Alors, bonjour.
Je suis très heureux d'être ici pour déposer un projet de loi de ma formation
politique, donc le projet de loi n° 198, qui vise à faciliter la divulgation
d'actes répréhensibles. Dans le jargon, on appelle ça les lanceurs d'alerte.
Donc, c'est une initiative parlementaire pour protéger davantage les lanceurs
d'alerte.
Je suis accompagné de Richard Perron, qui
est président du syndicat des professionnels du gouvernement du Québec. C'est
M. Perron, notamment, vous l'aurez reconnu, qui se bat quotidiennement pour la
réintégration de Louis Robert, qui est un agronome dont tout le monde
connaît le nom maintenant, notamment parce qu'il a posé un geste courageux en
dénonçant, à son employeur et aux médias, l'influence indue des lobbys des
pesticides alors qu'il était à l'emploi du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries
et de l'Alimentation. Mais on le connaît aussi, surtout, malheureusement, parce
que M. Robert a été congédié. Et son syndicat se bat, nous sommes à leur côté,
d'ailleurs, pour un traitement juste d'un homme qui a posé un geste courageux,
qui devrait plutôt recevoir les plus hauts honneurs et les remerciements plutôt
que son T4 de son employeur. Le moins qu'on puisse dire, c'est que M. Robert
avait mis le doigt sur un gros bobo et qu'il a été puni pour ce faire.
C'est pour ça, en fait, qu'on a décidé, à
Québec solidaire, et j'ai décidé de travailler à l'élaboration d'un projet de
loi qui protégerait réellement les lanceurs d'alerte et non pas seulement qu'en
théorie. Parce qu'actuellement, c'est vrai, il y a un projet de loi qui a été
adopté dans la dernière législature par le précédent gouvernement libéral.
Soyons bons joueurs. Ils ont fait le premier pas, mais ils ne se sont pas
rendus à destination. Alors, nous voulons faire les derniers pas, nous rendre à
destination. Le but ici est de protéger les lanceurs d'alerte. Et, en
protégeant les lanceurs d'alerte, on se protège nous-mêmes, d'ailleurs, et on
protège la démocratie. Une réelle loi forte, avec des dents, qui protège les
lanceurs d'alerte, c'est un des remparts essentiels à une démocratie comme la
nôtre.
Nous voulons ouvrir notamment une nouvelle
voie pour les lanceurs d'alerte, c'est-à-dire la dénonciation publique, donc,
évidemment, le passage vers les médias, ce que, de toute façon, généralement,
les lanceurs d'alerte font. Cela dit, ils le font, et le cas de M. Robert est éloquent
en ce sens, aux risques et périls de perdre leur emploi, de l'opprobre et de se
faire ensuite même parfois poursuivre par leur employeur, alors que ces gens ne
font que leur devoir de citoyen en démocratie, que de protéger la population.
Pensons aux grands scandales récents dans
l'histoire internationale et ici, le Watergate, évidemment, qui est le cas le
plus célèbre, ça va de soi, ici, au fédéral, le scandale des commandites, et
ici, au Québec, plus récemment, le scandale de la corruption dans le milieu de
la construction. Tous ces scandales ont éclaté grâce à des lanceurs d'alerte
anonymes, souvent cachés, parfois cachés pendant des décennies, qui ont eu le
courage d'aller voir des journalistes, et qui ont vidé leur sac, et qui ont
donné des informations qui ont parfois eu des répercussions extraordinaires.
Pensons évidemment au Watergate, avec la démission du président des États-Unis,
mais pensons, ici aussi, à la commission Charbonneau, qui a quand même levé le
voile sur des scandales épouvantables dans le milieu de la construction et qui
impliquaient des fonds publics.
Alors, le projet de loi, je le disais,
ouvre la porte à des dénonciations publiques. On ouvre aussi une couverture aux
dénonciateurs du secteur privé. Et on souhaite la nomination et la création
d'un commissaire à l'éthique qui serait, donc, habileté à recevoir les plaintes
et à les traiter, mais aussi à protéger les lanceurs d'alerte.
Je termine en vous disant que je suis
particulièrement fier d'avoir obtenu l'appui de deux anciens collègues
journalistes. Je dirais même deux mentors parce qu'ils sont un peu plus vieux
que moi, et je les ai suivis dans leur carrière pour ensuite suivre leurs pas,
deux journalistes d'enquête qui ont fait leurs preuves. Je parle ici d'Alain
Saulnier, qui a été notamment directeur de l'information à Radio-Canada, qui a
créé l'émission Enquête, qui est une sommité dans la matière de
l'éthique en journalisme et qui est aujourd'hui professeur de journalisme à
l'Université de Montréal, et mon ancien collègue de LaPresse,
André Noël, qui n'a plus vraiment besoin de présentation dans le milieu, André
qui a fait sa carrière à dénoncer justement des situations inacceptables dans
la fonction publique et dans le secteur privé.
Alors, je veux juste simplement rappeler
que protéger les lanceurs d'alerte, c'est aussi nous protéger et c'est protéger
notre démocratie, notre société et aussi les deniers publics. Alors, sans plus
tarder, je passe la parole à M. Perron.
M. Perron (Richard) :Merci beaucoup, M. Marissal. Nous, au syndicat des
professionnels du gouvernement du Québec, on apprécie beaucoup l'initiative de
Québec solidaire pour faire bouger les choses. Ça fait depuis 2012‑2013 qu'on
se bat pour avoir un vrai régime pour protéger les lanceurs d'alerte au SPGQ.
On avait lancé un document de réflexion avec des recommandations ici même, à
l'Assemblée nationale, en 2013, et tous les partis se disaient d'accord avec
ça.
D'ailleurs, il a inspiré en grande partie
le projet de loi qui a été adopté, il y a près de deux ans de ça, par l'ancien
gouvernement. On a salué plusieurs des éléments qui ont été intégrés, qu'on
avait proposés. Mais, en commission parlementaire, on disait : Il y a un
grave problème parce que l'article 7 de la loi permet une divulgation publique
lorsque la santé et la sécurité de la population est en danger ou
l'environnement est menacé, mais il y a un deuxième alinéa, qu'on dénonçait,
qui oblige les gens à aller à la police et qui rend cet article-là caduc,
finalement.
Et est arrivé ce qui devait arriver. Bien,
Louis Robert, qui a fait une dénonciation d'abord à l'interne, qu'on a voulu
taire, et ensuite, dans l'intérêt public, à un journaliste pour que la chose
sorte publiquement pour protéger la santé des Québécois, bien, il se retrouve à
être réprimandé au point d'être sanctionné par un congédiement, ce qui lance un
très mauvais message à tous les autres fonctionnaires du ministère de
l'Environnement ou de n'importe quel ministère qui pourraient détenir des
informations qu'ils doivent divulguer, qu'on doit divulguer à la population
pour la protéger.
Il est maintenant temps de travailler à
améliorer cette loi-là, à la changer, comme le propose Québec solidaire. Le
nouveau gouvernement a dit qu'il voulait gouverner autrement, qu'il voulait
gouverner différemment. Je pense que c'est une main tendue que lance Québec
solidaire pour améliorer les choses. Dans la foulée de l'affaire de Louis
Robert, le premier ministre a dit qu'il serait peut-être temps de revoir cette
loi-là et il était ouvert à l'améliorer. Bien, il faudrait maintenant, comme on
dit au Québec, que les bottines suivent les babines, et que le premier ministre
fasse preuve de bonne volonté, et rejoigne cette main tendue de Québec
solidaire, que je suis convaincu que tous les partis vont vouloir rejoindre.
L'OCDE a adopté des mesures pour mieux
protéger les lanceurs d'alerte. L'Union européenne vient de le faire. L'Internationale
des services publics m'a même déjà amené à Genève pour plaider pour une
convention internationale à l'Organisation internationale du travail, et les
employeurs étaient d'accord avec nous. C'est les gouvernements qui résistaient.
Il y a un mouvement mondial vers la protection des lanceurs d'alerte pour
protéger la démocratie, pour protéger la santé publique. Cette initiative va
dans ce sens, et on l'appuie sans réserve.
Donc, M. le premier ministre, l'invitation
est lancée. Joignez Québec solidaire dans son initiative. On sera là pour
proposer même d'autres améliorations avec vous. Merci.
M. Marissal : Merci, M.
Robert. M. Perron, excusez-moi. Oui, c'est confondant.
Alors, j'en profite, je ne l'ai pas dit tout
à l'heure, pour vous dire que l'appui vidéo d'Alain Saulnier est sur ma page
Facebook. Alors, c'est un appui ferme. Je tiens à préciser qu'ils ne sont pas
membres de Québec solidaire et qu'ils ne le font pas, M. Noël et M. Saulnier,
de façon partisane, mais ils le font pour le bien de la société et de la
démocratie. Je vous remercie.
(Fin à 14 h 10)