(Quinze heures deux minutes)
M. Gaudreault : Alors, bonjour
à tous et à toutes. Je tenais absolument à réagir, aujourd'hui, à un premier
ministre du Québec qui s'enfonce littéralement dans ses contradictions
concernant l'histoire des trop-perçus d'Hydro-Québec. Écoutez, il y a une
limite, là, à réagir en disant : Ah! On n'est pas prêts à regarder ça tout
de suite, mais à s'enfoncer dans une série de contradictions.
Je veux juste vous rappeler que, pour 2018,
les trop-perçus d'Hydro-Québec sont évalués à 180 millions. Selon la CAQ,
elle-même, l'année passée, ils disaient que depuis 2008, c'était 1,5 milliard
de trop-perçus. Cette année, les profits d'Hydro-Québec sont de l'ordre de
2 840 000 000 $. Et on a un premier ministre qui l'avait
joué très théâtral, l'année passée, avec sa députée de Saint-Hyacinthe, Mme
Soucy, en déposant une pétition de 48 000 noms, qu'ils ont recueillis
en quelque chose comme deux mois, pour dire qu'Hydro-Québec doit rembourser les
trop-perçus. Et là, aujourd'hui, maintenant qu'il est au gouvernement, alors
c'est complètement deux versions contradictoires, on a un premier ministre qui
ose dire, qui ose dire que la population est rendue ailleurs, que la population
ne réclame pas le remboursement des trop-perçus.
Je voudrais juste dire à M. Legault, là,
que sa pétition de l'année passée, en deux mois, avait récolté 48 000
noms, c'est important, mais la pétition de cette année de la Fédération
canadienne des contribuables, depuis vendredi, alors on ne parle pas depuis
plusieurs jours, là, depuis vendredi seulement, 24 000 noms ont été
récoltés, 24 000 noms, la moitié de ce que M. Legault a récolté en
quelque deux mois l'année passée. Et il ose nous dire aujourd'hui que, non, ça
n'intéresse pas les gens, que, non, les gens ne veulent pas avoir le remboursement
des trop-perçus. Alors, ce que M. Legault dit avant la campagne électorale
et ce que M. Legault, premier ministre, fait après la campagne électorale,
c'est deux poids, deux mesures. C'est contradictoire.
Et il ajoute, en plus de ce qu'il vient de
dire, il ajoute l'élément suivant : C'est que, bien, écoutez, ce n'était
pas dans notre campagne électorale. Mais c'est parce que la pétition qui a été
déposée par sa députée de Saint-Hyacinthe, là, ce n'est pas en 1980, là, c'est
l'année passée. Puis ils ont fait toute une campagne là-dessus, vous irez
revoir la petite vidéo, là, que Mme Soucy avait tournée, ça ressemble à un
court-métrage, là, vraiment très bien monté, et tout, pour mettre de la
pression sur le ministre de l'époque, de l'Énergie, et aujourd'hui, bien, c'est
complètement deux poids, deux mesures.
Alors, vous comprenez que c'est
inacceptable. On comprend que le premier ministre, ça lui a pris seulement
quelques mois pour devenir arrogant et se déconnecter des demandes de la
population. Merci.
Mme Plante (Caroline) :
Bonjour, M. Gaudreault. Quand M. Legault dit : Les tarifs
d'hydroélectricité n'excéderont pas l'inflation, c'est ça que les gens veulent,
comment est-ce que vous interprétez cette déclaration-là?
M. Gaudreault : Bien, ça, c'est
une chose en soi, puis Hydro-Québec peut faire des demandes, va faire ses
demandes devant la Régie de l'énergie, et que ça n'excède pas l'inflation,
c'est un élément, mais ça n'empêche pas le phénomène des trop-perçus. Le
phénomène des trop-perçus, ça le dit, là, c'est les revenus trop perçus par
rapport à ce qui a été fixé par la régie comme tarif, alors c'est de l'argent
direct dans les poches des citoyens et des citoyennes. Et M. Legault a
fait la campagne électorale, et pas juste la campagne électorale, depuis au
moins 2014 que la seule phrase qu'il a dans la bouche, c'est de redonner de
l'argent dans le portefeuille des familles québécoises. Là, il a une belle
occasion de le faire, là, puis il passe complètement à côté. Alors, M. Legault
a perdu toute crédibilité là-dessus.
Et maintenant, pour ce qui est des
demandes de la régie, bien, on va laisser Hydro-Québec les faire, et évidemment
il ne faut pas que ça excède le taux d'inflation.
Mme Plante (Caroline) : Puis
est-ce qu'il a raison de dire, dans le fond, que les surplus...
M. Gaudreault : Les
trop-perçus ou les surplus?
Mme Plante (Caroline) : Les
trop-perçus, disons, vont bénéficier aux Québécois d'une façon ou d'une autre, directement
ou indirectement, ils vont rembourser les Québécois d'une façon ou d'une autre?
M. Gaudreault : Bien,
j'aimerais ça qu'il soit un petit peu plus précis pour nous dire comment.
Est-ce que ça va être par d'autres avantages reliés aux actifs d'Hydro-Québec?
Par exemple, je voyais — bon, en soi, on pourrait parler de ça
éventuellement, là — l'entente qui a été signée avec le Maine, la
semaine passée, pour l'exportation d'hydroélectricité. Ils ont convenu, avec le
Maine, d'utiliser la ligne d'Hydro-Québec pour en profiter pour faire des
larges bandes de fibre optique pour amener Internet haute vitesse un peu
partout dans le Maine. On n'a pas ça au Québec.
Alors, si, au moins, il arrivait avec des
propositions pour nous dire : Bien, on va utiliser les infrastructures
d'Hydro-Québec pour, par exemple, installer la fibre optique partout dans les
régions du Québec pour Internet haute vitesse... Non, il n'y a pas ça. Est-ce
que ça pourrait être, par exemple, pour investir dans les régions pour
développer une industrie de fine pointe, par exemple, dans l'éolien, dans le
solaire? Non, il n'y a même pas ça. Il fait juste dire : Non, non, non, on
verra éventuellement. Puis, en attendant, bien, non, je retourne ma veste puis
je ne rembourse pas les trop-perçus. Alors, ça, c'est inacceptable.
Mme Plante (Caroline) : Le
principe, dans le fond, c'est que les trop-perçus peuvent... il y a une partie
qui est remboursée aux Québécois, mais l'autre partie, dans le fond, peut aider
la société d'État à augmenter sa productivité puis augmenter son efficacité. Alors,
ce serait une bonne chose à ce moment-là?
M. Gaudreault : Bien, dans la
mesure où ça se traduit chez les citoyens. Mais la question est bien, bien
précise, là, c'est que les trop-perçus, ça le dit, c'est trop perçu par rapport
à l'autorisation qu'ils ont reçue de la régie, et ça, ça doit retourner
directement dans les poches des citoyens.
Maintenant, si Hydro-Québec veut augmenter
son efficacité, si Hydro-Québec veut travailler sur des chantiers, comme ceux
que je vous ai nommés tout à l'heure, bien, qu'il nous le présente puis qu'il
nous le fasse. Mais, à ce moment-ci, les trop-perçus de quelque
180 millions, il n'y a pas de retour possible là-dessus, il faut que ça
retourne dans les poches des citoyens, des payeurs d'hydroélectricité qui sont,
la plupart, des Québécois.
Puis, en plus, en plus, c'est beaucoup
plus démocratique que ce qu'il prétend sur l'abolition de la taxe scolaire, parce
que l'autre argument de M. Legault, c'est dire : On va en retourner
de l'argent dans les poches des Québécois, on peut oublier les trop-perçus
parce qu'on va réduire les taxes scolaires dans toutes les régions du Québec.
Bien, j'ai des petites nouvelles pour M. Legault, parce que les taxes
scolaires, ça s'adresse seulement aux propriétaires. Mais, chez Hydro-Québec,
là, si vous êtes locataire, plusieurs loyers, sinon la très grande majorité des
logements, les gens paient eux-mêmes leur électricité, ce qui n'est pas le cas
avec les taxes scolaires. Alors, ça, ça sera une façon démocratique, une façon
universelle de retourner de l'argent dans les poches des Québécois et c'est ce
qu'on demande à M. Legault de faire.
Mme Plante (Caroline) : Tu
sais, dans le fond, ce qu'il dit, c'est qu'on a des mesures, dont la taxe
scolaire, la hausse des crédits d'impôt pour les familles, des mesures qui
totalisent 1,5 milliard par année. Alors, il dit : Bon, bien, les
Québécois vont déjà pouvoir bénéficier de ça.
M. Gaudreault : Donc, ça veut dire
que sa ligne, c'est juste : on tire la ligne à 1,5 milliard par
année. C'est assez. Ça veut dire que c'était juste du baratin, ce qu'il nous a
dit l'année passée, parce que l'année passée, en même temps qu'il déposait sa
pétition de 48 000 noms sur les trop-perçus d'Hydro-Québec, il avait
commencé aussi à plaider sur les crédits d'impôt et sur la taxe scolaire.
Alors, pourquoi, sur la question
d'Hydro-Québec, là, tout d'un coup, il change de sujet, puis il dit : Les
Québécois ne sont pas là puis ne veulent pas le remboursement des trop-perçus?
C'est ça qui est inacceptable. Et, vous savez, Hydro-Québec, là, moi, j'adore
cette société d'État, mais il faut qu'on la surveille constamment, constamment.
On dit souvent qu'Hydro-Québec c'est un État dans l'État. C'est très gros, il y
a sa propre culture organisationnelle. Souvenez-vous de ce qu'on avait été obligés
de faire en 2010 ou 2011. Ça avait pris un ordre de l'Assemblée
nationale — c'est rare, un ordre de l'Assemblée
nationale — pour qu'Hydro-Québec accepte de rendre publics aux
parlementaires les contrats. C'était arrivé à coups de palettes à l'Assemblée
nationale, je m'en souviens, là, c'était une pile de documents, mais on l'avait
fait, parce qu'Hydro-Québec résistait. Hydro-Québec résistait, elle se
protégeait. L'institution se protège elle-même. Donc, ça avait pris un ordre de
l'Assemblée nationale, parce que le seul actionnaire d'Hydro-Québec, c'est
l'État québécois. L'État québécois, c'est qui? C'est vous et moi, c'est tous
les citoyens.
Donc, si M. Legault baisse les bras
tout de suite face à cette grosse organisation, ça veut dire qu'il va baisser
les bras face à Hydro-Québec pendant quatre ans. Alors, il a l'occasion de dire
à Hydro-Québec : Tu as juste une chose à faire, mon homme, c'est de
rembourser les trop-perçus aux consommateurs québécois. C'est juste ça qu'il a
à faire. Ça fait que là, il est en train de nous faire la démonstration que ce
n'est pas l'État québécois qui va envoyer ses consignes à Hydro-Québec;
Hydro-Québec va fonctionner par elle-même, dans sa propre logique, puis ça,
c'est inacceptable.
Mme Plante (Caroline) :
Est-ce qu'il évalue bien la grogne que ça peut susciter dans la population et
le malaise... donc, on apprenait par le Journal de Québec aujourd'hui
qu'il y aurait un certain malaise au sein de la députation caquiste sur ce
sujet-là.
M. Gaudreault : Bien, il
évalue très, très mal l'opinion publique, parce qu'en deux jours, 24 000
noms sur une signature, c'est quand même exceptionnel. C'est la moitié de ce
que lui a récolté en quelque deux mois, là. Donc, déjà là, il y a un message.
Deuxièmement, moi, je comprends les
députés de la Coalition avenir Québec qui font de la pression sur le
gouvernement, sur son gouvernement, sur le gouvernement de leur même parti
politique. Alors, il faut qu'ils continuent parce qu'à l'intérieur du caucus de
la CAQ, là aussi, là, ça veut dire qu'il y a un bras de fer qui est enclenché,
là. Parce qu'eux ils se le font dire dans les circonscriptions. Si, moi, je
m'en fais parler à Jonquière, quand je sors dans un centre d'achat ou ailleurs,
c'est la même chose avec les députés de la CAQ, là.
Donc, il faut que M. Legault soit à
la fois à l'écoute de la population qui signe de façon massive une pétition en
deux jours, mais il faut aussi qu'il soit à l'écoute de ses propres députés,
qui sont le miroir ou le reflet, normalement, des citoyens et des citoyennes.
Mme Plante (Caroline) : Puis
une dernière question. Vous l'avez évoqué, il ne s'est jamais engagé, pendant
la campagne électorale, à rembourser les trop-perçus. Puis là, en scrum, tout à
l'heure, là, il disait aux médias : Bien là, c'est à vous de rappeler ça aux
gens puis de dire la vérité. Qu'est-ce que vous pensez de cette sortie-là sur
le travail des médias?
M. Gaudreault : Bien, écoutez,
là, je ne veux pas faire de comparaison boiteuse, mais il se rapproche un peu
des «fake news» de M. Trump, là. Alors... C'est parce que la campagne
électorale, oui, c'est un moment privilégié où les formations politiques
présentent leurs engagements, présentent leur cadre financier, les chefs
participent à des débats télévisés, mais il n'y a pas un mur de Chine entre la
veille du déclenchement de la campagne puis le jour du déclenchement de la
campagne. Je veux dire, là, on ne parle pas d'engagement de la CAQ en 2014, à
la limite, on parle d'engagement de la CAQ, là, l'année passée. Puis on ne
parle pas juste d'une intervention quelconque à l'Assemblée, on parle d'une
opération médiatique qui a été montée, qui a été faite, où on voit la députée
de Saint-Hyacinthe partir avec sa valise puis aller déposer ça au bureau du
ministère de l'Énergie.
Alors, il y a un côté là-dedans de
trompeur. On veut faire accroire à la population que ça va être un enjeu
important, puis, dans quelques mois, il va y avoir des élections, votez pour
moi, puis on va défendre ça. Puis, après ça, il vient nous dire : Ah, non,
non! C'est vous autres, les journalistes, qui ne comprenez pas qu'il y a un mur
de Chine entre la veille du déclenchement de la campagne puis le jour du
déclenchement. Voyons donc!
Mme Plante (Caroline) : En
fait, ce n'était pas un engagement.
M. Gaudreault : Mais oui, mais
c'est... je veux dire, on a débattu là-dessus. On pourrait relever peut-être
l'ensemble des débats lors de la campagne électorale, là, mais je vous répète
qu'il a fait ça quelques semaines avant le déclenchement de la campagne. Merci.
(Fin à 15 h 15)